B. UN JEU NON COOPÉRATIF ENTRE ETATS MEMBRES DE L'UNION EUROPÉENNE
Dans le contexte de l'union monétaire européenne, les règles institutionnelles et les incitations qui pèsent sur les choix des gouvernements nationaux sont sans doute de nature à engendrer des comportements opportunistes et non coopératifs, que la situation de chômage massif et persistant risque de rendre plus attrayant encore si la concurrence se renforce sur les marchés des biens et services et les marchés financiers et si la mobilité des entreprises s'en trouve accrue. En effet, avec l'adoption de la monnaie unique, les gouvernements nationaux perdent le contrôle de la politique monétaire -- déjà, il est vrai, entre les mains de banques centrales indépendantes, mais nationales -- et de la politique de change, qui leur ont jusqu'à présent permis, au sein du Système monétaire européen (SME), de se livrer à des pratiques non coopératives visant à accroître la compétitivité de l'économie nationale par rapport à celles des partenaires : alors que les dévaluations compétitives et la " désinflation compétitive " apparaissaient ainsi comme les deux modalités possibles d'un même jeu non coopératif dans le SME, la concurrence fiscale par l'abaissement des charges sur les entreprises et sur les coûts de production a des effets similaires sur la compétitivité et devient donc, dans l'union monétaire, une arme d'autant plus attrayante que l'unification monétaire en renforcera les conséquences en termes de répartition spatiale des activités et des emplois. En outre, la contrainte que fait peser le Pacte de stabilité et de croissance sur les politiques budgétaires nationales, qui restent le seul instrument de politique macroéconomique entre les mains des gouvernements, pourrait rendre les perspectives de la concurrence fiscale plus séduisantes encore, dans la mesure où une relance par allégement de la fiscalité stimulerait davantage la croissance de l'assiette des prélèvements qu'une hausse des dépenses publiques, engendrant ainsi un moindre creusement du déficit public, mais aux dépens des partenaires.