B. UN DISPOSITIF COMPLÉMENTAIRE AUX AUTRES DISPOSITIFS DE SOUTIEN À L'INVESTISSEMENT OUTRE-MER
Les spécificités du FEI en font un outil complémentaire à la défiscalisation , dont le champ se limite pour l'essentiel aux investissements productifs et dans le secteur du logement, et aux dispositifs budgétaires (contrats de plan et de projet, ligne budgétaire unique et dispositifs budgétaires spécifiques), qui nécessitent une ingénierie lourde et ne sont, de ce fait, pas toujours adaptés aux projets de taille intermédiaire notamment portés par les communes et leurs intercommunalités .
1. La défiscalisation, principal instrument de soutien aux investissements productifs et dans le secteur du logement outre-mer
Les dispositifs de défiscalisation représentent une dépense fiscale de plus de 3,8 milliards d'euros (cf. tableau ci-dessous). Ils constituent, à ce titre, le principal outil de la politique de soutien de l'État aux outre-mer.
Coût des principales dépenses fiscales sur impôts d'État rattachées à la mission « Outre-mer »
(en millions d'euros)
Dispositif |
Base légale |
Impôt concerné |
Chiffrage initial pour 2014 |
Chiffrage actualisé pour 2014 |
Chiffrage actualisé pour 2015 |
Chiffrage pour 2016 |
Taux de TVA minoré |
Art. 296 du code général des impôts (CGI) |
TVA |
1 260 |
1270 |
1 340 |
1 370 |
Défiscalisation des investissements productifs |
Art. 199 undecies B du CGI |
IR |
380 |
310 |
300 |
300 |
Défiscalisation des investissements en matière de logement |
Art. 199 undecies A et 199 undecies D du CGI |
IR |
235 |
220 |
185 |
150 |
Défiscalisation dans le logement social |
Art. 199 undecies C |
IR |
nc |
280 |
205 |
nc |
Réduction du barème de l'impôt sur le revenu |
Art. 197-I-3 du CGI |
IR |
310 |
320 |
380 |
380 |
Défiscalisation des investissements productifs |
Art. 217 undecies et 217 duodecies du CGI |
IS |
190 |
175 |
170 |
nc |
Exonération de certains produits et matières premières ainsi que des produits pétroliers |
Art. 295 du CGI |
TVA |
180 |
195 |
180 |
180 |
TVA dite « non perçue récupérable » |
Art. 295 A du CGI |
TVA |
100 |
100 |
100 |
100 |
Exclusion du champ d'application de la TICPE |
Art. 267 du code des douanes |
TICPE |
800 |
750 |
828 |
866 |
Crédit d'impôt pour les investissements productifs |
Art. 244 quater W du CGI |
IR et IS |
- |
- |
- |
nc |
Crédit d'impôt pour les investissements dans le logement social |
Art. 244 quater X du CGI |
IS |
- |
- |
- |
nc |
Autres dépenses fiscales rattachées à la mission |
475 |
148 |
161 |
524 |
||
Total (en estimant constants, en 2016, le coût des dispositifs non chiffrés) |
3 930 |
3 768 |
3 849 |
3 870 |
Source : documents budgétaires
Les principaux dispositifs de soutien aux investissements productifs et dans le secteur du logement outre-mer sont prévus au sein du code général des impôts, aux articles :
- 199 undecies A (réduction d'impôt sur le revenu due au titre des investissements dans le logement libre et intermédiaire) ;
- 199 undecies B (réduction d'impôt sur le revenu due au titre des investissements productifs) ;
- 199 undecies C (réduction d'impôt sur le revenu due au titre des investissements dans le logement social) ;
- 217 undecies (déduction d'impôt sur les sociétés due au titre des investissements productifs) ;
- 217 duodecies (extension du dispositif de l'article 217 undecies à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises) ;
- 244 quater X (crédit d'impôt en faveur des investissements productifs) ;
- 244 quater W (crédit d'impôt en faveur du logement social).
En 2015, la dépense fiscale en faveur des investissements productifs et dans le secteur du logement outre-mer s'est élevée à près de 860 millions d'euros .
Si la défiscalisation apparaît indispensable au développement économique des outre-mer, son champ est cependant circonscrit aux investissements productifs et dans le secteur du logement, à l'exclusion des investissements collectifs réalisés par les collectivités ultramarines .
2. Les dotations spécifiques de l'État et les fonds structurels européens
a) Un soutien budgétaire de l'État aux investissements outre-mer significatif
Le soutien de l'État aux investissements outre-mer concerne principalement les opérations dans le logement social, les opérations contractualisées et le financement d'actions hors opérations contractuelles en matière d'investissements structurants. Dans le secteur du logement social, la ligne budgétaire unique constitue le principal instrument d'intervention de l'État. Cette dotation permet le financement d'opérations de construction et d'amélioration de logements, et de résorption de l'habitat insalubre. En 2016, la ligne budgétaire unique est dotée de 247,6 millions d'euros en AE et de 234,7 millions d'euros en CP. |
Les opérations contractualisées (contrats de plan État-régions, contrats de développement) concernent quant à elles, d'une part, la nouvelle génération de contrats de plan État-régions pour la période 2015-2020 avec les départements d'outre-mer et, d'autre part, les contrats de projets et de développement avec les autres collectivités (Saint-Pierre-et-Miquelon, Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis-et-Futuna et Saint-Martin).
