B. DES LIMITES QUI CONTRAIGNENT LA MONTÉE EN PUISSANCE DE LA COG 2013-2017
La France consacre aujourd'hui 4 % de son PIB à la politique familiale (5 % si l'on ajoute les droits familiaux liés aux pensions de retraite) retraite). Pourtant, certains interlocuteurs ont considéré que l'efficience de cette politique pouvait encore être améliorée.
C'est ce que soutient notamment Anne-Claire Mialot, secrétaire générale du Laboratoire de l'Égalité, dont une des préconisations vise à créer un fonds d'investissement public-privé destiné exclusivement au financement des dispositifs d'accueil des jeunes enfants.
1. De fortes inégalités territoriales
Tous modes d'accueil confondus, l'offre d'accueil varie selon les départements entre 9 et 80 places pour 100 enfants.
Les solutions adoptées reflètent donc en grande partie l'offre disponible sur le territoire : les zones urbaines sont mieux couvertes en matière d'accueil collectif car les équipements leur sont plus accessibles, tandis que les zones rurales offrent plus de places chez les assistantes maternelles.
Assistantes maternelles, crèches, garde par les
parents :
des spécificités territoriales bien
marquées
Source : Enquête DRESS « Les spécificités régionales des modes de garde déclarés des enfants de moins de trois ans », avril 2013
Ainsi, comme le montre le graphique ci-dessus :
- dans le Nord et le Nord-Est, les enfants sont gardés le plus souvent par leurs parents (groupe 1). Cette forte proportion est notamment corrélée au taux d'inactivité ou de chômage des parents : 50 % des enfants de moins de trois ans ont au moins un parent qui se déclare inactif ou au chômage dans le Nord-Pas-de-Calais contre 40 % en moyenne en France métropolitaine ;
- dans les zones rurales, le recours aux assistants maternels est plus élevé (groupe 2).
En moyenne, dans ces régions, deux enfants de moins de trois ans sur cinq sont gardés par un assistant maternel.
Dans les Pays-de-la-Loire - région qui fait figure d'exception nationale - près d'un enfant sur deux est accueilli par un assistant maternel. En revanche, en région PACA et en Corse, la proportion d'enfants gardés par un assistant maternel est de deux enfants sur dix, soit la proportion la plus faible.
Dans les grandes zones urbaines (groupe 3), l'accueil collectif est plus répandu :
- le nombre de place d'accueil collectif et familial est supérieur à la moyenne nationale ;
- la proportion de jeunes enfants accueillis en EAJE (établissement d'accueil des jeunes enfants) est comprise entre 5 et 39 % selon les départements.
En Ile-de-France, par exemple, plus d'un enfant sur cinq est accueilli en crèche. Cette région offre 24 places en accueil collectif pour cent enfants de moins de trois ans, contre quinze en moyenne en France métropolitaine.
Enfin, en Région PACA et en Corse (groupe 4), la part d'enfants confiés à un assistant maternel est faible : moins de 20 places contre 37 offertes en moyenne en France métropolitaine.
La faible présence d'assistants maternels se traduit par un recours plus important à la garde par les parents et à l'accueil collectif : dans la région PACA, près d'un quart des enfants sont accueillis en crèches.
La persistance des inégalités territoriales dans notre pays a été unanimement déplorée : pour cent enfants à garder, il y aurait 17 à 96 places de crèches selon les territoires (l'écart serait de 9 à 80 selon Laurence Rossignol) .
Un des facteurs explicatifs est que la politique d'offre contractuelle en vigueur, dans laquelle s'inscrivent les territoires qui le décident, génère des disparités géographiques importantes.
Comme l'a expliqué le président du Haut Conseil de la Famille (HCF), le développement des EAJE dépend des équilibres qui régissent les territoires et des choix des élus. « Nous ne disposons d'aucun instrument qui nous permettrait d'atténuer ces disparités. Les incitations financières ne peuvent produire que des résultats à la marge . »
Pour répondre à cette préoccupation, Laurence Rossignol a indiqué le 19 février avoir demandé aux préfets, par la circulaire du 22 janvier 2015 36 ( * ) , de réunir tous les acteurs locaux de la petite enfance (CAF, conseils généraux, communes), afin qu'ils se prêtent à l'élaboration d'un diagnostic commun des besoins des familles sur le territoire .
