B. EXAMEN DU RAPPORT D'INFORMATION DE MM. JACQUES GENTON, CLAUDE ESTIER ET YVES GUENA SUR LA XIVÈME CONFERENCE DES ORGANES SPECIALISES DANS LES AFFAIRES COMMUNAUTAIRES (COSAC) ET SUR L'ACTION COLLECTIVE DES PARLEMENTS NATIONAUX
Le mercredi 9 octobre 1996, la délégation a
examiné le projet de rapport d'information de MM. Jacques Genton, Claude
Estier et Yves Guéna sur la XIV
ème
COSAC et sur
l'action collective des Parlements nationaux.
M. Jacques Genton
précise que la XIVème COSAC, qui s'est
tenue à Rome les 24 et 25 juin derniers, a débuté par
une déclaration du président en exercice du Conseil de l'Union
européenne, suivie d'un débat, puis avait abordé deux
thèmes : le suivi de la Conférence de Barcelone sur le
partenariat euro-méditerranéen, et le rôle des Parlements
nationaux dans l'Union européenne. Ce dernier point, observe-t-il, a
été une nouvelle fois au centre des débats. Tous les
participants ont manifesté leur attachement à la COSAC et
souhaité que celle-ci fonctionne mieux. Certains demandent surtout une
réforme de l'organisation interne de la COSAC : une
préparation plus rigoureuse de l'ordre du jour, l'élaboration de
rapports introductifs, éventuellement une ébauche de
secrétariat permanent permettant une meilleure préparation des
réunions. D'autres sont plus ambitieux et évoquent des missions
nouvelles pour la COSAC.
M. Jacques Genton rappelle ensuite que le Conseil européen de Turin a
chargé la CIG d'étudier le thème de la " contribution
collective des Parlements nationaux aux tâches qui incombent à
l'Union ", et que les négociateurs ont choisi de privilégier
la piste d'une expression collective des Parlements nationaux au sein de la
COSAC. Au cours de la XIVème COSAC, poursuit-il, aucun sentiment
dominant ne s'est dégagé à propos de la réforme de
la COSAC, car le règlement actuel n'envisage pas que celle-ci puisse
voter. En l'absence d'un vote sur quelque sujet que ce soit, on ne peut que
prendre acte des déclarations successives des parlementaires, d'autant
que des opinions différentes peuvent être exprimées par les
membres d'une même délégation nationale. Le problème
du vote au sein de la COSAC estime-t-il, est sans doute d'ailleurs un des
points centraux d'une réforme de cette instance.
M. Jacques Genton conclut qu'au stade actuel des débats de la CIG, la
délégation du Sénat se doit de préciser les
orientations qui lui paraissent les meilleures pour l'action collective des
Parlements nationaux au sein de l'Union européenne et, par
là-même, pour l'avenir de la COSAC.
M. Yves Guéna
expose les orientations du rapport sur ce point. Au
cours des dernières années, rappelle-t-il, les Parlements
nationaux ont développé leur contrôle sur l'action
européenne de leurs Gouvernements. En France, le nouvel article 88-4 de
la Constitution a été le principal instrument de ce
contrôle. A ce rôle individuel s'est ajoutée une dimension
collective avec la création de la COSAC, conçue comme un forum et
un lieu d'échange d'informations. Certaines questions, poursuit-il, qui
sont aujourd'hui au premier plan de la construction européenne, comme le
renforcement des deuxième et troisième piliers de l'Union, et la
meilleure application du principe de subsidiarité, appelleraient une
expression collective des Parlements nationaux. Or, sous sa forme actuelle, la
COSAC ne le permet pas, ses travaux étant trop discontinus et ne pouvant
se conclure par des votes. La COSAC devrait donc disposer d'un fil conducteur
permanent assurant la continuité de ses travaux, et devrait pouvoir
adopter des recommandations ou des résolutions par un vote. Certains
objectent que les délégués à la COSAC ne peuvent
engager les Assemblées qu'ils représentent : mais il en est
de même dans le cas de l'Assemblée de l'Union de l'Europe
occidentale (UEO), de l'Assemblée de l'Atlantique Nord, ou de
l'Assemblée de l'Organisation pour la Sécurité et la
Coopération en Europe (OSCE). De telles instances à
caractère consultatif émettent des votes qui ont une valeur
indicative auprès des organes de décision intergouvernementaux,
mais elles n'engagent que les parlementaires participants et ne se substituent
en aucun cas aux Assemblées qui sont représentées.
