CHAPITRE V
LES PERSPECTIVES D'ÉVOLUTION DU DROIT
COMMUNAUTAIRE EN MATIÈRE DE TAUX RÉDUIT
Tous les
deux ans, le champ d'application du taux réduit doit être revu.
Ainsi, l'article 12-4 de la directive TVA de mai 1977
83(
*
)
prévoit que sur la base d'un
rapport de la Commission, le Conseil réexamine le champ d'application
des taux réduits. Il peut sur proposition de la Commission, et statuant
à l'unanimité, décider de modifier la liste des biens et
services figurant à l'annexe H de ladite directive.
La Commission européenne est cependant par principe réticente
à de telles modifications pérennes de l'annexe H.
En effet, celles-ci ont inévitablement pour effet d'accroître le
champ des exceptions, de multiplier les dérogations, de nuire à
l'harmonisation fiscale et partant, de reculer d'autant la perspective de mise
en place du système commun ou régime définitif de TVA.
A ce titre, elle préfère recourir à des dérogations
ponctuelles s'appuyant notamment sur l'article 28 de la directive de 1977 qui
traite des dispositions transitoires. Il n'est donc pas fortuit que la
proposition de directive n° E-1236 visant à permettre aux
Etats membres qui le souhaiteraient d'appliquer à titre
dérogatoire et de façon expérimentale des taux
réduits de TVA sur les services à forte intensité de main
d'oeuvre vise à modifier ledit article et non à s'insérer
au sein de l'annexe H. La Commission estime en effet s'agissant de cette
dernière qu'elle ne repose pas sur une "
approche absolument
cohérente
".
Cette proposition de directive va dans le bon sens, ainsi que votre rapporteur
l'a déjà relevé. Il est cependant conduit à
s'interroger sur les modalités de leur mise en oeuvre qui devra
nécessairement se faire par l'intermédiaire de la prochaine loi
de finances, celle pour l'an 2000. En outre, ces baisses de TVA,
annoncées lors de la précédente discussion
budgétaire par le gouvernement, devaient être adoptées par
le Conseil Ecofin du 25 mai 1999
84(
*
)
. Les plus récentes informations
communiquées au 30 juin 1999 à votre rapporteur par le
gouvernement, ne font plus état que d'une adoption probable au cours du
second semestre de 1999.
I. LA POSITION DE PRINCIPE RÉSERVÉE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
A. LE CONTEXTE GÉNÉRAL
La
"
doctrine
" de la commission européenne en ce domaine
résulte du rapport établi sur la base de l'article 12-4
précité de la Commission au Conseil et au Parlement qui a
été présenté à Bruxelles le 13 novembre
1997.
Elle se fonde également sur le texte de l'article 99 du
traité CE qui indique qu'une harmonisation est nécessaire pour
assurer l'établissement et le fonctionnement du marché unique.
Cet article dispose en effet que : "
Le Conseil, statuant
à l'unanimité sur proposition de la Commission et après
consultation du Parlement européen et du Comité économique
et social, arrête les dispositions touchant à l'harmonisation des
législations relatives aux taxe sur le chiffre d'affaires, aux droits
d'accises et autres impôts indirects dans la mesure où cette
harmonisation est nécessaire pour assurer l'établissement et le
fonctionnement du marché intérieur dans le délai
prévu à l'article 14 ".
Au terme d'un examen approfondi de l'ensemble des questions traitant outre les
niveaux des taux, la place et l'évolution du système actuel de
TVA, ce rapport tire des conclusions "
en vue d'éventuelles
mesures législatives que pourrait prendre la Commission en ce qui
concerne l'article 12-4
".
La Commission estime dans ce cadre que toute mesure éventuelle de
baisse sectorielle du taux de TVA doit s'apprécier en fonction de
l'objectif central que constitue la mise en place du système commun de
TVA pour le marché unique.
B. LES DEMANDES SECTORIELLES DE RÉEXAMEN DES CATÉGORIES VISÉES PAR L'ANNEXE H
Après avoir rappelé le caractère facultatif de l'annexe H, et la définition large des catégories qui la composent, la Commission détaille les principales demandes visant à inclure certains biens ou services dans le champ d'application du taux réduit de TVA dont elle a été saisie.
1. L'agriculture
Les
demandes portent sur les produits de l'agriculture ne figurant pas
déjà dans l'annexe H. En effet, la catégorie 1
de cette annexe prévoit de soumettre au taux réduit "
les
denrées alimentaires (y compris les boissons, à l'exclusion,
toutefois, des boissons alcooliques), destinées à la consommation
humaine et animale ; les animaux vivants, les graines, les plantes et les
ingrédients normalement destinés à être
utilisés dans la préparation des denrées
alimentaires ; les produits normalement utilisés pour
compléter ou remplacer des denrées alimentaires
".
La Commission estime qu'une "
modification ciblée de
l'annexe H dans ce domaine est actuellement considérée comme
inopportune
". Elle aurait cependant pu concerner, selon elle, les
fleurs coupées, les feuillages d'ornement, les bulbes, racines et
produits similaires et le bois de chauffage.
