N° 843

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 juillet 2025

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le contrôle de légalité
et
budgétaire des actes des collectivités territoriales,

Par Mme Florence BLATRIX CONTAT,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Claire Carrère-Gée, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

L'ESSENTIEL

Les contrôles de légalité et budgétaires sont sans cesse présentés comme une politique prioritaire du ministère de l'intérieur, avec l'objectif de les moderniser, conformément au plan « missions prioritaires des préfectures » pour 2022-2025. Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », a présenté le mercredi 9 juillet 2025 les conclusions de ses travaux de contrôle sur cette politique, dont les moyens dédiés contrastent avec les objectifs affichés.

I. UN CONTRÔLE DE LÉGALITÉ FANTOMATIQUE AU REGARD DE LA CONTRACTION DES EFFECTIFS ET DE L'INADAPTATION DES LOGICIELS UTILISÉS PAR LES PRÉFECTURES

A. DES EFFECTIFS EN DISSONANCE AVEC L'AUGMENTATION DU NOMBRE D'ACTES TRANSMIS, SOURCE D'UN AFFAIBLISSEMENT DES CONTRÔLES

1. Une baisse continue des effectifs, non revalorisés dans le cadre de la LOPMI

De 2012 à 2020, les effectifs des préfectures et des sous-préfectures sont passés de 83 027 équivalents temps plein travaillés (ETPT) à 70 608 ETPT, soit une perte de 14 % des effectifs initiaux. Cette contraction se reflète particulièrement au sein des services en charge du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire, dont les effectifs représentent 4 % des emplois rémunérés par le programme 354 « Administration territoriale de l'État ».

Ils sont passés de 1 019 ETP en 2010 à 868 ETP en 2024 s'agissant du seul contrôle de légalité, ce qui représente une baisse de l'ordre de 15 % des emplois sur la période. Les effectifs en charge des contrôles budgétaires ont été affectés encore plus durement, passant de 343 ETP en 2010 à 252 ETP en 2024, soit une baisse de 26,5 % des emplois. Sur cette période, ces services ont perdu en moyenne 1,1 % de leurs effectifs tous les ans.

Évolution des effectifs au regard du nombre d'actes transmis et contrôlés
entre 2015 et 2024

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données de la DGCL

En parallèle, le nombre d'actes transmis annuellement au niveau national est passé de 5,15 à 7,72 millions d'actes, dont la moitié concerne les trois domaines prioritaires du contrôle de légalité (commande publique, fonction publique territoriale et urbanisme), et ce malgré une politique de réduction des actes obligatoirement transmissibles.

Pour autant, ces services n'ont été destinataires d'aucune des plus de 300 créations de poste intervenues pour l'heure dans le cadre de la loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI). Enfin, il apparaît que les effectifs sont répartis sur le territoire sans aucune corrélation avec le nombre d'actes transmis, en l'absence de dialogue de gestion au niveau des préfets de région.

2. Un taux de contrôle qui tend à se réduire, notamment pour les actes prioritaires

Si le nombre d'actes contrôlés a certes augmenté en volume, passant de 1,06 million en 2015 à 1,52 million d'actes en 2024, le taux de contrôle a en revanche diminué. Alors qu'il était de 20,6 % en 2015, il n'est plus que de 17,8 % en 2023. Pour l'année 2024, le taux de contrôle remonte pour s'établir à 19,6 %.

Par ailleurs, le taux de contrôle des actes prioritaires tend également à se réduire. Alors qu'il était de 89 % en 2015, il n'est plus que de l'ordre de 83 % en 2024, s'éloignant de la cible figurant dans le projet annuel de performances pour ces actes prioritaires, qui était de 90 %. Il est également très contrasté selon les départements, variant de 33 % à 99 % en fonction des territoires.

Enfin, il demeure une zone grise du contrôle de légalité s'agissant des entreprises publiques « satellites » des collectivités, largement soustraites à ce contrôle du fait de leur régime de droit privé. Elles n'en demeurent pas moins constitutives de risques financiers pour les collectivités et pénaux pour les élus, comme le révèlent les contrôles des comptes et de la gestion exercés par les chambres régionales des comptes.