Seize départements volontaires 37 ( * ) ont déjà préfiguré cette démarche.
Un schéma départemental des services aux familles devrait alors répondre à l'amélioration de la couverture de ces besoins en matière de soutien à la parentalité et de modes d'accueil, tenant compte de leur diversité, à laquelle la secrétaire d'État s'est dite particulièrement attachée.
Votre rapporteur se félicite de cette initiative, et souhaite que ces schémas territoriaux permettent une réponse adaptée, au plus près du besoin des familles.
Interrogé à ce sujet, le président du Haut Conseil de la Famille (HCF) a regretté que les schémas territoriaux ne soient jamais opposables, et donc, selon lui, peu efficaces : « Si depuis toujours les gouvernements successifs reprennent l'idée de réaliser des schémas territoriaux, ceux-ci ne sont jamais opposables. Nous verrons si la nouvelle génération des schémas territoriaux rencontre davantage de succès ».
Partageant ce point de vue, Philippe Dupuy, délégué petite enfance et emploi de l'Association des collectifs enfants-parents-professionnels (ACEPP), s'est interrogé sur l'utilité des schémas territoriaux, dès lors qu'en parallèle peuvent émerger des initiatives privées d'accueil pseudo-collectif du type des Maisons d'assistants maternels, et qui conduisent les élus à remettre en cause les projets de crèches qui avaient été imaginés selon les schémas.
Cette interrogation a permis au directeur général de la CNAF de préciser que les schémas territoriaux ne visaient pas uniquement les crèches, mais l'ensemble des dispositifs d'accueil de la petite enfance et des services aux familles, y compris les dispositifs d'aide à la parentalité, dont on mesure bien l'importance. « La généralisation des schémas territoriaux est essentielle pour maintenir une diversité des offres et donc une liberté de choix des modes de garde. »
En tout état de cause, la délégation souhaite être informée de la réalisation de ces schémas territoriaux et du ciblage des aides qui en découlera, visant à une meilleure adéquation de l'offre aux besoins sur les territoires.
Une recommandation sera formulée en ce sens.
2. Un choix contraint par le niveau de vie et par l'activité professionnelle des parents
Le choix d'une formule d'accueil est également contraint par le niveau de vie et l'activité professionnelle des parents :
- parmi les enfants de moins de trois ans appartenant aux 20 % des ménages les plus aisés, 69 % sont gardés à titre principal par un tiers, contre seulement 9 % des enfants issus des ménages plus modestes ;
- à l'inverse, l'arbitrage financier entre un revenu tiré de l'exercice d'un emploi et le coût de la garde éventuelle de l'enfant peut jouer en faveur de l'arrêt d'activité professionnelle dans les familles modestes : cet arbitrage intervient le plus souvent, comme cela a été dit plus haut, aux dépens de l'activité de la mère....
Enfin, les disparités observées en matière d'accès aux différents modes de garde s'accentuent dans le cas des familles monoparentales .
3. Un financement complexe
Selon des participants à la table ronde du 5 février 2015, la complexité du système de financement est un frein aux initiatives locales en matière de création de places d'accueil.
Rappelons qu'il existe, d'une part, un financement national de l'accueil individuel dans le cadre de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) et, d'autre part, un financement mixte de l'accueil collectif dans le cadre de la prestation de service unique (PSU).
Pour ce qui concerne les places en crèches, la CNAF s'appuie sur la prestation de service unique (PSU) 38 ( * ) , qui rémunère le service rendu par les crèches, comme elle le fait pour les centres sociaux et les accueils de loisirs sans hébergement (ALSH). Le guide de la prestation de service unique, mis à jour en mai 2013 par la CAF de la Haute-Garonne figure en annexe de ce rapport.
