C. MOBILISER TOUS LES ACTEURS POUVANT CONTRIBUER AU RESPECT DES PRINCIPES DE SUBSIDIARITÉ ET DE PROPORTIONNALITÉ
1. Renforcer la place des Parlements nationaux, notamment en matière de contrôle du respect du principe de subsidiarité
Les Parlements nationaux, qui représentent les peuples, ont un rôle essentiel à jouer pour rapprocher l'Union européenne et les citoyens. Le renforcement du rôle des Parlements nationaux permettrait de rendre l'Union européenne plus proche des citoyens et son action plus légitime et plus efficace.
À l'initiative du Sénat, un groupe de travail a été constitué au sein de la COSAC, sous présidence française de l'Union européenne, chargé de proposer les moyens de renforcer le rôle des Parlements nationaux dans l'Union européenne.
À l'issue de ses travaux, ce groupe de travail a publié un rapport, en juin 2022104(*), qui avance plusieurs propositions.
Il propose d'abord de mieux surveiller le respect du principe de subsidiarité, notamment en abaissant à un quart des voix des Parlements nationaux le seuil de déclenchement du "carton jaune" et en portant de huit à dix semaines le délai accordé aux Parlements nationaux pour qu'ils procèdent au contrôle de subsidiarité.
Il préconise aussi de mieux associer les parlements nationaux au processus décisionnel, dès la phase pré-législative. Il appelle à renforcer le rôle de contrôle des parlements nationaux vis-à-vis du Conseil mais aussi de la Commission européenne, en ouvrant aux parlements nationaux un droit de questionnement écrit. Enfin, il plaide pour développer le dialogue entre les parlements nationaux et les institutions européennes et pour rendre plus efficace la coopération interparlementaire.
Les rapporteurs font leurs ces propositions, que la COSAC plénière réunie à Budapest du 27 au 29 octobre dernier a elle-même endossées dans sa contribution finale105(*).
Proposition n° 8 : Faciliter le contrôle du respect du principe de subsidiarité par les Parlements nationaux, en portant de huit à dix semaines sa durée et en abaissant à un quart des chambres parlementaires nationales le seuil à partir duquel la Commission doit reprendre sa proposition législative (déclenchement du « carton jaune »)
2. Inciter les États membres réunis au Conseil à procéder à un examen préalable de toute initiative européenne au titre de la subsidiarité et de la proportionnalité
Les États membres devraient, préalablement à l'examen au fond, procéder à un examen systématique de toute nouvelle initiative législative au regard de la subsidiarité et de la proportionnalité afin de vérifier si cette proposition apporte une réelle « valeur ajoutée » et si les moyens envisagés sont proportionnés.
Le respect du principe de subsidiarité s'impose à l'ensemble des institutions européennes, en particulier au Conseil, comme cela a été rappelé précédemment.
Or, comme le SGAE en a fait état aux rapporteurs lors de son audition, il est rare qu'au sein du Conseil, qui réunit les ministres des 27, la question du respect du principe de subsidiarité soit évoquée.
Le Conseil d'État considère, dans son récent rapport sur la souveraineté, que « le Conseil devrait jouer un rôle moteur s'agissant du respect du principe de subsidiarité au sein des institutions de l'Union », notamment afin de garantir que les États membres conservent, en vertu des traités, la compétence de principe qui est la leur, y compris s'agissant des actes délégués.
Le Conseil d'État recommande à cet égard de mettre en place « une Madame ou un Monsieur subsidiarité » qui serait nommé par le Président du Conseil européen pour intervenir auprès du Conseil de l'Union. Cette personnalité s'appuierait sur un service placé au sein du secrétariat général du Conseil. Elle serait chargée de « développer une expertise et une vigilance particulières au Conseil, y compris en nouant des relations avec les parlements nationaux ». Le Conseil d'État suggère aussi qu'au niveau national, le Secrétariat général des affaires européennes coordonne pour sa part un suivi interministériel du principe de subsidiarité.
Les rapporteurs estiment eux aussi souhaitable d'inviter les représentants des États membres réunis au sein du Conseil à examiner systématiquement - et préalablement à son examen au fond - si toute nouvelle initiative législative européenne est conforme aux principes de subsidiarité et de proportionnalité, c'est-à-dire à vérifier si celle-ci est susceptible d'apporter une réelle « valeur ajoutée » et si les moyens envisagés sont pertinents pour atteindre les objectifs fixés. Ils sont toutefois réservés sur l'opportunité de créer à cet effet une fonction nouvelle de représentant, spécialement nommé par le Président du Conseil européen pour inciter le Conseil à y veiller.
Proposition n° 9 : Inciter les États membres réunis au Conseil à examiner la conformité de toute initiative européenne aux principes de subsidiarité et de proportionnalité, en amont de sa négociation
3. Rétablir un poste de vice-président de la Commission européenne chargé de la simplification et de la subsidiarité
Dans son rapport sur l'avenir de la compétitivité européenne, Mario Draghi recommande de nommer un vice-Président de la Commission européenne chargé de la simplification afin de rationaliser l'acquis, tout en adoptant une méthodologie unique et claire pour quantifier le coût du nouveau « flux » réglementaire.
Il estime également qu'au début de chaque mandat de la Commission européenne, « une période fixe d'au moins six mois devrait être consacrée à l'évaluation systématique et au test de résistance de toute la réglementation existante par secteur d'activité économique ».
Le précédent collège de la Commission européenne présidé par Ursula von der Leyen comptait un vice-président chargé des relations interinstitutionnelles, Maros efèoviè, qui était notamment chargé du « mieux légiférer » et des relations avec les Parlements nationaux.
Il est regrettable à cet égard que, dans le nouvel organigramme de la Commission européenne présenté récemment par la présidente Ursula von der Leyen, le Commissaire européen chargé des relations interinstitutionnelles et des relations avec les Parlements nationaux ait été « rétrogradé » au poste de simple Commissaire européen et non plus de vice-président et que son « portefeuille » ait été scindé, puisque la simplification et la « meilleure réglementation » seraient confiés à un autre Commissaire européen, en l'occurrence Valdis Dombrovskis.
La simplification représente pourtant un sujet majeur et transversal, qui devrait relever du portefeuille d'un vice-président, comme le propose Mario Draghi dans son rapport. On pourrait utilement y ajouter la question de la subsidiarité.
Par ailleurs, le rôle du secrétariat général de la Commission européenne en matière de qualité législative et de contrôle de la subsidiarité à l'égard des autres directions générales et services mériterait d'être renforcé.
Sous l'autorité du Président de la Commission européenne et du vice-Président chargé de la simplification et de la subsidiarité, le secrétariat général de la Commission européenne pourrait jouer un rôle semblable à celui du secrétariat général du gouvernement en France et exercer un contrôle plus strict sur la base juridique, le choix des instruments, les études d'impact et la qualité des textes.
Proposition n° 10 : Rétablir un poste de Vice-Président de la Commission européenne chargé de la simplification et de la subsidiarité et renforcer le rôle du secrétariat général de la Commission européenne
* 104 Conclusions du groupe de travail de la COSAC sur les Parlements nationaux de juin 2022.
* 105Cf. alinéas 14 à 19 de la contribution accessible à cette adresse : file:///C:/Users/abornens/Downloads/LXXII%20COSAC%20Contribution%20FR.pdf