4. Mercredi 28 avril 2010 - Atelier de travail sur la mise en oeuvre de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER)
La commission a organisé un atelier de travail sur la mise en oeuvre de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) , auquel ont participé MM. Patrick Amoussou-Adeble, adjoint au sous-directeur des finances locales et de l'action économique à la direction générale des collectivités locales (DGCL), Christophe Bresson, directeur fiscal de France Telecom, Mme Catherine Damelincourt, directeur fiscal du groupe EDF, M. Gérard Gouzes, président délégué de l'assemblée des communautés de France (AdCF), Mme Marie-Christine Lepetit, directrice de la législation fiscale (DLF), MM. Richard Loyen, délégué général d'Enerplan, Denis Merville, président de la commission environnement et développement durable de l'association des maires de France (AMF), et Nicolas Wolff, président de France énergie éolienne .
M. Jean Arthuis , président, a rappelé que la réforme de la taxe professionnelle (TP) a substitué à cette dernière deux impositions : la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et la cotisation foncière des entreprises (CFE). Elle a aussi introduit un nouvel impôt propre à certains secteurs, l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), constitué de plusieurs composantes dont l'assiette et le taux varient en fonction de la nature des installations.
L'objet de l'IFER est de neutraliser l'essentiel de l'important avantage fiscal qui aurait résulté de la réforme de la TP pour les entreprises de réseau non délocalisables. Elle concerne donc trois principaux secteurs : l'énergie, les télécommunications et les transports et est différentielle puisqu'elle ne se substitue pas intégralement à l'ancienne TP. La cotisation économique territoriale (CET), composée de la CVAE et de la CFE, ne représente pour certaines installations qu'une fraction minoritaire de l'imposition globale.
Des dotations viendront dès 2010 compenser l'éventuel manque à gagner fiscal pour les collectivités territoriales qui percevaient déjà la TP au titre de certaines installations. En revanche, les engagements se traduisant par des installations imposables à compter du 1 er janvier 2010 ne donnent pas lieu à compensation.
Compte tenu de sa nouveauté et de certaines imprécisions sur les paramètres de sa mise en place, l'IFER a donné lieu à d'abondants débats lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2010 et a fait apparaître des divergences d'intérêts. Parmi les questions et inquiétudes figurent par exemple le niveau de « retour » pour les collectivités, le caractère plus ou moins incitatif pour les énergies alternatives, les « effets de bord » à l'égard d'installations incluses ou exclues de l'assiette ou la répartition de la charge entre entreprises redevables et cocontractantes. Plusieurs élus locaux ont ainsi fait part aux membres de la commission des finances de leurs incertitudes ou déceptions.
Pour l'ensemble de ces raisons, M. Jean Arthuis , président, a souhaité que la commission des finances procède à l'examen des principales difficultés posées par l'IFER, dans la perspective de la « clause de rendez-vous » que prévoit l'article 76 de la loi de finances pour 2010 :
- l'IFER correspond-elle à l'objectif de neutralisation de l'avantage fiscal pour les grandes entreprises de réseau non délocalisables ? Le résultat est-il conforme aux négociations engagées avant le vote de la réforme ?
- les modalités de calcul et d'acquittement de la taxe sont-elles suffisamment claires ? L'assiette est-elle pertinente ? Le modèle économique des industries est-il respecté ?
- le niveau de retour aux collectivités est-il cohérent avec les investissements engagés et les nuisances supportées ? Les projets d'implantations décidés avant la réforme mais dont la construction n'est pas achevée ou engagée sont-ils menacés ?
M. Gérard Gouzes, président délégué de l'assemblée des communautés de France (AdCF) , a identifié deux principales difficultés concernant l'IFER. D'une part, l'absence d'indexation de leur tarif ou de leur assiette conduira à une diminution tendancielle de leur produit pour les collectivités territoriales. L'AdCF propose donc une indexation sur l'inflation prévisionnelle figurant chaque année dans le projet de loi de finances.
D'autre part, le rendement fiscal de certaines installations paraît très inférieur après la réforme à ce qu'il était avant, notamment pour le secteur éolien. Ainsi, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) estime que le rendement fiscal des éoliennes est au moins cinq fois moindre après la réforme.
M. Denis Merville, président de la commission environnement et développement durable de l'association des maires de France (AMF), a indiqué que l'AMF a été saisie par de nombreuses municipalités engagées dans des projets d'installation d'éoliennes remis en cause par la réforme en raison de la diminution du retour sur investissements qu'elle provoque pour les communes.
