D. SUR LE DÉPOT DES DOSSIERS
Du peu de dossiers déposés depuis l'entrée en vigueur de la loi se pose nécessairement la question de l'information des populations civiles comme des militaires ou travailleurs civils.
À défaut d'un dépôt volontaire émanant de ces populations, ne serait-il pas opportun de mener des actions ciblées à destination de celles-ci ?
1. Mettre en oeuvre de nouvelles campagnes d'information à destination des populations locales
Lors des auditions menées par vos rapporteurs, la révélation du peu de dossiers déposés par les populations locales a été un étonnement. Cette interrogation semble partagée par plusieurs acteurs du dossier, notamment le CIVEN, qui remarquait à juste titre que les populations polynésiennes, par exemple, avaient un taux d'acceptation de l'ordre de 20 % 21 ( * ) .
Vos rapporteurs s'interrogent donc sur l'opportunité d'une nouvelle campagne d'information pour les populations locales. En particulier, outre les campagnes d'information et d'affichage, vos rapporteurs suggèrent que les médecins soient les premiers vecteurs d'information.
Bien sûr, un important travail a déjà été fait, puisque un centre médical de suivi a été mis en place en Polynésie. Le travail effectué par le médecin du service de santé des armées, sur place, est remarquable : outre les soins, il a un rôle d'aide auprès des populations dans le dépôt des dossiers.
Mais vos rapporteurs estiment qu'il pourrait également être judicieux d'intégrer les médecins civils à cette procédure. Par leurs questions visant à retracer le parcours de la personne qui les consulte, ils peuvent, si le doute leur parait suffisant, les aiguiller vers des spécialistes, des associations de victimes ou les coordinateurs en place en Polynésie et à l'ambassade de France en Algérie.
A cet égard, vos rapporteurs, sans vouloir empiéter sur un cadre qui dépasse les contours de leur mission, encouragent à ce que la question de l'indemnisation des victimes des essais nucléaires soit toujours inscrite à l'agenda des relations franco-algériennes.
2. Engager une démarche active de recherche des militaires en poste lors des essais
Cette démarche permettrait d'informer directement les militaires ou travailleurs civils en poste dans les zones déterminées aux périodes des essais aériens de l'existence de la loi et les engageraient, s'ils avaient déclenché une maladie présente sur la liste, à se rapprocher d'un médecin ou du CIVEN pour plus d'informations.
Bien sûr vos rapporteurs ont conscience qu'une information générale à destination de tous les militaires ayant été en poste, en croisant les fichiers, est impossible à mettre en oeuvre, les archives et dossiers n'étant pas tous informatisés.
Néanmoins , une démarche volontariste d'information vis-à-vis des personnels doit être engagée.
Cela peut prendre plusieurs formes :
- Une information aux pensionnés, de quelques lignes, sur l'existence de la loi, lors de l'envoi d'un relevé ou décompte ;
- Une information auprès des associations d'anciens militaires pour qu'elles relayent l'information auprès de leurs membres ;
- Une sensibilisation des médecins civils, en particulier les oncologues, afin qu'ils ajoutent dans l'entretien préalable avec leur patient des questions pour savoir s'ils ont été en poste en Algérie ou en Polynésie ;
- Une mise à disposition de plaquettes d'information, dans les salles d'attente, pour informer de l'existence du dispositif.
Bien sûr, cela nécessite aussi une grande prudence dans la gestion de l'information et les mots employés, car il ne s'agit ni de créer de l'anxiété, ni de susciter de faux espoirs.
Cette recherche globale pourrait être appuyée par une démarche plus particulière auprès des personnels dont il est avéré qu'ils ont reçu une surdose lors des essais 22 ( * ) . Une telle approche a précédemment était mise en oeuvre auprès des militaires ayant été fortement contaminés suite à l'accident Béryl : ils ont fait l'objet d'un suivi médical complet à l'hôpital Percy, qui continue aujourd'hui.
Il n'est donc pas inimaginable d'entreprendre la même démarche pour le millier de cas de surdoses avérées.
* 21 À comparer avec le taux global d'acceptation des dossiers qui est de 1,3 %
* 22 D'après le CIVEN, 581 cas de doses supérieures à 5 mSv dont 102 supérieures à 50 mSv au Sahara, et, en Polynésie, 345 cas de doses supérieures à 5 mSv