II. LE JEU DANGEREUX DE LA CONCURRENCE FISCALE
Le chapitre 1 présente une synthèse des différentes analyses théoriques existantes sur la concurrence fiscale et ses conséquences. L'union monétaire devant engendrer une plus grande mobilité des biens et services, des capitaux, des entreprises et, peut-être, des personnes, au sein de l'espace européen, l'application de tels raisonnements au contexte européen peut être fondée sur deux ordres de considérations : celles qui ressortent de l'analyse de la concurrence fiscale entre collectivités territoriales au sein des espaces monétairement intégrés (Etats unitaires ou fédérations) ; et celles qui relèvent des mécanismes macroéconomiques de la concurrence entre Etats nationaux au sein d'une zone économiquement intégrée.
A. QUELQUES ENSEIGNEMENTS DE LA CONCURRENCE ENTRE COLLECTIVITÉS LOCALES
Relativement peu nombreuses en France, les analyses, théoriques et empiriques, de la concurrence fiscale entre collectivités locales abondent, au contraire, dans les fédérations existantes et singulièrement aux Etats-Unis et au Canada. Concernant la fiscalité directe des personnes, les consommations collectives et la protection sociale, il en ressort que la mobilité individuelle aboutit à une ségrégation géographique selon le revenu qui, en l'absence de péréquation fiscale, risque de creuser de manière cumulative les inégalités de potentiel fiscal entre collectivités. Concernant la fiscalité sur les entreprises, et bien que les travaux empiriques existants ne mettent pas clairement en évidence un effet des écarts de fiscalité sur les choix de localisation des activités, la concurrence fiscale -- au sens large, incluant les subventions et autres facilités consenties aux entreprises, notamment dans les cas de nouvelles implantations -- entre collectivités locales semble avérée. Elle engendre, comme pour les prélèvements sur les ménages, des phénomènes de concentration spatiale des activités et un renforcement cumulatif des inégalités de potentiel fiscal ; mais elle est, en outre, à l'origine de gains d'aubaine pour les entreprises nouvellement installées et d'un surcroît de charges fiscales pesant sur les assiettes les moins mobiles.