- L'ESSENTIEL
- LES RECOMMANDATIONS DES RAPPORTEURS
SPÉCIAUX
- I. LE CENTRE DE CRISE ET DE SOUTIEN CONSTITUE UN
SERVICE ESSENTIEL À LA GESTION DES CRISES INTERNATIONALES
- II. DANS UN CONTEXTE DE MULTIPLICATION DES CRISES
INTERNATIONALES, LE CDCS A BÉNÉFICIÉ D'UNE PROGRESSION
CONTINUE DE SES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS
- A. EN LARGE HAUSSE DEPUIS 2017, LE FINANCEMENT DU
CDCS PARAÎT POUR LE MOINS ÉPARPILLÉ
- B. UNE POLITIQUE DE RESSOURCES HUMAINES DYNAMIQUE,
AU SEIN D'UN SERVICE QUI SE DISTINGUE PAR LA DIVERSITÉ DES PROFILS
RECRUTÉS
- A. EN LARGE HAUSSE DEPUIS 2017, LE FINANCEMENT DU
CDCS PARAÎT POUR LE MOINS ÉPARPILLÉ
- III. CONFRONTÉ À UNE EXTENSION
CONTINUE DE SES COMPÉTENCES ET DE SES MOYENS, LE CENTRE DE CRISE ET DE
SOUTIEN DOIT VEILLER À CONSERVER SA SPÉCIFICITÉ
- A. SI LES CIRCONSTANCES EXCEPTIONNELLES
CONTRAIGNENT SES DÉPENSES, LE FINANCEMENT DES OPÉRATIONS DU CDCS
DOIT ÊTRE CLARIFIÉ
- B. LES EFFORTS DE PRÉVENTION À
L'ÉGARD DU PUBLIC ET DE VALORISATION DU MODÈLE DU CENTRE DE CRISE
ET DE SOUTIEN DOIVENT ÊTRE RENFORCÉS
- C. L'ÉTENDUE DE LA MISSION D'AIDE
HUMANITAIRE ET DE STABILISATION DU CDCS PEUT ÊTRE INTERROGÉE
- 1. Si la remise en cause de la dualité
fonctionnelle du service ne paraît pas opportune, la centralisation de
l'ensemble de l'aide humanitaire de la France par le CDCS doit être
écartée
- 2. En tout état de cause, dans un contexte
de forte augmentation de l'aide humanitaire, les objectifs portés par le
FUHS mériteraient d'être précisés
- 1. Si la remise en cause de la dualité
fonctionnelle du service ne paraît pas opportune, la centralisation de
l'ensemble de l'aide humanitaire de la France par le CDCS doit être
écartée
- A. SI LES CIRCONSTANCES EXCEPTIONNELLES
CONTRAIGNENT SES DÉPENSES, LE FINANCEMENT DES OPÉRATIONS DU CDCS
DOIT ÊTRE CLARIFIÉ
- I. LE CENTRE DE CRISE ET DE SOUTIEN CONSTITUE UN
SERVICE ESSENTIEL À LA GESTION DES CRISES INTERNATIONALES
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- LISTE DES DÉPLACEMENTS
- TABLEAU DE MISE EN oeUVRE ET DE SUIVI
N° 154
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025
Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 novembre 2024
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des finances (1) sur les missions et moyens du centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des affaires étrangères,
Par Mme Nathalie GOULET et M. Rémi FÉRAUD,
Sénateurs
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, MM. Vincent Capo-Canellas, Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Jean-Baptiste Olivier, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.
L'ESSENTIEL
La commission des finances a examiné, le mercredi 20 novembre 2024, le rapport de Mme Nathalie Goulet et M. Rémi Féraud, rapporteurs spéciaux de la mission « Action extérieure de l'État », sur les missions et moyens du centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des affaires étrangères.
I. LE « COUTEAU SUISSE » DU QUAI D'ORSAY FACE AUX SITUATIONS DE CRISE
A. UN SERVICE DONT L'ORGANISATION EST ADAPTÉE À SA DOUBLE COMPÉTENCE
Le centre de crise et de soutien (CDCS) est né de la double volonté de professionnaliser les capacités d'urgence du Quai d'Orsay et de s'inspirer des méthodes de l'humanitaire. Si la création d'une première cellule de gestion de crises au ministère remonte à 1985, le centre de crise est organisé en 2008, sous l'impulsion du ministre des affaires étrangères et européennes Bernard Kouchner.
Ce service est chargé de la veille, de l'anticipation, de l'alerte et de la gestion des crises se déroulant à l'étranger et nécessitant, soit une réaction à un événement menaçant la sécurité des ressortissants français à l'étranger, soit une action humanitaire d'urgence1(*). À partir de 2015, il reçoit également une mission relative à la stabilisation.
L'organisation du CDCS reflète sa double compétence de gestion des crises consulaires et des crises humanitaires. Il se décompose ainsi entre trois pôles principaux correspondant aux missions du service :
- le centre de situation, chargé de la sécurité des Français à l'étranger et de la mise en oeuvre des réponses de première urgence face aux crises sécuritaires ;
- le centre des opérations d'urgence, chargé de la planification et de la réponse aux crises consulaires, de la préparation à la gestion de crise des agents de l'administration centrale et des postes diplomatiques et consulaires, de l'activation des cellules de crise ainsi que du suivi des affaires individuelles sensibles à l'étranger ;
- le centre des opérations humanitaires et de stabilisation (COHS), qui constitue le service de réponse humanitaire d'urgence de l'État.
B. UNE MISSION DE PROTECTION DES RESSORTISSANTS FRANÇAIS À L'ÉTRANGER
Tout d'abord, le CDCS assure des fonctions de veille et d'alerte et de préparation de la réponse aux crises. Le centre opère une activité de veille sur les évènements sécuritaires à l'étranger qui excède le seul champ politique et concerne également les risques naturels et épidémiologiques. Il est aussi chargé de la formation des postes diplomatiques aux situations de crise.
Dans le cadre de cette mission de veille, deux outils essentiels sont destinés aux usagers : la carte « Conseils aux voyageurs » comprenant 191 fiches pays (consultée 26,5 millions de fois au cours de l'année 2023) et le service « Fil d'Ariane » qui permet aux usagers de déclarer leurs déplacements à l'étranger.
Ensuite, le centre opère la gestion des situations individuelles les plus sensibles. Cette mission, menée par le centre des opérations d'urgence, regroupe le suivi des morts violentes ou survenues dans des conditions suspectes, des disparitions inquiétantes, des enlèvements de Français à l'étranger ou des situations d'« otages d'État ».
Enfin, lors de la survenance de crises consulaires, le centre des opérations d'urgence a la capacité d'ouvrir une cellule de crise.
Elle permet au centre de coordonner l'action du MEAE et, dans une optique interministérielle, d'assurer un chef-de-filât dans la conduite de la crise.
En particulier, le CDCS assure la conduite des opérations pour la partie civile des moyens engagés, lors de l'organisation d'opérations d'évacuation de ressortissants (RESEVAC).
Organisation d'une cellule de crise du CDCS
Source : commission des finances d'après le rapport d'activité 2023 du CDCS
C. UNE MISSION, PLUS RÉCENTE, D'ACTION HUMANITAIRE ET DE STABILISATION
Concernant les questions d'action humanitaire et de stabilisation, la mission du CDCS est double.
En premier lieu, il constitue l'unique service de réponse humanitaire d'urgence de l'État. Pour cette raison, il pilote la gestion des crises humanitaires et l'organisation des opérations d'urgence. D'un point de vue opérationnel, l'action du CDCS se décline entre :
- d'une part, la fourniture et l'acheminement de biens humanitaires et de services (nourriture, médicaments, transport, etc..) ;
- d'autre part, par le déploiement d'équipes du CDCS en zone de crise ou l'organisation d'opérations d'évacuation sanitaire.
À cette aide en nature s'ajoutent les financements apportés par le CDCS aux organisations de la société civile au titre du fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation (FUHS).
En second lieu, il coordonne l'aide humanitaire de la France au sein du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Le CDCS anime ainsi la Task Force humanitaire créée en 2023 pour assurer la cohérence des différents vecteurs de l'aide humanitaire française. De même, le centre de crise et de soutien a été chargé de la réalisation de la nouvelle stratégie humanitaire de la France pour les années 2023 à 20272(*).
Ce chef-de-filât en matière d'aide humanitaire se traduit également par les partenariats développés par le CDCS avec la société civile, le secteur privé, au travers d'un fonds de concours et de partenariats avec des fondations d'entreprises, et avec les organisations internationales et les États étrangers.
Les cinq premières ONG
bénéficiaires de versements au titre du FUHS
sur la
période 2011-2022
(en millions d'euros)
Principales ONG bénéficiaires de
subventions |
Montants |
Solidarités International |
57,5 millions d'euros |
ACTED |
37,8 millions d'euros |
Première Urgence Internationale |
35,6 millions d'euros |
Humanité & Inclusion |
25,5 millions d'euros |
CARE France |
24 millions d'euros |
Source : commission des finances
II. DANS UN CONTEXTE DE MULTIPLICATION DES CRISES, LE CENTRE A BÉNÉFICIÉ, JUSQU'EN 2025, D'UNE FORTE AUGMENTATION DE SES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS
A. DES MOYENS BUDGÉTAIRES EN HAUSSE MAIS PEU LISIBLES SUR LE BUDGET DE L'ÉTAT
Le centre de crise dispose d'enveloppes dédiées au sein des missions « Action extérieure de l'État » et « Aide publique au développement ».
En premier lieu, le CDCS bénéficie, sur les crédits du programme 105 de la mission AEE, d'une enveloppe spécifique permettant de financer ses dépenses de fonctionnement, d'une part, et les opérations de protection des ressortissants, d'autre part.
Cette dotation budgétaire se décompose entre un montant de base, correspondant aux dépenses de fonctionnement du service, et d'une ligne de crédits relative à la gestion de crise, qui peut être réabondée en cours d'année en fonction des besoins.
Évolution de l'enveloppe du CDCS au sein du
programme 105,
en distinguant dépenses de fonctionnement et
dépenses de crise
entre 2017 et 2025
(en millions d'euros et en AE=CP)
Note n° 1 : le montant plus élevé de l'enveloppe du CDCS pour l'exercice 2017 s'expliquait par une dotation additionnelle de 1,63 million d'euros afin de répondre aux enjeux de sécurité de la communauté française à l'étranger, dans un contexte de menace terroriste renforcée.
Note n° 2 : pour l'exercice 2021, aucune ligne de crédits relative à la gestion de crise n'a été prévue dans la loi de finances initiale.
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Depuis 2013, date la plus antérieure des données transmises, la dotation du centre de crise et de soutien est en forte hausse. Entre 2013 et 2024, l'enveloppe du CDCS est en effet passée de 1,89 millions d'euros d'AE=CP à 5,15 millions d'euros en 2024, soit une multiplication par 2,7 des crédits alloués à ce service. De manière assez notable, le centre de crise et de soutien s'est trouvé préservé des différentes revues de dépenses et programmes d'économies ayant concerné le ministère de l'Europe et des affaires étrangères depuis 2008.
L'enveloppe dédiée au CDCS se caractérise par une surexécution constante des crédits. Pourtant, les moyens de la réserve de crise, à l'exception de l'exercice 2021, ont connu une progression constante.
Les moyens de gestion de crise du service sont sous-budgétisés.
Cette sous-estimation conduit, en cours d'exercice, à des redéploiements de crédits pour compenser la hausse parfois massive des dépenses liées aux opérations de protection de nos ressortissants.
Exécution de la dotation du centre de crise et de soutien entre 2019 et 2023
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
En second lieu, la mission d'aide humanitaire et de stabilisation repose sur un financement issu du programme 209 de la mission « Aide publique au développement » : le fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation (FUHS).
Cette enveloppe budgétaire constitue l'instrument de réaction rapide du ministère de l'Europe et des affaires étrangères face aux crises humanitaires. Il forme, avec l'aide alimentaire programmée (AAP), les contributions volontaires aux Nations unies et le fonds Minka, l'un des canaux de financement de l'aide humanitaire de la France.
Doté de 200 millions d'euros en AE=CP dans la loi de finances initiale pour 2024, le FUHS permet de financer deux types d'actions : la mise en oeuvre d'actions d'aide humanitaire (71,5 % des crédits exécutés en 2023) et le soutien à des actions de stabilisation (28,5 % des crédits exécutés).
En complément de l'enveloppe allouée au CDCS au sein du programme 105 et du FUHS du programme 209, le financement des opérations d'urgence du CDCS peut s'appuyer sur des crédits issus d'autres missions du budget de l'État. Le ministère de l'intérieur et le ministère des armées sont particulièrement concernés du fait de leur participation aux opérations d'évacuation ou d'assistance humanitaire.
B. LES OPÉRATIONS DU CENTRE PEUVENT ÊTRE FINANCÉES, A POSTERIORI, PAR DES FONDS EUROPÉENS
Dans la mise en oeuvre de sa mission de protection consulaire comme d'aide humanitaire, le CDCS peut recourir au mécanisme de protection civile de l'Union européenne (MPCU).
Dans sa dimension financière, le MPCU permet la prise en charge partielle des frais de transport et d'opérations comme lors de la mobilisation de matériel et de personnel déployés sur les lieux d'une crise humanitaire ou d'une catastrophe naturelle3(*). Le MPCU peut prendre en charge 75 % des frais engagés, les 25 % restants demeurent à la charge de l'État membre.
Exemples de recours au mécanisme de
protection civile de l'Union européenne
lors de crises
consulaires
Contexte |
Nature de l'opération |
Date |
Coût total |
Montant pris en charge |
Pandémie de Covid |
Rapatriement de 370 000 ressortissants français |
2020 |
29 375 119 euros |
533 283 euros |
Éthiopie |
Évacuation d'environ 260 personnes (240 Français et ayants-droits et une vingtaine de ressortissants européens) |
2021 |
342 305 euros |
211 274 euros |
Niger |
Évacuation des ressortissants |
2023 |
2 747 163 euros |
2 060 372 euros |
Soudan |
Évacuation des ressortissants |
2023 |
839 000 euros |
329 858 euros |
Israël |
Évacuation des ressortissants |
2023 |
7 600 000 euros |
225 000 euros |
Note : s'agissant des opérations d'évacuation de ressortissants d'Israël, la demande de remboursement à la Commission européenne est en cours de traitement.