La lettre-circulaire du 29 juin 2011, dans laquelle la Caisse nationale des allocations familiales a clarifié et précisé certaines règles d'application de la prestation de service unique , a considérablement modifié le mode de calcul de la tarification en crèche.
Les principaux changements, visant à rapprocher facturation et heures effectivement réalisées, sont les suivants :
- suppression des forfaits journaliers pour permettre aux familles de choisir librement le nombre d'heures d'accueil dont elles ont besoin ;
- interdiction de limiter le nombre de congés auxquels les parents peuvent prétendre sur un an ;
- encouragement de l'accueil de familles bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et/ou monoparentales pour favoriser leur insertion professionnelle ;
- fourniture des couches et du lait sans augmentation de la tarification faite aux familles.
Du point de vue des collectivités , le système de financement est peu clair.
Du point de vue de la famille , un même mode d'accueil peut revêtir trois formes de financement différentes :
- les maisons d'assistants maternels (MAM) sont financées par la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) (les parents sont les employeurs) ;
- certaines micro-crèches sont également financées par la PAJE (ici, l'employeur est une personne morale et les parents achètent une prestation de service qui pourra en partie être remboursée par les aides individuelles) ;
- d'autres micro-crèches sont financées par la PSU (dans ce cas, le prix de la prestation dépend à la fois de revenus de la famille et du nombre d'heures facturées).
Philippe Dupuy, délégué petite enfance et emploi de l'Association des collectifs enfants-parents-professionnels (ACEPP), a en outre fait observer au cours de la table ronde du 5 février 2015 que les règles de la PSU avaient totalement réorganisé l'accueil collectif en France en l'espace de quelques années. D'un fonctionnement au forfait, on est passé selon lui à la facturation à l'heure, voire à la demi-heure si l'on respecte les dernières dispositions réglementaires. Cette réorganisation paraît regrettable à Philippe Dupuy : « Par ce texte, le projet collectif est totalement abandonné ; l'approche est désormais celle d'une prestation de service, d'un accueil « individuel ».
Par ailleurs, la mise en place des Maisons d'assistants maternels, dont le statut juridique apparaît encore incertain et peu lisible (accueil dit « individuel », mais qui s'apparente en réalité à un accueil collectif), contribue à brouiller un peu plus la cohérence d'ensemble de la politique d'accueil de la petite enfance sur le territoire.
Dans ce contexte, certains participants à la table ronde du 5 février 2015 ont exprimé le besoin d'outils d'estimation des dépenses à engager, difficiles selon eux à anticiper avec précision.
Votre rapporteur s'interroge sur une possible clarification des différents modes de financement des structures d'accueil du jeune enfant, qui permettrait d'assurer une meilleure complémentarité entre les différentes solutions d'accueil. Le Haut Conseil à la Famille (HCF) a déjà fourni des réflexions en ce sens.
4. Les normes d'hygiène et de sécurité, sources de concurrence entre les structures collectives et les assistants maternels
Un constat s'impose : les coûts de construction d'un établissement d'accueil collectif ont presque doublé en dix ans.
D'après la CNAF, le coût total d'une nouvelle place en EAJE est passé de 18 079 euros en 2000-2001 à 34 312 euros en 2012-2013.
L'augmentation des coûts, dans un contexte de conjoncture économique difficile, peut donc expliquer la moindre propension des collectivités territoriales à mettre en oeuvre des plans de construction actuelle (baisse des dotations de l'État, charges liées à l'aménagement des rythmes éducatifs etc.).
Source : CNAF, « L'accueil du jeune enfant en 2011 », Observatoire national de la petite enfance en 2012.
Or, le coût de la place en EAJE, en investissement et en fonctionnement, peut être influencé par les normes de sécurité et d'hygiène, notamment celle portant sur la superficie minimale exigée par enfant.
C'est dans cette conjoncture difficile que se pose la question de la révision des normes.
La réflexion sur les normes, fréquemment évoquée lors de la table ronde du 5 février 2015, recouvre deux aspects :
- la question de l'encadrement des enfants ;
- et celle des règles sanitaires et de sécurité.