3. Un nombre de recours gracieux non suivis d'effet toujours élevé

Statistiques nationales du contrôle de légalité en 2024

Les recours gracieux formés par les préfets en cas d'irrégularité ne sont pas toujours suivis d'effet. En 2024, sur 13 824 recours gracieux formés, seulement 7 799 actes ont été modifiés ou retirés par les collectivités et 838 actes ont été déférés devant des tribunaux administratifs. Par conséquent, 5 187 recours gracieux n'ont débouché sur aucune action de la part des collectivités ou bien des préfets, ce qui représente plus de 37 % des recours gracieux initialement formés.

Entre 2020 et 2024, plus de 35 % des actes irréguliers détectés chaque année par le contrôle de légalité et signalés par un recours gracieux ne sont ni retirés, ni déférés pour autant.

Relations entre les effectifs et les déférés préfectoraux déposés en 2024

Source : commission des finances du Sénat

Les disparités territoriales constatées dans l'exercice des contrôles s'expliquent par des causes profondes et multifactorielles. En premier lieu, il demeure une certaine frilosité du corps préfectoral à déférer, en particulier lorsqu'il s'agit de grosses collectivités. En second lieu, même s'il n'est pas possible d'établir un lien causal entre les effectifs et les déférés, il apparaît toutefois une corrélation entre les départements les mieux dotés en effectifs et ceux où le nombre de déférés est le plus dynamique.

B. DES PERTES D'EFFECTIFS INSUFFISAMMENT COMPENSÉES PAR UN REPYRAMIDAGE DES COMPÉTENCES ET PAR DES FORMATIONS ET OUTILS APPROPRIÉS

1. Un repyramidage des catégories timoré et insuffisant au regard de la complexification des sources juridiques du contrôle

Le plan « Préfectures nouvelle génération » (PPNG), lancé en juin 2015, entendait opérer un repyramidage des compétences des personnels des préfectures à horizon 2020. Celui-ci a finalement été atteint quatre ans après l'année cible initiale. En effet, en 2024, les services dédiés au contrôle de légalité sont composés de 200 agents de catégorie A (23 %), 477 agents de catégorie B (55 %) et 191 agents de catégorie C (22 %). S'agissant des services en charge du contrôle budgétaire, ils comportent quant à eux 59 agents de catégorie A (24 %), 133 agents de catégorie B (53 %) et 58 agents de catégorie C (23 %).

Évolution des effectifs par catégories entre 2016 et 2024
pour le contrôle de légalité

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données de la DGCL

Ce repyramidage est toutefois encore en décalage avec les compétences techniques et d'expertise juridique attendues des agents, dans un contexte de complexification croissante du droit. Les préfectures doivent alors recourir à des recrutements contractuels de diplômés en droit sur ces postes. Par ailleurs, une trop grande part des effectifs, de l'ordre de 20 %, est encore dédiée à la réception et au tri des actes, et pourrait être davantage orientée vers l'accompagnement des collectivités territoriales et le contrôle juridique.

2. Une intensification des formations, encore trop éloignées de la prise de poste des agents

L'offre distancielle s'est étoffée à partir de janvier 2024, avec le déploiement d'une formation « tronc commun » dès la prise de poste disponible sur la plateforme interministérielle Mentor, afin qu'elle soit accessible également aux agents du ministère de l'aménagement du territoire et de la décentralisation exerçant une mission de contrôle de légalité en dans les directions départementales des territoires. Cette e-formation, d'une durée d'uniquement deux heures, expose les aspects généraux du contrôle de légalité. Les formations plus thématiques sont quant à elles accessibles sur la plateforme ForMI du ministère de l'intérieur.

Elles peuvent être complétées le cas échéant par des formations en présentiel, organisées par les services régionaux de formation. À partir de 2024, les formations en présentiel se sont intensifiées, permettant ainsi la tenue de 118 formations sur la période 2020-2024, avec 909 agents formés.

Toutefois, l'organisation des formations « tronc commun » en présentiel peut intervenir parfois jusqu'à un an et demi après la prise de poste des agents, et des disparités territoriales assez fortes sont constatées en la matière. Outre l'éloignement temporel, les agents auditionnés ont signalé le caractère insuffisamment opérationnel des « mallettes pédagogiques », surtout en ce qui concerne l'urbanisme. Enfin, ces dernières semblent largement orientées vers la pédagogie, parfois au détriment de l'expertise technique.