Source : commission des finances d'après les données transmises par le CDCS
C. UNE POLITIQUE DE RESSOURCES HUMAINES DYNAMIQUE, MARQUÉE PAR UNE DIVERSITÉ DES PROFILS
Disposant d'une trentaine d'agents lors de sa création en 2008, le centre de crise et de soutien a vu ses effectifs largement augmenter depuis. Le service comptait 104 agents en 2024, contre 54 en 2013, soit un quasi doublement en une décennie.
La spécificité des missions du CDCS et la nature de ce service dédié à l'urgence ont conduit à une diversification des profils recrutés. Trois pôles additionnels sont constitués au sein du centre et ont vu leurs effectifs progresser : un pôle médical, une unité de gestion administrative et de soutien, ainsi qu'un pôle dédié aux affaires financières au sein du COHS.
III. IL IMPORTE DE CONSERVER LA SPÉCIFICITÉ DU CENTRE DE CRISE ET DE SOUTIEN, CONFRONTÉ À UNE EXTENSION CONTINUE DE SES COMPÉTENCES ET MOYENS
A. UN FINANCEMENT QUI DEVRA ÊTRE CLARIFIÉ
D'une part, l'enveloppe budgétaire du CDCS doit être plus réaliste au niveau de la budgétisation et faire l'objet d'une clarification de ses canaux de financement au stade de l'exécution. Sur le programme 105, il paraît nécessaire de prévoir au stade de l'examen du projet de loi de finances de l'année, une prévision plus réaliste du montant des dépenses de gestion de crise. De plus, au stade de l'exécution, le montant et la nature des refacturations opérés par d'autres départements ministériels au CDCS devraient davantage détaillés dans les documents budgétaires.
D'autre part, au niveau européen, une plus grande efficacité de la solidarité financière doit être recherchée.
Le principe de solidarité des opérations d'évacuation conduit à des comportements non-coopératifs de la part d'États-membres de l'Union européenne. Cette tentation du passager clandestin est d'autant plus importante en raison de l'image d'excellence du centre de crise et de soutien, d'une part, et du fait que la France assure le rôle d'« État pilote » dans un grand nombre d'États tiers, d'autre part.
De plus, les versements de l'assistance financière du mécanisme de protection civile de l'Union européenne sont sujets à des retards depuis les dernières années.
B. UN BESOIN DE PRÉVENTION À L'ÉGARD DU PUBLIC ET UNE OPPORTUNITÉ DE VALORISATION DU MODÈLE DU CDCS
Deux obstacles persistants contribuent à limiter l'efficacité de la mission de protection des ressortissants opérée par le CDCS : une trop faible utilisation du service « Fil d'Ariane » par les ressortissants lors de leurs déplacements et la faible mise en oeuvre du registre des Français à l'étranger.
Par ailleurs, la spécificité du modèle du CDCS, fondé sur le cumul des fonctions de protection consulaire et d'aide humanitaire, devrait être davantage valorisé auprès de nos partenaires étrangers afin d'« exporter » ce succès de la diplomatie française.
C. UNE MISSION D'AIDE HUMANITAIRE ET DE STABILISATION QUI INTERROGE
La remise en cause de la dualité fonctionnelle du service ne paraît pas opportune.
La distinction entre crises consulaires et crises humanitaires est complexe à opérer en pratique. Une même crise peut induire des menaces sur des ressortissants français et nécessiter une intervention de la France au soutien de populations vulnérables.
Pour autant, la centralisation de l'ensemble de l'aide humanitaire de la France par le CDCS doit être écartée. Si le rôle d'animation et de pilotage confié au CDCS est bienvenu pour améliorer l'articulation entre les différents guichets d'aide humanitaire, l'optique d'une centralisation des moyens au sein du centre ne paraît pas souhaitable. Elle contribuerait en effet à rigidifier les procédures d'attribution et de déploiement des financements et renforcerait les besoins en ressources humaines du centre.
En tout état de cause, dans un contexte de forte augmentation de l'aide humanitaire, les objectifs portés par le FUHS doivent être précisés. Cet outil ne dispose en effet d'aucun mandat formalisé à ce jour.
LES RECOMMANDATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX
Recommandation n° 1 : À l'occasion de la préparation annuelle de la loi de finances, prévoir une budgétisation plus réaliste des dépenses de gestion de crise du CDCS. Au stade de l'exécution, préciser l'ensemble des remboursements perçus et dues par le CDCS au titre de ses opérations (Ministère de l'Europe et des affaires étrangères, CDCS).
Recommandation n° 2 : Encourager la réduction des délais de remboursement des dépenses éligibles au mécanisme de protection civile de l'Union européenne (CDCS, Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne).
Recommandation n° 3 : Poursuivre les efforts de prévention à l'égard du public, notamment en s'appuyant sur les élus des Français de l'étranger, en encourageant l'inscription consulaire au registre des Français établis hors de France et le recours au Fil d'Ariane (MEAE, CDCS).
Recommandation n° 4 : Valoriser le modèle du CDCS, par des actions de formation destinées aux services étrangers et par une traduction des « Conseils aux voyageurs » en anglais (MEAE, CDCS).
Recommandation n° 5 : Clarifier le mandat et les objectifs du fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation, en lien avec les autres instruments de l'aide humanitaire de la France (CDCS, MEAE).
I. LE CENTRE DE CRISE ET DE SOUTIEN CONSTITUE UN SERVICE ESSENTIEL À LA GESTION DES CRISES INTERNATIONALES
A. LA DUALITÉ FONCTIONNELLE DU CDCS, UNE SPÉCIFICITÉ HISTORIQUE QUI SE REFLÈTE DANS SON ORGANISATION
1. Un service né de la double volonté de professionnaliser les capacités d'urgence du Quai d'Orsay et de s'inspirer des méthodes de l'humanitaire
La création d'une structure dédiée à la gestion de crises au sein du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) remonte à 1985 et à l'installation de la cellule d'urgence au sein du Quai d'Orsay. Les missions de ce service sont toutefois cantonnées au suivi des situations de crises internationales4(*).
En parallèle, un service de l'action humanitaire (SAH) est créé en 1993. Il constitue la traduction institutionnelle et opérationnelle d'un investissement croissant du ministère chargé des affaires étrangères dans le domaine de l'action humanitaire. La nomination en 1988 d'un secrétaire d'État chargé de l'action humanitaire, Bernard Kouchner, placé auprès du Premier ministre, avait initié un rapprochement entre le ministère des affaires étrangères et les sujets humanitaires. La présence de Bernard Kouchner, personnalité issue de la société civile et reconnue sur ces thématiques, dans plusieurs gouvernements successifs (comme secrétaire d'État chargé de l'action humanitaire de 1988 à 1992, ministre de la santé et de l'action humanitaire de 1992 à 1993, secrétaire d'État à la santé de 1997 à 1999, ministre délégué à la santé de 2001 à 2002 et ministre des affaires étrangères et européennes de 2007 à 2010), a été déterminante dans la structuration progressive des capacités de gestion de crise du Quai d'Orsay.
La naissance d'une structure dualiste, cumulant les missions d'une cellule de crise avec celles d'un service dédié aux urgences humanitaires, est concrétisée en 2002 avec l'intégration au sein d'une délégation à l'action humanitaire (DAH) de la cellule d'urgence et du service de l'action humanitaire. En juillet 2008, sous l'impulsion du ministre des affaires étrangères et européennes Bernard Kouchner, est créé le centre de crise (CDC), qui vient se substituer à ce service. Ce centre répond à la volonté du ministère de professionnaliser la réponse aux crises internationales et d'améliorer ses délais de réponse, en application des orientations fixées par le Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France5(*). La première opération de grande envergure menée par le centre a été la réponse au séisme de 2010 à Haïti.
Les missions du centre de crise sont fixées au IV de l'article 3 du décret n° 2012-1511 du 28 décembre 2012 portant organisation de l'administration centrale du ministère des affaires étrangères : « Le centre de crise et de soutien est chargé de la veille, de l'anticipation, de l'alerte et de la gestion des crises se déroulant à l'étranger et nécessitant soit une réaction à un événement menaçant la sécurité des ressortissants français à l'étranger, soit une action humanitaire d'urgence. Il est également chargé du soutien à la stabilisation post-crise.
« Il est compétent à l'égard de la sécurité des Français établis ou de passage à l'étranger. Il traite notamment les questions relatives aux décès, aux disparitions inquiétantes et aux prises en otage de Français à l'étranger.
« Il coordonne l'action des départements ministériels en matière de sécurité des Français à l'étranger ainsi que la réponse de l'État pour les opérations d'aide humanitaire d'urgence et de soutien à la stabilisation décidées par le Gouvernement. Dans les domaines de sa compétence, il assure les relations avec les autres acteurs de l'aide humanitaire internationale et la mobilisation de partenariats avec la société civile, les collectivités territoriales et les entreprises.
« Il participe à l'élaboration et à la mise en oeuvre de la politique du Gouvernement en matière d'action humanitaire d'urgence et d'appui à la reconstruction »6(*).
Sa dénomination a été modifiée en 2015 pour devenir le centre de crise et de soutien (CDCS)7(*), afin de formaliser l'adjonction de la mission de stabilisation à ses compétences, effective dès 2014. La mission de stabilisation vise à « rétablir les conditions de viabilité minimales d'un État et de répondre aux besoins essentiels des populations »8(*). Elle s'insère entre la phase d'urgence et le basculement vers des actions d'aide au développement.
Depuis 2015, le CDCS assure également la direction de la cellule interministérielle d'aide aux victimes, dans l'hypothèse d'attaque terroriste sur le territoire français.
Conformément au schéma d'organisation gouvernementale pour la gestion de crise9(*), le CDCS assure la coordination sur les crises extérieures10(*). En cas de crise internationale, le CDCS organise régulièrement, en planification ou en conduite de crise, des réunions interministérielles associant les différents ministères concernés. Le CDCS participe aux cellules interministérielles de crise (CIC) aux côtés du cabinet du ministre des affaires étrangères.
2. Une organisation reflétant la dualité fonctionnelle du service et sa vocation de gestion de crise
L'organigramme du centre de crise et de soutien constitue la traduction organisationnelle de la dualité de mission de ce service. Le CDCS se décompose ainsi entre trois pôles principaux correspondant aux missions du service.
Premièrement, le centre de situation est chargé de la sécurité des Français à l'étranger et de la mise en oeuvre des réponses de première urgence face aux crises sécuritaires. Son action se décompose entre :
- une activité de veille et d'alerte informationnelle sur les facteurs potentiels de crise, d'une part, et de réponse au public et aux postes diplomatiques 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, d'autre part ;
- la réalisation d'une permanence et de missions pour le compte du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et des postes diplomatiques. Il s'agit en particulier de la réponse aux urgences protocolaires et consulaires comme les autorisations de survol ;
- une activité de planification, par un appui aux postes diplomatiques dans la préparation et la mise à jour de leurs plans de sécurité des communautés françaises à l'étranger. Les agents du centre de situation peuvent, dans cette perspective, opérer des missions sur place ;
- une mission de cartographie pour l'information du public et la conduite des opérations du CDCS sur le terrain ;
- l'animation du réseau de partenaires du CDCS (entreprises, opérateurs et organisations de la société civile) sur les thématiques de sécurité des ressortissants à l'étranger.
Organigramme du centre de crise et de soutien
Source : rapport d'activité 2023 du centre de crise et de soutien
Deuxièmement, le centre des opérations d'urgence est chargé de la planification et de la réponse aux crises consulaires, de la préparation à la gestion de crise des agents de l'administration centrale et des postes diplomatiques et consulaires, de l'activation des cellules de crise ainsi que du suivi des affaires individuelles sensibles à l'étranger.
Les agents du centre des opérations d'urgence peuvent, lors de la survenance d'une crise consulaire majeure, renforcer les équipes des postes diplomatiques et consulaires concernés. En fonction de la nature de la crise (naturelle ou politique), ces agents peuvent être renforcés par des personnels spécialistes issus d'autres ministères comme des psychologues de la cellule d'urgence médico-psychologique (CUMP), des équipes de la gendarmerie nationale, de la police nationale ou des agents de la sécurité civile.
Troisièmement, le centre des opérations humanitaires et de stabilisation (COHS) constitue le service de réponse humanitaire d'urgence de l'État. Pour ce faire, le COHS assure :
- le pilotage et la gestion des crises humanitaires, par la définition des besoins et par des interventions au soutien des populations, soit par une aide bilatérale directe soit par des subventions à des organismes de la société civile ;
- la coordination entre le CDCS et les administrations (ministère des armées, ministère de l'intérieur, ministère de la santé) et les opérateurs (Agence française de développement, Expertise France) susceptibles d'intervenir au cours de la crise. Cette coordination intervient également avec les autres États bailleurs et la Commission européenne, notamment au travers de la direction générale pour la protection civile et les opérations d'aide humanitaire européennes, dite ECHO11(*).
Initialement désignée comme la mission pour l'action humanitaire, le COHS a intégré en 2019 la mission pour la stabilisation. Cette dernière, créée au sein de la direction générale de la mondialisation et rattachée au CDCS en 2014, était chargée de l'accompagnement des premières étapes de sortie de crises. Son intégration au centre de crise puis sa fusion avec la mission pour l'action humanitaire traduit la centralisation des capacités de suivi crise/post-crise au sein du CDCS.
Par ailleurs, le positionnement administratif du CDCS au sein du MEAE reflète également la souplesse de ses méthodes d'intervention et de décision. Le centre de crise est en effet directement rattaché au cabinet du ministre. Cette proximité dans l'organigramme du ministère se retrouve dans le positionnement géographique du service. Ce dernier est opportunément contigu aux locaux du cabinet du ministre chargé des affaires étrangères. Loin d'être anecdotique, cette proximité physique permet un accès facilité des différentes parties prenantes aux réunions des cellule de crise.
