M. le président. « Art. 30. - L'article 62 du code de la famille et de l'aide sociale est ainsi modifié :
« 1° Les deux premiers alinéas sont ainsi rédigés :
« Lorsqu'un enfant est recueilli par le service de l'aide sociale à l'enfance dans les cas mentionnés aux 1°, 2°, 3° et 4° de l'article 61, un procès-verbal est établi.
« Il doit être mentionné au procès-verbal que les père ou mère ou la personne qui a remis l'enfant ont été informés : » ;
« 2° Dans le 2°, les mots : ", et notamment des dispositions de l'article 63 ci-après relatives à leur adoption" sont supprimés ;
« 3° Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° Sauf dans le cas mentionné au 4° de l'article 61, de la possibilité, lorsque l'enfant est âgé de moins d'un an, de demander le secret de leur identité ainsi que de donner des renseignements ne portant pas atteinte à ce secret. Ces renseignements sont recueillis dans des conditions précisées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. » ;
« 4° