II. LE CONSEIL RÉGIONAL DU LIMOUSIN : LE REPORT MODAL VERS LE TRANSPORT FERROVIAIRE
Le 28 septembre, à la faveur de plusieurs rencontres dans le département de la Haute-Vienne, votre rapporteure a recensé plusieurs solutions de mobilité mises en oeuvre par les collectivités (département, région, métropole).
La région Limousin, qui compte 741 100 habitants, a voulu mettre sa compétence ferroviaire au service de la mobilité durable. Souhaitant encourager le report modal vers le transport ferroviaire, le conseil régional a entrepris de renforcer l'attractivité de son offre de transport express régional (TER), dont les horaires ont été cadencés en 2013 et les tarifs refondus en 2015, et d'organiser l'intermodalité autour du réseau ferré, en créant des pôles d'échange en 2000, et une centrale d'information multimodale en 2009.
À travers l'exemple - loin d'être unique - de la région Limousin, votre rapporteure entend rappeler que l'offre ferroviaire constitue une alternative crédible au trafic routier, tant pour le transport de passagers, aujourd'hui bien établi, que pour celui des marchandises, encore trop limité.
A. LES OBJECTIFS
Dans le cadre du Schéma régional climat air énergie (SRCAE) qu'il a adopté en 2013, le conseil régional du Limousin a identifié le secteur des transports comme un moyen d'action majeur dans sa stratégie de lutte contre le changement climatique. Ce secteur constitue en effet le deuxième émetteur de gaz à effet de serre dans cette région, avec 24% des rejets.
Le Limousin, territoire à dominante rurale, se caractérise par une faible densité démographique, une relative dispersion de l'habitat et une fluidité certaine du réseau routier. Il en résulte un usage prépondérant du transport routier par les particuliers et les professionnels. C'est pourquoi ce mode de déplacement est responsable de 94% des émissions dues au trafic de voyageurs, et de 99% des rejets imputables au trafic de marchandises.
Dans ces circonstances, le conseil régional a entendu utiliser pleinement sa compétence ferroviaire avec pour objectif, à l'horizon 2050, de faire passer la part modale des transports en commun de 8 à 25%, et celle du fret ferroviaire de 2 à 7%.
Plus précisément, l'enjeu est de faire émerger un réseau ferré mieux intégré aux grands axes nationaux et européens, davantage interconnecté avec les autres modes de transport, et toujours plus adapté aux besoins des usagers.
B. LES ACTIONS
1. Le renforcement de l'attractivité de l'offre ferroviaire
Avec 15 lignes, 82 gares et 862 kilomètres de voies en 2009 28 ( * ) , les TER constituent la pierre angulaire des transports collectifs en région Limousin.
Conscient de la nécessité de proposer une offre plus compétitive et plus fiable, le conseil régional, en partenariat avec la Société nationale des chemins de fer (SNCF), a entrepris la modernisation des horaires et des tarifs proposés, dans le but de renforcer la fréquentation des lignes, d'optimiser le fonctionnement du réseau, et de faciliter les déplacements vers les lieux de travail ou de loisirs.
Aussi a-t-il engagé, en 2013, le cadencement de son offre, c'est-à-dire la mise en cohérence des horaires. C'est ainsi que, sur la ligne Limoges-Guéret, les trains partent dorénavant à la onzième minute de chaque heure, le matin et le soir. Ces horaires cadencés participent d'une conception durable de la mobilité à double titre : en premier lieu, ils favorisent une offre plus régulière et plus lisible, adaptée aux besoins des voyageurs, ce qui permet un usage fréquent du réseau, en particulier pour les déplacements domicile-travail ; ensuite, le cadencement permet la synchronisation des TER avec les grandes lignes ferroviaires et les autres réseaux de transports collectifs, rendant ainsi possible l'utilisation en un temps réduit de plusieurs modes de déplacement successifs.
Outre ces horaires cadencés, des tarifs incitatifs ont également été déployés en 2015. À titre d'exemple, une offre spécifique, le « PassLiberté », a été créée à l'intention des voyageurs utilisant de manière régulière une même ligne, ce qui favorise le recours au TER pour les trajets quotidiens.