S'agissant des normes d'encadrement , la réglementation prévoit la présence simultanée de deux professionnels, dont un diplômé d'État, dans une micro-crèche , d'un adulte pour cinq enfants qui ne marchent pas dans une crèche et d'un adulte pour huit enfants qui marchent. Dans les maisons d'assistants maternels en revanche, un professionnel seul peut s'occuper en même temps de quatre enfants au maximum.
Pour certains professionnels, cette disparité permet une plus grande souplesse de gestion. Sylvie Bruel N'Diaye, coordinatrice petite enfance de la ville du Pré-Saint-Gervais, a ainsi considéré lors de la table ronde du 5 février 2015 que le taux d'encadrement des enfants dans les MAM (quatre professionnelles pour douze enfants) rendait ces projets extrêmement intéressants pour les familles. Pour d'autres professionnels, cette faculté crée une concurrence et des contraintes pour les EAJE difficiles à justifier.
C'est le cas de Vanessa Sabathier, responsable des services petite enfance de la communauté de communes Val de Gers : « Nous ne comprenons pas qu'un assistant maternel puisse accueillir, seul, quatre enfants alors que dans le même temps, en structure collective, même pour un enfant, il faut compter au moins deux personnes », a-t-elle déploré, tout en reconnaissant qu' « il est impossible de gérer seul un groupe de huit enfants de 18 mois . ». Vanessa Sabathier a conclu que les normes d'encadrement paraissaient incohérentes au regard de la réalité du terrain.
Selon Sylvie Bruel N'Diaye, « La création d'une MAM présente un très faible coût et de faibles contraintes en termes de normes ».
La secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie a estimé difficile de mobiliser les collectivités territoriales pour qu'elles créent des solutions d'accueil supplémentaires, tout en renforçant parallèlement les normes d'encadrement exigées. Elle a plaidé pour le « statu quo sur ce point » au cours de son audition du 19 février 2015.
Comme Laurence Rossignol, votre rapporteur estime qu'il n'est pas opportun à l'heure actuelle de modifier cette réglementation, qui créerait une nouvelle instabilité juridique, à un moment où, au contraire, les acteurs ont besoin de stabilité.
S'agissant des règles d'hygiène et de sécurité , l'ensemble de nos interlocuteurs ont relevé qu'elles varient d'un département à l'autre, et parfois au sein d'un même département.
D'une part, les normes d'hygiène et de sécurité n'ont cessé de se renforcer. À titre d'exemple, les textes applicables aux crèches sur la sécurité et la qualité de l'air intérieur se trouvent dans plusieurs sources : code de la santé publique, code de l'action sociale et des familles, code du travail, circulaires de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) relatives aux conditions d'attribution de dotations financières aux EJAE, règles relatives aux établissements recevant du public, etc.
D'autre part, les services départementaux de protection maternelle et infantile (PMI), qui accordent les agréments, sont susceptibles de préconiser des règles plus sévères.
L'exemple de la « biberonnerie », rapporté le 5 février 2015 par Vanessa Sabathier, a retenu l'attention : « Trois ans après la construction de la structure multi-accueil - un bâtiment neuf dont les plans ont été soumis à la PMI - il nous a été demandé de démolir la « biberonnerie » car il aurait fallu installer deux portes sur ce local de trois mètres carrés, pour assurer la séparation entre un circuit propre et un circuit sale ».
Finalement, le président du conseil général s'est opposé à ce que la « biberonnerie » soit démolie. Si cette décision a pu être interprétée comme une bonne nouvelle, elle démontre la latitude avec laquelle les normes peuvent être appliquées.
Devant la délégation, Laurence Rossignol a, le 19 février 2015, insisté sur la nécessité, en matière de normes, de « distinguer le ressenti de la réalité ». Ainsi, les normes sur la qualité de l'air ont-elles été assouplies, conjointement avec la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Parallèlement, un groupe de travail a été mis sur pied dans le cadre d'une réflexion sur les normes d'urbanisme, mais ses travaux n'ont pas confirmé, selon la secrétaire d'État, l'intérêt d'une quelconque réforme en la matière.