Il est convenu avec M. Gérard Gouzes que l'indexation des composantes de l'IFER est une nécessité pour éviter une perte de pouvoir d'achat des collectivités territoriales.
Enfin, les modalités de répartition de l'IFER portant sur les éoliennes entre les communes, les intercommunalités et les départements doivent être clarifiées.
M. Philippe Marini , rapporteur général, a estimé que les ressources fiscales avant et après réforme doivent être prises en compte globalement. Ainsi, le produit de TP doit être comparé au nouveau produit de CVAE, de CFE et de l'IFER.
Il convient par ailleurs de distinguer les cas des installations existantes, de celles pour lesquelles un permis de construire a déjà été délivré et, enfin, de celles pour lesquelles une négociation est en cours en vue de la délivrance d'un permis de construire.
Concernant le tarif de l'IFER appliqué aux éoliennes, le Sénat avait souhaité le porter à 8 000 euros par mégawatt heure mais le gouvernement a pris l'initiative, en lecture des conclusions de commission mixte paritaire, de le ramener à 2 913 euros par mégawatt heure, soit un tarif légèrement plus élevé que le tarif prévu dans le projet de loi de finances initial. Ce niveau devra probablement être réexaminé, ainsi que la question de l'indexation du tarif.
Enfin, les modalités de répartition du produit des composantes de l'IFER doivent permettre d'éviter les stratégies non coopératives, notamment celles des petites communes isolées, et de favoriser une meilleure collaboration entre la commune, l'intercommunalité et le département dans les décisions d'implantations d'installations soumises à l'IFER.
M. Albéric de Montgolfier s'est déclaré en accord avec les propos de M. Philippe Marini , rapporteur général . Le tarif de l'IFER du secteur éolien finalement voté produit pour les collectivités territoriales des recettes très inférieures à ce qu'elles étaient, en raison de la disparition du plafonnement à la valeur ajoutée antérieurement pris en charge par l'Etat. Une question de principe doit donc être tranchée : faut-il garantir la neutralité de la réforme pour les entreprises du secteur éolien ou pour les collectivités territoriales bénéficiaires des retombées fiscales ?
Le modèle économique du secteur éolien paraît déjà très largement aidé, par un tarif d'achat garanti de l'électricité et par des dispositifs de réduction d'impôt de solidarité sur la fortune pour les investissements dans les petites et moyennes entreprises (PME). Il ne serait donc pas choquant que le coût du plafonnement à la valeur ajoutée soit pris en charge par les opérateurs. Enfin, les éoliennes produisent des nuisances visuelles qui justifient des retombées financières au-delà de la seule commune d'implantation.
M. Claude Belot a rappelé que la France s'est engagée dans une politique de développement volontariste des énergies renouvelables et qu'il y souscrit pleinement. Ces énergies sont aujourd'hui compétitives. Or, les modalités du remplacement de la TP par l'IFER nécessitent une clarification afin que les décisions d'implantation puissent être prises en connaissance de cause.
M. Jean Arthuis , président, a estimé qu'il faut trouver un point d'équilibre entre ce que les entreprises paient et ce que les collectivités reçoivent.
M. Nicolas Wolff, président de France énergie éolienne, a tout d'abord indiqué que le syndicat qu'il préside, composé de 240 membres, représente les acteurs du secteur éolien. La réforme telle qu'elle a été votée garantit un traitement fiscal équitable des différents secteurs soumis à l'IFER. Une prise en charge par les entreprises du secteur éolien d'une partie du plafonnement sur la valeur ajoutée romprait cet équilibre. Par ailleurs, le secteur éolien est créateur d'emploi et favorise l'aménagement du territoire. Une piste à explorer serait d'appliquer le plafonnement à 3 % de la valeur ajoutée à un panier comprenant non seulement la CET mais également l'IFER. Le secteur éolien n'a pas, à l'inverse de nombreux secteurs industriels, bénéficié fiscalement de la suppression de la taxe professionnelle.
M. Nicolas Wolff s'est déclaré ouvert à la possibilité, évoquée par M. Jean Arthuis , président, d'indexer le tarif de l'IFER éolien sur le prix de l'énergie. Il rappelé qu'aujourd'hui le coût du mégawatt produit par éolienne est de 80 euros contre 65 euros pour l'énergie nucléaire.