2. La santé
Les principales difficultés résultent de " la formulation vague qui a été employée dans la disposition ". Il s'agit ici de déterminer, s'agissant des catégories 3 (produits pharmaceutiques) et 4 (équipements médicaux), ce que peuvent être exactement les produits " normalement utilisés pour les soins de santé ", ou les équipements " normalement destinés à soulager ou traiter des handicaps ".
3. Les transports de personnes
La taxation du transport de personnes, qui est prévue par la catégorie 5, constitue une " question spécifique extrêmement complexe ". La diversité des taux, les distinctions établies entre modes et moyens de transport, engendrent non seulement des problèmes pratiques pour les entreprises du secteur, mais également d'importantes distorsions de concurrence. La Commission estime ainsi que " le secteur du transport est un secteur particulier qui pourrait nécessiter un traitement spécial en matière de TVA ". Ainsi une étude a-t-elle été commandée afin d'appréhender complètement la situation dans ce secteur.
4. La culture
Les
justifications apportées visant à élargir le champ du taux
réduit, s'agissant des livres, journaux et les périodiques
(catégorie 6) ou la taxation de façon générale
des manifestations culturelles (catégorie 7) sont de deux ordres.
D'une part, les industriels estiment que les enregistrements audio ou video
font l'objet d'une discrimination par rapport aux autres biens culturels
(livres, journaux, droits d'admission aux musées, cinémas,
théâtres...). D'autre part, des Etats membres, et notamment la
France, estiment que ces enregistrement constituent des moyens de communication
comme les autres, et que seules des raisons historiques "
qui ne sont
plus valables dans la société de l'information
" leur
interdisent l'accès au bénéfice du taux réduit.
Outre les difficultés consistant à distinguer clairement entre ce
qui ressort des loisirs ou de la culture, la Commission estime, dans la mesure
où ces enregistrements supposent toujours un équipement technique
afin d'accéder à l'information qu'ils contiennent, que se pose
également la question du taux propre à ces
équipements.
5. La politique sociale
Malgré les demandes de certains Etats membres tendant
à inclure tous les services du secteur de la construction, la Commission
estime préférable de ne continuer à soumettre au taux
réduit que la livraison, la construction, la rénovation et la
transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale
(catégorie 9).
En tout état de cause, la Commission rappelle que l'extension du champ
de l'annexe H, si elle pose des problèmes techniques
spécifiques, a également des incidences en termes de recettes
budgétaires qui, si elles étaient compensées, pourraient
se révéler impopulaires ou contre-productives.
Elle estime également au plan économique, que la TVA n'est pas
l'outil le mieux adapté pour favoriser un domaine particulier, culturel
ou social. Elle pense au contraire que les subventions directes ou une baisse
de la fiscalité directe peuvent se révéler plus
efficaces.
C. LES ÉLÉMENTS D'APPRÉCIATION DE LA COMMISSION QUANT À L'INTRODUCTION DE NOUVELLES CATÉGORIES DANS L'ANNEXE H
1. Les discussions avec les Etats membres
La
Commission fait état de demandes portant sur "
l'application du
taux réduit aux services dits à forte intensité de
main-d'oeuvre et respectueux de l'environnement
", mais
également aux livraisons de biens et aux prestations de services
écologiques et économes en énergie.
S'agissant des biens et services à forte intensité de
main-d'oeuvre, deux arguments sont avancés : réduire le
niveau du chômage, et lutter contre l'économie souterraine. Elle
indique ainsi que les services de proximité pour lesquels une baisse de
la TVA est demandée correspondent à "
des services
à forte intensité de main-d'oeuvre habituellement fournie par des
travailleurs indépendants ou des entreprises familiales,
généralement au domicile du client (cours particuliers, garde
d'enfants, industrie à domicile, etc. )
".
2. La TVA instrument utile de politique économique ?
Même si l'idée d'utiliser la TVA "
comme
outil
politique pour atteindre des objectifs économiques spécifiques,
tels que l'augmentation de l'emploi ou une meilleure protection de
l'environnement, rencontre l'approbation jusqu'à un certain point du
Parlement européen et du Comité économique et
social
", la Commission estime que cela irait à l'encontre du
but éventuel qui est de simplifier le système de la TVA et de
réduire les charges. De même, elle émet "
des
doutes sérieux quant à savoir si la TVA constitue un instrument
utile de politique économique
".
En effet, selon la Commission la TVA n'a qu'une incidence limitée sur
les prix de vente et la demande de services dépend d'autres facteurs.
Par ailleurs, compte tenu des mesures de compensation budgétaires qui
seraient prises, "
l'effet global sur la demande dans un secteur
particulier et sur le marché de l'emploi serait pour le moins incertain.
A ce jour, aucune constatation empirique ne permet de tirer une conclusion
différente
".
Les conséquences sur la TVA seraient donc triples : le
système sera plus complexe ; des problèmes de
définition du champ d'application du taux réduit se
poseront ; la neutralité de la TVA, taxe générale
à la consommation, sera remise en question.
Par ailleurs, elle estime que la TVA n'est pas la principale raison de la
fraude fiscale, les avantages financiers étant bien plus importants dans
le domaine des impôts directs et des cotisations de
sécurité sociale.
3. Étude des effets sur l'emploi de l'application sectorielle d'un taux réduit de TVA
La
Commission a chargé un organisme
85(
*
)
extérieur de réaliser
une telle étude concernant "
l'effet potentiel d'instruments
fiscaux (taux réduit de TVA appliqué à certains secteurs)
sur la création d'emplois
".
