C. ISOLER LE FSE : UN PROJET ABANDONNÉ PAR LA COMMISSION
La Commission a un temps envisagé officieusement de séparer le FSE de la politique de cohésion. Devant la levée de boucliers en provenance des régions, qui sont les principales bénéficiaires du fonds, la Commission n'a pas poursuivi son projet.
La révision du cadre financier pluriannuel était effectivement une occasion idéale pour réformer le FSE et remettre en question cet outil, au motif bien connu que le bilan du FSE vieux de plus de 50 ans était mitigé en termes d'efficacité.
L'objectif de la Commission consistait à créer une politique européenne de l'emploi dont le FSE aurait été le bras séculier. Les commissaires Johannes Hahn, Maria Damanaki, Laszlo Andor et Dacian Ciolos défendaient en effet l'idée d'une plus grande complémentarité entre les différents fonds de cohésion afin de déboucher sur une meilleure concentration de l'argent communautaire sur les priorités stratégiques de l'Union européenne, priorités contenues dans la stratégie « UE 2020 ».
L'indépendance du FSE, selon ses promoteurs, aurait également apporté plus de visibilité aux mesures mises en place par l'Union pour endiguer le chômage né de la crise économique et financière. Dans ces conditions, le FSE ne serait plus lié au territoire aussi bien pour ses objectifs que pour sa mise en oeuvre alors qu'aujourd'hui, si la stratégie et le budget sont négociés et décidés entre l'Union européenne et les États membres, le Parlement européen et la Commission, la mise en oeuvre des financements par le FSE incombe aux États membres et à leurs régions, puisque l'idée maîtresse et originelle est de promouvoir les régions les moins avancées ou d'aider les régions en crise à se reconvertir.
Dans ce projet aujourd'hui abandonné, le point délicat était naturellement le financement, car sortir le FSE signifiait lui allouer une enveloppe budgétaire propre et donc indépendante de celle du FEDER. En effet, aujourd'hui FEDER et FSE sont alloués en bloc aux États membres qui détenaient eux-mêmes la part du FSE.
En outre, certains commissaires, dont Danita Hubner, ont rappelé que le FEDER était plus efficace s'il était coordonné et intégré au FSE. D'autres voix se sont élevées pour faire savoir que l'atout du FSE était d'agir directement sur les territoires et à travers les territoires, donc au plus proche du terrain. En outre, un territoire bénéficiant du FEDER est aussi et automatiquement un territoire qui a besoin de soutien en termes de formation et de lutte contre le chômage des plus vulnérables.
Toutefois, la Commission a fait part du bilan qu'elle dressait de l'action du FSE et des pistes de réflexion qu'elle souhaite voir débattues. En novembre 2010, la Commission a publié le 5 e rapport sur la cohésion économique, sociale et territoriale de l'Union, rapport intitulé « Investir dans l'avenir de l'Europe ». À la suite de ce rapport, elle a conduit une consultation publique sur l'avenir de la politique de cohésion.
La Commission remarque qu'il existe une difficulté à relier les réalisations financées par le FSE et les objectifs de la stratégie de Lisbonne. Ensuite, elle demande que soient reconnues les problématique posées par la définition des dépenses non éligibles au FSE et relevant plutôt de la santé ou de la protection sociale car, à ses yeux, 10 à 16 % des fonds du FSE sont dépensés pour des actions qui ne sont pas éligibles. La Commission considère qu'une programmation réalisée sur sept ans handicape la réactivité du FSE. Enfin, la Commission reconnaît qu'il existe un problème d'articulation entre la gestion assurée par les États membres et la responsabilité budgétaire et comptable assumée par le commissaire européen chargé de l'emploi.
La Commission insiste sur le fait que ces problèmes tiennent pour partie au fait que les règles générales des fonds structurels trouvent mal à s'appliquer aux particularités du domaine social. La Commission souhaite impliquer davantage les ministres en charge de l'emploi.
En conclusion, la Commission envisagerait une réforme offrant au FSE un environnement plus flexible et plus réactif que celui du FEDER.