2. Améliorer l'efficacité du Fichier des Incidents de Crédit aux Particuliers (FICP)
Le groupe de travail s'est prononcé contre la
création d'un fichier positif. Toutefois, il lui paraît
nécessaire d'améliorer le dispositif actuel du fichier central
des incidents de paiement pour répondre à deux objectifs.
Il s'agit tout d'abord de décourager toute tentative de fraude ou d'abus
de la part des débiteurs. En effet, les entretiens menés avec des
responsables de la Banque de France ont laissé entendre que la part des
surendettés qui essaient de profiter du système instauré
par la loi Neiertz tend à augmenter.
Il s'agit de débiteurs qui saisissent la commission de surendettement
uniquement pour gagner du temps, sans la moindre intention de signer un plan
conventionnel ou de fournir les efforts financiers nécessaires à
la réussite de ce dernier.
En effet, la commission peut demander au
juge la suspension des voies d'exécution. Dans ce genre de situation,
les débiteurs considèrent la procédure collective comme un
droit acquis et refusent fréquemment de faire preuve de bonne
volonté. La constitution de leur dossier demande souvent beaucoup plus
de temps, le personnel de la Banque de France ayant à les relancer sans
arrêt et à vérifier très attentivement leurs
déclarations. Or, " cette perte de temps " n'est guère
récompensée puisque, dans la majorité des cas, une fois le
plan conventionnel élaboré, les débiteurs soit refusent de
le signer, soit ne donnent plus signe de vie, obligeant les commissions de
surendettement à clore le dossier.
Or, ce détournement de la procédure est facilité par
l'inscription tardive du débiteur au FICP, qui intervient après
l'adoption du plan conventionnel.
Au moment de la discussion de la loi,
cette date avait été retenue car les intervenants avaient
estimé que les ménages menacés de surendettement
étaient certainement confrontés à des incidents de
paiement avant même le dépôt de leur dossier et qu'ils
étaient, en conséquence, déjà inscrits au FICP. La
réalité est tout autre et vos rapporteurs ont pu constater que
certains ménages surendettés, qui ont contracté de
nombreux prêts, parfois dans le même établissement, ne sont
toujours pas inscrits au FICP.
C'est pourquoi le groupe de travail propose d'inscrire les débiteurs
au FICP dès le dépôt du dossier devant la commission de
surendettement.
Les avantages de cette mesure sont nombreux :
- elle dissuaderait les débiteurs mal intentionnés
d'encombrer les commissions en les interdisant de crédit dès le
dépôt de leurs dossiers ;
- elle renforcerait la logique de bonne foi supposée des
débiteurs. En effet, le dépôt d'un dossier de
surendettement constitue une démarche volontaire de la part du
particulier. Elle signifie que celui-ci se sent en situation de surendettement
et cherche à sortir de cette situation difficile en sollicitant l'aide
des commissions. La procédure étant d'ores et déjà
condamnée à l'échec si le débiteur aggrave son
insolvabilité, l'interdire de crédit apparaît donc comme
une mesure légitime.
Le groupe de travail souhaite également
renforcer l'efficacité
du FICP
.
En centralisant tous les incidents de paiement et en mettant ces informations
à la disposition de l'ensemble du système bancaire, le FICP
constitue indéniablement un progrès dans la maîtrise du
surendettement. Tous les établissements de crédit entendus par le
groupe de travail ont d'ailleurs affirmé consulter le FICP avant la
délivrance de crédits. Toutefois, le groupe de travail estime
que, dans une logique de généralisation du recensement des
incidents significatifs, il serait utile d'enrichir le fichier FICP de
données complémentaires telles que :
- les saisines des commissions départementales de surendettement ;
- les impayés d'impôts constatés par le Trésor
(impôt sur le revenu, taxe d'habitation...) ;
- les impayés constatés par EDF ou France
Télécommunications ;
- les impayés constatés par les compagnies d'assurances
relativement aux primes mises en recouvrement.
Le groupe de travail est convaincu qu'ainsi enrichi, le fichier actuel
gagnerait en efficacité. Toutefois, ils ne cachent pas qu'un tel
élargissement soulève deux problèmes, l'un éthique
et l'autre financier.