Les contrats de plan État-Région et les contrats de projets et de développement La nouvelle génération de contrats de plan État-Région 2015-2020 vise à financer des opérations intervenant dans six domaines : 1. les infrastructures et services collectifs de base, la lutte contre la vulnérabilité des territoires et populations ; 2. l'aménagement urbain durable ; 3. la gestion des ressources énergétiques et environnementales ; 4. le développement de la recherche et de l'innovation, les filières d'excellence ; 5. la cohésion sociale et l'employabilité ; 6. le développement économique durable. Dans les ROM, ces thématiques sont déclinées en trois objectifs stratégiques : - améliorer les conditions de vie des habitants (aménagement urbain, cohésion sociale, infrastructures et services collectifs de base, préventions des risques) ; - renforcer la compétitivité des économies ultramarines (cohésion sociale et employabilité, développement économique durable) ; - aider les territoires à préparer l'avenir (gestion des ressources énergétiques et environnementales, développement de la recherche et de l'innovation, filières d'excellence). Les contrats de développement passés avec les collectivités d'outre-mer et la Nouvelle-Calédonie concernent : - pour Saint-Pierre-et-Miquelon, le développement économique et social ainsi que l'amélioration des infrastructures et du cadre de vie de la population ; - pour Saint-Martin, l'amélioration du cadre de vie, la cohésion sociale, le financement d'infrastructures favorisant le développement économique ainsi que la promotion et la conservation du patrimoine touristique, naturel et culturel ; - pour la Nouvelle-Calédonie, l'accès au logement, le développement des services à la personne, le désenclavement des populations, et le financement d'équipements de base (assainissement et gestion des déchets, accès aux soins) ; - pour Wallis-et-Futuna, des investissements dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'emploi, du sport et de la culture ainsi que de l'aménagement durable et de l'environnement. Enfin, le contrat de projets en Polynésie française signé le 9 mars 2015 permettra, d'une part, le financement des projets relevant des compétences de la collectivité et, d'autre part, l'appui aux investissements communaux (eau potable, déchets, eaux usées). |
b) Les fonds structurels européens, une source de financement importante des investissements publics en outre-mer
Les investissements publics réalisés dans les départements et régions d'outre-mer peuvent bénéficier des aides du fonds européen de développement économique et régional (FEDER), qui concentre ses interventions sur la recherche, l'innovation, les infrastructures dont les transports, le développement économique, l'aide aux PME, la prévention des risques, les investissements liés à l'énergie, les investissements culturels, l'environnement y compris les investissements liés à l'eau et au traitement des eaux usées, la gestion des déchets, la promotion de la biodiversité.
Au titre de la programmation 2014 -2020, les DROM et Saint-Martin bénéficieront de près de 2,5 milliards d'euros d'aides du FEDER , selon la répartition figurant ci-dessous.
Programmation 2014-2020 du FEDER
FEDER |
|
Guadeloupe |
490 535 502 |
Guyane |
317 814 471 |
Martinique |
418 395 431 |
Mayotte |
139 940 534 |
Réunion |
1 062 628 697 |
Saint-Martin |
36 498 002 |
Total |
2 465 812 637 |
Source : réponse au questionnaire budgétaire
3. Un dispositif particulièrement adapté aux investissements de moyenne ampleur réalisés par les communes
Bien qu'indispensables au rattrapage économique et social des outre-mer, ces dispositifs de soutien nationaux et européens à disposition des collectivités ultramarines ne sont pas toujours adaptés aux projets de de moyenne ampleur notamment portés par les plus petites d'entre elles . Ainsi, dans son rapport de 2012, l'inspection générale de l'administration rappelait très justement que les communes ultramarines « ne sont pas, sauf exceptions, suffisamment dotées en agents d'encadrement. Il en résulte un déficit d'expertise et de pilotage qui nuit à la mise en oeuvre des dispositifs d'aide et nécessite un engagement plus fort des services de l'État ». S'agissant des champs d'intervention des fonds européens et des opérations contractualisées, la mission rappelait que « les priorités attribuées au FEI ne représentent qu'une part minoritaire des programmations FEDER et CPER pour les DROM : les questions de l'eau, d'assainissement et de déchets représentent 16 % des crédits FEDER et 27 % des crédits État du CPER ; les infrastructures scolaires, sanitaires et sociales comptent pour 11 % du FEDER et 17 % du CPER ». Il convient en outre de rappeler qu'en tant que pays et territoires d'outre-mer (PTOM), les collectivités d'outre-mer (COM) ne bénéficient pas des aides du FEDER.
La mission d'audit en concluait que « la création du fonds exceptionnel d'investissement constitue une réponse partielle à ces difficultés ».
Au total, vos rapporteurs spéciaux constatent que le FEI a en effet permis de financer des opérations de moyenne ampleur principalement portées par les communes 7 ( * ) . Entre 2009 et 2014, le montant moyen des opérations financées s'est ainsi élevé à 2,26 millions d'euros. Par ailleurs, 41 % des projets financés avaient un coût total inférieur à 1 million d'euros et ce montant était supérieur à 5 millions d'euros pour 10 % d'entre eux seulement .
* 7 Les projets portés par les communes et leurs EPCI ont représenté plus de 68 % des opérations financées entre 2009 et 2014 (hors plan de relance).