C'est à une harmonisation de la lecture et de l'interprétation des normes nationales qu'il convient, en tout état de cause, de travailler, et la délégation formulera en ce sens une recommandation visant à l'édiction d'un « guide des bonnes pratiques » commun à tous les acteurs de l'accueil de jeunes enfants.
5. La poursuite de la revalorisation des métiers de la petite enfance
La réflexion sur les modes de garde est indissociable de celle portant sur le développement de ces secteurs et des emplois qui y sont créés. À l'heure actuelle, il existe des différences sensibles, sur le plan de la formation, entre le personnel diplômé travaillant dans les structures collectives et celui qui assure l'accueil individuel des enfants.
Le tableau ci-après récapitule les diplômes requis, pour exercer dans une structure d'accueil publique.
Les voies d'accès aux métiers en
structures d'accueil de la petite enfance
Formation |
CAP Petite enfance |
Auxiliaires de puériculture |
Éducateur de jeunes
enfants
|
Puéricultrice
|
Missions |
Le titulaire du CAP petite enfance est un professionnel formé pour les soins à apporter aux jeunes enfants dans le respect de la vie quotidienne et en relation avec une équipe éducative. |
Le titulaire du diplôme d'État d'auxiliaire puériculture dispense des soins en collaboration avec la puéricultrice (ou l'infirmière) et sous sa responsabilité. Il réalise des activités d'éveil et d'éducation de l'enfant. |
Le titulaire du diplôme d'État d'éducateur de jeunes enfants est un travailleur social spécialiste de la petite enfance qui exerce une fonction d'accueil des jeunes enfants et de leurs familles dans les différents établissements et services. |
Rôle de prévention , de protection et d'éducation auprès des familles. Encadrement |
Diplôme requis et conditions d'accès |
Aucun diplôme requis Aucune limite d'âge |
- Réussite au concours d'accès à la formation qui donne lieu à l'obtention d'un diplôme d'État (DE) - Aucune condition de diplôme pour se présenter au concours - Être âgé d'au moins 17 ans |
- Réussite au concours d'accès à la formation donnant lieu à l'obtention d'un diplôme d'État d'éducateur de jeunes enfants (DEEJE) - Titulaire du baccalauréat pour se présenter au concours - Ou être titulaire du diplôme professionnel d'auxiliaire de puériculture , ou du CAP petite enfance et justifier de trois ans d'expérience |
- Être titulaire d'un diplôme d'État de puéricultrice (DEP) - Concours accessible après un diplôme d'État d'infirmier ou de sage-femme |
Déroulement
|
Formation d'un an proposée en école ou à distance Apprentissage d'une durée de deux ans après la troisième |
Formation d'un an accessible uniquement sur concours |
Formation de trois ans en école (alternance cours et stages) Il existe une trentaine d'écoles spécialisées en France accessibles uniquement sur concours d'entrée |
Formation d'un an dans une école de puériculture. Il existe une trentaine d'école agrées par le ministère de la Santé (écoles payantes) |
À cet égard, votre rapporteur a été sollicité par la directrice du service petite enfance de la mairie de Passy (Haute-Savoie), au sujet de l'uniformisation des modalités de recrutement des personnels de la petite enfance dans les établissements d'accueil relevant d'une collectivité territoriale. Selon elle, les personnes titulaires d'un diplôme CAP petite enfance seraient susceptibles de bénéficier d'une intégration dans la fonction publique territoriale, lorsqu'elles sont amenées à occuper un poste de titulaire vacant, ce qui ne serait pas le cas des personnes titulaires d'un diplôme d'auxiliaire de puériculture, d'éducatrice de jeunes enfants, d'infirmière ou de puéricultrice, ces dernières étant astreints à l'obtention d'un concours d'intégration spécifique.
Faute de temps pour expertiser la problématique, votre rapporteur s'adressera aux institutions compétentes pour obtenir un diagnostic sur le sujet.