3. Des logiciels de contrôle devenus obsolètes et peu ergonomiques pour les usagers

Les applications @ctes et @ctes budgétaires permettent aux collectivités territoriales de télétransmettre leurs actes aux services préfectoraux afin de les rendre immédiatement exécutoires, en lieu et place de la transmission papier. Ces deux applications ont respectivement été déployées en 2005 et 2011, et ont été peu refondues depuis, si bien qu'elles accusent une dette technique importante. Tous les agents auditionnés ont relevé l'absence d'ergonomie et de fiabilité de ces applications, qui n'est d'ailleurs toujours pas une boîte de dialogue avec les collectivités, mais un seul canal de transmission.

Pour autant, les coûts annuels des logiciels @ctes et @ctes budgétaires sont dynamiques et ont augmenté de 34 % entre 2019 et 2024. Une grande part de coûts sont captés par les frais d'assistance à maîtrise d'ouvrage (AMOA) qui rémunèrent le prestataire extérieur de la direction générale des collectivités locales (DGCL). Sur la période 2015-2025, le coût des deux logiciels s'est élevé à 13,8 millions d'euros dont plus de 7 millions d'euros pour l'assistance à maîtrise d'ouvrage, soit 50,7 % des coûts totaux. Un tel montant interroge, d'autant qu'aucun projet d'ampleur de refonte des systèmes d'information n'a été mené sur cette période.

Coûts annuels des logiciels Actes et Actes budgétaires entre 2018 et 2024

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la DTNUM

Une refonte d'ampleur devrait intervenir d'ici 2027, pour un coût évalué entre 7 et 10 millions d'euros selon les différentes hypothèses d'intégration de l'intelligence artificielle.

II. UNE RÉORGANISATION DES CONTRÔLES POUR VALORISER LA MUTUALISATION DE L'EXPERTISE, OPÉRÉE DE FAÇON PEU UNIFORME SELON LES TERRITOIRES

A. LE PIACL, ORGANISME CONSULTATIF D'ASSISTANCE JURIDIQUE À DISPOSITION DES PRÉFECTURES

Le pôle interrégional d'appui au contrôle de légalité (PIACL), créé à titre expérimental en 2002, avant de devenir une entité à part entière de la sous-direction des compétences et institutions locales de la DGCL fin 2006, a pour mission principale l'assistance juridique aux services de contrôle de légalité et budgétaire des préfectures. Il dispose d'effectifs limités, qui sont passés de 17 ETP en 2013 à 22 ETP en 2019, répartis en cinq chambres spécialisées.

Depuis une dizaine d'années, le nombre de saisines du PIACL a baissé de 10 % en moyenne par an, pour s'établir à environ 1 100 saisines depuis 2020. Le nombre d'avis rendus a diminué du même ordre de grandeur, pour s'établir lui aussi à 1 100 avis. Cette baisse en volume ne signifie pour autant pas un ralentissement de l'activité du PIACL, qui rend des avis étoffés. Son utilité est unanimement reconnue par les agents préfectoraux. En outre, ses personnels sont aujourd'hui davantage sollicités en matière de formation, à travers l'animation d'ateliers ou de conception de mallettes pédagogiques et grilles de contrôle à destination des agents affectés dans les services de contrôle de légalité et budgétaire.

B. DES PARTENARIATS HÉTÉROGÈNES AVEC LES DIRECTIONS DÉPARTEMENTALES DES TERRITOIRES POUR LES ACTES D'URBANISME

Les directions départementales des territoires (DDT) et des directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) peuvent participer au contrôle de légalité des actes d'urbanisme depuis 2009, afin d'externaliser le contrôle là où se situent les compétences. Des partenariats existent dans la moitié des départements, plus ou moins approfondis selon les territoires, à raison principalement des effectifs disponibles dans ces services. Sur la période 2015-2020, ils ont été plutôt stables, passant de 80,3 ETPT en 2015 à 84,2 ETPT en 2020, avec un pic observé à 98,1 ETPT en 2018. Aucune direction centrale ne dispose en revanche de données sur les effectifs dédiés à ces contrôles au sein des DDT(M) après 2021.

Les agents des DDT(M) ont été progressivement intégrés au réseau du contrôle de légalité. Une évolution majeure est à relever en 2023 puisque les agents des DDT(M) ont désormais accès au PIACL et à la plateforme du SIACL. Les DDT(M) semblent pour l'heure s'être peu servies de cette possibilité au regard de la faible part des saisines du PIACL en matière d'urbanisme.

