III. RENFORCER LES MOYENS D'INTERVENTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
La situation des collectivités locales de montagne se caractérise par la stagnation ou la diminution de leurs ressources, consécutive à leur évolution démographique, et l'augmentation de leurs charges, en matière environnementale notamment.
A. LA SITUATION FINANCIÈRE DES COMMUNES DE MONTAGNE EST CONTRASTÉE
Selon les chiffres fournis à la mission commune d'information, l'ensemble des communes de montagne de moins de 10.000 habitants (au nombre de 4.813 en 1999) représente 10 % de la population totale des communes de moins de 10.000 habitants.
La situation financière de ces communes est très différente selon qu'il s'agit de stations touristiques de sport d'hiver ou de communes de montagne classiques.
1. Les stations de sports d'hiver dépensent trois fois plus que les autres communes, pour un potentiel fiscal supérieur de 22 % et fortement mobilisé
Les stations de sports d'hiver (au nombre de 308 en 1999) se distinguent nettement des autres communes de moins de 10.000 habitants, qu'elles soient ou non de montagne, comme le montre le graphique ci-après. En effet, elles sont caractérisées par une dette et des dépenses élevées (respectivement 2.829 et 3.000 euros par habitant, contre environ trois fois moins pour les autres communes).
Les finances des communes de montagne de moins de 10.000 habitants
En euros par habitant
Source : Direction générale des collectivités locales
Ceci résulte des investissements importants réalisés par les stations de sports d'hiver à partir des années soixante-dix, comme l'indique le graphique ci-après.
Structure des dépenses des communes de montagne de moins de 10.000 habitants
En euros par habitant
Source : Direction générale des collectivités locales
Ce graphique permet de mettre en évidence deux phénomènes :
- les stations de sports d'hiver ont des intérêts de la dette élevés (9,7 % des dépenses de fonctionnement, contre environ 7 % pour les autres communes) ;
- leurs dépenses d'équipement brutes représentent une part moins importante des dépenses d'investissement que celles des autres communes (60 % des dépenses d'investissement, contre 73 % dans l'ensemble des communes de moins de 10.000 habitants). En effet, la majeure partie de leurs dépenses d'équipement sont achevées, et l'essentiel de leur budget d'investissement est désormais constitué par le remboursement de la dette.
Les dépenses des stations de sports d'hiver présentent donc une rigidité importante.
Le manque de neige des années 1989, 1990 et 1991 a révélé un certain nombre de problèmes structurels. En effet, un euro investi au cours de la période 1980-1990 ne rapportait que 15 centimes d'euros de recettes par an. En outre, ces investissements n'étaient généralement pas autofinancés. La crise du « manque de neige » a donc révélé un certain nombre de dysfonctionnements et certaines collectivités se sont retrouvées en cessation de paiement avec un endettement important et une marge de manoeuvre réduite.
Le niveau élevé des dépenses est favorisé par le fait que les stations de sports d'hiver ont un potentiel fiscal plus élevé que celui des autres communes (505 euros par habitant, contre environ 400 pour les autres communes), comme l'indique le graphique ci-après.
Potentiel fiscal des communes de montagne de moins de 10.000 habitants
En euros par habitant
Source : Direction générale des collectivités locales
Ce potentiel fiscal provient notamment de certains impôts spécifiques aux communes touristiques.