M. Richard Loyen, délégué général d'Enerplan, a présenté Enerplan comme la principale association professionnelle du secteur de l'énergie solaire. A horizon de cinq à dix ans, le coût de l'énergie solaire devrait rejoindre celui des autres formes de production d'électricité. L'énergie solaire contribue à l'objectif de réduction des émissions de carbone.
Il s'est déclaré ouvert à une réflexion sur l'indexation des tarifs de l'IFER, en fonction de l'inflation ou du coût de l'électricité.
Mme Marie-Christine Lepetit, directrice de la législation fiscale (DLF), a rappelé que l'objectif de l'IFER était d'éviter les effets d'aubaine dont auraient pu bénéficier certains secteurs économiques particulièrement gagnants à la réforme de la TP. La volonté initiale du Gouvernement était de traiter de manière préférentielle les énergies renouvelables au travers de tarifs d'IFER incitatifs. Toutefois, le Parlement a retenu une approche différente, uniforme et conforme à l'objectif d'éviter les effets d'aubaine.
En réponse à M. Philippe Marini , rapporteur général, qui a souhaité que soient fournies au Parlement le plus rapidement possible des simulations complètes et fiables sur l'IFER, Mme Marie-Christine Lepetit a indiqué que davantage d'informations seront disponibles à la fin du semestre.
Elle est convenue qu'une approche comparative globale doit être retenue entre, d'une part, l'ancienne TP et, d'autre part, la CVAE, la CFE et l'IFER. La question technique de la base foncière des éoliennes doit encore être clarifiée. Les conséquences de la répartition de la CVAE en fonction des effectifs salariés doivent être étudiées de manière plus approfondie. Enfin, l'indexation de l'IFER est un sujet ouvert qui devra probablement être traité composante par composante, en prenant en compte le dynamisme des bases de calcul de l'impôt.
M. Jean Arthuis , président , a considéré que deux questions demeurent en suspens : l'appréhension de la valeur foncière d'une éolienne et la répartition de la valeur ajoutée qu'elle génère puisque le critère des effectifs de l'établissement ne lui est pas applicable.
Sur le premier point, Mme Marie-Christine Lepetit a indiqué qu'une règle claire existe.
M. Nicolas Wolff a souligné que les éoliennes constituent un élément d'aménagement du territoire. A ce titre, il importe que le produit des impositions soit à la fois réparti au niveau d'une échelle géographique vaste, comme par exemple le département, et au niveau de la commune d'implantation de l'éolienne. Il a plaidé pour qu'un équilibre soit trouvé entre ces deux objectifs.
M. Richard Loyen a estimé que la détermination du foncier peut poser un problème pour les installations photovoltaïques selon qu'elles sont installées en plein-champ ou sur un immeuble.
M. Jean Arthuis , président , s'est demandé comment s'opère la localisation géographique de l'assiette de la CVAE pour l'énergie photovoltaïque.
M. Philippe Marini , rapporteur général , a constaté que la territorialisation des bases en ce qui concerne la CVAE ne semble pas poser de difficultés pour les éoliennes, dès lors qu'il s'agit d'un équipement standardisé. Il n'a pas jugé opportun d'examiner, au cas par cas, la valeur ajoutée générée par chaque éolienne. Ainsi, il serait possible d'envisager un mécanisme dans lequel la répartition de l'assiette de la CVAE s'opère en fonction du nombre, de la puissance et de la technologie des éoliennes installées.
Mme Marie-Christine Lepetit a expliqué que la technique retenue pour les barrages, quoique sophistiquée, pourrait se révéler adaptée. En amont, les services fiscaux identifient, au niveau de l'entreprise, la part de la valeur ajoutée tirée de l'ensemble des barrages. Ensuite, chacun des barrages se voit attribuer une part de celle-ci en fonction de sa puissance. La règle des effectifs ne s'applique donc pas.
M. Jean Arthuis , président , s'est demandé si, pour les éoliennes, il ne serait pas préférable de faire masse de l'ensemble des impositions actuelles pour les regrouper dans un impôt unique forfaitaire. Il s'est également interrogé sur la traçabilité de la valeur ajoutée lorsqu'un particulier installe des panneaux photovoltaïques.
M. Richard Loyen a répondu que le particulier n'est pas soumis aux différentes impositions. En revanche, s'il souhaite revendre son électricité, il est lié par un contrat à un prestataire, qui doit s'acquitter de la CVAE. Dans ce cas, la traçabilité de la valeur ajoutée ne soulève pas de difficulté particulière.