C. DES PARTENARIATS CONVENTIONNELS AVEC LES DR/DDFIP POUR LE CONTRÔLE BUDGÉTAIRE ET LE CONTRÔLE DES DÉLIBÉRATIONS FISCALES

Les directions départementales et régionales des finances publiques (DD/DRFIP) peuvent apporter leur soutien aux préfectures chargées du contrôle budgétaire conformément à une convention toujours active signée le 7 novembre 2013 entre la DGFiP et la DGCL déclinée ensuite en conventions locales. En effet, un certain nombre de contrôles réalisés par les comptables sur les documents budgétaires permettent d'identifier et de corriger des anomalies. Toutefois, cet appui apparaît pour l'heure largement informel dès lors que seulement 13 préfectures ont formalisé un tel partenariat par une convention ou un protocole d'accord, selon les données remontées de la DGCL pour la période 2019-2021. Par ailleurs, le partenariat est pour l'heure théoriquement limité au seul contrôle budgétaire, même si des partenariats sont étendus dans les faits au niveau local au contrôle des délibérations fiscales.

Une actualisation de la convention de 2013 est en cours par la DGCL et la DGFiP, afin de confier aux DD/DRFIP l'examen de l'ensemble des délibérations fiscales soumises au contrôle de légalité. L'approfondissement du contrôle partenarial est toutefois conditionné à l'interfaçage des applicatifs, et principalement aux évolutions du logiciel @ctes pour se mettre au niveau technique des applications de la DGFiP.

III. MODERNISER LES CONTRÔLES DE LÉGALITÉ ET BUDGÉTAIRES

A. 1ER AXE : CONSOLIDER LE NIVEAU DES EFFECTIFS, AVEC DES FORMATIONS OPÉRATIONNELLES DÈS LA PRISE DE POSTE DES AGENTS

1. Une consolidation des effectifs dans les préfectures et au niveau central

Dans son rapport de 2022, la Cour des comptes avait estimé qu'un renforcement des effectifs à hauteur de 190 ETP serait nécessaire pour que l'État mène à bien ces contrôles. Si ce niveau de renforcement paraît à moyen terme difficile à atteindre au regard du nombre total des 350 créations de postes envisagées dans le cadre de la LOPMI, il apparaît a minima nécessaire de consolider le niveau des effectifs en charge des contrôles de légalité et budgétaires en fonction des besoins des préfectures, d'autant plus que le ministère de l'intérieur martèle le caractère prioritaire de cette mission constitutionnelle dévolue aux préfets. Ce niveau d'effectifs devrait pouvoir ressortir des documents budgétaires, au moins en ce qui concerne ceux affectés en préfectures, ce qui n'est pas le cas en l'état du projet annuel de performances de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». En ce qui concerne les effectifs affectés dans les DDT, la rapporteure spéciale estime que le suivi devrait être repris par la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN), ne serait-ce que sur une base déclarative.

Le suivi des effectifs au niveau agrégé est un préalable nécessaire afin de s'assurer de l'adéquation entre la répartition territoriale des effectifs et les enjeux du contrôle de légalité et budgétaire dans chaque département.

De plus, le repyramidage des effectifs au profit des agents de catégorie A doit de nouveau être envisagé dans ces services, au regard de la complexité des normes juridiques à appliquer. À moyen terme, ce repyramidage pourra d'ailleurs certainement être opéré à effectifs constants grâce aux gains permis par l'intelligence artificielle du point de vue du tri des actes.

Enfin, 6 ETP au niveau de la DGCL à l'heure actuelle ne paraissent pas suffisants pour répondre aux enjeux qui attendent les contrôles de légalité et budgétaires, notamment en termes d'évolutions numériques et de besoins d'animation d'un réseau étendu.

2. Accroître l'offre de formation, en professionnalisant les contenus, sous l'égide du PIACL

Les formations en présentiel d'une durée d'une journée et demi à deux jours selon le contrôle de légalité ou le contrôle budgétaire doivent être privilégiées dans un délai de six mois à compter de la prise de poste des agents dans tous les territoires. Les cas pratiques, qui sont les exercices les plus utiles pour l'exercice des missions des agents, ne peuvent être réalisés qu'en présentiel et mériteraient de constituer d'ailleurs une part plus importante de la formation initiale. Les formations continues doivent aussi être plus adaptées à la réalité des contrôles quotidiens effectués par les agents, et particulièrement dans le domaine de l'urbanisme.