La Commission souligne, par delà le rappel des hypothèses
retenues, que "
l'étude se conclut cependant sur une affirmation
univoque
:
la réduction compensée de la TVA sur
certains services ne produit, en général, que des effets
marginaux sur l'emploi, tandis que la réduction compensée de
l'imposition directe n'a pas d'effet perceptible. En revanche, la
réduction compensée des cotisations de sécurité
social produit, globalement, les effets les plus bénéfiques pour
l'emploi
".
Elle rappelle ainsi, ce qui semble constituer de sa part une opposition de
principe à de telles baisses ciblées :
" L'étude ne permet en aucune manière de
considérer qu'une réduction de la TVA sur les services à
forte intensité de main-d'oeuvre constitue un choix de politique fiscale
à conseiller, qui justifierait les difficultés
considérables que soulèverait une telle mesure "
.
De même, elle estime que les résultats d'une autre étude
contradictoire réalisée par un institut néerlandais sur le
même sujet, eu égard aux hypothèses retenues, et tenant
notamment à la non-compensation des allégements fiscaux, ne
contredisent pas les résultats précédents.
Elle tient néanmoins à rappeler que,
" en tout
état de cause, la Commission est prête à renforcer la
discussion en ce qui concerne tant le côté théorique de la
corrélation entre la fiscalité et l'emploi, que le plan politique
et la raison pratique pour aborder les réductions de TVA dans ce
contexte "
.
D. L'HARMONISATION DU CHAMP D'APPLICATION DU TAUX RÉDUIT DE TVA
L'annexe H de la directive de mai 1977 n'est pas fondée sur une " approche absolument cohérente, ni concurrente ", et nombre des difficultés tenant à la délimitation des matières relevant, ou non, du taux réduit résulte de ce manque de cohérence originelle . Cette situation devra donc être réexaminée selon la Commission dans la perspective du passage au régime définitif de TVA.
1. L'analyse de la situation actuelle en matière de taux
Les
dispositions permettant aux Etats membres d'appliquer un taux réduit
sont appliquées de "
façons très
diverses
". Si 11 Etats appliquent un taux réduit sur les
denrées alimentaires et 5 maintiennent également un taux
spécial transitoire, seuls 3 Etats ont un taux réduit en
matière de nettoyage des voies publiques
86(
*
)
.
De cette situation, la Commission a tiré trois
"
conclusions-clefs
" :
1) le caractère facultatif de l'annexe H et l'absence de
définitions communes peuvent entraîner des distorsions de
concurrence ;
2) les Etats membres souhaitent utiliser les taux de TVA comme instrument de
politique économique et cela, à condition de ne pas créer
de distorsions de concurrence ;
3) un traitement inégal peut exister entre biens ou services comparables
en raison des nouvelles technologies.
2. La situation au regard du nouveau système commun de TVA
La Commission estime que le système commun de TVA ne doit pas entraîner " l'application de graves distorsions de concurrence ". A ce titre, il est donc nécessaire de mettre en place un taux normal se situant à l'intérieur d'une fourchette étroite et de prévoir un taux réduit obligatoire dont le champ serait défini de façon très restrictive et selon des critères cohérents.
E. LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
Celle-ci
estime que la structure actuelle des taux de TVA n'est pas un obstacle au
fonctionnement du régime transitoire de TVA. Ainsi, s'agissant des
achats frontaliers, les écarts de taux n'entravent pas les achats
transfrontaliers même s'ils peuvent influencer les choix des
consommateurs et, partant, entraîner des distorsions.
La structure actuelle des taux de TVA, et en particulier le champ d'application
du taux réduit, fait ressortir deux difficultés : son
caractère facultatif et l'absence de définitions communes des
catégories. Cette situation pouvait porter atteinte au principe de la
neutralité de la TVA selon la Commission.
Ainsi, elle indique que les problèmes rencontrés en
matière de taux réduit "
ne peuvent être
résolus que graduellement dans les différentes étapes des
propositions à produire dans les cadres de l'instauration du nouveau
système commun de TVA
".
Quatre orientations sont, dans ce cadre, proposées par ce rapport :
- une approximation plus proche des taux de TVA ;
- une fixation du champ d'application des taux réduits en fonction de
considérations sociales ;
- l'imprécision de l'outil "
taux réduit
", qui
ne peut être conçu comme un substitut pour des subventions
directes ;
- la préservation de la neutralité générale de la
TVA.
II. LE RAPPORT DU PARLEMENT EUROPÉEN : LA NÉCESSAIRE MAIS DÉLICATE ADAPTATION AUX BESOINS SOCIAUX
Le 25
juin 1998 a été présenté par la Commission
économique, monétaire et de la politique industrielle, le
" rapport sur le rapport " de la Commission détaillé
ci-dessus.
Après avoir rappelé la structure des taux de TVA prévue
par la législation communautaire, la situation en matière
d'harmonisation en 1996, l'intérêt d'une harmonisation plus
complète des taux, et fait un état récapitulatif des
demandes présentées par les Etats membres en matière de
taux réduit, le Parlement européen a relevé que
"
la Commission marque son scepticisme à l'égard de
l'utilisation de la TVA en tant qu'instrument de politique
économique
" et rappelle qu'en terme de créations
d'emplois la réduction compensée des cotisations de
sécurité sociale s'avère plus bénéfique.