Mme Marie-Christine Lepetit a largement approuvé ces propos tout en relevant que de nombreux dispositifs spécifiques sont applicables.
M. Patrick Amoussou-Adeble, adjoint au sous-directeur des finances locales et de l'action économique à la direction générale des collectivités locales , a constaté les difficultés pratiques de la répartition de la CVAE, qui a pu entraîner des pertes de recettes pour certaines collectivités territoriales. Il a toutefois estimé que, si d'autres modalités de répartition apparaissent envisageables, notamment pour les différentes composantes de l'IFER, il n'existe pas de solution idéale qui permette de dépasser les difficultés rencontrées aujourd'hui.
M. Denis Merville s'est demandé pourquoi certains éléments des éoliennes sont exclus de l'assiette foncière. Il a considéré que l'intégralité du bien devrait être assujettie aux impôts fonciers. Il s'est également interrogé sur la répartition des impositions perçues au titre des éoliennes « off-shore » et des hydroliennes. Il a enfin indiqué que l'installation d'équipements photovoltaïques soulève, par leur étendue, de réelles questions en termes d'urbanisme.
En ce qui concerne le premier point, M. Jean Arthuis , président , a jugé qu'il peut apparaître difficile de distinguer la partie proprement mobilière d'une éolienne, qui aurait, auparavant, relevé de l'assiette des équipements et biens mobiliers (EBM).
Mme Marie-Christine Lepetit a rappelé que les éoliennes « off-shore » sont soumises à une imposition spécifique prévue par l'article 1519 B du code général des impôts. Les hydroliennes relèvent désormais de l'IFER.
M. Nicolas Wolff a indiqué que la répartition du produit de l'imposition, pour les éoliennes « off-shore », est respectivement de 50 % pour le département et de 50 % pour les communes proches du parc éolien.
M. François Fortassin a estimé que l'installation d'éoliennes hors du bord de mer constitue une « ineptie » énergétique dans la mesure où elles ont besoin de vents réguliers, ce qui suppose qu'il ne fasse ni trop chaud, ni trop froid. Elles sont donc régulièrement à l'arrêt. Par ailleurs, il a observé que la responsabilité du raccordement au réseau électrique des installations photovoltaïques demeure incertaine. Il a enfin jugé probable que des friches photovoltaïques apparaissent dans un avenir proche.
M. Richard Loyen a précisé que le raccordement au réseau relève de la responsabilité du porteur de projet. Il a également indiqué que, en l'état actuel, le producteur d'énergie photovoltaïque a plus intérêt à vendre la totalité de sa production que de la consommer.
M. Gérard Gouzes a regretté que la réforme de la taxe professionnelle et la mise en place des nouvelles impositions soient un facteur d'incertitude pour les élus locaux alors même que les charges et les contraintes qu'ils doivent assumer sont tangibles. Il s'est ainsi vivement opposé à l'intégration de l'IFER dans la CET car le plafonnement de cette dernière conduirait inéluctablement à une perte de ressources, non compensées par l'Etat, pour les collectivités territoriales.
M. Jean Arthuis , président , a constaté que la nouvelle législation ne remet pas en cause les situations antérieures. Elle a pour autant permis de mettre fin à un système dans lequel les ressources perçues par la commune étaient, en réalité, largement acquittées par l'Etat.
M. Claude Belot a déploré que, pour les panneaux photovoltaïques situés en plein champ, la valeur foncière de l'installation soit nécessairement très réduite. Il a également jugé nécessaire de revoir les modalités de répartition du produit de la composante photovoltaïque de l'IFER qui lui semblent inadaptées.
En réponse à une question de M. Jean Arthuis , président, M. Philippe Marini , rapporteur général , a rappelé qu'une ambiguïté persiste sur l'attribution du produit de l'IFER sur les éoliennes. Deux interprétations sont possibles. La commission des finances du Sénat estime que le produit de l'impôt doit revenir pour 30 % à la commune et 70 % à l'EPCI ou, à défaut, au département. Selon une autre lecture, la répartition serait de 15 % pour la commune, 35 % pour l'EPCI et 50 % pour le département ou, à défaut d'EPCI, de 85 % pour le département. Pour l'énergie photovoltaïque, la répartition est de 50 % pour le département et 50 % pour le bloc communal. Dans ce dernier cas, il conviendra cependant de distinguer la part de la commune et celle de l'EPCI.