Afin que ce nouveau fichier ne porte pas atteinte aux libertés
individuelles, il reviendra aux pouvoirs publics, sous le contrôle de la
Commission Nationale Informatique et Liberté (CNIL), de définir
précisément la nature des informations ainsi recueillies et mises
à disposition.
Par ailleurs, il faudra fixer les modalités de sa consultation et,
notamment, déterminer la liste des organismes habilités à
accéder au FICP. Jusqu'à présent, la
confidentialité des informations était garantie par le secret
bancaire, puisque seuls les établissements de crédit
étaient autorisés à consulter le fichier (qu'ils
étaient également les seuls à alimenter). En cas
d'élargissement des sources d'informations du FICP, se posera
inévitablement la question de l'accès à ce dernier par les
organismes extérieurs à la profession bancaire et, en cas de
réponse positive, des mesures à prendre pour s'assurer que les
renseignements communiqués resteront confidentiels.
Le recensement d'informations complémentaires dans le FICP
soulève également la question délicate de son
financement.
Le coût du fichier actuel, soit 16,5 millions de
francs par an, est réparti par la Banque de France entre les
établissements de crédits en fonction de leur part dans les
encours de crédits. En contrepartie, ces derniers ont le monopole de son
utilisation. Toutefois, si d'autres organismes étaient autorisés
à le consulter, il semblerait logique que ces derniers participent
à son financement.
En outre, vos rapporteurs tiennent à rappeler que l'efficacité
du FICP dans la prévention du surendettement dépend aussi de la
manière dont il est utilisé par les établissements de
crédit. Or, les pratiques varient beaucoup d'un établissement
à l'autre.
Ainsi, les établissements les plus soucieux de la
maîtrise du risque consultent systématiquement le FICP pour toute
demande de crédit, alors que d'autres ne s'y réfèrent pas
lorsque le client est connu ou a déjà
bénéficié d'un crédit. En outre, le FICP ne
constitue pour les établissements de crédit qu'une aide à
la décision et certains ont reconnu accorder des crédits alors
même que le demandeur est inscrit au FICP.
LE FICHIER DES INCIDENTS DE CRÉDIT AUX
PARTICULIERS
Le FICP a pour objectif de renseigner les
établissements de crédit sur le risque lié à
l'octroi de crédits aux particuliers. A l'inverse de certains fichiers
européens, le FICP ne recense pas les encours de crédits au nom
des personnes physiques. C'est un fichier négatif qui centralise les
difficultés de remboursement des crédits aux particuliers. Le
FICP est géré par la Banque de France et recense :
- les incidents de paiement caractérisés (pour une durée
de 5 ans pour les incidents postérieurs au 1er juin 1996,
pour 3 ans pour les incidents antérieurs à cette date);
- les mesures conventionnelles ou judiciaires de traitement des situations de
surendettement : recommandations émises par la commission auxquelles le
juge a conféré force exécutoire et mesures prises par le
juge à la suite d'une contestation (conservation pendant le plan ou la
mesure judiciaire, sans que la durée de conservation puisse
excéder 5 ans).
Pour les crédits à échéances
échelonnées, un incident de paiement caractérisé
est constitué par des défauts de paiement qui atteignent :
- pour un crédit remboursable mensuellement, un montant
équivalent au triple de la dernière échéance due ;
- dans les autres cas, un montant équivalent à une
échéance demeurée impayée pendant plus de
90 jours.
Pour les crédits sans échéance échelonnée,
l'incident caractérisé sera constitué par le défaut
de paiement des sommes exigibles plus de 90 jours après la date de
mise en demeure de payer du débiteur, dès lors que la somme
exigible est au moins de 3.000 francs.
Pour tous les types de crédit, l'incident caractérisé sera
constitué si, après défaut de paiement,
l'établissement de crédit engage une procédure judiciaire
ou prononce la déchéance du terme après mise en demeure du
débiteur restée sans effet.
L'inscription effectuée au nom du débiteur est
immédiatement effacée s'il y a paiement intégral des
sommes dues.