Le rapport estime nécessaire, à défaut d'une
complète harmonisation "
illusoire à
échéance rapprochée
", un effort de
rationalisation de la structure des taux, passant par l'établissement de
définitions communes des catégories auxquelles le taux
réduit peut s'appliquer, ainsi que la suppression des régimes
dérogatoires.
Pour le Parlement européen, "
la préoccupation
légitime de la préservation des recettes publiques
" ne
doit pas dicter une attitude excessivement figée en ce qui concerne le
domaine actuel des taux réduits, "
qu'il convient d'adapter
à la transformation des besoins sociaux et culturels
". Outre
les initiatives de la Commission, il envisage ainsi l'application d'un taux
réduit de TVA aux nouveaux biens culturels liés à la
société de l'information (CD-Rom), à des services
liés à l'impératif de mobilité sociale et de
l'emploi (restauration), à des services de nature à favoriser la
consolidation d'une société de droit (services d'accès
à la justice et au droit).
III. LA PROPOSITION DE DIRECTIVE N° E-1236
Cette
proposition de directive du Conseil modifiant la directive
n° 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer
à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les
services à forte intensité de main d'oeuvre (n° E-1236)
a été présentée à Bruxelles le 17
février 1999. Elle a été déposée sur le
Bureau du Sénat le 26 mars 1999. Elle correspond à une
réponse "
politique
" à des demandes fortes en
ce sens des Etats-membres. En effet, la Commission européenne, ainsi que
cela ressort de son rapport précité de novembre 1997, semblait
jusqu'alors réservée tant sur le fond que sur la forme quant
à la mise en place de baisses ciblées de TVA. Elle les estimait
à la fois inopportunes au regard de son objectif qui est de mettre en
place un régime définitif, mais également inefficaces au
regard d'aides plus directes à l'emploi.
Ainsi, cette proposition de directive vient opportunément relancer le
processus d'extension du champ des biens et services soumis au taux
réduit. En effet, les demandes présentées par la France,
notamment, visant à une modification pérenne du contenu de
l'annexe H, n'ont pas à ce jour abouti compte tenu du refus de la
Commission européenne de prendre en compte ces demandes. Celles-ci sont
principalement de trois ordres : les biens culturels (disques, cassettes,
CD Rom et CD-interactifs)
87(
*
)
,
la fourniture d'énergie par le biais de réseaux de chaleur, et
les véhicules peu polluants
88(
*
)
.
A défaut de modification pérenne de l'annexe H, ladite
proposition constitue une innovation intéressante qu'il appartiendra
à chaque Etat membre d'utiliser en fonction de ses besoins.
A. LA COMMUNICATION DU COMMISSAIRE EUROPÉEN : LUTTER CONTRE LE CHÔMAGE ET LE TRAVAIL AU NOIR
Dans sa
communication en date du 12 novembre 1997
89(
*
)
, le commissaire européen
chargé de la fiscalité, M. Mario Monti, tout en estimant, en
terme de création d'emplois, qu'une réduction ciblée des
cotisations sociales était un instrument plus efficace qu'une
réduction du taux de TVA, a expliqué que "
la situation
actuelle exige de se montrer inventif pour trouver le moyen, grâce
à la fiscalité, de créer des emplois effectivement et
à court terme
". Il semble ainsi apporter une réponse
" politique " forte aux demandes des gouvernements des Etats-membres.
Compte tenu de ses effets sur le niveau des déficits budgétaires
ou sur la concurrence fiscale, il juge nécessaire une
"
extrême prudence
" en ce domaine et souhaite une
expérience qui soit limitée dans le temps et aurait deux
effets : d'une part, faire baisser les prix à la consommation et
donc stimuler la demande, d'autre part réduire l'incitation à
rejoindre ou à rester dans l'économie souterraine.
Si la Commission reste sceptique quant à l'effet réel sur
l'emploi de telles mesures, l'importance du problème du chômage
fait que même en période de consolidation budgétaire
"
toute proposition raisonnable en ce sens mérite d'être
étudiée, même si le succès n'est pas
garanti
".
La Commission souhaite donc une expérience limitée dans le temps
et dans sa portée, afin de ne pas créer de distorsion de
concurrence, dont l'impact budgétaire serait de niveau " peu
élevé ", c'est-à-dire équivalent aux recettes
correspondant à un point de pourcentage du taux normal de TVA, par
exemple. Pour la France, cela correspondrait ainsi à une perte de
recettes fiscales de 30 à 35 milliards de francs.
Différentes conditions sont donc posées :
- le libre choix des Etats membres de participer à
l'expérience ;
- la Commission veillera à ce que le taux réduit n'entraîne
pas de distorsion de concurrence entre les activités similaires au sein
d'un même Etat membre ou dans différents Etats membres ;
- l'expérience prendra automatiquement fin à l'expiration d'un
délai de trois ans. La Commission réfléchira cependant in
fine "
à l'opportunité d'introduire sous une forme
obligatoire les mesures, eu égard aux résultats tirés de
ladite expérience
" ;
- les services concernés doivent être définis clairement et
précisément (par exemple : la rénovation et la
réparation de logements, les services d'aides à domicile, tout en
excluant les livraisons de biens).