B. LA MISSION DE PROTECTION DES RESSORTISSANTS FRANÇAIS À L'ÉTRANGER
1. Les fonctions de veille et d'alerte et de préparation de la réponse aux crises
La mission de protection des ressortissants français à l'étranger s'articule autour de quatre grands axes, partagés entre le centre de situation et le centre des opérations d'urgence, et reposant sur une série d'outils spécifiques au CDCS.
En amont de la survenance d'une crise, trois grandes orientations structurent la mission de protection des ressortissants assurée par le CDCS. Elles relèvent essentiellement, comme indiquée supra, du centre de situation.
Tout d'abord, le centre opère une activité de veille et d'alerte sur les évènements sécuritaires à l'étranger. Au sein du centre de situation, une unité de 17 veilleurs assure cette mission 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Pour ce faire, elle s'appuie à la fois sur des sources ouvertes d'information et sur des canaux confidentiels (médias, First Alert, Crisis 24, notes des postes et des services extérieurs à destination du ministère, etc). La veille excède le seul champ politique et concerne également les risques naturels et épidémiologiques. En parallèle de cette veille, une unité d'analyse et de planification, composée de six rédacteurs répartis en zones géographiques, assure une mission de prospective et d'anticipation de la menace sur les zones à risques.
Cette activité de veille comprend également une permanence téléphonique accessible au public 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Au cours de la crise sanitaire, entre 2020 et 2021, le centre d'appels du CDCS a été particulièrement sollicité avec un pic d'activité proche de 28 000 appels téléphoniques en 2020.
Nombre de recours au centre d'appel téléphonique du CDCS entre 2019 et 2023, hors cellule de crise
Source : commission des finances
Ensuite, le centre assure une analyse des risques et une préparation de la réponse aux crises. Cette mission repose principalement sur le suivi des plans de sécurité des communautés françaises à l'étranger, en coordination avec les postes diplomatiques et consulaires. En 2023, le CDCS assurait le suivi de 224 plans de sécurité. Le centre de crise et de soutien opère une analyse des risques et des moyens nécessaires pour assurer la sécurité des ressortissants dans le pays concerné. Il a également la responsabilité d'équiper en réseaux radios et téléphones satellitaires sécurisés les postes dans le cadre de leur plan de sécurité mais également d'en assurer la maintenance, la modernisation et l'extension. Le réseau entretenu par le centre regroupe 1 125 lignes téléphoniques satellitaires actives12(*) et 104 stations radios13(*). Dans les pays les plus exposés aux risques, le CDCS organise l'installation de stocks de médicaments, matériels et biens de première nécessité. La préparation des plans de sécurité comporte également une dimension de formation des agents ainsi qu'une mission d'audit des plans de sécurité14(*).
L'analyse des risques et la préparation aux crises comprennent, en outre, une activité de cartographie. Le centre de crise a, dans ce but, internalisé des compétences spécifiques en se dotant d'un service dédié. Ce service de cartographie assure à la fois une information au public, par la réalisation et l'actualisation de la carte « Conseils aux voyageurs » consultable sur le site du MEAE, une aide à la décision aux autorités politiques par la transmission de cartes de situation en période crise à destination des autorités politiques et un soutien aux opérations sur le terrain par la préparation de cartes d'état-major. Ces dernières s'intègrent dans les plans de sécurité des postes diplomatiques et servent aux équipes de terrain du CDCS lors de la survenance de crise.
Deux outils essentiels, à destination des usagers, permettent au CDCS d'assurer sa mission de protection des ressortissants.
D'une part, la carte « Conseils aux voyageurs », précitée constitue l'activité la plus visible du CDCS pour les usagers, en particulier dans la préparation de leurs déplacements à l'étranger. La carte se décompose en 191 fiches pays et une dizaine de fiches thématiques. Ces pages conseils ont été consultées environ 26,5 millions de fois au cours de l'année 2023. De plus, la page « conseils aux voyageurs » du site internet du MEAE comporte des alertes « dernières minutes » en cas d'évènements graves susceptibles d'affecter la sécurité des Français à l'étranger. La fréquence des actualisations des pages conseils varie selon la survenance d'évènements pouvant affecter la sécurité de nos ressortissants. En 2023, le CDCS a procédé à 2 068 modifications de fiches dont 1 164 alertes « dernières minutes », soit six modifications en moyenne par jour. L'élaboration des fiches « Conseils aux voyageurs » fait l'objet, depuis 2011, d'une certification ISO-9001-2015, renouvelée en juin 2023.
D'autre part, le service « Fil d'Ariane » permet aux usagers de déclarer leurs déplacements à l'étranger. Les voyageurs inscrits peuvent ainsi recevoir des alertes par courriel ou messages téléphoniques et des consignes de sécurité si la situation du pays de passage le justifie. Depuis la création de cet outil en 2010, 1 755 294 comptes ont été créés. Parmi eux, environ 3 % correspondent à des comptes créés des établissements scolaires, pour qui l'inscription sur le « Fil d'Ariane » est obligatoire. Cet outil permet de surcroît au CDCS de disposer d'une évaluation a minima du nombre de ressortissants français de passage dans chaque pays.
2. Le suivi des situations individuelles les plus sensibles
Le CDCS assure la gestion des situations individuelles les plus sensibles. Cette mission, menée par le centre des opérations d'urgence regroupe le suivi des morts violentes ou survenues dans des conditions suspectes, des disparitions inquiétantes, des enlèvements de Français à l'étranger ou des situations d'« otages d'État ». À titre d'illustration, en 2023, le CDCS a été notifié de 507 décès à l'étranger dont 330 morts violentes, de 395 disparitions potentiellement inquiétantes et de sept enlèvements.
Sur ce point, il existe une question de répartition des compétences entre le centre de crise et de soutien et la direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire (DFAE). Si cette dernière assure le suivi de la situation des détenus français à l'étranger, notamment les détenus, la gestion des « otages d'État » relève du CDCS. Cette répartition n'est pas formalisée dans les textes mais relève d'une appréciation politique du cabinet du ministre qui, au cas par cas, peut confier au CDCS le suivi d'une affaire.
De même, la DFAE est compétente par principe pour assister les Français en difficulté à l'étranger. Ces derniers peuvent contacter les services consulaires du poste dans l'État dans lequel ils séjournent, ou recourir à la plateforme d'appels France consulaire15(*). La gestion des ressortissants français ne revient au CDCS que dans les situations de crise. La répartition des compétences entre la DFAE et le CDCS s'inscrit par conséquent dans une gradation des risques pesant sur les ressortissants français à l'étranger.
3. La gestion des crises consulaires
Lors de la survenance de crises consulaires, le centre des opérations d'urgence a la capacité d'ouvrir une cellule de crise.
Organisation d'une cellule de crise du CDCS
Source : commission des finances d'après le rapport d'activité 2023 du CDCS
La première action de la cellule de crise consiste dans l'ouverture d'une ligne téléphonique dédiée afin d'offrir au public un service d'assistance dans la localisation de nos ressortissants et la recherche des proches. Pour répondre aux appels téléphoniques, le CDCS peut s'appuyer sur un vivier reposant, d'une part, sur des volontaires de la Croix-Rouge française mobilisée dans le cadre d'une convention de partenariat avec le CDCS et, d'autre part, sur des agents volontaires issus d'autres services du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Au cours de l'année 2023, deux exemples de mise en oeuvre d'une réponse téléphonique par une cellule de crise sont particulièrement illustratifs des contraintes auxquels est soumis le CDCS :
- en premier lieu, lors du séisme de septembre 2023 au Maroc, le nombre d'appels téléphoniques s'est élevé à 6 833, avec un temps d'attente de 1 minute 14 secondes en moyenne. Ce temps moyen a été tiré à la hausse par le nombre d'appels très élevé le jour de la publication du numéro au public sur les chaînes d'information16(*) ;
- en second lieu, suite à l'attaque du 7 octobre 2023 en Israël, la cellule de crise a reçu 7 278 appels pour un temps de 3 minutes et 14 secondes en moyenne. Ici encore, cet indicateur de moyenne est stimulé par l'afflux très important de sollicitations le 12 octobre 2023, jour de l'annonce par la France d'une opération d'évacuation par des vols spécialement affrétés. La plupart des appels enregistrés au cours de la crise (5 530) ont été passés lors de la phase d'évacuation.
Sur le plan interne au ministère de l'Europe et des affaires étrangères, le CDCS joue un rôle de coordination dont la nature varie selon les moyens à la disposition des postes diplomatiques et consulaires et de la nature des crises. Dans le cas d'un poste de taille importante, en mesure de mettre en place une cellule de crise, le centre de crise joue un rôle de pilotage stratégique, de contrôle et d'appui opérationnel. Toutefois, dans la plupart des cas, les crises d'ampleur excèdent les capacités de gestion de crise des postes. La cellule de crise du CDCS assure alors un pilotage renforcé depuis Paris et s'appuie sur les services de terrain pour le suivi des cas signalés. Dans les crises récentes (Afghanistan, Ukraine, Soudan, Niger, Haïti), c'est ce schéma qui a été privilégié. Des équipes du centre de crise peuvent être projetées sur le terrain, en renfort.
Sur le plan interministériel, le CDCS assure la coordination de la protection par l'État de nos ressortissants. Cette coordination se décline dans trois domaines :
- premièrement, en matière de communication, le CDCS, en lien avec la direction de la communication et de la presse (DCP) du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, centralise la communication de crise de l'État ;
- deuxièmement, lors de l'envoi de renforts sur le terrain ou de matériels, en particulier de matériel médical, le centre de crise et de soutien est chargé de l'organisation de la coopération entre les services de l'État. Il travaille notamment en étroite liaison avec le ministère chargé de la santé et le ministère de l'intérieur. S'agissant du ministère de la santé, le CDCS peut s'appuyer sur la Task Force sanitaire internationale (TFSI)17(*), dans le cadre de conventions bilatérales entre le centre et le ministère. Composée de 200 professionnels de santé ayant reçu une formation spécifique de Santé publique France et du CDCS, la TFSI peut être déployée dans des crises sécuritaires comme humanitaire. Les frais engagés par la Task Force sont refacturés au CDCS. Ce dernier dispose toutefois d'une capacité médicale interne avec trois médecins urgentistes et un psychologue. S'agissant du ministère de l'intérieur, les moyens de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion de crises (DGSCGC) peuvent être mobilisés dans les opérations de protection des ressortissants comme les opérations humanitaires18(*) ;
- troisièmement, lors de l'organisation d'opérations d'évacuation de ressortissants (RESEVAC), le CDCS assure, pour la partie civile des moyens engagés, la conduite des opérations, en étroite collaboration avec le centre de planification et de conduite des opérations (CPCO)19(*) du ministère des armées, pour la partie militaire. Les opérations REVESAC sont décidées sur décision du Président de la République, sur recommandation du CDCS et du CPCO.
La localisation des ressortissants français est répertoriée par le CDCS dans l'application Crisenet, grâce aux données du registre pour les Français vivant à l'étranger, d'une part, et de l'application Fil d'Ariane, pour les Français en déplacement, d'autre part.
Ce rôle de coordination du CDCS se décline également à l'égard de nos partenaires étrangers, par les canaux diplomatiques habituels et au travers du réseau tissé par le centre de crise et de soutien avec ses services homologues.
C. LA MISSION D'ACTION HUMANITAIRE ET DE STABILISATION
1. Le CDCS, chef de file des services de l'État en matière d'aide humanitaire
Concernant les questions d'action humanitaire et de stabilisation, la mission du CDCS est double.
D'une part, il constitue l'unique service de réponse humanitaire d'urgence de l'État. Pour cette raison, il pilote la gestion des crises humanitaires et l'organisation des opérations d'urgence. En cas de crise humanitaire, le CDCS peut apporter, soit directement une aide en nature (par la livraison de biens matériels ou le déploiement d'équipes du CDCS), soit une aide financière.
D'autre part, il coordonne l'aide humanitaire de la France au sein du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. En effet, la gestion de l'aide humanitaire française, qui représente en 2023 près de 835 millions d'euros, est répartie entre trois canaux de financement gérés par trois services distincts du MEAE : le fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation (FUHS) géré par le CDCS, l'aide alimentaire programmée (AAP) gérée par la direction générale de la mondialisation et les contributions volontaires aux Nations unies gérées par la direction Nations unies, des organisations internationales, des droits de l'homme et de la francophonie (dite NUOI). Pour ce faire, le CDCS anime la Task Force humanitaire créée en 2023 pour assurer la cohérence de ces trois vecteurs. De même, le centre de crise et de soutien a été chargé de la réalisation de la nouvelle stratégie humanitaire de la France pour les années 2023 à 202720(*).
Ce chef-de-filât en matière d'aide humanitaire se traduit également par les partenariats développés par le CDCS avec la société civile, le secteur privé, au travers d'un fonds de concours et de partenariats avec des fondations d'entreprises et avec les organisations internationales et les États étrangers.
2. Un rôle d'organisation et de coordination des opérations humanitaires d'urgence, similaire à celui exercé pour les opérations de protection des ressortissants
La gestion d'une crise humanitaire suit un schéma organisationnel similaire à celui des crises consulaires décrit supra, avec l'ouverture d'une cellule de crise et l'engagement, sous la coordination du centre de crise, de moyens issus de différents départements ministériels.
D'un point de vue opérationnel, l'action du CDCS se décline entre :
- d'une part, la fourniture et l'acheminement de biens humanitaires et de services (nourriture, médicaments, transport, etc..) ;
- d'autre part, par le déploiement d'équipes du CDCS en zone de crise ou l'organisation d'opérations d'évacuation sanitaire.
À cette aide en nature s'ajoutent les financements apportés par le CDCS aux organisations de la société civile au titre du FUHS.
S'agissant des livraisons matérielles, le CDCS peut s'appuyer sur des stocks de biens humanitaires localisés à proximité des zones fréquemment affectées par des catastrophes. Les stocks regroupent des matériels de première nécessité, non périssables et sans entretien, mobilisables dans des délais très courts en cas de demande d'assistance d'un pays voisin. Trois stocks sont actuellement effectifs : en Guadeloupe (gestion commune CDCS-DGSCGC) et en Nouvelle-Calédonie (gestion commune CDCS-Croix-Rouge française) depuis 2019 et en Polynésie française (gestion commune CDCS-Forces armées de Polynésie française) depuis 2020.