D'autres voies permettent de travailler en crèche sans être titulaire de l'un des diplômes requis, par exemple en procédant à la validation des acquis d'une expérience d'au moins trois ans auprès d'un public d'enfants .
Le métier d'assistant maternel, par ailleurs, recouvre des situations professionnelles hétérogènes. La table ronde du 5 février 2015 a montré la professionnalisation en cours, notamment grâce à l'action des RAM sur le territoire.
Parmi les questions récurrentes, on peut citer les interrogations suivantes :
- comment valoriser ce métier ?
- comment attirer des hommes vers ce métier, dans une perspective de lutte contre les stéréotypes masculins et féminins ?
- comment anticiper le départ en retraite prochain d'une génération entière d'assistants maternels ?
- Comment s'adapter au nouveau profil des assistants maternels, plus diplômés et soucieux d'accéder à un véritable cursus et à une évolution de carrière ?
Lors de son audition, le 19 février 2015, Laurence Rossignol a indiqué avoir signé avec le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et avec les partenaires sociaux, l'accord cadre du premier EDEC (engagement de développement de l'emploi et des compétences) pour la petite enfance.
Cet accord, conclu le 16 février 2015 pour la période 2015-2018 et auquel participent la majorité des partenaires sociaux, concerne le secteur privé de la petite enfance (crèches associatives, particuliers employeurs d'assistants maternels ou de gardes à domicile, entreprises de crèches).
Il mobilisera jusqu'à cinq millions d'euros (1,5 millions provenant de l'État et 3,5 millions des organismes paritaires finançant la formation professionnelle des salariés). Ces moyens financeront des actions de soutien non seulement aux salariés (professionnalisation, développement des compétences, prévention des risques professionnels) mais aussi aux employeurs (gestion des ressources humaines, recrutement).
Cet accord doit permettre de :
- construire des parcours de carrière et favoriser l'accès à la qualification (promouvoir la validation des acquis de l'expérience (VAE) vers le diplôme d'auxiliaire de puériculture ; expérimenter les contrats de professionnalisation pour les gardes d'enfants au domicile ; accompagner les gestionnaires pour la mise en place de parcours qualifiants pour leurs employés ; mener une campagne d'information auprès des assistants maternels sur le nouveau compte personnel formation ; améliorer le niveau de formation, notamment chez les assistants maternels et les gardes d'enfants à domicile avec l'expérimentation d'un référentiel spécifique « français compétences professionnelles ») ;
- renforcer les compétences des employeurs (accompagnement RH notamment pour les fonctions de directeurs de crèches) ;
- améliorer le bien-être au travail et lutter contre les risques professionnels (troubles musculo-squelettiques par exemple) ;
- mieux faire connaître les métiers de la petite enfance et promouvoir dans ce domaine la mixité (communication ciblée auprès des prescripteurs tels que Pôle emploi, l'ONISEP...). 39 ( * )
D'un côté, les professionnels se verront reconnaître un accès facilité à la validation des acquis par l'expérience, et de l'autre côté, les employeurs verront leurs compétences en matière de ressources humaines et de gestion budgétaire renforcées.
« Il nous a semblé utile de développer la formation continue, dans la mesure où les professionnels interviennent à une période déterminante dans le développement de l'enfant : ils seront ainsi mieux à même de répondre à l'accueil en horaires décalés, de repérer les enfants en situation de maltraitance, et de détecter le handicap », a précisé Laurence Rossignol le 19 février 2015.
La spécificité des parents-employeurs sera également prise en compte.
L'EDEC constitue ainsi la première étape du « Plan métiers de la petite enfance », dont le ministère envisage la mise en oeuvre. Ce plan, axé sur la sécurisation des parcours professionnels, prévoit des passerelles entre les métiers et les diplômes de la petite enfance.
Parallèlement, la révision des contenus du CAP petite enfance doit être l'occasion de prendre en considération toutes les nouvelles compétences requises par le développement des modes d'accueil : « Nous travaillons aussi à la refonte du CAP petite enfance, à un moment où, hasard du calendrier, le contenu de ce diplôme est en cours de réexamen », comme l'a relevé Laurence Rossignol lors de son audition.