Afin de porter à la connaissance des usagers, et en particulier des entreprises, cette offre renouvelée, le conseil régional a engagé des opérations de communication destinées à rappeler l'intérêt du transport ferroviaire pour la mobilité quotidienne. Pour évoquer un simple exemple, les entreprises ont été incitées à apposer une « estampille de proximité » sur leurs publications ou leurs devantures, de manière à mettre en évidence leur proximité avec les gares, et encourager ainsi leurs employés et leurs clients à utiliser les TER.
Votre rapporteure souligne que c'est en agissant sur la mobilité quotidienne, et plus particulièrement sur les trajets domicile-travail, que les collectivités sont les plus susceptibles de favoriser la mobilité durable.
2. L'organisation de l'intermodalité autour du réseau ferré
Le conseil régional a également souhaité développer l'intermodalité autour des lignes et des gares ferroviaires. Dans cette optique, il a créé des pôles d'échange, participé à la mise en service d'une centrale d'information multimodale et développé des solutions de billettique intégrée.
Le déploiement des pôles d'échange constitue une action historique du conseil régional engagée il y a maintenant une décennie.
En 2000, un premier projet, le Centre intermodal d'échanges de Limoges (CIEL), a été créé avec succès sur le site de la gare de Limoges. Ce projet, qui a réuni le conseil régional du Limousin, le conseil départemental de la Haute-Vienne, la ville et l'agglomération de Limoges, le syndicat en charge des transports de Limoges, la SNCF, l'État et la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) 29 ( * ) , visait à mieux coordonner les transports en train, en bus et en autocar sur ce site. C'est pourquoi ont été prévus à proximité immédiate de cette gare un terminal pour les autocars, qui accueille les lignes du conseil départemental, ainsi qu'un pôle pour les bus, desservi par le réseau de l'agglomération. Un espace d'accueil, situé au centre de la gare, délivre des informations sur les différents moyens de transport à disposition. Au total, une offre particulièrement dense de TER, d'autocars et de bus dessert le pôle d'échange, contribuant ainsi à positionner la gare de Limoges comme le principal noeud de circulation de la région.
Afin de prendre la mesure de cette initiative ancienne et réussie, votre rapporteure a réalisé une visite de terrain sur ce pôle d'échange. Elle a ainsi pu constater que la coordination des acteurs locaux autour d'un projet stable, d'une gouvernance identifiée et de financements pérennes permettent de faire progresser l'intermodalité.
Fort de cette expérience, le conseil régional a entendu développer d'autres pôles d'échange, avec le concours financier de l'État et de l'Union européenne. Des structures de ce type ont ainsi été implantées à Aubusson, La Souterraine, Égletons, Tulle, Uzerche, et plus récemment à Brive en 2014. Au total, l'effort financier consenti par le conseil régional dans les pôles d'échange s'élève à 4 millions d'euros.
Si l'intermodalité a été promue par la création de pôles d'échange, elle a également été favorisée avec la mise en service d'une centrale d'information multimodale et de solutions de billettique intégrée.
Le conseil régional a ainsi participé à la création en 2009 de la centrale d'information multimodale « Mobilimousin », qui recense les offres de transport proposées par la région Limousin, les départements de la Corrèze, de la Creuse et de la Haute-Vienne, les agglomérations de Brive, de Limoges et de Tulle, les aéroports de Brive et de Limoges, et la SNCF notamment. Cet outil, disponible sur les terminaux mobiles, propose un calculateur d'itinéraires permettant de comparer différentes solutions de transport pour un même trajet. Une centrale d'appels lui est associée.
Parallèlement à cette centrale d'information, la région a développé des solutions de billettique intégrée avec les principales villes situées sur son territoire. À titre d'illustration, l'offre « Passéo » permet d'utiliser à la fois le réseau de TER, géré par le conseil régional, et les lignes de bus mises en place par les agglomérations de Brive et de Tulle depuis 2011.
Votre rapporteure souligne que l'information multimodale et la billetique intégrée favorisent utilement l'intermodalité, en offrant aux usagers un « guichet unique », par-delà les frontières administratives.
* 28 Conseil régional du Limousin, Schéma régional des infrastructures et des transports, 2009, page 29.
* 29 Le projet, initialement porté par le conseil départemental de la Haute-Vienne, a ensuite été repris et développé par le conseil régional du Limousin.