M. Denis Merville s'est demandé si des aménagements sont envisagés pour les projets engagés.
M. Jean Arthuis , président , a noté que l'application des règles antérieures à ces projets risque de générer un coût substantiel que l'état actuel des finances publiques ne permet pas de supporter.
M. Philippe Marini , rapporteur général , a estimé que les projets s'étant vu délivrer un permis de construire avant le vote de la loi de finances pour 2010 pourraient éventuellement bénéficier d'une mesure en leur faveur.
Mme Catherine Damelincourt, directeur fiscal du groupe EDF , a ensuite rappelé qu'EDF demeure un des premiers contributeurs de la CET et de l'IFER. L'effet d'aubaine dû à la suppression de la taxe professionnelle a été entièrement compensé par la création des nouvelles impositions. La charge fiscale de l'entreprise est donc strictement identique avant et après la réforme. De fait, l'IFER relative aux centrales nucléaires et thermiques a été calibrée pour que la réforme soit entièrement neutre pour EDF. Par ailleurs, pour les centrales nucléaires, les règles de calcul de localisation de la valeur ajoutée ont été adaptées pour que les ressources des communes, sur lesquelles sont implantées ces installations, soient stabilisées au niveau précédant le vote de la réforme.
En réponse à une observation de M. Gérard Gouzes sur la péréquation, M. Philippe Marini , rapporteur général , a estimé que la loi de finances pour 2010 a répondu à la volonté du Parlement de raisonner à droit constant. Cela n'exclut toutefois pas une évolution dans la perspective de la « clause de rendez-vous », ainsi que cela a été débattu lors de l'atelier de travail que la commission a organisé sur la péréquation.
M. Claude Belot s'est interrogé sur le seuil d'imposition des réseaux de chaleur alimentés par la biomasse, dont le niveau élevé, de 50 mégawatts de puissance installée, ne permet pas aux collectivités de bénéficier de recettes au titre de l'IFER.
M. Jean Arthuis , président , a également mentionné la situation analogue des stations de compression de gaz. M. Philippe Marini , rapporteur général , a jugé qu'il pourrait être pertinent de réexaminer le seuil d'imposition des installations thermiques pour élargir l'assiette de l'IFER. En réponse à une question de M. Jean Arthuis , président , M. Claude Belot a précisé que le produit de la taxe professionnelle versée au titre du réseau de chaleur de sa commune n'était en 2009 que de 189 euros. Il a ajouté que l'entreprise fermière du réseau choisit librement le lieu de domiciliation et d'imposition de l'essentiel de ses moyens d'exploitation.
M. Philippe Marini , rapporteur général , a considéré comme M. Jean Arthuis , président , que l'IFER sur les centrales nucléaires et thermiques ne pose pas de difficultés majeures, pour autant que le régime antérieur de péréquation et de répartition départementales continue de s'appliquer. M. Denis Merville a insisté sur l'enjeu financier que représente cette péréquation pour les communes de son département, et a observé que les salariés des centrales nucléaires peuvent être domiciliés dans des régions distinctes.
M. Edmond Hervé a relevé que des conventions spécifiques lient chaque centrale nucléaire aux communes sièges et environnantes, qui n'ont pour la plupart été jamais publiées mais dont il importe de tenir compte.
M. Jean Arthuis , président , a ensuite exposé les principales caractéristiques - périmètre, exonérations, tarifs et affectation aux collectivités - de l'IFER sur les stations radioélectriques. Il a évoqué certaines difficultés concernant l'imposition des radios associatives et des radios locales et thématiques indépendantes, l'interprétation favorable aux radios associatives ayant été confirmée lors de l'examen de la première loi de finances rectificative pour 2010. Il a également présenté le régime de l'IFER sur les répartiteurs principaux de la boucle locale cuivre, dont le produit est intégralement affecté aux régions.
M. Christophe Bresson, directeur fiscal de France Telecom , a considéré que la réforme de la taxe professionnelle n'est pas réalisée à droit constant pour France Télécom, puisque le groupe devra s'acquitter en 2010 d'une imposition globale de 680 à 690 millions d'euros, soit un montant supérieur à celui escompté, de 625 millions d'euros. En outre, la société était déjà la seule de son secteur à se trouver pénalisée par le régime antérieur, compte tenu de l'effet du « plafonnement du plafonnement » de la valeur ajoutée, à hauteur d'environ 200 millions d'euros.