Concluant son propos, M. Yves Guéna estime que la COSAC, tout en restant
un organisme léger, doit se doter d'une certaine permanence et de la
possibilité de conclure ses travaux par des votes, et qu'elle doit
assurer plus particulièrement un suivi dans les domaines de la
subsidiarité et du troisième pilier.
M. Claude Estier
approuve ces orientations. Il est important,
poursuit-il, d'introduire plus de continuité dans le fonctionnement de
la COSAC. Les débats de celle-ci sont très inégaux :
à Paris, à Rome, les délégués ont pu avoir
un véritable échange de vues, mais il n'en a pas
été ainsi à Madrid. La proposition de renforcer la COSAC
et de lui donner une base dans un protocole annexé au Traité est
réaliste et raisonnable : il ne s'agit pas de créer un
Sénat européen, mais de donner plus de poids et
d'efficacité à un organisme existant.
Puis M. Claude Estier souligne la nécessité de
préciser davantage quel serait le fonctionnement d'une COSAC
renforcée, en s'interrogeant à cet égard sur les
résultats du groupe de travail qui a été
évoqué à Rome. Il souhaite que la COSAC de Dublin permette
un progrès dans ce sens, car il serait utile que des initiatives
viennent de la COSAC elle-même.
M. Jacques Genton
indique que le Parlement irlandais, qui exerce la
présidence de la COSAC, vient de présenter un document de travail
tenant compte dans une certaine mesure des propositions françaises.
M. Christian de La Malène
approuve à son tour
les orientations du rapport, tout en soulignant la nécessité de
conserver une conception ambitieuse de ce que doit être une COSAC
rénovée. Il estime à ce propos qu'une intervention
située seulement en amont du processus de décision n'aura
peut-être pas un poids suffisant : dans certains domaines, la COSAC
devrait recevoir un rôle consultatif situé au sein même du
processus de décision. Soulignant que certains Parlements nationaux
exerçaient une influence très importante sur la politique
européenne de leurs gouvernements, il estime qu'il serait
légitime que la COSAC soit pleinement associée aux grands choix
concernant les deuxième et troisième piliers ainsi que la
subsidiarité.
M. Xavier de Villepin
s'étonne que la COSAC ne puisse,
actuellement, procéder à des votes. Se prononçant à
son tour pour son renforcement, il souhaite qu'elle puisse également
être un lieu de débat sur les grandes orientations de la
construction européenne, dans le cadre d'un dialogue avec le Conseil.
M. Lucien Lanier
déclare soutenir les orientations du rapport,
estimant particulièrement souhaitable que la COSAC puisse adopter des
recommandations concernant la subsidiarité et le troisième
pilier. Il exprime cependant la crainte que ces recommandations ne soient
guère écoutées, notamment par le Parlement
européen.
M. Claude Estier
rappelle que le Parlement européen est
représenté à la COSAC et participe largement aux
débats.
M. Yves Guéna
estime que des recommandations émanant de la
COSAC auraient un certain poids politique, que le Conseil ne pourrait ignorer.
M. Jacques Genton
confirme que le Conseil est bien l'interlocuteur
essentiel de la COSAC. Il précise que chaque réunion de la COSAC
donne lieu à un exposé de la présidence en exercice du
Conseil, suivi d'une séance de questions-réponses, indiquant
qu'il s'agit là d'une règle coutumière.
M. Claude Estier
rappelle que la COSAC de Bonn a permis un
échange approfondi avec le Chancelier Kohl.
M. René Trégouët
, après avoir exprimé
son soutien aux grandes orientations du rapport, juge souhaitable de renforcer
les liens entre les Parlements nationaux et l'Europe. Plus la construction
européenne s'approfondira, estime-t-il, et plus une étroite
association des Parlements nationaux sera nécessaire. Il serait
d'ailleurs souhaitable, poursuit-il, que la règle coutumière du
dialogue avec le Conseil lors des réunions de la COSAC soit
confirmée par le Traité.
M. Christian de La Malène
rappelle que l'association des
Parlements nationaux constitue une des priorités de la France pour la
Conférence intergouvernementale, telles que les a
présentées M. Michel Barnier.
M. Yves Guéna
souligne que le Président de la
République s'est très clairement prononcé en ce sens.
Puis la délégation adopte à l'unanimité le rapport
d'information.
Le rapport de MM. Jacques Genton, Claude Estier et
Yves Guéna :
"
Comment organiser l'action collective des Parlements nationaux au
sein de l'Union européenne
"
a été publié sous le n° 24 (1996-1997)