L'intervention du CDCS à Gaza entre octobre 2023 et avril 2024
Depuis le déclenchement de la crise humanitaire à Gaza à compter d'octobre-novembre 2023, le centre de crise et de soutien a engagé, dans le cadre de la réponse humanitaire de la France, une large palette de moyens21(*).
Premièrement, le CDCS a coordonné l'acheminement de près de 1 200 tonnes de fret d'aide en nature au travers de plus de 40 opérations aériennes et maritimes. Parmi ces opérations, cinq vols ont été réalisés avec l'appui de l'Union européenne dans le cadre du point aérien humanitaire européen (soit 92 tonnes de fret humanitaire). En avril 2024, le CDCS a acheminé par un avion militaire plus de six tonnes de médicaments d'urgence en Jordanie. Ces lots de médicaments d'urgence ont permis la prise en charge de plus de 750 malades et blessés, dont des enfants. De plus, la France a procédé à des opérations de largages aériens, dans le cadre d'une coopération bilatérale franco-jordanienne. Entre janvier et avril 2024, onze largages franco-jordaniens et seize largages franco-allemands ont été réalisés.
Deuxièmement, le centre a organisé, avec le ministère des armées, le déploiement d'un porte-hélicoptères amphibie de classe Mistral, le Dixmude, Dixmude à Al-Arish, en Égypte, de novembre 2023 à janvier 2024. Ce dispositif a impliqué des personnels du service de santé des armées, de la réserve sanitaire et de la direction générale de la sécurité civile et a permis la réalisation de 269 actes de chirurgie ainsi que 2 078 consultations et soins. Il a été mis en oeuvre en partenariat avec les autorités égyptiennes et les pays de la région, ainsi qu'avec la Croix-Rouge / le Croissant-Rouge égyptien.
Troisièmement, les services du CDCS ont assuré l'évacuation sanitaire de quatorze enfants palestiniens blessés ou malades. Ces derniers ont été pris en charge au sein de services hospitaliers français.
Quatrièmement, les crédits du fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation ont été mobilisés à hauteur de 12 millions d'euros au bénéficie d'ONG spécialisées actives dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, en particulier dans les secteurs de la santé, de l'eau et de l'assainissement, de la sécurité alimentaire, de la mise à l'abri des déplacés et de l'aide multisectorielle directe aux foyers de déplacés.
Cinquièmement, la France a mené des opérations bilatérales avec les pays voisins dont : une opération conjointe franco-qatarie d'acheminement de 75 tonnes d'aide à destination du Croissant-Rouge palestinien, une opération franco-jordanienne d'acheminement de 400 tonnes de farine et des actions franco-égyptiennes de financement de colis alimentaires, de dons de médicaments et de matériels médical au bénéfice du ministère de la santé égyptien.
Source : commission des finances d'après les réponses du centre de crise et de soutien au questionnaire des rapporteurs spéciaux
II. DANS UN CONTEXTE DE MULTIPLICATION DES CRISES INTERNATIONALES, LE CDCS A BÉNÉFICIÉ D'UNE PROGRESSION CONTINUE DE SES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS
A. EN LARGE HAUSSE DEPUIS 2017, LE FINANCEMENT DU CDCS PARAÎT POUR LE MOINS ÉPARPILLÉ
1. Le centre de crise dispose d'enveloppes dédiées au sein des missions « Action extérieure de l'État » et « Aide publique au développement »...
a) Un financement de la mission de protection des ressortissants reposant en partie sur la dotation du CDCS au titre du programme 105
Au sein du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » de la mission « Action extérieure de l'État », le centre de crise et de soutien bénéficie d'une enveloppe spécifique permettant de financer ses dépenses de fonctionnement, d'une part, et les opérations de protection des ressortissants, d'autre part. La mission d'aide humanitaire et de stabilisation est, quant à elle, portée par le programme 209 « Solidarité avec les pays en développement » de la mission « Aide publique au développement ».
La dotation budgétaire du CDCS se décompose entre un montant de base, correspondant aux dépenses de fonctionnement du service, et d'une ligne de crédits relative à la gestion de crise, qui peut être réabondée en cours d'année en fonction des besoins. Une part minime (600 000 euros en 2023) de la dotation est constituée de subventions aux associations de victimes et d'aide aux victimes22(*).
Pour l'exercice 2024, la budgétisation présentée par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères prévoit une répartition de la dotation comme suit : 1,6 million d'euros pour le renouvellement et la maintenance des réseaux de communication de sécurité autonomes ; 0,6 million pour les dépenses de fonctionnement courant ; 0,5 million pour le renouvellement des dotations des postes en équipement projetable ainsi que la fourniture de consommables médicaux ; 0,4 million pour la formation à la gestion de crise ; 0,35 million pour la constitution de stocks de sécurité pour les postes et enfin 1,5 million pour la gestion de crise.
Depuis 2013, date la plus antérieure des données transmises, la dotation du centre de crise et de soutien est en large hausse. Entre 2013 et 2024, l'enveloppe du CDCS est en effet passée de 1,89 million d'euros d'AE=CP à 5,15 millions d'euros en 2024, soit une multiplication par 2,7 des crédits alloués à ce service. De manière assez notable, le centre de crise et de soutien s'est trouvé préservé des différentes revues de dépenses et programmes d'économies ayant concerné le ministère de l'Europe et des affaires étrangères depuis 2008.
Pour autant, sur la période 2017-2024, cette dotation est relativement stable, notamment au regard des dépenses de fonctionnement du service. Ceci s'explique en partie par le fait que les dépenses relatives aux personnels affectés au CDCS ne sont pas intégrées dans cette enveloppe. Or, comme détaillé infra, le volume d'ETP du service a sensiblement progressé depuis 2017.
Évolution de l'enveloppe du CDCS au sein du
programme 105,
en distinguant dépenses de fonctionnement et
dépenses de crise entre 2017 et 2025
(en millions d'euros et en AE=CP)
Note n° 1 : le montant plus élevé de l'enveloppe du CDCS pour l'exercice 2017 s'expliquait par une dotation additionnelle de 1,63 million d'euros afin de répondre aux enjeux de sécurité de la communauté française à l'étranger, dans un contexte de menace terroriste renforcée.
Note n° 2 : pour l'exercice 2021, aucune ligne de crédits relative à la gestion de crise n'a été prévue dans la loi de finances initiale.
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
S'agissant des dépenses de crise, l'enveloppe dédiée au CDCS se caractérise par une surexécution chronique des crédits. Pourtant, les moyens de la réserve de crise, à l'exception de l'exercice 2021, ont connu une progression constante. L'enveloppe dédiée est en effet passée de 0,5 million d'euros en 2019 à 1,5 million d'euros en 2023. Si le centre de crise et de soutien indique que cette augmentation traduit la prise en compte par le ministère des conséquences financières des crises internationales successives, il n'en demeure pas moins que les moyens de gestion de crise du service sont sous-budgétisés.
Cette sous-estimation conduit, en cours d'exercice, à des redéploiements de crédits pour compenser la hausse parfois massive des dépenses liées aux opérations de protection de nos ressortissants. Ainsi, à titre d'exemples, le MEAE a :
- abondé, au cours de l'exercice 2020, à hauteur de 36 millions d'euros la dotation du CDCS grâce à une avance mobilisée depuis la trésorerie des opérations de maintien de la paix afin de couvrir les dépenses additionnelles des opérations de rapatriement dans le contexte de la crise sanitaire23(*) ;
- obtenu en fin d'exercice 2023 un dégel de 7,5 millions d'euros pour abonder l'enveloppe du CDCS afin de couvrir le coût des opérations d'évacuation du Niger (2,7 millions d'euros) et d'Israël (4,8 millions d'euros)24(*).
Face à des situations extrêmes et difficilement anticipables comme les opérations d'aide au retour des ressortissants français durant la crise sanitaire, il est certain qu'une estimation adaptée de l'enveloppe budgétaire nécessaire est complexe. Néanmoins, la survenance régulière de crises consulaires au cours des exercices passés devrait inciter les gestionnaires budgétaires à une prévision plus fine des besoins de gestion de crise.
Exécution de la dotation du centre de crise et de soutien entre 2019 et 2023
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
En complément de la dotation initiale, le financement des opérations de protection des ressortissants peut être complété a posteriori par des versements extérieurs, au travers de deux fonds de concours :
- un fonds de concours « Participations diverses aux dépenses du centre de crise et de soutien - P105 »25(*) qui correspond aux remboursements de passagers d'avions affrétés par le CDCS et aux remboursements d'assurance lors d'évacuations sanitaires. Sur l'exercice 2020, marqué par la crise sanitaire, ce fonds a perçu à ce titre 6,5 millions d'euros de remboursements ;
- un fonds de concours « Participation de la Commission européenne aux dépenses du centre de crise et de soutien - P105 »26(*) qui correspond aux remboursements de l'Union européenne au titre du mécanisme de protection civile de l'Union européenne (MPCU), dont le fonctionnement est développé infra.
La participation des évacués au financement des opérations
Le coût financier conséquent des opérations de protection des ressortissants a conduit l'État à prévoir un mécanisme de responsabilisation des voyageurs et des professionnels du tourisme et de l'assurance avec la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État, largement inspiré du dispositif de la loi n° 85-30 du 9 janvier1985 relative au développement et à la protection de la montagne dite loi « Montagne »27(*).
D'une part, l'article 22 de la loi du 27 juillet 2010 permet à l'État d'« exiger le remboursement de tout ou partie des dépenses qu'il a engagées ou dont il serait redevable à l'égard de tiers à l'occasion d'opérations de secours à l'étranger au bénéfice de personnes s'étant délibérément exposées, sauf motif légitime tiré notamment de leur activité professionnelle ou d'une situation d'urgence, à des risques qu'elles ne pouvaient ignorer »28(*). Par exception, les journalistes ou personnes exposées à des crises graves sont donc exclues de ce dispositif.
D'autre part, son article 23 permet à l'État d'exercer une action récursoire à l'encontre des opérateurs ne respectant pas leurs engagements contractuels, et notamment l'obligation de prestation de voyage et celle de rapatriement, à l'égard des ressortissants français, forçant l'État à se substituer à eux dans l'organisation du rapatriement.
Pour autant, en dépit de ce cadre juridique dissuasif, les auditions menées avec le CDCS ont confirmé la persistance de comportements à risques. Des organismes de voyages organisés se sont en effet spécialisés dans les zones dangereuses, promettant une expérience atypique à leurs clients.
Par ailleurs, la crise sanitaire en 2022 a également donné lieu à une participation financière des personnes évacuées. Cette situation ne s'inscrivait toutefois pas dans le cadre des crises consulaires29(*). Le rapatriement des ressortissants correspondait en effet à un engagement du Président de la République, à l'occasion de son allocution du 16 mars 2020, d'une aide au retour des Français se trouvant à l'étranger. Le dispositif s'est traduit par l'affrètement d'avions sur le budget du MEAE. Les passagers se sont engagés, selon un prix fixé à l'avance, à rembourser une partie du coût du trajet.
Source : commission des finances
b) La mission humanitaire et de stabilisation s'appuie essentiellement sur le fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation (FUHS), qui relève du programme 209
Si la dotation du CDCS sur le programme 105 correspond au financement de sa mission de protection des ressortissants, sa mission d'aide humanitaire et de stabilisation repose quant à elle sur un financement issu du programme 209 de la mission « Aide publique au développement » : le fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation (FUHS).
Cette enveloppe budgétaire constitue l'instrument de réaction rapide du ministère de l'Europe et des affaires étrangères face aux crises humanitaires. Il forme l'un des canaux de financement de l'aide humanitaire de la France, avec l'aide alimentaire programmée (AAP), les contributions volontaires aux Nations unies et le fonds Minka de l'Agence française de développement. Le CDCS définit l'aide alimentaire comme visant à « assurer l'assistance et la protection des personnes vulnérables et à répondre aux besoins fondamentaux des populations affectées par une catastrophe naturelle ou un conflit ». Ces besoins fondamentaux regroupent l'accès à l'eau, à des soins médicaux ou à la nourriture.
Doté de 200 millions d'euros en AE=CP dans la loi de finances initiale pour 2024, le FUHS permet de financer deux types d'actions :
- d'une part, la mise en oeuvre d'actions d'aide humanitaire (71,5 % des crédits exécutés en 2023), il peut s'agir de projets humanitaires d'urgence et à impact rapide pour répondre aux besoins essentiels des populations dans des temporalités courtes (entre 0 et 18 mois) ;
- d'autre part, le soutien à des actions de stabilisation (28,5 % des crédits exécutés), qui recouvrent toutes les actions qui participent du processus de sortie de crise à l'international. Ces actions recouvrent les projets participant au relèvement d'États en crise, par l'appui aux transitions politiques, la lutte contre les groupes terroristes ou la réhabilitation d'infrastructures et des activités économiques.
Depuis 2017, on observe un bondissement des crédits du FUHS. Doté de 49 millions d'euros de crédits de paiement en 2017, cet instrument représentait 285,2 millions d'euros en 2023, soit une multiplication par six de cette enveloppe.
Évolution du fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation entre 2017 et 2025
(en millions d'euros)
Note : les montants indiqués sont en exécution hors exercice 2024 et PLF 2025
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
La croissance des moyens du FUHS s'inscrit dans la progression des financements humanitaires de la France depuis 2017. Le montant total de l'aide humanitaire français s'élevait en 2017 à 95 millions d'euros en cumulant les crédits du FUHS, de l'AAP et des contributions volontaires aux Nations unies. Elle atteignait 835 millions d'euros en 2023, soit une multiplication par près de neuf des moyens engagés et permettait à la France de figurer parmi les dix premiers bailleurs humanitaires mondiaux. Le fonds d'urgence humanitaire et de soutien a été relativement préservé des mesures de consolidation budgétaire dans le cadre du projet de loi pour 2025. Ce dernier, dans sa version initiale, déposée à l'Assemblée nationale, prévoyait ainsi une enveloppe de 220 millions d'euros en AE=CP.