Il y a donc une évolution significative de la position de la
Commission européenne. Dans son rapport du 13 novembre 1997, elle se
montre très réservée devant de telles baisses, alors que
la communication du 12 novembre 1997, peut--être par réalisme,
semble faire preuve d'une plus grande ouverture.
Dans cette communication précitée du 12 novembre 1997, la
Commission indique que "
la lutte contre le chômage figure en
tête de l'agenda européen et [que] la Commission a fait de cette
tâche la priorité des priorités
". Aussi
même si elle estime qu'une réduction ciblée des cotisations
sociales constituerait un instrument plus efficace en terme de création
d'emplois, elle ne se déclare pas opposée à une telle
mesure dès lors qu'il s'agit d'une expérience limitée dans
le temps reposant sur une approche prudente de modification du système
de TVA : "
le problème du chômage revêt une
telle importance qu'il vaut la peine de tester le fonctionnement d'un
allégement de la TVA ciblée sur les services à forte
intensité de main d'oeuvre. Toute proposition raisonnable en ce sens
mérite d'être étudiée, même si le
succès n'est pas garanti
". Elle estime par ailleurs que
"
dans certains secteurs économiques, la réduction de TVA
aiderait, en effet, à réintégrer dans le circuit une
partie des activités tombées dans l'économie
souterraine
".
Elle s'inscrit pleinement dans la volonté de voir la lutte contre le
chômage figurer "
en tête de l'agenda
européen
"
90(
*
)
.
Ainsi le Conseil européen extraordinaire sur l'emploi de Luxembourg des
20 et 21 novembre 1997 avait souhaité que soit étendue pour les
Etats-membres l'opportunité d'une réduction du taux de la TVA sur
les services à forte intensité de main d'oeuvre, non
exposés à la concurrence transfrontalière.
Ces orientations ont été reprises lors du Conseil européen
de Vienne les 11 et 12 décembre 1998 et figurent parmi les quatre sujets
"
qui préoccupent au premier chef les citoyens européens
et exigent une action rapide et efficace
".
B. LA PROPOSITION DE DIRECTIVE N° E-1236 : UN NOUVEAU RÉGIME DÉROGATOIRE
Le régime proposé est dérogatoire au moins à un triple point de vue. Non seulement il complète l'article 28 de la directive de 1977 consacré aux " dispositions transitoires ", mais son champ est limité sectoriellement ainsi que dans le temps. Il n'a pas en effet vocation, en principe, à être pérennisé en figurant au sein de l'annexe H.
1. Une mesure limitée dans le temps
Le système préconisé par la Commission consiste à permettre aux Etats-membres qui le souhaitent d'expérimenter le fonctionnement et les effets d'un allégement de la TVA ciblé sur les services à haute intensité de main d'oeuvre. Elle estime cependant qu'une telle expérience doit être optionnelle et circonscrite dans le temps. C'est pourquoi elle est limitée à trois ans entre le 1 er janvier 2000 et le 31 décembre 2002 mais présente cependant un caractère obligatoire pour les Etats : une fois l'expérimentation engagée, ceux-ci, semble-t-il, ne peuvent plus demander à en bénéficier ou y renoncer.
2. La lutte contre le chômage et l'économie souterraine
L'initiative récemment prise par la Commission européenne répond à un double objectif : tout d'abord, elle estime qu'un taux réduit de TVA fera baisser les prix à la consommation et donc stimulera la demande de services employant beaucoup de main-d'oeuvre. D'autre part, l'adoption d'un taux réduit devrait réduire l'incitation à rejoindre ou à rester dans l'économie souterraine.
3. Un champ d'application: " les services à forte intensité de main d'oeuvre "
Les
services concernés doivent remplir les trois conditions suivantes :
- être à forte intensité de main-d'oeuvre ;
- être fournis directement aux consommateurs finaux ;
- être principalement locaux et non susceptibles de créer des
distorsions de concurrence.
Il n'est pas fourni dans la proposition de directive n° E-1236 de
liste limitative de ces services.
Seul l'exposé des motifs de la
proposition donne quelques indications, à titre d'exemple.
En outre, l'application d'un taux réduit ne doit pas mettre en
péril le bon fonctionnement du marché intérieur. Aussi les
États devront-ils informer la Commission,
avant le 1
er
septembre 1999
, de leur intention de procéder à des
expérimentations de TVA à taux réduits, et lui
communiquer, avant cette date, toutes les données utiles concernant le
champ, le coût et les effets prévus sur l'emploi de la mesure,
pour qu'elle puisse veiller à ce que cela n'entraîne pas de
distorsions de concurrence.
Il appartiendra alors à la Commission en fonction des
éléments qui lui seront ainsi communiqués par les
Etats-membres de proposer au Conseil statuant à l'unanimité
d'autoriser un État à appliquer les taux réduits
prévus par l'article 12-3a de la directive TVA de 1977
précitée.
