III. LA MODERNISATION DES PROCÉDURES
Le redéploiement des moyens rendrait le dispositif plus
logique et plus équitable sans augmenter sensiblement sa capacité
globale. Une augmentation substantielle de celle-ci ne peut non plus être
attendue à moyen terme d'une meilleure assistance au travail du juge.
De telles mesures ne sauraient donc suffire à recréer les
conditions d'un traitement convenable en terme de quantité, de
rapidité et de qualité des divers contentieux, en particulier du
contentieux de masse qui ne cesse d'augmenter
(cf. première partie
du rapport).
Ce constat conduit inéluctablement à s'interroger sur la
possibilité d'une adaptation structurelle de l'appareil judiciaire. La
mission est ainsi conduite à examiner les questions
évoquées depuis longtemps dans les milieux judiciaires mais qui,
à l'exception de la collégialité, n'ont pas jusqu'à
présent donné lieu à des décisions
concrètes. Les questions les plus fréquemment posées sont
les suivantes :
1/ la collégialité doit-elle connaître de nouveaux reculs
en faveur du juge unique ?
2/ des simplifications de procédure sont-elles possibles ?
3/ l'abus du recours à la justice peut-il être évité
?
Enfin, quelles que soient les réponses données aux questions qui
précèdent, la seule réponse dont l'ampleur correspond
à celle du problème n'est-elle pas de s'interroger sur le point
de savoir si le processus judiciaire que nous connaissons est bien
adapté à certaines formes nouvelles de contentieux ou s'il ne
faut pas
imaginer -ou revivifier- des mécanismes différents,
éventuellement nouveaux, susceptibles de concilier l'efficacité
et la qualité de l'action judiciaire. C'est le problème de la
généralisation d'une procédure spécifique
adaptée au contentieux de masse
. On passerait ainsi du niveau des
améliorations tactiques à celui d'une révision de la
stratégie judiciaire.
A. AMÉLIORER LES PROCÉDURES CLASSIQUES
1. Le juge unique et la collégialité
Au-delà du débat de principe qui reste
très ouvert parmi les praticiens et au sein même de la mission, il
n'existe pas d'étude fiable permettant de mesurer l'impact du recul de
la collégialité sur la qualité des décisions.
Si les moyens existaient, la collégialité serait sans doute
préférable. A défaut, la concentration de la tâche
de juger sur un seul homme paraît acceptable, du moins en première
instance. La " solitude " qui en résulte, peut-être
excessive pour les affaires présentant un certain degré de
complexité, serait en partie compensée par l'intervention des
assistants du fait du " dialogue " qui en résultera, du
moins
pour les affaires " mises en délibéré ".
L'intervention de ces assistants pourraient trouver ici une utilité
supplémentaire.
Encore faut-il que la multiplication des audiences soit accompagnée au
pénal d'une réorganisation du Parquet, du greffe et des locaux.
Au civil, la multiplication des juges uniques spécialisés est une
bonne garantie de qualité et de célérité de la
décision lorsque chaque magistrat peut effectivement se consacrer
à un domaine. Elle suppose une taille de juridiction adéquate et
doit donc s'intégrer dans la démarche de regroupement.
Il serait souhaitable au pénal de pouvoir renvoyer à la
collégialité mais il n'est pas certain que même le renvoi
par jugement motivé susceptible d'appel suggéré par
certains lèverait l'obstacle constitutionnel.
En tout état de cause, si une certaine cohérence du domaine du
juge unique peut être opportune, son extension, notamment à la
comparution immédiate n'est pas apparue souhaitable à la mission.
Pourrait, tout au plus, être envisagée son extension à la
rébellion, au port d'armes de quatrième catégorie,
à l'escroquerie ou à l'abus de confiance simples, voire à
certaines infractions au code du travail ou de la consommation.
En revanche, les avantages de la collégialité n'étant pas
contestables, il apparaît à la mission que son abandon au niveau
de l'appel constituerait un fâcheux recul.
Proposition n° 26
: Rendre plus cohérent le domaine du
juge unique.
Proposition n° 27
: Maintenir une véritable
collégialité en tout état de cause en appel.