À l'occasion de la conférence nationale humanitaire du 19 décembre 2023, le Président de la République a annoncé l'objectif de porter l'aide humanitaire française à un milliard d'euros en 2025. Les conclusions de la réunion du comité interministériel de la coopération internationale et du développement (Cicid) de juillet 2023 ont repris cet objectif. Si, dans le contexte budgétaire contraint, le Gouvernement a renoncé à cet engagement, l'évolution des crédits de l'aide humanitaire n'en illustre pas moins le dynamisme des crédits gérés par le centre de crise et de soutien.
La mise en oeuvre du FUHS, tant en matière d'urgence humanitaire que de stabilisation, se décline entre plusieurs modalités d'intervention pratiques. Il peut s'agir :
- de subventions à des organisations de la société civile ;
- de financements à des opérateurs publics (ex : Expertise France) ;
- de contributions à des organisations internationales, en particulier les entités relevant de la sphère onusienne et disposant de fortes capacités opérationnelles d'urgence comme le Programme alimentaire mondial (PAM) ;
- de financements à des partenaires privés ;
- d'achats de prestations et de financement des frais des gestion des interventions directes du CDCS dans le suivi des projets ;
- de délégations de crédits aux services de coopération et d'action culturelle (SCAC) présents dans les postes diplomatiques. Entre 8 et 10 % des financements aux ONG se fait ainsi par l'intermédiaires des postes diplomatique chaque année.
Le financement de projets pilotés par des organisations de la société civile demeure la principale modalité de mise en oeuvre du fonds. Le CDCS a ainsi financé 248 projets au profit de 90 ONG en 2023, pour un montant total de 240,8 millions d'euros. Si le nombre de projets financés a progressé depuis 2015, lorsque le FUHS finançait un total de 138 initiatives, cette progression a été moins importante que celle des crédits du fonds. Il en résulte une progression du ticket moyen par projet financé, qui se situe à un peu plus d'un million d'euros. Comme le relevait le rapport d'évaluation du FUHS en 202030(*), le CDCS s'appuie en priorité sur des ONG de taille critique disposant de fortes capacités d'intervention. Au total sur la période 2015-2018, seulement 15 ONG bénéficiaient de près de 64 % des subventions du FUHS.
Les cinq premières ONG
bénéficiaires de versements au titre du FUHS
sur la
période 2011-2022
(en millions d'euros)
Principales ONG bénéficiaires de subventions au titre du FUHS |
Montants |
Solidarités International |
57,5 millions d'euros |
ACTED |
37,8 millions d'euros |
Première Urgence Internationale |
35,6 millions d'euros |
Humanité & Inclusion |
25,5 millions d'euros |
CARE France |
24 millions d'euros |
Source : commission des finances
La sélection des projets financés par le FUHS se fait sur une base annuelle, par une identification a priori des priorités. Environ deux tiers des financements sont alloués en début d'année, le tiers restant étant gardé en réserve pour financer une réponse rapide à de crises soudaines. Actuellement, les financements sont alloués sur une base annuelle. Toutefois, en réponse à une demande des organisations de la société civile, le CDCS envisage d'expérimenter, selon un modèle pratiqué par certains pays comme le Danemark, des financements pluriannuels.
La définition des priorités de financement du FUHS se fait en coopération avec les ONG bénéficiaires. Les auditions menées par les rapporteurs spéciaux auprès des principales ONG bénéficiaires de crédits du FUHS ont confirmé le rapport de confiance développé avec les services du centre des opérations humanitaires et de stabilisation du CDCS31(*). Par rapport à d'autres bailleurs humanitaires, la sélection des projets par le CDCS est relativement rapide. Une procédure d'urgence permet ainsi de débloquer des financements en 48 heures.
S'agissant de la sélection des projets financés par des crédits délégués aux ambassades, le CDCS a formalisé les pratiques des SCAC en proposant un manuel de procédures interne.
Il importe de souligner qu'au-delà du financement de projets ONG, 15 % des crédits du FUHS financent des interventions directes du CDCS et de l'aide en nature. Le centre ne constitue en rien un simple guichet mais également un opérateur de l'aide humanitaire.
Par ailleurs, au-delà de l'enveloppe initiale, les crédits du FUHS peuvent être abondés en cours d'exercice par la provision pour crises majeures, qui relève également du programme 209. Créé en 2022 et intervenant en complément des autres instruments d'aide humanitaire, la provision pour crises majeures est une réserve d'urgence. Elle permet au ministère de l'Europe et des affaires étrangères de compléter les dotations initiales de ses enveloppes d'aide humanitaire lors de la survenance d'une crise soudaine. Dotée, lors de sa création en 2022 de 22,4 millions d'euros, cette enveloppe représentait un total de 270 millions d'euros en 2023. Son activation est visée par le directeur général de la mondialisation, responsable du programme 209, et validée par le directeur de cabinet du ministre.
Ventilation des crédits de la provision
pour crises majeures en abondement
du fonds d'urgence humanitaire et de
stabilisation sur l'exercice 2023
(en millions d'euros et en crédits de paiement)
Note : les abondements sont détaillés chronologiquement par date de l'autorisation de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères de recourir à cette réserve de crise.
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Les dimensions de cette réserve de crise, dont la ventilation échappe à l'autorisation parlementaire, ont été critiquées32(*). Le CDCS dispose d'une marge de manoeuvre considérable dans la conduite de ses opérations humanitaires. Si son activation n'est pas réservée au FUHS, elle aurait néanmoins potentiellement permis de doubler l'enveloppe initiale prévue en loi de finances pour 2023. Le centre de crise et de soutien, dans ses réponses au questionnaire de contrôle, défend la pertinence de cette enveloppe dont l'usage permet d'éviter un « effet d'éviction sur la programmation initiale définie en début d'année ». Il s'agit ainsi d'éviter les transferts de crédits en cours d'exercice pour pallier les besoins de financement liés aux crises internationales. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères défend, en contrepartie du principe d'ouverture de cette réserve de crise en début d'exercice, un engagement à annuler en fin d'année les crédits non consommés.
Compte tenu du contexte budgétaire restrictif, la provision pour crises majeures est prévue pour être supprimée dans le projet de loi de finances pour 2025 dans le cadre des importantes mesures d'économies opérées sur le programme 209 de la mission « Aide publique au développement ». Si les rapporteurs spéciaux ne contestent pas la complexité de l'équation budgétaire, la suppression totale de cette enveloppe de crise risque de peser sur les moyens d'action du CDCS en cours d'année. Le financement de dépenses d'urgence humanitaire suite au déclenchement d'un événement grave, comme la décision en date d'octobre 2024 d'apporter 100 millions d'euros d'aide au Liban, devra alors reposer sur des ouvertures de crédits en cours d'année.
L'aide humanitaire des collectivités territoriales mise en oeuvre par le CDCS
Dans le cadre de leur action extérieure, les collectivités territoriales participent activement à la politique d'aide humanitaire, et plus largement d'aide au développement, de la France. L'article L. 1115-1 du code général des collectivités territoriales dispose effectivement que « Dans le respect des engagements internationaux de la France, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent mettre en oeuvre ou soutenir toute action internationale annuelle ou pluriannuelle de coopération, d'aide au développement ou à caractère humanitaire ».
Si les collectivités peuvent soutenir des actions humanitaires directement par la voie de subventions, elles peuvent également faire transiter leur aide humanitaire par le centre de crise et de soutien, au travers du fonds d'action extérieure des collectivités territoriales (FACECO). Il s'agit d'un fonds de concours, géré par le CDCS.
Le mécanisme du fonds de concours offre trois avantages principaux :
- tout d'abord, il assure une mutualisation des contributions des collectivités volontaires ce qui, tout en permettant notamment aux petites collectivités de participer à une opération plus large, maintient une cohérence de l'action humanitaire de la France ;
- ensuite, la mise en oeuvre des fonds est assurée par le centre des opérations humanitaires et de stabilisation (COHS), garantie d'expertise en matière humanitaire et assurant une forte réactivité de la réponse humanitaire ;
- enfin, le recours à ce dispositif permet de veiller à la bonne utilisation et à la traçabilité des financements apportés par les collectivités.
En outre, la mise en oeuvre des fonds donne systématiquement lieu à une communication mentionnant le soutien de la collectivité donatrice dans le bilan de l'opération.
Sur l'exercice 2023, les financements transitant par le FACECO se sont élevés à 6,1 millions d'euros. Ils ont été répartis sur des enveloppes dédiées à des zones géographiques destinataires (Ukraine, Turquie-Syrie, Maroc, Libye, Arménie). Le fonds de concours a été abondé par 726 collectivités territoriales.
Source : commission des finances
De même que pour les dépenses liées à la protection des ressortissants, trois fonds de concours permettent d'abonder les crédits gérés par le CDCS au titre de la conduite d'opérations humanitaires d'urgence :
- le fonds d'action extérieure des collectivités territoriales (FACECO), développé dans l'encadré infra ;
- le fonds de concours « entreprises » qui retrace les contributions du secteur privé au profit des opérations humanitaires du CDCS. Ce dernier dispose en effet de partenariats privilégiés avec les Fondations CMA-CGM, Airbus, Veolia, Foundation S (Sanofi), l'ONG Électriciens sans frontière, l'association Tulipe, et les entreprises Enedis, EDF, Nutriset ou Lactalis ;
- le fonds de concours « remboursements de la Commission européenne/MPCU » qui correspond aux remboursements de l'Union européenne au titre du mécanisme de protection civile de l'Union européenne (MPCU), dont le fonctionnement est développé infra.
2. ...complétées par des avances issues d'autres missions du budget de l'État...
En complément de l'enveloppe allouée au CDCS au sein du programme 105 et du FUHS du programme 209, le financement des opérations d'urgence du CDCS peut s'appuyer sur des crédits extérieurs aux missions « Action extérieure de l'État » et « Aide publique au développement ». Si le ministère de l'Europe et des affaires étrangères assure en effet le chef-de-filât de la conduite de ce type d'opérations, d'autres départements ministériels interviennent dans leur conduite. Le ministère de l'intérieur et le ministère des armées sont particulièrement concernés dès lors que leur participation aux opérations d'évacuation ou d'assistance humanitaire implique de leur part des dépenses particulièrement lourdes. Cette participation est toutefois refacturée, a posteriori, au CDCS.
Ainsi, en fin d'exercice, le CDCS reverse aux ministères concernés les crédits correspondants. À titre d'exemple, lors de l'exercice 2022, les collaborations interministérielles du centre en matière humanitaire ont conduit à refacturer un montant de plus de 5,7 millions d'euros sur les crédits du FUHS. Il s'agissait notamment d'opérations de soutien à la sécurité civile en Ukraine, du déploiement d'unités de la sécurité civile française en réponse à des catastrophes naturelles à Madagascar, au Pakistan et au Tchad et de soutiens matériels et médicaux.
Un délai additionnel peut cependant être observé dans le remboursement des frais avancés par les autres ministères de la part du CDCS. L'exercice 2023 a ainsi été caractérisé par un nombre élevé de collaborations interministérielles avec 31 opérations conjointes réalisées par le CDCS, dont le déploiement de l'élément de sécurité civile rapide d'intervention médicalisée (ESCRIM) en Libye et l'intervention du porte-hélicoptère amphibie (PHA) Dixmude à Al-Arish en Égypte. Pour une grande partie des dépenses engagées par les ministères partenaires, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a fait le choix de reporter le remboursement des sommes avancées à l'exercice 2024 au lieu de les engager directement sur l'exercice 2023.
Ces avances et remboursements complexifient la lisibilité du financement des opérations d'urgence humanitaires. Elles apparaissent cependant incontournables du fait de la sollicitation des moyens d'autres ministères, sous la coordination du CDCS.
3. ...et par un mécanisme européen de solidarité financière
Dans la mise en oeuvre de sa mission de protection consulaire comme d'aide humanitaire, le CDCS peut recourir au mécanisme de protection civile de l'Union européenne (MPCU). Cet instrument, créé en 2001 et dont la gestion est assurée par la direction générale pour la protection civile et les opérations d'aide humanitaire européennes (ECHO), vise à renforcer la coordination des États membres dans la réaction aux catastrophes naturelles ou d'origine humaine.
Dans sa dimension financière, le MPCU permet la prise en charge partielle des frais de transport et d'opérations comme lors de la mobilisation de matériel et de personnel déployés sur les lieux d'une crise humanitaire ou d'une catastrophe naturelle33(*). Le MPCU peut prendre en charge 75 % des frais engagés, les 25 % restants demeurent à la charge de l'État membre.
Pour pouvoir bénéficier de cette aide financière, l'État membre menant une opération éligible au MPCU doit notifier sa volonté d'activer le mécanisme au plus tard quinze jours après le début de l'opération, mais toujours avant la fin de l'opération. La Commission européenne valide ou non la demande de subvention.
En matière de protection des ressortissants, le mécanisme de protection civile de l'UE s'articule avec le régime de protection consulaire de l'Union européenne. Le droit primaire de l'Union rattache à la citoyenneté européenne le droit pour tout ressortissant européen « de bénéficier, sur le territoire d'un pays tiers où l'État membre dont ils sont ressortissants n'est pas représenté, de la protection des autorités diplomatiques et consulaires de tout État membre dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État »34(*). La mise en oeuvre du droit à la protection consulaire est fixée, en droit dérivé, par la directive (UE) 2015/637 du Conseil du 20 avril 201535(*). En application de cette directive, le ou les États membres qui coordonnent et dirigent l'assistance aux ressortissants européens non représentés ou « État pilote »36(*), peuvent solliciter un soutien financier du MPCU.
De plus, l'État assurant les mesures de protection d'un ressortissant peut demander le remboursement des frais engagés à l'État dont ce ressortissant a la nationalité37(*). Lorsque le MPCU a également été activé, le remboursement de l'État dont le bénéficiaire de la protection a la nationalité est déterminée après déduction de la contribution de l'Union.