4. Une mise en place effective sous la responsabilité de chaque Etat-membre
Les
mesures de baisse de TVA seront du ressort de chaque Etat-membre. Ceux-ci
devront mettre en oeuvre au plan interne les dispositions nécessaires
pour se conformer à cette proposition de directive au plus tard avant le
31 décembre 1999. Par ailleurs, la Commission doit veiller, en cours
d'application, à ce que de telles mesures n'entraînent pas de
distorsions de concurrence, soit entre Etats-membres, soit au sein d'un
même État. Le cas échéant, elle propose au Conseil
qui statue en ce cas à la majorité qualifiée d'adopter les
mesures appropriées.
Avant le terme de cette expérience, soit avant le 1
er
octobre
2002, les Etats-membres doivent établir un rapport
détaillé précisant notamment les effets de ces baisses de
TVA en termes de création d'emplois. Au vu de ce rapport, il pourra donc
être proposé, le cas échéant, de pérenniser
ces baisses ciblées, par exemple, en étendant le champ de
l'annexe H de la directive de 1977.
C. LES PRECONISATIONS DE VOTRE COMMISSION
1. Une telle initiative doit être approuvée
Elle
doit permettre en baissant sectoriellement le taux de TVA de diminuer le poids
des prélèvements obligatoires, tout en permettant la
création d'emplois, même si cette dernière politique se
doit également, de reposer sur des mesures de baisse des charges
sociales, notamment celles pesant sur les bas salaires.
Par ailleurs, eu égard au caractère expérimental d'une
telle mesure qui consiste en effet, non pas à modifier le contenu de
l'annexe H de la directive TVA de 1977 déterminant la liste des
biens et services pouvant être éligibles à l'un des deux
taux réduits, mais à compléter l'article 28 qui
recense les "
dispositions transitoires
" applicables en ce
domaine, il importe de lui donner le champ d'application le plus large
possible.
2. Quels " secteurs à forte intensité de main d'oeuvre " ?
Sous
réserve de répondre aux conditions rappelées ci-dessus,
tous les services à forte intensité de main d'oeuvre, sans aucune
exclusive, doivent avoir vocation à pouvoir être, le cas
échéant, soumis à un tel taux réduit. En effet,
plus les expériences pratiquées seront diverses, meilleurs en
seront les enseignements pour l'ensemble des Etats, et grandes les
potentialités alors offertes de modifier, de façon
pérenne, le contenu de l'annexe H. En outre, la présente
proposition de directive ne fixe que des critères
d'éligibilité sans fournir de liste limitative. De plus, les
seuls exemples donnés figurent au sein de l'exposé des motifs et
non du dispositif même. Ils n'ont donc qu'une valeur indicative.
La mise en place effective de ces mesures sera cependant du ressort de chaque
Etat-membre et devra figurer, concrètement, s'agissant de la France, au
nombre des orientations contenues dans la prochaine loi de finances, celle pour
l'an 2000.
Sous réserve de précisions concernant les marges de manoeuvre
budgétaires dont dispose véritablement le gouvernement en ce
domaine, trois secteurs apparaissent tout particulièrement susceptibles
de bénéficier d'un taux réduit :
la restauration
sous réserve d'une clarification préalable de la situation
existant actuellement
, les services rendus à la personne et les
prestations de réparation et de rénovation d'immeubles anciens
à usage d'habitation. Ces trois secteurs offrent en effet des
potentialités, certes variables, mais néanmoins très
réelles de créations d'emplois
91(
*
)
.
Néanmoins, le gouvernement ne semble actuellement avoir des
"
préférences
" que dans deux domaines :
les services destinés aux particuliers et les travaux d'entretien dans
l'immobilier.
Quant à l'Assemblée nationale, "
le choix prioritaire
s'est porté sur les travaux de grosses réparations,
d'amélioration et d'entretien dans l'habitat
"
92(
*
)
. Aussi la résolution
adoptée le 17 juin 1999 par l'Assemblée nationale demande au
gouvernement
" d'informer la Commission européenne, avant le
1
er
septembre 1999, que la France envisage, dans la mesure
où les marges de manoeuvre budgétaires le permettront, de
soumettre, dans le cadre de la prochaine loi de finance,
notamment
les
travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien
dans l'habitat, au taux réduit de la TVA ".
En outre, votre rapporteur n'a pu obtenir que des informations très
fragmentaires concernant les intentions des gouvernements des autres
Etats-membres. On évoque ainsi, tout au plus, aux Pays-Bas, le secteur
de la cordonnerie, ou en Italie celui de la reliure.
Dans
la propositions de directive n° E-1236, le secteur de la
restauration
figure-t-il au nombre
des " services à forte
intensité de main d'oeuvre ? "
Dans la
présentation qu'il fait, le gouvernement exclut le secteur de la
restauration des secteurs pour lesquels il demanderait, dans l'hypothèse
où la proposition de directive n° E-1236 serait adoptée
en l'état, à appliquer un taux réduit de TVA. Par
delà les considérations liées au coût
budgétaire d'une telle mesure, ainsi que la nécessité de
préserver la particularité fiscale applicable au secteur de la
restauration collective, notamment lorsqu'elle s'opère en milieu
scolaire ou hospitalier, on peut s'interroger sur les raisons juridiques qui
motivent le refus du gouvernement de rendre éligible le secteur de la
restauration à de telles baisses.
