Clôture du colloque |
Mme Michèle André, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes
Merci Yannick Bodin, merci Anne-Marie Lizin, merci à tous. En entendant ce qui a été dit au cours de cette journée, nous sommes partagées entre l'affliction de voir des choses aussi terribles autour de nous, dans nos milieux. Nous sommes aussi remplies d'espoir de pouvoir faire bouger la société, pas seulement les lois. Les lois, nous le savons bien, sont nécessaires mais pas suffisantes. Nous savons bien qu'il faut derrière les lois des hommes et des femmes, conscients des problèmes au plus profond de ce qui est l'humain en eux, en chacun d'eux, que ce soit des magistrats, des policiers, des membres d'associations, et ceux-là sont déjà à nos côtés. Tout cela est nécessaire, c'est-à-dire une communauté humaine qui se sent concernée par des problèmes qu'il faut regarder en face.
J'entendais tout à l'heure Mme Gaye Petek qui disait que des regards se détournaient, parce que l'on ne voulait pas froisser, on ne voulait pas contrarier. Il faut bien dire les choses. Si les choses ne sont pas dites, elles sont ignorées, inconnues ; on s'occupe d'autre chose et on passe à côté. Le pari d'aujourd'hui était de rassembler des hommes, des femmes, des représentants d'institutions qui, connaissant la situation, peuvent en faire état, peuvent en témoigner et dire combien le contexte international doit favoriser une évolution dans le bon sens.
Nous avons des traités, nous avons des rencontres, nous revenons parfois de certaines grandes réunions internationales avec l'impression que si cela bougeait un peu dans notre propre pays, dans tous nos pays, toutes les femmes de nos pays iraient mieux. Nous avons ces outils. Utilisons-les. Regardons la façon dont les faits divers, jour après jour, sont alarmants. Deux choses m'ont frappée ces derniers temps. Cette petite Kurde qui a été enterrée vivante par son père et son grand-père parce qu'elle parlait aux garçons ! Avant-hier, deux hommes ont violé une femme dans le Sud de la France parce qu'elle était homosexuelle, comme pour lui donner une leçon. Quand la virilité est aussi décalée par rapport à la vie, à la valeur de la vie, alors il est clair que nous sommes interpellés.
Je pense que l'analyse que nous avons conduite aujourd'hui, les échanges qui ont lieu, renforcent en nous la certitude qu'il y a des actions à mener. C'est mon message d'espoir, avec vous toutes, vous tous, avec le regret de voir des associations arrêter leurs actions parce que l'argent manque. Hélas, hélas ! Nous risquons de voir cela se répéter.
Nous sommes concernés par cela. Je pense qu'il faudra bien que nous parlions de cela aussi ensemble. Une association qui meurt, quelque part, c'est une action qui s'en va, et cela n'est pas pensable. Nous avons tellement besoin de ce réseau associatif, de ce soutien.
L'an dernier, les parlementaires se sont beaucoup mobilisés pour préserver les crédits du Planning familial. D'un trait de plume, on avait enlevé 40 % de crédits et nous, les parlementaires, nous avons considéré que ce n'était pas possible.
Nous les parlementaires, nous sommes actifs, nous sommes présents, nous sommes capables de générer du réseau avec nos amis des associations, avec les autres parlementaires, dépassant les femmes - effectivement elles ne sont pas encore très nombreuses au Parlement - mais dépassant aussi les clivages politiques. Ces clivages sont stériles et ne permettent pas d'avancer.
Nous avons besoin de toutes nos associations, de toutes les femmes et de tous les hommes de bonne volonté qui considèrent qu'une vie humaine en vaut une autre, qu'aucune ne peut être méprisée, maltraitée, détruite au prétexte que, dans la société, il y aurait comme un code, qui admet que l'homme est naturellement supérieur et qu'il a le droit de vie et de mort sur une femme. Le coeur du débat est là.
( S'adressant à Mme Azougach ) Vous avez très bien reposé le problème en anthropologue, mais aussi au niveau du quotidien. Nous sommes tous concernés, que nous soyons de telle ou telle histoire familiale, culturelle, historique, de tel ou tel espace du monde, tout simplement parce que nous regardons bien la situation. J'ai eu la chance d'aller au Pakistan il y a une vingtaine d'années. Benazir Bhutto se lamentait sur le fait qu'elle ne pouvait pas agir sur son propre pays, parce qu'il lui manquait une majorité au Parlement pour bouger. Il y avait des centaines de femmes enfermées en prison à perpétuité, pour adultère. Leur parole ne comptant pas comme celle d'un homme, elles ne pouvaient pas contrebalancer celle-ci, même parole contre parole, puisque la leur n'était qu'une demi-parole.
Tout cela nous le savons. Faisons en sorte que ce ne soit pas le pire qui se répande dans le monde avec la circulation des personnes. Nous avons au contraire le devoir de nous unir pour que la vraie justice permette aux femmes de vivre dans la vraie égalité, avec la liberté de choix de leur propre vie. C'est notre combat à la Délégation aux droits des femmes, et c'est celui que nous essayons de porter pour tous et pour chacun.
Je remercie véritablement tous nos intervenants, surtout ceux qui sont venus de très loin pour nous apporter leur éclairage aujourd'hui. Il nous sera utile, nous saurons nous en servir et nous espérons vous retrouver à un autre moment sur des thèmes peut-être moins graves. Nous sommes très heureux de vous avoir accueillis aujourd'hui, et nous vous retrouverons très prochainement. Merci beaucoup.