Exemples de recours au mécanisme de protection civile de l'Union européenne lors de crises consulaires
Contexte |
Nature de l'opération |
Date |
Coût total |
Montant pris en charge au titre du MPCU |
Pandémie de Covid |
Rapatriement de 370 000 ressortissants français |
2020 |
29 375 119 euros |
533 283 euros |
Éthiopie |
Évacuation d'environ 260 personnes (240 Français et ayants-droits et une vingtaine de ressortissants européens) |
2021 |
342 305 euros |
211 274 euros |
Niger |
Évacuation des ressortissants |
2023 |
2 747 163 euros |
2 060 372 euros |
Soudan |
Évacuation des ressortissants |
2023 |
839 000 euros |
329 858 euros |
Israël |
Évacuation des ressortissants |
2023 |
7 600 000 euros |
225 000 euros |
Note : s'agissant des opérations d'évacuation de ressortissants d'Israël, la demande de remboursement à la Commission européenne est en cours de traitement.
Source : commission des finances d'après les données transmises par le CDCS
Concernant les enjeux consulaires, la mobilisation par la France du MPCU est relativement récente. À l'inverse, pour ses opérations humanitaires, le centre de crise et de soutien a recours à l'assistance du MPCU depuis 2020. En matière humanitaire, le montant cumulé des remboursements de la Commission européenne s'élevait à 5,7 millions d'euros entre 2020 et avril 2024, dont 4,8 millions d'euros depuis le début de la guerre en Ukraine. Sur le seul exercice 2023, le CDCS a déclaré 26 opérations au MPCU dont 19 ont donné lieu à une demande de remboursement.
Sur le plan de la nomenclature budgétaire, les remboursements de la Commission européenne au CDCS au titre du mécanisme de protection civile de l'Union sont retracés sur deux fonds de concours distincts : l'un abonde le programme 105 pour les opérations consulaires et l'autre abonde le programme 209 pour les opérations humanitaires.
Au total, la diversité des opérateurs et des financements en jeux complexifie la lecture des moyens mis en oeuvre par le centre de crise et de soutien. Si l'on prend l'exemple pratique38(*) d'une opération humanitaire coordonnée par le CDCS, au cours de laquelle intervient la sécurité civile, et dont la mise en oeuvre donne lieu à l'activation du MPCU, le schéma de financement suivant est mis en place :
- la Commission européenne rembourse le ministère de l'intérieur à hauteur de 75 % des dépenses éligibles au MPCU ;
- le MEAE rembourse le ministère de l'intérieur à hauteur de 25 % des dépenses éligibles (montant complémentaire du MPCU) ainsi qu'à hauteur des dépenses engagées non éligibles au MPCU.
Présentation simplifiée des canaux
de financement
de l'action du centre de crise et de soutien
Source : commission des finances
B. UNE POLITIQUE DE RESSOURCES HUMAINES DYNAMIQUE, AU SEIN D'UN SERVICE QUI SE DISTINGUE PAR LA DIVERSITÉ DES PROFILS RECRUTÉS
1. Un service de taille limité mais dont les effectifs ont doublé depuis sa création
Disposant d'une trentaine d'agents lors de sa création en 2008, le centre de crise et de soutien a vu ses effectifs largement augmenter depuis. Le service comptait 104 agents en 2024, contre 54 en 2013, soit un quasi doublement en une décennie.
Cette progression constante des effectifs constitue un point notable au sein d'un ministère marqué par des efforts sensibles de réduction de la masse salariale. Entre 2018 et 2022, dans le cadre du programme « Action publique 2022 », le ministère avait ainsi procédé à la suppression de 332 ETP.
Au 25 juillet 2023, sur les 104 ETP du CDCS, 84,5 relevaient du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Ce socle était complété par 9 mises à disposition et 9 apprentis. Ces effectifs sont relativement limités par rapport aux sollicitations du CDCS. La possibilité de recourir au vivier de volontaires de la Croix-Rouge et du MEAE pour ses missions les plus consommatrices de moyens humains (réponse téléphonique) permettent au centre de compléter ses ressources humaines en cas de déclenchement d'une cellule de crise.
Évolution des effectifs du CDCS selon le statut des personnels
(en équivalents temps plein et en pourcentage)
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
Évolution sur 2016-2024 |
|
Titulaires de catégorie A |
31 |
31 |
24 |
27 |
33 |
39 |
36 |
36 |
33 |
+ 6,5 % |
Titulaires de catégorie B |
19 |
21 |
17 |
19 |
20 |
24 |
22 |
22 |
23 |
+ 21,1 % |
Titulaires de catégorie C |
12 |
13 |
11 |
12 |
12 |
12 |
11 |
11 |
10 |
- 16,7 % |
Contractuels de catégorie A |
17 |
18 |
13 |
20 |
24 |
24 |
20 |
20 |
22 |
+ 29,4 % |
Contractuels de catégorie B |
0 |
0 |
0 |
3 |
1 |
5 |
3 |
2 |
1 |
- |
Contractuels de catégorie C |
0 |
0 |
0 |
0 |
6 |
2 |
1 |
1 |
2 |
- |
Apprentis |
2 |
3 |
3 |
0 |
3 |
5 |
9 |
11 |
9 |
+ 350 % |
Vacataires |
0 |
0 |
2 |
0 |
1 |
9 |
3 |
5 |
4 |
- |
Total |
81 |
86 |
70 |
81 |
99 |
120 |
105 |
108 |
104 |
+ 28,4 % |
Source : commission des finances
2. Une diversité des profils qui distingue le CDCS des autres services du ministère
La spécificité des missions du CDCS et la nature de ce service dédié à l'urgence ont conduit à une diversification des profils recrutés. Trois pôles additionnels sont constitués au sein du centre et ont vu leurs effectifs progresser.
Tout d'abord, un pôle médical a été créé pour disposer d'une capacité de projection sanitaire, interne au centre. Ce pôle comprend trois médecins urgentistes et une infirmière.
Ensuite, s'agissant de la logistique et des services support, le CDCS comporte une unité de gestion administrative et de soutien qui s'assure tant de la gestion budgétaire et comptable du centre que de la gestion logistique. Deux techniciens et deux apprentis sont ainsi en charge de la dotation des postes en matériels radio et satellitaires ainsi que de leur mise en fonctionnement pour la sécurité de nos ressortissants à l'étranger.
Enfin et surtout, la montée en puissance de la mission d'aide humanitaire et de stabilisation a entraîné une progression sensible des effectifs du centre des opérations humanitaires et de stabilisation (COHS). La forte croissance de l'enveloppe du fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation, l'augmentation de l'activité en réponse aux crises et la multiplication du nombre de projets financés a renforcé les besoins en ressources humaines du COHS. Ce dernier a ainsi bénéficié de 4,5 créations de postes depuis 2022 au niveau des rédacteurs et des gestionnaires. Parmi ces derniers, si la majorité des profils demeurent généralistes, les ouvertures de postes sur la période récente ont permis de recruter des profils plus spécialisés. Il s'agit notamment de spécialistes en logistique et de personnes issues du milieu des ONG avec des compétences en termes de réponse d'urgence.
La progression constante des crédits du FUHS et du financement des projets gérés par des organisations de la société civile a, en outre, conduit le CDCS à créer au sein du COHS un pôle dédié aux affaires financières en 2021. Cette unité est chargée de la politique de maîtrise des risques du COHS et de la gestion budgétaire et comptable. Cette politique de maîtrise des risques s'articule autour de plusieurs missions : contractualisation des subventions, cartographie des partenaires, gestion des alertes et des abus qui seraient identifiés, réalisation d'une cinquantaine d'audits par an, mise en place d'évaluations qualitatives des projets. En 2023, ce pôle comptait 6,5 ETP : outre le chef d'unité, deux rédacteurs audit et conformité, trois gestionnaires comptables et un demi ETP pour le suivi des marchés. En 2024, un nouveau poste de gestionnaire comptable a été ouvert.
III. CONFRONTÉ À UNE EXTENSION CONTINUE DE SES COMPÉTENCES ET DE SES MOYENS, LE CENTRE DE CRISE ET DE SOUTIEN DOIT VEILLER À CONSERVER SA SPÉCIFICITÉ
A. SI LES CIRCONSTANCES EXCEPTIONNELLES CONTRAIGNENT SES DÉPENSES, LE FINANCEMENT DES OPÉRATIONS DU CDCS DOIT ÊTRE CLARIFIÉ
1. L'enveloppe budgétaire du CDCS doit être plus réaliste au niveau de la budgétisation et faire l'objet d'une clarification de ses canaux de financement au stade de l'exécution
S'agissant de la mission de protection consulaire, compte tenu de la surexécution chronique de la dotation du CDCS sur le programme 105, il paraît nécessaire de prévoir au stade de l'examen du projet de loi de finances de l'année, une prévision plus réaliste du montant des dépenses de gestion de crise. Si par nature, le montant exact de ces dépenses est imprévisible, les estimations des exercices passées se sont révélées clairement sous-évaluées.
Par ailleurs, la complexité du financement des opérations d'urgence assurées sous la conduite du CDCS, impliquant des avances et remboursements aux autres ministères impliqués, est incontournable. Pour autant, il paraît nécessaire que les parlementaires disposent, dans l'exercice de leur mission de contrôle du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques, d'une information claire et détaillée quant à ces circuits de financements. Or, le montant et la nature des refacturations opérés par d'autres départements ministériels au CDCS ne sont pas détaillés dans les documents budgétaires. Ces informations pourraient apparaître dans les rapports annuels de performance annexés au projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année.
Recommandation n° 1 : À l'occasion de la préparation annuelle de la loi de finances, prévoir une budgétisation plus réaliste des dépenses de gestion de crise du CDCS. Au stade de l'exécution, préciser l'ensemble des remboursements perçus et dues par le CDCS au titre de ses opérations (MEAE, CDCS).
2. Au niveau européen, une plus grande efficacité de la solidarité européenne doit être recherchée
Deux limites à l'efficacité de la coopération européenne en matière de protection des ressortissants peuvent être mises en avant.
En premier lieu, les auditions menées auprès du centre de crise et de soutien ont souligné l'existence de comportements non-coopératifs de la part d'États-membres de l'Union européenne. Ces pratiques consistent essentiellement pour un État, lors du déclenchement d'une crise, à évacuer le personnel de son ambassade et à faire reporter sur d'autres États, en premier lieu la France, le soin d'opérer l'évacuation de ses ressortissants à l'occasion de l'aggravation de la crise. Le CDCS a été récemment confronté à ce comportement de « passager clandestin » lors de la crise en Haïti au cours de l'année 2023.
Dès 2013, la Cour des comptes, dans un rapport sur la sécurité des Français à l'étranger, alertait sur ce refus de coopération de la part de certains partenaires : « dans un contexte de restriction budgétaire qui concerne tous les États-membres de l'Union, depuis le traité de Lisbonne, le risque est grand de voir des pays réduire leur protection et leur réseau en sachant que la France est susceptible de prendre le relais pour leurs concitoyens »39(*).
Cette tentation du passager clandestin est d'autant plus importante en raison de l'image d'excellence du centre de crise et de soutien, d'une part, et du fait que la France assure le rôle d'« État pilote » dans un grand nombre d'États tiers, d'autre part. En effet, en l'état actuel du droit de l'Union, seul un nombre limité d'État assume les missions d'« État pilote » (Allemagne, Espagne, France, Italie, Pays-Bas), en particulier depuis le départ du Royaume-Uni40(*). Selon le CDCS, la France se retrouve ainsi chef de file dans trois quarts des situations de crise dans des États tiers41(*).
Ce déficit de coopération pourrait en partie être pallié par le projet de révision de la directive (UE) 2015/63742(*), actuellement en cours d'examen au Parlement européen. La proposition législative vise à mettre en oeuvre les conclusions de la « boussole stratégique » de l'Union43(*), adoptée en 2022, qui recommandait de renforcer les mécanismes de réaction de crise de l'Union. La directive de 2015 serait modifiée notamment pour :
- préciser le contenu des plans d'urgence consulaires conjoints ;
- améliorer la circulation des informations entre les États membres et les institutions de l'Union ainsi que les informations fournies aux citoyens de l'Union, quant à leurs déplacements dans les pays tiers ;
- rationaliser des dispositions relatives au remboursement des coûts résultant d'une protection consulaire. Le droit proposé prévoit ainsi que l'État assurant la protection consulaire puisse adresser directement sa demande de remboursement au ressortissant européen bénéficiaire et non plus à l'État dont il a la nationalité ;
- réviser la définition de la notion d'« État pilote » afin d'y inclure davantage d'États membres et de mieux répartir la charge de la protection consulaires des citoyens européens non représentés.
En tout état de cause, les comportements non-coopératifs de certains États membres ne doivent pas occulter le bon état des relations du CDCS avec ses homologues européens. Un partenariat avec le ministère allemand des affaires étrangères prévoit ainsi la présence au sein du service d'un diplomate allemand en échange.
En second lieu, les versements de l'assistance financière du mécanisme de protection civile de l'Union européenne sont sujets à des retards depuis les dernières années. Ceci s'explique par la difficulté de la direction générale ECHO de la Commission européenne à traiter l'ensemble des demandes d'activation du MPCU en raison d'un sursaut du nombre de demandes. Au cours de l'exercice 2022, le MPCU a été activé à 232 reprises dont 126 pour la seule crise ukrainienne. Pour l'année 2023, une partie des versements du MPCU au bénéfice des opérations humanitaires du centre de crise a du être reporté à l'exercice 2024.
Recommandation n° 2 : Encourager la réduction des délais de remboursement des dépenses éligibles au mécanisme de protection civile de l'Union européenne (CDCS, Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne).
B. LES EFFORTS DE PRÉVENTION À L'ÉGARD DU PUBLIC ET DE VALORISATION DU MODÈLE DU CENTRE DE CRISE ET DE SOUTIEN DOIVENT ÊTRE RENFORCÉS
Les rapporteurs spéciaux relèvent que deux obstacles persistants contribuent à limiter l'efficacité de la mission de protection des ressortissants opérée par le CDCS. D'une part, le service « Fil d'Ariane » est encore trop peu utilisé par les usagers dans leurs déplacements à l'étranger. D'autre part, la mise en oeuvre du registre des Français à l'étranger, véritable serpent de mer des affaires consulaires, est clairement insuffisante. Pourtant, le CDCS et les services consulaires, avec l'appui des associations et des élus des Français de l'étranger, mènent des actions de sensibilisation en faveur de l'inscription consulaire. Si une obligation d'inscription au registre n'apparaît pas opportune compte tenu de fortes incertitudes juridiques, une poursuite des actions de sensibilisation parait indispensable.
