II. UNE VOLONTÉ SALUTAIRE DE CHANGEMENT
A. DES PRINCIPES NOUVEAUX
Consciente des défauts que présente aujourd'hui la politique communautaire de la recherche, la Commission européenne a présenté le 30 avril 1997 une proposition pour le cinquième Programme-cadre qui vise à modifier radicalement la stratégie européenne. Comme la Commission le note dans son introduction " Pour l'Union européenne, le cinquième Programme-cadre de recherche et développement technologique doit être l'occasion de mettre en oeuvre une nouvelle approche de la politique de recherche menée au niveau communautaire, adaptée aux défis contemporains et aux aspirations des citoyens européens ".
1. Les objectifs
La Commission européenne propose que le nouveau
programme-cadre soit caractérisé par la concertation et la
flexibilité, afin de corriger les errements que votre rapporteur a
précédemment évoqués. Elle souhaite,
conformément aux recommandations du groupe d'experts chargé de
l'évaluation du quatrième Programme-cadre, que la politique
communautaire repose sur les trois principes suivants :
-
l'excellence scientifique et technologique
; la qualité de
la recherche accomplie dans le cadre des programmes communautaires n'a jamais
été mise en cause, mais la priorité absolue donnée
au critère de l'excellence doit permettre de ne sélectionner que
les meilleurs projets, sans souci de répartition
équilibrée de ces projets entre les Etats membres ;
-
la pertinence par rapport aux grandes politiques de l'Union
;
-
la " valeur ajoutée " européenne
; comme
l'a noté votre rapporteur, il s'agit d'un critère essentiel,
compte tenu de la modestie relative du budget communautaire, si on le rapporte
à l'ensemble des dépenses de recherche et de développement
dans l'Union européenne.
La conception du programme-cadre est entièrement revue. La Commission
européenne propose en effet de remplacer l'approche disciplinaire des
programmes spécifiques par une approche prenant en considération
des objectifs à atteindre. Cela la conduit à proposer une
réduction drastique du nombre des programmes communautaires.
Naturellement, la structure du projet est partiellement
déterminée par le Traité instituant la Communauté
européenne. Celui-ci prévoit en effet dans son article 130 G que
la Communauté mène quatre actions dans le domaine de la recherche
:
a) mise en oeuvre de programmes de recherche, de développement
technologique et de démonstration en promouvant la coopération
avec et entre les grandes entreprises, les centres de recherche et les
universités ;
b) promotion de la coopération en matière de recherche, de
développement technologique et de démonstration communautaires
avec les pays tiers et les organisations internationales ;
c) diffusion et valorisation des résultats des activités en
matière de recherche, de développement technologique et de
démonstration communautaires ;
d) stimulation de la formation et de la mobilité des chercheurs de la
Communauté.
Dans ces conditions, le programme-cadre présenté par la
Commission européenne est organisé en six programmes :
- trois programmes thématiques correspondant à la première
action prévue par le Traité ;
- trois programmes horizontaux correspondant à chacune des trois autres
actions prévues par le Traité.
Dans le même souci de concentrer et de rendre plus efficaces la politique
communautaire, les programmes thématiques seront organisés en
actions-clés
"
liées à des objectifs
économiques et sociaux que l'on peut aujourd'hui considérer comme
majeurs pour le futur prévisible de l'Union. Ces actions-clés
sont définies en fonction de problèmes à résoudre ;
ces actions doivent couvrir la gamme complète des activités
nécessaires à l'atteinte de leurs objectifs, de la recherche
fondamentale à la démonstration, en passant par le
développement ; elles auront en particulier pour objectif de faire
converger sur le thème qui est le leur les efforts publics et
privés menés en Europe
".
Outre ces actions-clés, les programmes thématiques comporteront
également des activités de recherche et de développement
de technologies génériques, dont la Commission européenne
affirme qu'elles seront conduites dans un nombre limité de domaines, et
des activités de soutien aux infrastructures de recherche.
La Commission européenne insiste également dans sa proposition
sur les objectifs de coordination et de flexibilité. Elle propose de
renforcer la coordination entre les différents programmes du
programme-cadre, mais également avec les autres politiques de l'Union,
en particulier les programmes d'assistance technique et économique, tels
que PHARE (aide aux Pays d'Europe centrale et orientale), TACIS (aide aux
nouveaux Etats indépendants de l'ancienne URSS) et MEDA (aide aux pays
méditerranéens). La coordination entre actions européennes
et actions nationales devrait être également renforcée
ainsi que la coordination entre le programme-cadre et les autres actions
européennes de recherche, en particulier EUREKA.
La volonté affirmée de flexibilité vise naturellement
à permettre à l'Union de faire face rapidement à
l'émergence éventuelle de nouveaux besoins en cours de
réalisation du programme-cadre. L'adaptation du quatrième
Programme-cadre pour faire face à l'épidémie
d'encéphalopathie spongiforme bovine s'est en effet avérée
très difficile. La Commission européenne propose donc de ne pas
programmer dès le départ l'affectation de la totalité des
moyens des programmes spécifiques afin qu'une marge de manoeuvre puisse
exister pendant la réalisation du programme. La Commission ajoute, mais
sans plus de précisions, que, "
réciproquement, il devra
pouvoir être mis fin à des actions qui se seraient
révélées de trop faible impact
".
2. Les instruments
En ce qui concerne les instruments qui seront utilisés
pour la mise en oeuvre du nouveau programme, les
actions indirectes
resteront les principales modalités d'intervention de la
Communauté, en particulier les actions à frais partagés
entre la Communauté et d'autres sources de financement.
Le principe des actions à frais partagés constitue une garantie
de la qualité de la recherche entreprise. Selon les cas, la
Communauté européenne prend en charge 35 % ou 50 % des
projets qui sont retenus. De sorte que, pour une entreprise, la participation
à un projet est de toute façon coûteuse. Cela permet
d'éviter que soient lancées des actions n'ayant pas de
véritable intérêt.
Toutefois, la Communauté mène également des
actions
directes de
recherche
, par l'intermédiaire du Centre Commun
de Recherche (CCR). Ce centre est composé de quatre instituts ayant des
compétences diverses et situés à Ispra, Karlsruhe, Petten
et Geeel. Les recherches de ce centre dans le cadre du cinquième
Programme-cadre devraient être axées sur le thème suivant :
" La recherche au service de l'individu et des citoyens " et
comporter des actions dans les domaines de la santé, la
sécurité, l'environnement, la protection des consommateurs, la
lutte contre la fraude.
Enfin, la Commission européenne affirme sa volonté de mettre en
oeuvre les articles 130 K, 130 L, 130 N du Traité instituant la
Communauté européenne, qui prévoient des
possibilités de coopération entre certains Etats membres
seulement avec l'aide de la Communauté et la création
d'entreprises communes ou de toute autre structure nécessaire à
la bonne exécution des programmes de recherche. Toutefois, les
modalités de mise en oeuvre de ces dispositions ne sont pas
évoquées. Il est vrai que l'application de ces articles
dépend avant tout de la volonté des Etats.