C. DES ENJEUX DE RECONVERSION À LA CROISÉE D'INTÉRÊTS DIVERGENTS
La question de la reconversion d'anciens sites hospitaliers revêt également un enjeu essentiel. Cette problématique touche en effet quasiment toutes les régions , représente un coût pendant la période de transition (coût de gardiennage, maintien en état du site,...) et a, surtout, vocation à devenir une question centrale dans les années à venir , compte tenu de l'évolution des modes de prise en charge qui vont conduire à diminuer la surface immobilière dédiée aux soins et des réorganisations de la carte hospitalière, loin d'être achevées.
1. Les difficultés liées à la reconversion du patrimoine immobilier hospitalier
La reconversion d'un établissement de santé n'est pas aisée pour une raison simple soulevée, à plusieurs reprises, lors de l'audition pour suite à donner : un hôpital n'est pas un bien comme les autres.
a) « L'utilisation du patrimoine privé pour des activités hospitalières annexes : une option discutée »
La tentation d'utiliser le patrimoine privé des établissements de santé pour accueillir des activités annexes, comme les services administratifs des hôpitaux, est forte.
Cependant, dans nombre d'établissements, elle peut avoir des conséquences financières lourdes , en raison des coûts d'aménagement et d'entretien de bâtiments inadaptés pour ce type de services.
b) « Une opportunité de réemploi pour d'autres activités sanitaires et sociales ? »
Les anciens bâtiments hospitaliers ont pu également être utilisés pour accueillir des institutions sanitaires spécialisées, médico-sociales ou sociales (accueil des personnes âgées ou handicapées,...).
Ce mouvement a aujourd'hui « atteint ses limites », selon la Cour. En effet, la plupart de ces activités nécessitent désormais des locaux adaptés à leurs besoins spécifiques. « L'erreur qui a consisté naguère à ajuster l'activité de substitution aux contraintes des bâtiments disponibles, au détriment de l'efficacité de la prise en charge et de l'efficience de la gestion ne doit pas être réitérée ».
c) Une valeur culturelle mal exploitée
Par ailleurs, le patrimoine immobilier des hôpitaux représente une valeur culturelle et architecturale importante . Il est, d'ailleurs, protégé (404 édifices ou anciens édifices hospitaliers sont protégés au titre des monuments historiques).
Ce patrimoine est cependant mal exploité compte tenu de la difficulté à trouver des financeurs .
L'avenir des musées hospitaliers, établis dans certains sites (il existe une quarantaine de musées de la médecine et une douzaine de musées hospitaliers), paraît en particulier assez incertain.
2. Les intérêts parfois divergents entre les hôpitaux et les collectivités territoriales
La reconversion des anciens hôpitaux situés en centre-ville, sur des emprises foncières souvent vastes, peut enfin constituer un enjeu majeur de réaménagement urbain pour les collectivités territoriales .
Comme le rappelle la Cour, les communes détiennent d'importantes compétences en la matière : compétence d'élaboration des plans locaux d'urbanisme, octroi des permis de construire, droit de préemption.
Or, même si le maire est encore souvent le président du conseil de surveillance des hôpitaux, les intérêts de la collectivité territoriale et de l'établissement de santé peuvent être divergents :
« Pour sa part, [indique la Cour] le directeur de l'établissement cherche à maximiser le produit des cessions, alors que la collectivité peut souhaiter le minimiser , soit parce qu'elle se porte acquéreur, soit parce qu'elle souhaite qu'y soient construits des logements sociaux ou des équipements collectifs ou qu'y soient réalisés des espaces verts - autant d'éléments réduisant la charge foncière d'un terrain et donc le prix de vente pour l'hôpital » 2 ( * ) .
C'est pourquoi, la Cour insiste sur l'importance de la qualité des échanges entre les établissements de santé et les collectivités locales , point qui a également été souligné par la grande majorité des intervenants lors de l'audition pour suite à donner.
* 2 Cour des comptes - rapport public annuel 2012.