Votre rapporteur suivra avec le plus grand intérêt la mise en oeuvre de ces dispositifs.
6. Les maisons d'assistants maternels (MAM) : une solution prometteuse, des difficultés juridiques à résoudre
Les maisons d'assistants maternels (MAM) Depuis la loi du 9 juin 2010 portant création des MAM, les assistants maternels peuvent exercer leur profession en dehors de leur domicile. L'accueil des enfants s'effectue alors au sein de MAM qui peuvent accueillir jusqu'à quatre professionnelles. Les assistants maternels exerçant en MAM sont titulaires d'un agrément délivré par la PMI les y autorisant. Les employeurs des assistants maternels exerçant au sein des MAM sont les parents. En 2012, on comptait 550 MAM (160 en 2010 et 330 en 2011). Parmi elles, on peut citer « Petit oiseau deviendra grand » en Ardèche, « Les pitchouns » en Côte-d'Or, « Les bouts chou com à la maison » en Haute-Garonne, etc. Les MAM sont particulièrement développées sur certains territoires, comme en Loire-Atlantique, où 71 structures de ce type ont été créées. |
Dans un contexte budgétaire contraint, les MAM représentent une alternative prometteuse en vue du développement de l'offre d'accueil des modes de garde.
À titre d'exemple, la commune du Pré-Saint Gervais (18 100 habitants), est la première ville de la Seine-Saint-Denis à avoir créé une MAM. D'après Carine Coste-Chareyre, directrice de l'action sociale, le projet « revient à trois fois moins cher qu'une place en crèche ». Les MAM permettent de créer jusqu'à seize places d'accueil, quatre enfants pouvant être suivis par un professionnel en fonction de son agrément.
Élisabeth Laithier, adjointe au maire de Nancy et co-présidente du groupe de travail « Petite enfance » de l'Association des maires de France (AMF) a cependant soulevé, au cours de la table ronde du 5 février 2015, les deux principales difficultés rencontrées par la prise en charge d'un enfant par un assistant maternel.
La première difficulté tient à l'absence de statut juridique .
« Lors d'un groupe de travail organisé la semaine dernière, une élue nous expliquait par exemple qu'une MAM sur son territoire avait dû fermer, tout simplement parce que les assistantes maternelles qui la composaient ne s'entendaient plus », a témoigné Elisabeth Laithier le 5 février 2015.
La question de la délégation d'accueil dans une MAM a également été soulevée et ce point juridique reste à ce jour en suspens.
Le point sur la délégation d'accueil dans une MAM Le parent qui confie son enfant à un assistant maternel exerçant en MAM, peut autoriser cet assistant maternel à déléguer l'accueil de son enfant à une ou plusieurs autres professionnels exerçant dans la même maison. Dans ce cas, le parent reste employeur du seul professionnel auquel il confie son enfant. L'autorisation de délégation figure dans le contrat de travail de l'assistant maternel et l'accord de chaque assistant maternel auquel l'accueil de l'enfant peut être délégué est joint en annexe au contrat. L'assistant maternel délégant (qui a reçu l'autorisation des parents de déléguer l'accueil de l'enfant) remet une copie de son contrat de travail à chaque assistant maternel délégataire (susceptible d'assurer par délégation l'accueil de l'enfant). La délégation d'accueil ne fait l'objet d'aucune rémunération à l'assistant maternel délégataire. Elle ne peut ni conduire un assistant maternel à accueillir un nombre d'enfants supérieur à celui prévu par son agrément, ni permettre à un professionnel de ne pas assurer le nombre d'heures d'accueil mensuel prévu par son ou ses propres contrats de travail. |
La seconde difficulté identifiée lors de la table ronde du 5 février 2015 tient aux questions de formation.
Pour Elisabeth Laithier, « Les assistants maternels dans les MAM ne sont pas formés pour réaliser de l'accueil collectif . » Or, « il n'y a aucune raison que les MAM échappent aux demandes strictes qui s'imposent aux micro-crèches en matière de normes et de statut juridique ».