Si en l'état actuel de la réglementation communautaire, il
n'apparaît en effet pas possible de modifier le régime des taux de
TVA applicable à la restauration, la vente à consommer sur place
n'étant pas éligible à l'un des deux taux réduits
prévus par l'article 12 de la directive,
la proposition de directive
n° E-1236 contribue à faire significativement évoluer
l'état du droit en ce domaine.
En effet, le texte de cette proposition de directive fixe des conditions que
doivent remplir les services concernés et qui ne peuvent pas, a priori,
exclure du champ de cette mesure la restauration. En effet, ces services
doivent "
être à forte intensité de main
d'oeuvre ; être fournis directement aux consommateurs finaux ;
être principalement locaux et non susceptibles de créer des
distorsions de concurrence. L'application d'un taux réduit ne doit pas
mettre en péril le bon fonctionnement du marché
intérieur
".
Par ailleurs, seul l'exposé des motifs de cette proposition de directive
qui n'a pas a priori, en lui-même de force juridique, donne quelques
indications quant aux secteurs potentiellement éligibles :
"
Sans préjudice de l'examen au cas par cas lié à
la procédure prévue d'autorisation par le Conseil, les services
susceptibles de répondre à ces conditions et d'offrir les
meilleures opportunités de création d'emploi, pourraient
être,
à titre d'exemple
, certains services de
réparation de biens meubles corporels, certains services
écologiques, des
prestations de services de proximité
consistant en des services rendus à la personne sous forme d'aide
à domicile, à la jeunesse, aux personnes âgées ou
handicapées
etc... ".
Comme le relève fort justement
la commission des Finances de l'Assemblée nationale, ce champ est plus
large que celui envisagé dans la communication précitée du
commissaire européen en date du 12 novembre 1997.
En outre, le commissaire européen chargé de la fiscalité
ne semble pas être catégoriquement opposé à une
telle mesure. Si dans une lettre en date du 17 juillet 1998 adressée
à M. le ministre de l'économie et à M. le
secrétaire d'Etat au budget il indique que "
la France ne peut
donc pas appliquer un taux réduit de TVA au secteur de la restauration
dans le cadre de la législation communautaire actuelle ",
cette
prise de position se situe antérieurement à la transmission de la
proposition de directive n° E-1236. Aussi évoquant les travaux
de la Commission européenne en ce domaine, il rappelle que des
critères ont été posés et que, "
il
appartient bien entendu au Conseil, comme la Commission l'y a invitée,
de définir le champ d'application qu'il souhaite pour cette mesure.
J'estime toutefois que le secteur de la restauration ne pourrait pas en faire
partie compte tenu des orientations proposées "
. Un tel
jugement ne semble pas constituer un obstacle insurmontable à
l'application du taux réduit de TVA au secteur de la restauration.
De plus, lors de son audition par la commission des Finances du Sénat,
le 29 juin 1999, M. le secrétaire d'Etat au Budget n'a pas
rejeté une telle perspective. Il a seulement indiqué
"
s'agissant des secteurs éligibles à ces baisses, qu'il
convenait d'être sélectif afin d'être efficace. En
conséquence, le Gouvernement avait estimé que deux secteurs,
celui des services à la personne et des travaux dans l'immobilier,
étaient prioritaires. Il a reconnu, s'agissant de la restauration, que
des taux de TVA différents étaient appliqués à des
opérations voisines en relevant que l'application générale
du taux réduit de TVA serait coûteuse et que l'application de taux
intermédiaires de TVA conduirait à pénaliser la
restauration collective, ce qui ne pourrait être admis, et ce, pour
d'évidentes raisons sociales ".
A la demande du président de votre commission des Finances,
M. Alain Lambert, le gouvernement a chiffré
précisément le coût pour le budget de l'Etat et fourni les
bases de calcul de ces trois mesures de baisse ciblée
93(
*
)
.
En tout état de cause, cela démontre que le coût brut
pour l'Etat résultant de l'assujettissement au taux réduit, soit
du secteur de la restauration, soit des travaux dans le logement est
pratiquement identique.
Récapitulation du coût calculé par le gouvernement
Taux réduit de TVA pour les ventes à consommer sur place |
5,5 % |
21,29 milliards de francs |
|
14 % |
9,31 milliards de francs |
Taux réduit de TVA pour les services de proximité |
30 à 100 millions de francs |
|
Taux réduit de TVA sur les travaux de réparation dans les immeubles à usage d'habitation |
20,94 milliards de francs 94( * ) |
Ces
évaluations ne font ressortir que le coût budgétaire brut
pour l'Etat, sans prendre en compte les retours tant en termes de cotisations
sociales que de surcroît de rentrées fiscales. Elles sont
néanmoins globalement cohérentes avec les chiffrages obtenus par
votre rapporteur et émanant notamment des organisations professionnelles
concernées.
Par ailleurs, il est certain qu'il est difficile de mesure l'impact fiscal de
la régression du travail au noir puisque par définition il n'est
pas connu. Mais cet impact existe, il ne faut pas l'oublier. Comme il ne faut
pas oublier que la suppression du travail au noir est un des objectifs
poursuivis.
