N° 567

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 30 avril 2025

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le rapport d'avancement annuel
du
plan budgétaire et structurel à moyen terme 2025-2029,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Claire Carrère-Gée, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet,
MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre,
Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek,
Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

AVANT-PROPOS

Pour la première fois depuis l'entrée en vigueur du nouveau cadre de gouvernance économique de l'Union européenne le 29 avril 2024, le Gouvernement remet à la Commission européenne un rapport d'avancement annuel (RAA) : celui de 2025 portant sur le plan budgétaire et structurel de moyen terme (PSMT) 2025-20291(*).

Le nouveau cadre de gouvernance économique de l'Union européenne

Engagée en avril 2023 sur le fondement d'une proposition de la Commission européenne, la réforme du pacte de stabilité et de croissance s'est traduite par l'adoption, le 29 avril 2024, d'une directive2(*) et de deux règlements, l'un portant réforme du volet préventif3(*) et l'autre du volet correctif4(*) du cadre budgétaire. Ces règles budgétaires révisées ont en particulier institué un nouvel indicateur de suivi de l'effort de redressement des comptes publics : la dépense primaire nette, définie comme les dépenses publiques, déduction faite des dépenses d'intérêts, des mesures discrétionnaires en matière de recettes, des dépenses relatives aux programmes de l'Union entièrement compensées par des recettes provenant de fonds de l'Union, des dépenses nationales de cofinancement des programmes financés par l'Union, ainsi que des éléments cycliques des dépenses liées aux indemnités de chômage. Après que la Commission leur a proposé une trajectoire de référence, les États membres dont la dette publique est supérieure à 60 % du PIB ou dont le déficit public dépasse 3 % du PIB déterminent, dans le cadre du plan budgétaire et structurel de moyen terme (PSMT) d'une durée de quatre ou cinq ans, leur trajectoire de dépense nette, et celle-ci doit être validée par le Conseil. Cette trajectoire est sous-jacente à une période d'ajustement, de quatre ou sept ans, à l'issue de laquelle le déficit public doit être inférieur à 3 % et la dette publique orientée sur une trajectoire descendante. À l'appui d'un allongement de la période d'ajustement, les États membres détaillent la liste des réformes et des investissements conformes aux priorités communes de l'Union européenne qu'ils comptent déployer sur la durée du plan. Tous les ans, les États membres communiquent avant le 30 avril à la Commission un rapport d'avancement annuel (RAA) qui remplace le programme de stabilité et le programme national de réforme, et vise à assurer le suivi de l'application du PSMT. En cas de déviation ponctuelle ou cumulée trop importante par rapport à la trajectoire de dépense nette - enregistrée dans un compte de contrôle - les États membres, si leur déficit public est par ailleurs supérieur à 0,5 % du PIB et leur dette publique supérieure à 60 % du PIB, se voient appliquer la procédure de déficit excessif. Par ailleurs, il faut noter que, dans le cadre de la procédure de déficit excessif, la trajectoire de dépense nette est également la trajectoire de correction.

Source : commission des finances du Sénat

Le PSMT de la France, adopté en Conseil des ministres le 23 octobre 2024, a fait l'objet d'un débat en séance publique au Sénat le 30 octobre5(*). En cohérence avec les amendements au projet de loi de finances portés par le nouveau Gouvernement, ce dernier avait rectifié la trajectoire de dépenses qu'il contenait sans que le Sénat n'en ait alors eu connaissance et, sur cette base, le PSMT a été validé par le Conseil de l'Union européenne le 21 janvier 2025.

Le RAA est un rapport de suivi du PSMT et n'a pas la vocation prospective (mais non contraignante) qu'avaient le programme de stabilité et le programme national de réforme, qu'il remplace dans le calendrier du semestre européen. Présenté le 16 avril 2025 en Conseil des ministres par le ministre de l'économie et des finances, le RAA doit être transmis avant le 30 avril à la Commission européenne.

Alors que la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) n'a pas encore été actualisée pour tenir compte du remplacement du programme de stabilité par le PSMT et le RAA, le Gouvernement a transmis au Haut conseil des finances publiques ce dernier document en amont de sa transmission au Parlement, comme prévu à l'article 1er K de la LOLF, puis à la Commission européenne. La commission des finances salue ce geste sans en exagérer la portée : la transmission du programme de stabilité était une pratique bien établie et la forte dégradation des finances publiques de notre pays, qui nécessite une transparence accrue, aurait rendu impensable la rétention de ce document par le Gouvernement.

I. LE RENFORCEMENT DES INCERTITUDES DÉGRADE UNE SITUATION ÉCONOMIQUE DÉJÀ MOYENNE ET REND L'EXERCICE DE PRÉVISION DÉLICAT

A. LES PERFORMANCES ÉCONOMIQUES RÉCENTES DE LA FRANCE DEMEURENT INFÉRIEURES À CELLES DE LA ZONE EURO

Si l'on se limite à l'année 2024, l'économie française est, avec une croissance de 1,1 %, très légèrement plus performante que la zone euro dans son ensemble, qui enregistre une hausse de 0,9 %. Cela est principalement dû à la situation de l'économie allemande, qui a subi une récession pour la deuxième année consécutive (- 0,2 % après - 0,3 % en 2023). Si l'économie italienne a connu l'an dernier une croissance médiocre (0,7 %), les économies portugaise, grecque et espagnole se sont montrées particulièrement dynamiques, avec des taux de croissance respectifs de 1,9 %, 2,3 % et 3,2 %6(*), les causes de la croissance espagnole étant principalement à chercher du côté de son secteur touristique diversifié, de l'immigration alimentant un marché de l'emploi dynamique et de la hausse des dépenses publiques liées au plan de relance européen NextGenerationEU.

En revanche, entre la fin 2019 et la fin 2024, le PIB de la France a progressé de près d'un point et demi de moins que celui de la zone euro sur cette même période. La performance française reste supérieure de près de quatre points à celle de l'Allemagne.

Croissance du PIB de quelques pays entre 2019 et 2024, en %

Source : commission des finances du Sénat d'après l'OFCE7(*)

Trajectoire du PIB de quelques pays depuis le début de la crise sanitaire

Source : OFCE8(*)

Ainsi, en comparaison aussi bien des États-Unis que de nos partenaires européens, la performance de l'économie française depuis six ans est médiocre.


* 1 Plan budgétaire et structurel à moyen terme 2025-2029, publié le 23 octobre 2024.

* 2 Directive (UE) 2024/1265 du Conseil du 29 avril 2024 modifiant la directive 2011/85/UE sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres.

* 3 Règlement (UE) 2024/1263 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2024 relatif à la coordination efficace des politiques économiques et à la surveillance budgétaire multilatérale et abrogeant le règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil.

* 4 Règlement (UE) 2024/1264 du Conseil du 29 avril 2024 modifiant le règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs.

* 5 Voir le compte-rendu de la séance du 30 octobre 2024 sur le débat sur le plan budgétaire et structurel national à moyen terme et l'orientation des finances publiques.

* 6 Données Eurostat.

* 7 « France : l'incertaine croissance. Perspectives 2025-2026 pour l'économie française ». Policy brief n° 144, 9 avril 2025, Observatoire français des conjonctures économiques.

* 8 « Climats hostiles. Perspectives 2025-2026 pour l'économie mondiale. Policy brief n° 143, 9 avril 2025, Observatoire français des conjonctures économiques.

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