Mme Marie-Christine Lepetit a rappelé que le tarif de l'IFER a été calculé sur la base du montant acquitté par France Télécom en 2008, sans aucune intention de « surtaxer » cette société.
M. Philippe Marini , rapporteur général , a rappelé que le régime de taxe professionnelle de France Télécom constitue un édifice complexe, et s'est demandé si le surcroît d'imposition de cette société n'est pas également tributaire du dynamisme des bases de la TP.
M. Christophe Bresson a indiqué que France Télécom est pleinement soumis au droit commun depuis le 1 er janvier 2004, date avant laquelle l'entreprise versait l'intégralité de sa TP à l'Etat. Il a relevé qu'elle enregistre jusqu'à présent une baisse tendancielle de cet impôt de 20 à 30 millions d'euros par an, qui s'explique par une diminution de la valorisation de l'assiette des nouveaux équipements et biens mobiliers venant se substituer à l'ancien matériel. Les bases de l'IFER sur les stations radioélectriques et sur la boucle locale cuivre se révèlent quant à elles dynamiques. Il a admis que les tarifs de ces deux composantes ont été calculés d'après les bases de 2008, mais après que France Télécom a déposé sa déclaration pour l'exercice 2009, de sorte que le produit attendu de l'IFER rompt la tendance baissière constatée ces dernières années.
Il a également indiqué ne pas être en mesure de répondre à une question de M. Jean Arthuis , président , sur une éventuelle révision du barème de tarification des opérateurs concurrents qui utilisent la boucle locale. Il a confirmé que l'assiette des deux composantes est aisément localisable et ne pose donc pas de difficultés au regard de l'affectation du produit aux régions.
Puis, en réponse à M. Albéric de Montgolfier , M. Christophe Bresson a précisé que l'imposition due par France Télécom en 2010 devrait comprendre 42 millions d'euros au titre de la cotisation foncière des entreprises, 210 millions d'euros au titre de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, 35 millions d'euros de frais de chambres de commerce et d'industrie et 405 millions d'euros d'IFER, dont 5 millions au titre de l'imposition des stations radioélectriques. En réponse à M. Jean-Pierre Fourcade , il a ajouté que le coût du « plafonnement du plafonnement » à la valeur ajoutée a été de 214 millions d'euros en 2007, 189 millions d'euros en 2008 et 259 millions d'euros en 2009.
Mme Catherine Damelincourt a considéré qu'EDF supporte également un coût de l'ordre de 500 millions d'euros par an à ce titre.
En réponse à une observation de M. Philippe Marini , rapporteur général, M. Christophe Bresson a estimé que le contentieux communautaire sur les conditions d'imposition de France Télécom n'est pas encore réglé. En écho à une remarque de M. Jean Arthuis , président , il a ajouté que la TP et les taxes assimilées sont intégrés dans l'EBITDA (Earnings before interests, taxes, depreciation and amortisation), indicateur financier très suivi par les marchés financiers, tandis que l'impôt sur les sociétés exerce un impact en aval sur le résultat net.
Mme Marie-Christine Lepetit a relevé que l'analyse de l'IFER sur la boucle locale cuivre a fait apparaître une question, actuellement examinée par la mission présidée par M. Bruno Durieux, sur la manière dont cet impôt sera répercuté, à l'instar de la TP auparavant, sur les autres opérateurs clients du dégroupage dans le cadre de la formation des prix de la téléphonie mobile. Il s'agit donc de déterminer si ce report de charge d'imposition sera supportable pour les autres opérateurs dans le contexte économique actuel, et s'il convient de modifier les conditions de taxation de France Télécom.
M. Jean Arthuis , président , a considéré que les présents débats sont, de fait, complémentaires de la réflexion conduite par M. Bruno Durieux.
Il a ensuite abordé l'IFER sur les transports, qui concerne la SNCF et la RATP.
M. Jean-Pierre Fourcade s'est interrogé sur le produit attendu des deux composantes de l'IFER sur les transports et sur l'état des discussions qui seraient actuellement menées sur les tarifs applicables.