Les impôts spécifiques aux communes touristiques La fiscalité locale présente en montagne certaines particularités. 1. Prélèvements perçus par les communes a) La taxe de séjour Tout d'abord, ces communes peuvent percevoir la taxe de séjour, qui sert à financer l'office de tourisme et n'est pas spécifique aux communes de montagne. Selon l'article L. 2333-26 du code général des collectivités territoriales 77 ( * ) , dans diverses catégories de communes 78 ( * ) , dont les communes de montagne au sens de la loi « montagne », le conseil municipal peut instituer, pour chaque nature d'hébergement à titre onéreux, une taxe de séjour, éventuellement forfaitaire. En revanche, la taxe sur les entreprises spécialement intéressées à la prospérité de la station, qui avait pour base juridique l'article L. 2333-47 du code général des collectivités territoriales, a été supprimée par l'article 107 de la loi de finances pour 2002, à la suite d'un amendement présenté par nos collègues députés Didier Migaud et Michel Bouvard. En effet, cette taxe, instaurée par la loi du 3 avril 1942 et pour laquelle aucune disposition réglementaire n'avait été codifiée, ne connaissait en pratique aucune application. b) La redevance pour l'accès aux pistes de ski de fond La redevance pour l'accès aux pistes de ski de fond concerne, par nature, exclusivement les communes de montagne. Son régime est fixé par l'article L. 2333-81du code général des collectivités territoriales. Celle-ci peut être instituée sur délibération du conseil municipal de la commune dont le territoire supporte de tels équipements. Le conseil municipal fixe annuellement le montant de la redevance et les conditions de sa perception 79 ( * ) . L'article L. 2333-83 du code général des collectivités territoriales précise que cette redevance peut être perçue, pour le compte et à la demande des communes concernées, par l'association départementale, interdépartementale ou régionale pour la promotion du ski de fond créée en application de l'article 84 de la « loi « montagne » » 80 ( * ) . 2. Les taxes sur les remontées mécaniques (perçues par les communes et les départements) a) La taxe communale sur les remontées mécaniques En application des articles 85, 86 et 87 de la loi « montagne », les communes situées en zone de montagne peuvent instituer une taxe portant sur les recettes brutes provenant de la vente de titres de transport par les entreprises exploitant des engins de remontées mécaniques. Le produit annuel de la taxe communale est affecté : - à des interventions favorisant le développement agricole en montagne ; - aux dépenses d'équipement, de services, de promotion et de formation induites par le développement du tourisme en montagne et les besoins des divers types de clientèle, ainsi qu'à l'amélioration des accès ferroviaires et routiers ; - aux dépenses de développement d'un tourisme d'initiative locale en montagne et des activités qui y contribuent ; - à des charges engagées par les clubs locaux de ski pour la formation technique de leurs jeunes adhérents ; - au financement d'actions de prévention des accidents en montagne conduites par des organismes compétents en la matière, et notamment par les sociétés de secours en montagne. b) La taxe départementale sur les remontées mécaniques L'article L.3333-4 du code général des collectivités territoriales institue une taxe départementale sur les remontées mécaniques, soumise au même régime que celui de la taxe communale (notamment en matière d'affectation). c) Taux et recettes correspondantes Selon l'article L. 2333-49 du code général des collectivités territoriales, le taux de la taxe communale ne peut excéder 3 % 81 ( * ) , et celui de la taxe départementale 2 %. Cependant, lorsque le département n'a pas institué cette taxe départementale, la limite du taux de la taxe communale est de 5 %. En 1999, le produit de la taxe communale sur les remontées mécaniques, perçue par 134 communes, s'est élevé à 23 millions d'euros. |
Compte tenu des charges d'emprunt et des dépenses de fonctionnement assez élevées, le coefficient de mobilisation du potentiel fiscal est bien plus important dans les stations de sport d'hiver que dans les autres communes (93,5 %, contre environ 70 % pour les autres communes).
2. Les autres communes de montagne dépensent légèrement plus que la moyenne nationale, pour un potentiel fiscal plus faible et moins mobilisé
Les communes de montagne ne disposant pas d'une station de sports d'hiver (au nombre de 4.505 en 1999) présentent des caractéristiques relativement semblables à celles des communes classiques de moins de 10.000 habitants. Leur situation est cependant légèrement moins favorable.
En effet, les graphiques ci-avant montrent qu'elles ont :
- un niveau de dépenses légèrement supérieur à la moyenne (1.010 euros par habitant, contre 911 euros en moyenne) ;
- une dette légèrement supérieure à la moyenne (700 euros par habitant, contre 628 euros en moyenne) ;
- un potentiel fiscal légèrement plus faible que la moyenne (368 euros, contre 414 en moyenne), mobilisé de façon modérée (67,5 %, contre 69 % en moyenne).
* 77 Loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 art. 100.
* 78 Les stations classées, les communes qui bénéficient de la dotation supplémentaire aux communes et groupements touristiques ou thermaux et la dotation particulière aux communes touristiques, les communes littorales, les communes de montagne, les communes qui réalisent des actions de promotion en faveur du tourisme et celles qui réalisent des actions de protection et de gestion de leurs espaces naturels.
* 79 Dans le cas d'installations s'étendant sur plusieurs communes, le montant et les conditions de perception de la redevance sont fixés sur délibérations conjointes des conseils municipaux concernés.
* 80 Article 84 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne : « Sur proposition du ou des conseils généraux ou du conseil régional concernés, il peut être créé pour les départements de montagne une association départementale, interdépartementale ou régionale pour la promotion du ski de fond. (...) L'association (...) ainsi créée a pour objet de contribuer sur le territoire des départements concernés à toutes actions propres à faciliter la pratique du ski de fond et notamment le développement des équipements, la coordination des actions de promotion et l'harmonisation du montant des redevances »
* 81 Toutefois, les communes qui percevaient, avant la loi du 9 janvier 1985 la taxe spéciale visée par les dispositions du décret du 14 novembre 1968, perçoivent une dotation du département égale à la différence du produit de la taxe au taux de 3 % et le produit de l'ancienne taxe.