Recommandation n° 3 : Poursuivre les efforts de prévention à l'égard du public, notamment en s'appuyant sur les élus des Français de l'étranger, en encourageant l'inscription consulaire au registre des Français établis hors de France et le recours au Fil d'Ariane (MEAE, CDCS).
Par ailleurs, la spécificité du modèle du CDCS, fondé sur le cumul des fonctions de protection consulaire et d'aide humanitaire, devrait être davantage valorisé auprès de nos partenaires étrangers afin d'« exporter » ce succès de la diplomatie française.
Il n'existe en effet pas, au sein des ministères des affaires étrangères de nos principaux partenaires, de structures véritablement similaires au centre de crise et de soutien. De nombreux États occidentaux (Allemagne, Belgique, Canada, Espagne, Etats-Unis, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni) disposent de services équivalents, mais dont les compétences sont limitées aux questions consulaires.
Dans ses échanges avec ses homologues étrangers, le CDCS réalise des présentations de son modèle et de son fonctionnement. Un approfondissement de cette démarche de formation des services aurait pu être envisagé. Pour autant, les ressources humaines du CDCS doivent s'inscrire dans un cadre limité. De fait, il n'apparaît pas opportun de disperser les capacités de formation du centre, qui doit en priorité assurer la préparation à la gestion de crise les administrations françaises. Une mobilisation du CDCS dans le cadre de l'Académie diplomatique et consulaire, dont la création a été annoncée en février 2023 dans le cadre des États généraux de la diplomatie, permettrait de renforcer la gestion de crise dans la formation continue des diplomates.
Pour autant la promotion du centre de crise et de soutien à l'étranger pourrait passer par d'autres canaux, notamment la valorisation de ses instruments. L'outil « Conseils aux voyageurs », n'est actuellement proposé qu'en français. Sa traduction dans d'autres langues, en premier lieu l'anglais, permettrait de mettre en avant à peu de frais l'excellence consulaire française.
Recommandation n° 4 : Valoriser le modèle du CDCS, par des actions de formation destinées aux services étrangers et par une traduction des « Conseils aux voyageurs » en anglais (MEAE, CDCS).
C. L'ÉTENDUE DE LA MISSION D'AIDE HUMANITAIRE ET DE STABILISATION DU CDCS PEUT ÊTRE INTERROGÉE
1. Si la remise en cause de la dualité fonctionnelle du service ne paraît pas opportune, la centralisation de l'ensemble de l'aide humanitaire de la France par le CDCS doit être écartée
Plusieurs arguments pourraient plaider en faveur d'une scission du centre de crise et de soutien en deux services distincts chargés de la protection consulaire, d'une part, et de l'action humanitaire et de stabilisation, d'autre part :
- premièrement, la séparation des urgences consulaires et des urgences humanitaires constitue le modèle de référence dans les ministères des affaires étrangères de nos partenaires. Avant 2008 et la création du CDCS, plusieurs services distincts coexistaient au sein du Quai d'Orsay ;
- deuxièmement, le CDCS est déjà organisé en deux unités séparées, le centre des opérations d'urgence et le centre des opérations humanitaires et de stabilisation, reflétant la dualité de mission du service. Ces deux pôles sont d'ailleurs géographiquement séparés entre deux bâtiments ;
- troisièmement, une scission s'inscrirait dans la logique de la nomenclature budgétaire actuellement applicable au CDCS. Un service d'urgence consulaire relèverait du programme 105 tandis qu'un service d'urgence humanitaire serait financé par les crédits du programme 209.
Toutefois, une telle séparation ne paraît pas opportune aux rapporteurs spéciaux. D'une part, la distinction entre crises consulaires et crises humanitaires est complexe à opérer en pratique. Une même crise peut induire des menaces sur des ressortissants français et nécessiter une intervention de la France au soutien de populations vulnérables. Ce cumul d'aspects consulaires et humanitaires est d'autant plus prégnant que les dernières années ont démontré l'enlisement et l'inscription dans le temps des crises internationales à l'image de l'Ukraine, de Gaza ou d'Haïti. D'autre part, la centralisation de la gestion de crise au sein du CDCS permet d'assurer la cohérence des interventions françaises, en particulier lorsqu'un événement international sollicite une action simultanée de mise à l'abri de nos ressortissants et d'action humanitaire. Les interlocuteurs et partenaires du CDCS, tant issus de la société civile que de l'administration, ont salué le professionnalisme et la réactivité de ce service.
À l'inverse, il ne paraît pas non plus souhaitable d'opérer une centralisation de l'aide humanitaire du MEAE au sein du CDCS. En effet, en complément de son poids dans la gestion des financements de l'aide humanitaire de la France, le CDCS constitue désormais le chef de file du ministère de l'Europe et des affaires étrangères sur ce sujet.
Les différentes évaluations de la politique humanitaire de la France ont souligné le défaut de coordination des canaux de financement de cette aide qui demeure éclatée, au sein du MEAE, entre trois dispositifs (le FUHS, l'AAP et les contributions volontaires aux Nations unies) auxquels s'ajoutent les financements post-crise de l'AFD (fonds Minka). Les rapports d'évaluation du FUHS en 202044(*), de l'aide alimentaire programmée en 202145(*) et de la stratégie humanitaire de la France en 202246(*) se sont étonnés de la faible coopération entre les différents guichets. Le bilan de la stratégie humanitaire 2018-2022 indiquait ainsi que : « le manque de moyens dédiés pour accompagner cette montée en puissance de l'aide humanitaire et la difficile coordination des financements, vont à l'encontre des engagements pris par la France. Le dialogue entre les différents guichets doit se poursuivre pour optimiser leur complémentarité et la consultation des acteurs opérationnels doit être systématisée ».
En réponse, le MEAE a fait le choix de créer une Task Force humanitaire pour coordonner les différents canaux d'aide, sous la conduite du CDCS. L'option du CDCS comme responsable de la coordination de l'aide humanitaire ne tenait pas forcément de l'évidence. Sur le plan budgétaire, le directeur général de la mondialisation demeure en effet responsable du programme 209 qui comprend la majeure partie des crédits de l'aide humanitaire.
Si le rôle d'animation et de pilotage confié au CDCS est bienvenu pour améliorer l'articulation entre les différents guichets d'aide humanitaire, l'optique d'une centralisation des moyens de cette aide au sein du centre ne paraît pas souhaitable. Elle contribuerait en effet à rigidifier les procédures d'attribution et de déploiement des financements et renforcerait les besoins en ressources humaines du centre. Ce dernier perdrait de surcroît en souplesse et en capacité de réaction d'urgence, éléments qui font sa spécificité et justifient son positionnement administratif et ses moyens dérogatoires.
2. En tout état de cause, dans un contexte de forte augmentation de l'aide humanitaire, les objectifs portés par le FUHS mériteraient d'être précisés
La forte progression des crédits du fond d'urgence humanitaire et de stabilisation a accru le poids du CDCS dans la gestion de l'aide humanitaire de la France. Pour autant, l'instrument du FUHS présente un certain nombre de limites, soulignée dans une évaluation réalisée par le cabinet Technopolis Group à la demande du ministère en août 2020, et qui devront être abordées dans un contexte budgétaire restrictif :
- premièrement, il n'existe aucun mandat formalisé du fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation ;
- deuxièmement, l'accroissement du volume de ce fonds a multiplié les risques de chevauchements avec les autres instruments de l'aide humanitaire. Ce risque est particulièrement élevé s'agissant de l'aide alimentaire programmée, comme l'ont souligné Michel Canévet et Raphaël Daubet, dans un récent rapport consacré à l'aide alimentaire de la France47(*) ;
- troisièmement, la mise en oeuvre du FUHS dans le domaine de la stabilisation est mal articulée avec les financements de l'Agence française de développement, comme l'indique le rapport d'évaluation de la stratégie humanitaire de la France : « une volonté stratégique commune reste à mettre en oeuvre pour assurer une réelle continuité des financements dès que cela est possible et pertinent »48(*).
Compte tenu de ce qui précède, il paraît indispensable de clarifier le mandat et les objectifs du fonds. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a indiqué qu'une note stratégique avait été rédigée à la demande du cabinet du ministre afin de définir les objectifs stratégiques assignés à chaque instrument de l'aide humanitaire. Ce document, non rendu public, pourrait fonder une doctrine de répartition entre les différents canaux de l'aide.
Recommandation n° 5 : Clarifier le mandat et les objectifs du fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation, en lien avec les autres instruments de l'aide humanitaire de la France (CDCS, MEAE).
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 20 novembre 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de Mme Nathalie Goulet et M. Rémi Féraud, rapporteurs spéciaux, sur les missions et moyens du centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des affaires étrangères.
Mme Nathalie Goulet, rapporteur spécial. - Avec mon collègue Rémi Féraud, nous allons vous présenter les conclusions de notre travail de contrôle du printemps dernier. En tant que rapporteurs spéciaux de la mission « Action extérieure de l'État », nous avons choisi de travailler sur le centre de crise et de soutien (CDCS) du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Nous avons avec cette structure une « pépite » et une spécificité française dont ne dispose quasiment aucun pays étranger.
Ce service, créé en 2008, assure au sein du Quai d'Orsay la gestion des crises internationales. Il est compétent à la fois sur les crises consulaires, impliquant des ressortissants français à l'étranger, et sur des crises humanitaires.
Deux raisons principales nous ont conduits à travailler sur cette thématique. D'une part, la multiplication des crises extérieures a conduit à placer ce service au coeur de l'actualité. Nous avons pu constater l'efficacité de son intervention lors des événements au Soudan, à Haïti ou en Israël. D'autre part, ce service a vu ses missions et ses moyens budgétaires et humains faire l'objet d'un élargissement conséquent ces dernières années.
Ainsi, entre 2013 et 2024, les crédits finançant le volet consulaire des activités du centre ont été multipliés par 2,3, tandis que l'enveloppe de ses actions humanitaires a été multipliée par quatre entre 2017 et 2024. Il nous paraissait utile d'évaluer l'adéquation de ces évolutions avec les besoins de la gestion de crise, à un moment où les crises se multiplient.
La double compétence du CDCS, pour la gestion des crises consulaires et des crises humanitaires, constitue une spécificité de l'organisation de notre diplomatie.
Sur le volet consulaire, le CDCS est chargé de la sécurité des Français à l'étranger et de la mise en oeuvre des réponses de première urgence face aux crises sécuritaires. Cette mission comprend un volet préventif, qui se traduit notamment par les fiches « conseils aux voyageurs » publiées sur le site du ministère. En cas de crise grave, le centre assure la coordination civile des évacuations de ressortissants.
Sur le volet humanitaire, le centre coordonne la réponse humanitaire d'urgence de la France. Il est chef de file au sein du ministère des affaires étrangères pour la coordination des instruments d'aide humanitaire et assure, en interministériel, le pilotage de l'acheminement de l'aide d'urgence en période de crise. En matière de coordination et d'harmonie entre les services, le CDCS fait bien office, une fois encore, de pépite.
Le financement des opérations du centre de crise suit un schéma particulier, à cheval sur deux missions budgétaires : d'une part, les dépenses de fonctionnement du centre, ainsi que les opérations d'évacuation de ressortissants, sont financées par une enveloppe spécifique du programme 105 de la mission « Action extérieure de l'État », à hauteur de 5 millions d'euros. Si ce montant est limité, il fait systématiquement l'objet d'une surexécution en cours d'exercice ; d'autre part, le financement des opérations d'aide humanitaire est assuré par le fonds d'urgence humanitaire et de soutien, doté de 200 millions d'euros et relevant de la mission « Aide publique au développement ».
Au-delà de ces deux enveloppes, le CDCS bénéficie d'avances de la part des ministères sectoriels qui interviennent à ses côtés lors de ses opérations. Il s'agit en particulier du ministère des armées, du ministère de la santé et du ministère de l'intérieur. Leur participation aux opérations est toutefois refacturée, a posteriori, au CDCS.
En outre, les opérations engagées par le centre de crise et de soutien peuvent donner lieu à une activation du mécanisme de protection civile de l'Union européenne (MPCU). Ce dispositif peut prendre en charge 75 % des frais engagés, les 25 % restants demeurent à la charge de l'État membre.
Ainsi, si le fonctionnement du centre, dans son volet tant humanitaire que consulaire, donne tout à fait satisfaction, ce schéma de financement nous paraît un peu confus et gagnerait à être plus transparent. Il n'en demeure pas moins que cet outil doit être à l'évidence sacralisé, voire dupliqué à l'étranger.
M. Rémi Féraud, rapporteur spécial. - J'aborderai, pour ma part, les points d'amélioration que nous avons pu relever au cours de nos travaux de contrôle. Nous en avons identifié trois principaux.
Tout d'abord, il nous semble que les canaux de financement du centre de crise pourraient être clarifiés. Comme l'a indiqué Nathalie Goulet, le financement des opérations les plus coûteuses, à savoir les opérations d'évacuation des ressortissants français et les opérations d'aide humanitaire, fait intervenir une multiplicité d'acteurs. Le caractère interministériel de la gestion de crise rend difficilement envisageable une simplification radicale du mode de financement.
Pour autant, il paraît nécessaire de retracer, au sein des rapports annuels de performances, l'ensemble des mouvements de crédits ayant abondé les actions du centre de crise, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Nous avons également identifié une marge certaine d'amélioration s'agissant du MPCU, et ce à deux égards. D'une part, les délais de remboursement du MPCU se sont particulièrement allongés en raison de l'accroissement du nombre de demandes, le mécanisme ayant ainsi été sollicité à 232 reprises en 2022. Or la France, principale bénéficiaire du MPCU s'agissant des opérations d'évacuation et de l'action humanitaire, est plus particulièrement affectée par ces délais. D'autre part, le cadre européen de la protection consulaire et notamment la notion d'« État pilote » tendent à confier à la France, dans un grand nombre de pays tiers, un rôle de coordination des opérations d'évacuation de ressortissants européens. De plus, certains États membres peuvent adopter des comportements non coopératifs visant à laisser la France avancer le financement et assurer l'organisation des opérations.