3. La potentialité offerte doit être utilisée par le gouvernement français
Cette
proposition de directive fixe en effet un cadre réglementaire
général, d'application limitée dans le temps cependant,
qui laisse, par la suite, une grande marge d'appréciation aux
Etats-membres. Ceux-ci devront donc adopter des mesures claires et lisibles
afin de ne pas nuire à l'efficacité de ce dispositif. Votre
rapporteur est cependant conduit à s'interroger quant aux perspectives
réelles d'adoption de ce texte. Présentées lors de la
discussion de la loi de finances pour 1999, comme l'une des mesures phares du
budget pour l'an 2000
95(
*
)
, ces
mesures de baisse ciblée de TVA ne pourront entrer en vigueur que si la
proposition de directive est définitivement adoptée.
Or les
dernières informations obtenues par votre rapporteur notamment lors de
l'audition de M. le Secrétaire d'Etat au budget par votre
commission des Finances le 29 juin 1999 n'ont pas permis de compléter
utilement son information.
Alors que ce texte devait être adopté définitivement par le
Conseil Ecofin du 25 mai 1999, il apparaît que cette adoption n'aurait
lieu qu'au cours du second semestre 1999. Elle requiert en effet, comme c'est
la règle en matière fiscale, l'unanimité des Etats-membres.
Un tel retard ne manquera pas de nuire à l'effectivité de ce
texte dans la mesure où tout décalage dans son adoption
réduira inévitablement et mécaniquement, les chances de
voir lesdites mesures de baisse ciblée figurer au sein du prochain
projet de loi de finances, celui pour l'an 2000. En effet, le texte actuel de
cette proposition de directive fixe au 1
er
septembre la date-butoir
de transmission à la Commission européenne des dossiers par
lesquels les Etats-membres l'informent de leur volonté de soumettre
certains services à forte intensité de main d'oeuvre au taux
réduit de TVA.
Le gouvernement s'est engagé devant la commission des Finances du Sénat à agir dans la transparence
Lors de
la présentation de sa communication d'étape, le 19 mai 1999, sur
la mise en oeuvre des taux réduits de TVA, votre rapporteur, au nombre
de ses préconisations, avait souhaité que
le gouvernement
agisse dans la transparence et informe le plus largement possible la
représentation nationale.
Ainsi, lors de son audition par votre commission des Finances le 29 juin 1999,
M. le secrétaire d'Etat au Budget, à la demande de M. Alain
Lambert, Président, s'est engagé à ce que "
les
informations communiquées à la Commission européenne
soient également transmises aux commissions des finances des deux
assemblées "
. Il a par ailleurs indiqué s'agissant des
services d'aide à la personne qu'il convenait d'étudier les
risques résultant de la mise en concurrence d'associations
déjà présentes dans ce secteur avec des entreprises
émergentes cherchant à s'y implanter. Il a de ce fait
déclaré que les études réalisées dans ce
cadre seraient transmises aux assemblées.
4. Des mesures claires et lisibles
Votre
rapporteur estime que le gouvernement devra, sur la base de cette proposition
de directive, prendre des mesures claires et lisibles. Elles seront en effet
destinées à des "
consommateurs finaux
",
c'est-à-dire aux particuliers. Il faut donc, tout à la fois
éviter les effets d'annonce et la mise en place de mesures
" homéopathiques ", à l'image de ce qui a
été pratiqué lors de la dernière loi de finances
avec la baisse de la TVA applicable aux abonnements au gaz et à
l'électricité. Il convient ainsi d'obtenir des précisions
quant au champ et à la nature des services d'aide à la personne
qui pourraient être éligibles à une baisse du taux de la
TVA afin de s'assurer qu'il ne sera pas porté atteinte à la
situation des associations qui opèrent déjà dans ce
secteur.
De même, on peut redouter en matière de travaux dans l'habitat,
une éventuelle limitation du champ d'application de cette mesure qui
nuirait à son efficacité et partant, à sa portée.
Cette crainte n'est pas seulement celle de votre rapporteur. Elle est
partagée en effet, non seulement par les organisations professionnelles
mais également par la commission des Finances de l'Assemblée
nationale. Ainsi, son rapporteur général, dans le rapport sur
ladite proposition de directive
96(
*
)
relève que
"
l'idée est parfois avancée de réduire le champ
d'application de la mesure afin de minimiser son coût pour les finances
publiques
".
Aussi tient-il à souligner que "
les exemples sont nombreux
où, à force de complexité, certaines mesures ont perdu
toute lisibilité et, partant, toute efficacité
". Votre
rapporteur ne peut que souscrire à de tels propos.
Plus généralement, cette proposition de directive doit
permettre la mise en place d'une vraie diminution des
prélèvements obligatoires. En effet, la baisse de la TVA qui
pourrait ainsi être réalisée ne doit pas être
compensée par la suppression ou la restriction de dispositif fiscaux
favorables aux ménages.
En outre, il convient également d'insister sur le caractère
expérimental de la mesure proposée et sur le fait que le projet
de directive n° E-1236 vise à préparer une modification
de l'annexe H. Pour que l'opération soit utile de ce point de vue,
il faut donc que l'expérimentation soit la plus large possible.
C'est ce qui donne sa signification profonde à l'expérimentation
qui ne vise pas simplement à " passer un cap " politique
mais qui s'inscrit bien dans le contexte d'une évolution lisible et
cohérente de l'ensemble du dispositif fiscal relatif à la TVA.
C'est à ce titre que votre rapporteur trouve cette proposition de
directive intéressante.