Il est ressorti de l'ensemble des témoignages entendus le 5 février 2015 que l'offre et la demande de formation des assistants maternels avait considérablement augmenté. Selon Jean-Rémy Acar, directeur général de la Fédération des particuliers employeurs de France (FEPEM), « ces trois dernières années, la totalité des fonds disponibles pour cela a été largement dépassée . »
Aujourd'hui, les partenaires sociaux négocient pour :
- d'une part, doubler les taux de collecte, c'est-à-dire l'investissement que consentent les employeurs pour la formation au bénéfice de la professionnalisation des assistants maternels ;
- d'autre part, intégrer à la convention collective les conséquences de la disparition du droit individuel à la formation (DIF) 40 ( * ) .
Le DIF était en effet l'un des leviers majeurs de la formation. Selon le directeur général de la FEPEM, « Il s'agit aujourd'hui de définir la manière de tenir compte des évolutions législatives pour adapter le cadre qui organise la relation d'emploi entre un particulier et son salarié, de façon à développer la professionnalisation . »
Pour la délégation, la professionnalisation représente l'un des premiers enjeux du secteur. Plus largement, l'une des conditions du développement des modes d'accueil des jeunes enfants est de professionnaliser le secteur pour assurer une qualité de service toujours plus grande.
La délégation a retenu l'exemplarité du dispositif des MAM mis en place au Pré-Saint-Gervais depuis quatre ans - la première MAM y a ouvert en 2011 - présenté le 5 février par Anne-Marie Duny, directrice de l'Action sociale et Sylvie Bruel N'Diaye, coordinatrice petite enfance de la ville du Pré-Saint-Gervais.
Cette formule y a été initiée à l'origine, en 2009, à la suite de deux constats :
- un taux de réponse insuffisant aux demandes des familles, d'une part ;
- et, d'autre part, une forte diminution du nombre d'assistants maternels sur le territoire, en raison de longues maladies ou de départs à la retraite.
Le dispositif des MAM a permis de créer au Pré-Saint-Gervais des places d'accueil et de favoriser l'insertion sur le marché du travail de personnes à la recherche d'un emploi d'assistant maternel.
Ce développement n'a été possible que parce que ce projet a été porté par la ville, qui identifie et finance les locaux, recrute les assistants maternels, les suit et les soutient, en lien avec la PMI et la CAF.
Par ailleurs, la table ronde du 5 février 2015 a montré qu'un projet de création de MAM supposait, de la part de tous les acteurs concernés, une concertation préalable en amont pour définir en détails le projet et reposait sur une bonne entente entre les assistants maternels qui y participent.
* 36 Circulaire n° DGCS/SD2C/2015/8 du 22 janvier 2015 relative à la mise en oeuvre de schémas départementaux des services aux familles
* 37 Ain, Bouches-du-Rhône, Charente, Charente maritime, Corrèze, cotes d'Armor, Indre-et-Loire, Jura, Loire-Atlantique, Lot, Pas-de-Calais, Pyrénées-Atlantiques, Bas-Rhin, Seine-Maritime, Seine-Saint-Denis et La Réunion.
* 38 La PSU est régulièrement revalorisée : le directeur de la CNAF, Daniel Lenoir, a précisé qu'il était prévu qu'elle augmente de 5 % par an sur la durée de la COG.
* 39 Extrait du site officiel du ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social : http://travail-emploi.gouv.fr/actualite-presse,42/communiques,2138/signature-de-l-edec-petite-enfance,18459.html
* 40 Le 1 er janvier 2015, le DIF est devenu le compte personnel à la formation (CPF). L'utilisation du CPF serait réservée aux actions qualifiantes (formations conduisant à une certification inscrite au RNCP - répertoire national des certifications professionnelles, à un CQP ou CQPI - certificat de qualification professionnelle ou interbranche...) inscrites sur une liste établie au niveau national, régional ou par une branche professionnelle.