Nos marges de manoeuvre sont néanmoins limitées pour faire évoluer un mécanisme européen, mais nous encourageons le Gouvernement à porter cette question dans le cadre de la négociation de la nouvelle directive sur la protection consulaire.
Ensuite, les services nous ont fait remonter une appropriation perfectible par le public des outils permettant un suivi de nos ressortissants à l'étranger. C'est désormais devenu un poncif que d'évoquer la nécessité d'encourager l'inscription des Français de l'étranger sur le registre consulaire, mais cet outil est particulièrement utile au centre de crise dans le recensement des populations françaises des pays en crise. Nous avons également noté que l'inscription des Français en déplacement à l'étranger sur l'application « Fil d'Ariane » pouvait être davantage encouragée.
Enfin, nous nous sommes interrogés sur le devenir de la dualité fonctionnelle du centre de crise : est-il justifié qu'un même service assure des missions à la fois dans le domaine consulaire et dans le domaine humanitaire ? La séparation en deux du CDCS est matériellement possible puisque le service est organisé en deux pôles thématiques. Pour autant, nous avons estimé qu'une telle scission ne serait pas opportune.
Plusieurs arguments viennent au soutien de cette position. En effet, en pratique, les crises humanitaires et consulaires tendent à se superposer. Disposer d'un seul service, de surcroît placé sous l'autorité du cabinet du ministre, permet d'assurer la cohérence de nos interventions d'urgence. Toutefois, sans préempter les prérogatives des rapporteurs spéciaux des crédits de la mission « Aide publique au développement », il nous paraît nécessaire que le fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation fasse l'objet d'une doctrine d'intervention précisée.
Pour répondre à ces grands enjeux, nous avons établi cinq recommandations qui visent à améliorer le fonctionnement du centre et son schéma de financement.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Merci aux deux rapporteurs spéciaux pour m'avoir fait découvrir un dispositif qui rend efficacement des services et qui fait en effet office de modèle. Je souscris à vos recommandations visant à clarifier le financement de ce centre et je proposerai même de le consolider. Identifiez-vous un risque de voir les finances mises en tension par l'attractivité du dispositif ?
Mme Nathalie Goulet, rapporteur spécial. - Il faut conserver de la souplesse dans le dispositif, en précisant qu'une partie des coupes budgétaires qui concernent l'aide publique au développement pourraient affecter les crédits du centre de crise : il faudra donc faire preuve de vigilance sur ce point.
Les responsables du CDCS ne tiennent pas particulièrement à ce que leur structure prenne trop d'ampleur, de façon que le dispositif reste gérable. Une fois encore, nous disposons là d'une pépite qui identifie notre présence à l'étranger en temps de crise, le centre remplissant de surcroît ses missions dans le cadre budgétaire fixé.
La commission a adopté les recommandations des rapporteurs spéciaux et autorisé la publication de leur communication sous la forme d'un rapport d'information.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Ministère de l'Europe et des affaires étrangères
- M. Luis VASSY, directeur du cabinet du ministre de l'Europe et des affaires étrangères ;
- Mme Héléna ROBYN, conseillère parlementaire.
Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC)
- M. Julien MARION, directeur général de la sécurité civile ;
- Colonel Alexandre JOUASSARD, chef du Centre Opérationnel de Gestion Interministérielle des Crises ;
- Mme Clémence LECOEUR, directrice de cabinet.
Centre de crise et de soutien (CDCS)
- M. Philippe LALLIOT, directeur ;
- M. Éric PASQUEL, chef de l'unité budgétaire, administrative et de soutien logistique ;
- Mme Judith FONDANECHE, chargée de mission auprès du directeur.
Association démocratique des Français de l'étranger (ADFE)
- M. François BOUCHER, président.
France Horizon
- M. Nabil NEFFATI, directeur général ;
- M. Hubert VALADE, président.
Table ronde des principaux bénéficiaires du Fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation
- M. Kevin GOLDBERG, directeur général de Solidarités International ;
- M. Thierry MAURICET, directeur général de Première Urgence Internationale
- Mme Marie-Pierre CALEY, directrice générale d'ACTED ;
- M. Jean-Pierre DELOMIER, directeur adjoint des opérations de Handicap International.
LISTE DES DÉPLACEMENTS
Déplacement au Centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (24 mai 2024)
- M. Philippe LALLIOT, directeur, et les équipes du centre.
TABLEAU DE MISE EN oeUVRE ET DE SUIVI
N° de la proposition |
Proposition |
Acteurs concernés |
Calendrier prévisionnel |
Support |
1 |
À l'occasion de la préparation annuelle de la loi de finances, prévoir une budgétisation plus réaliste des dépenses de gestion de crise du centre de crise et de soutien (CDCS). Au stade de l'exécution, préciser dans les documents budgétaires l'ensemble des remboursements perçus et dues par le CDCS au titre de ses opérations |
Ministère de l'Europe et des affaires étrangères, CDCS |
Automne 2025 |
Projet de loi de finances et rapport annuel de performance |
2 |
Encourager la réduction des délais de remboursement des dépenses éligibles au mécanisme de protection civile de l'Union européenne |
CDCS, Représentation permanente de la France auprès de l'Union |
2025 |
Action diplomatique auprès de la Commission européenne et de nos partenaires européens |
3 |
Poursuivre les efforts de prévention à l'égard du public, notamment en s'appuyant sur les élus des Français de l'étranger, en encourageant l'inscription consulaire au registre des Français établis hors de France et le recours au Fil d'Ariane |
MEAE, CDCS |
2025 |
Action de communication du ministère |
4 |
Valoriser le modèle du CDCS, par des actions de formation destinées aux services étrangers et par une traduction des « Conseils aux voyageurs » en anglais |
MEAE, CDCS |
2024 |
Action diplomatique auprès de nos partenaires |
5 |
Clarifier le mandat et les objectifs du fonds d'urgence humanitaire et de stabilisation (FUHS), en lien avec les autres instruments de l'aide humanitaire de la France |
MEAE, CDCS |
2025 |
Instruction ministérielle |
* 1 Article 3 du décret n° 2012-1511 du 28 décembre 2012 portant organisation de l'administration centrale du ministère des affaires étrangères.
* 2 Ministère de l'Europe et des affaires étrangères, Stratégie humanitaire de la France 2023-2027.
* 3 Décision n° 1313/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relative au mécanisme de protection civile de l'Union européenne.
* 4 Alain Boinet, Benoît Mirbel, « Analyses et propositions sur l'action humanitaire dans les situations de crise et post-crises », rapport à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, mars 2010.
* 5 Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France, 2008.
* 6 Dans sa version issue du décret n° 2022-1138 du 9 août 2022 modifiant le décret n° 2012-1511 du 28 décembre 2012 portant organisation de l'administration centrale du ministère des affaires étrangères.
* 7 Par le décret n° 2015-256 du 4 mars 2015 modifiant le décret n° 2012-1511 du 28 décembre 2012 portant organisation de l'administration centrale du ministère des affaires étrangères.
* 8 Cour des comptes, L'aide apportée par l'État au Liban depuis 2020, Exercices 2020-2022, audit flash, juillet 2023.
* 9 Circulaire de la Première ministre n° 6418/SG du 26 septembre 2023 relative à l'organisation gouvernementale pour la gestion des crises majeures.
* 10 En effet, selon l'article L. 1142-6 du code de la défense, le ministère chargé des affaires étrangères : « coordonne la gestion des crises extérieures ainsi que la planification civile de celles-ci avec le concours de l'ensemble des ministères et des services de l'État concernés ».
* 11 Pour European Civil Protection and Humanitarian Aid Operations.
* 12 Auxquelles s'ajoutent 385 lignes activables en urgence.
* 13 Dont 86 postes numériques et 18 analogiques.
* 14 Centre de crise et de soutien, rapport d'activité 2023, avril 2024.
* 15 Opérationnelle depuis octobre 2021, la plateforme France consulaire vise à soulager les services consulaires des demandes des usagers par une gestion centralisée des appels depuis un centre situé à la Courneuve. Ce service répond en français, du lundi au vendredi de 9h à 17h aux demandes générales d'information et de clarification des usagers. Il est déployé sur l'ensemble du continent européen depuis 2024 et poursuit son développement sur le continent africain.
* 16 Soit 4 minutes et 50 secondes d'attente pour un temps d'attente moyen de 38 secondes les jours suivants.
* 17 Créée en 2023, la TFSI s'appuie sur la réserve sanitaire de Santé publique France.
* 18 Un protocole signé le 13 avril 2017 fixe les rôles du CDCS et de la DGSCGC dans le cadre des activités de veille, d'anticipation, d'alerte et de gestion des crises survenant à l'étranger et qui nécessitent la mise en oeuvre des moyens de sécurité civile.
* 19 En application de l'article 19 de l'arrêté du 27 décembre 2019 portant organisation de l'état-major des armées, le CPCO est chargé d'assurer « pour le chef d'état-major des armées et sous l'autorité du sous-chef d'état-major opérations, la veille stratégique permanente, la contribution à l'anticipation stratégique, la planification pré-décisionnelle et opérationnelle ainsi que la conduite générale des actions militaires décidées par le président de la République et le Gouvernement dans un cadre national ou multinational ».
* 20 Ministère de l'Europe et des affaires étrangères, Stratégie humanitaire de la France 2023-2027.
* 21 Données en date du 10 avril 2024.
* 22 France victimes (FV), la Fédération nationale des victimes d'accidents collectifs (FENVAC) ainsi que l'Association française des victimes du terrorisme (AFVT) en 2024.
* 23 Cour des comptes, Analyse de l'exécution budgétaire 2020 - Mission Action extérieure de l'État, avril 2021.
* 24 Cour des comptes, Analyse de l'exécution budgétaire 2023 - Mission Action extérieure de l'État, avril 2024.
* 25 Fonds de concours 1-2-00641 « Participations diverses aux dépenses du centre de crise et de soutien ».
* 26 Fonds de concours 1-1-00637 « Participation de la commission européenne aux dépenses du centre de crise et de soutien ».
* 27 Rapport n° 262 (2009-2010) fait par Joseph KERGUERIS au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi relatif à l'action extérieure de l'État, déposé le 3 février 2010.
* 28 À noter qu'à l'inverse, la jurisprudence est particulièrement restrictive s'agissant de l'engagement de la responsabilité de l'État fondé sur l'insuffisance ou l'inefficacité de la protection consulaire.
* 29 Cour des comptes, rapport public annuel - tome I - L'aide au retour des Français retenus à l'étranger par la pandémie de covid 19, janvier 2021.
* 30 Technopolis Group, Évaluation du Fonds d'urgence humanitaire 2015-2018, rapport final d'évaluation, août 2020.
* 31 Audition d'ACTED, de Première urgence internationale, de Handicap international et de Solidarités international, 3 mai 2023.
* 32 Annexe n° 4 au rapport (n° 128) de M. Jean-François HUSSON au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2024, faite par MM. Michel Canévet et Raphaël Daubet sur les crédits de la mission Aide publique au développement et du compte de concours financier Prêts à des États étrangers, le 23 novembre 2023.
* 33 Décision n° 1313/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relative au mécanisme de protection civile de l'Union européenne.
* 34 Article 20, paragraphe 2, point c) du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), confirmé par l'article 46 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : « Tout citoyen de l'Union bénéficie, sur le territoire d'un pays tiers où l'État membre dont il est ressortissant n'est pas représenté, de la protection des autorités diplomatiques et consulaires de tout État membre dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État ».
* 35 Directive (UE) 2015/637 du Conseil du 20 avril 2015 établissant les mesures de coordination et de coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l'Union non représentés dans des pays tiers et abrogeant la décision 95/553/CE.
* 36 L'expression « État pilote » se réfère à un ou plusieurs États membres représentés dans un pays tiers donné et chargé de coordonner et de diriger l'assistance aux citoyens non représenté pendant des crises. Cette notion issue du droit souple a été codifiée en 2015 par la directive sur la protection consulaire.
* 37 Les mesures de transposition en droit interne figurent dans le décret n° 2018-336 du 4 mai 2018 relatif à la protection consulaire des citoyens de l'Union européenne dans des pays tiers.
* 38 D'après l'audition de la DGSCGC.
* 39 Cour des comptes, La sécurité des Français à l'étranger, observations définitives, 2015.
* 40 EU-CITZEN, « Consular Protection of Unpresented EU Citizens in Third Countries - Effectiveness and Future of the EU Citizenship Right to Consular Protection Outside the EU », Madalina Moraru, 2021.
* 41 Audition du CDCS, 4 avril 2024.
* 42 Proposition de directive du Conseil modifiant la directive (UE) 2015/637 établissant les mesures de coordination et de coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire des citoyens de l'Union non représentés dans des pays tiers et la directive (UE) 2019/997 établissant un titre de voyage provisoire de l'Union européenne (COM (2023) 930).
* 43 Conseil de l'Union européenne, « Une boussole stratégique en matière de sécurité et de défense - Pour une Union européenne qui protège ses citoyens, ses valeurs et ses intérêts, et qui contribue à la paix et à la sécurité internationales », 2022.
* 44 Technopolis Group, Évaluation du Fonds d'urgence humanitaire 2015-2018, rapport final d'évaluation, août 2020.
* 45 Technopolis Group, Évaluation de l'aide alimentaire programmée du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, rapport final d'évaluation, mars 2023.
* 46 Groupe URD, Revue stratégique, « Bilan des engagements de la stratégie humanitaire de la République française 2018-2022 : une aide humanitaire plus efficace face aux crises de demain ? », janvier 2023.
* 47 Rapport d'information n° 725 (2023-2024) fait par Michel Canévet et Raphaël Daubet au nom de la commission des finances sur l'aide alimentaire dans le cadre de l'aide publique au développement, 10 juillet 2024.
* 48 Groupe URD, Revue stratégique, « Bilan des engagements de la stratégie humanitaire de la République française 2018-2022 : une aide humanitaire plus efficace face aux crises de demain ? », janvier 2023.