Au regard de la qualité du travail fourni par le PIACL et de la satisfaction manifestée par les agents préfectoraux, la rapporteure spéciale estime que la mission de formation du PIACL doit être davantage développée. En ce sens, elle ne saurait que rejoindre la recommandation déjà formulée par la Cour des comptes en 2022 visant à confier à ce pôle un rôle de chef de file en matière de formation, notamment à raison du caractère nécessairement interministériel des formations. Il apparaît a minima nécessaire d'avoir un référent formation au sein du PIACL, en charge du suivi des webinaires et des foires aux questions (FAQ) disponibles après la formation, de l'élaboration de nouvelles grilles de contrôle et d'une veille jurisprudentielle très largement diffusée.

B. 2ÈME AXE : SYSTÉMATISER LES PARTENARIATS INSTITUTIONNELS

Les partenariats mis en place avec les DDT répondent à un besoin de spécialisation fort en matière d'urbanisme, si bien qu'il apparaît peu réaliste que les agents en préfecture soient experts de toutes les matières prioritaires du contrôle de légalité et dès lors que les compétences existent dans les DDT. Par ailleurs, les enjeux du contrôle de légalité en urbanisme, déclinés dans la stratégie nationale, par la DGCL, et départementale, par les préfets, répondent aux politiques publiques portées par les DDT. Elles sont donc un maillon essentiel dans la chaîne du contrôle de légalité des actes d'urbanisme, sur lesquelles il convient de s'appuyer dès lors que les effectifs le permettent localement.

Comme pour le contrôle des actes d'urbanisme, afin de perfectionner la qualité et la célérité du contrôle des services de l'État déconcentré, l'expertise des directions départementales et régionales des finances publiques apparaît capitale, d'autant que la DGFiP travaille au développement de contrôles automatisés, grâce à l'intelligence artificielle, qui devraient voir le jour à court terme.

Ce partenariat devrait être rendu obligatoire et parait pouvoir être mis en oeuvre à droit constitutionnel constant, dès lors que cette délégation partielle du contrôle ne remet pas en cause les dispositions de l'article 72 de la Constitution, à l'image de ce qui est fait avec les DDT. La responsabilité du contrôle relève toujours du préfet, à qui il revient de saisir, en cas d'irrégularités et s'il l'estime nécessaire, la juridiction compétente.

C. 3ÈME AXE : DÉVELOPPER UN ENVIRONNEMENT NUMÉRIQUE PROPICE À LA MISE EN oeUVRE DE L'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE À COURT TERME

La refonte du logiciel @ctes d'ici 2027 est consubstantielle à la modernisation des contrôles de légalité et budgétaires. La rapporteure spéciale sera donc vigilante à l'avancée de ce projet, en particulier quant au déploiement de l'intelligence artificielle et à son coût, au regard de l'assistance à maîtrise d'ouvrage confiée à un prestataire extérieur. La conduite de ce projet ne saurait exclure d'ici là des améliorations de l'expérience utilisateur au regard des besoins manifestés par les agents sur le terrain.

Ces derniers doivent également pouvoir disposer d'une plateforme numérique, pilotée au niveau central, afin de développer la collaboration entre la DGCL et les agents en charge des contrôles.

Enfin, dans le cadre de la transformation partenariale du contrôle de légalité, le conseil tend à prendre une part non négligeable du temps de travail des agents en charge des contrôles. Selon les éléments transmis par la DGCL, la fonction de conseil représente 50 % de l'activité des services en charge du contrôle de légalité et peut même atteindre 70 % dans certaines préfectures. En ce qui concerne le contrôle budgétaire, la part de conseil représenterait plutôt de l'ordre de 30 %. Toutefois, cette activité n'est pas vraiment quantifiée. Si les premières expérimentations menées par la direction du management de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (DMATES) n'ont pas prospéré, la rapporteure spéciale est toutefois convaincue de l'utilité de quantifier cette part de conseil dans l'objectif de valorisation du travail de conseil effectué par les services. Sans créer une « usine à gaz » pour les agents, la refonte du logiciel @ctes peut être l'occasion de créer une case dédiée à cocher par les agents, avec une évaluation du temps passé à conseiller les collectivités, et de préciser les différents canaux utilisés (téléphone, mail, etc.).

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