Mme Marie-Christine Lepetit a précisé que le rendement de l'IFER sur le matériel roulant de la SNCF est estimé à 250 millions d'euros, celui de l'IFER sur les rames de métro de la RATP, dont l'introduction dans le projet de loi sur le Grand Paris a permis de combler une lacune à l'égard des « grands gagnants » de la réforme de la TP, étant quant à lui évalué à 60 millions d'euros. En revanche, elle a indiqué ne pas avoir connaissance de nouvelles négociations sur les tarifs qui ont été adoptés dans la loi de finances. L'assiette doit cependant être encore précisée par des arrêtés en cours de rédaction. Evoquant les conventions liant la SNCF et les régions au titre du paiement de la charge de TP, elle a estimé que la continuité devrait prévaloir pour le paiement de la contribution économique territoriale et de l'IFER, de sorte que les régions seront globalement gagnantes puisqu'elles n'acquitteront auprès de la SNCF que la fraction afférente aux trains express régionaux, qui relèvent de leur compétence. En réponse à M. Jean-Pierre Fourcade , elle a considéré que le même raisonnement devrait prévaloir pour les relations financières entre la RATP et le Syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF).
Puis elle a indiqué à Mme Fabienne Keller que Réseau Ferré de France n'est pas redevable de l'IFER sur les transports, mais contribue à la répartition de son produit puisqu'il déclare chaque année à l'administration le nombre de sillons-kilomètres réservés par les entreprises de transport ferroviaire et répartis par région.
En réponse à une question de M. Philippe Dallier sur le traitement fiscal des dépôts de bus de la RATP, notamment en cas d'implantation sur plusieurs communes, Mme Marie-Christine Lepetit a précisé que ces installations ne sont pas comprises dans l'assiette de l'IFER, et a rappelé que les autocars et camions faisaient l'objet d'un dégrèvement spécifique dans le régime antérieur de TP. Le constat de l'absence de « grand gagnant » dans le secteur du transport de voyageurs par car avait ainsi justifié de ne pas l'imposer à l'IFER. Les entreprises concernées n'en restent pas moins redevables de la contribution économique territoriale et la répartition de la valeur ajoutée demeure fonction des effectifs. M. Philippe Dallier a jugé que l'« effondrement » des bases taxables crée néanmoins un effet d'aubaine.
M. Denis Merville s'est interrogé sur la situation des sociétés d'autoroute et des gestionnaires de tunnels. Mme Marie-Christine Lepetit a indiqué que ces infrastructures ne sont pas soumises à l'IFER, et M. Jean Arthuis , président , a entendu mettre en garde contre la tentation d'une extension des prélèvements.
M. Albéric de Montgolfier s'est interrogé sur les raisons qui ont conduit à ce que l'IFER sur les transformateurs électriques soit intégralement affectée au bloc communal. Mme Marie-Christine Lepetit a rappelé que la répartition du produit des composantes de l'IFER a fait l'objet de débats nourris au Parlement, et que l'administration, dans ses travaux préparatoires, s'était appuyée sur des critères de besoin de financement des collectivités et de proximité des installations imposées. Elle a estimé que la répartition du produit entre communes et départements peut encore être ajustée, et M. Philippe Marini , rapporteur général , s'est interrogé sur l'opportunité d'ouvrir à nouveau ce débat après que le Parlement a entendu mettre en place un certain équilibre.
Mme Catherine Damelincourt a considéré que les règles de répartition entre niveaux de collectivités territoriales avaient été vraisemblablement motivées par le souci de ménager l'acceptabilité des installations imposées et de maintenir un lien local fort.
M. Jean Arthuis , président , s'est réjoui de la qualité des débats et a appelé à ce que les parties clarifient leurs positions dans la perspective de la clause de rendez-vous. Il a sollicité auprès de l'administration fiscale des évaluations du produit, pour chaque niveau de collectivité, de la contribution économique territoriale et des composantes de l'IFER.
Mme Marie-Christine Lepetit a rappelé que plusieurs textes réglementaires sont actuellement examinés par le Comité des finances locales.
Mme Catherine Damelincourt a émis le voeu que la dynamique de simplification et d'allègement des formalités déclaratives soit maintenue. M. Jean Arthuis , président , a estimé que les règles de territorialisation risquent cependant de contrevenir à cette démarche.
M. Nicolas Wolff a jugé que l'éolien est une chance pour la France et a vocation à se développer en harmonie avec les intérêts des communes.
Enfin M. Gérard Gouzes a appelé à une vigilance permanente sur cette réforme, compte tenu du maintien de certaines incertitudes.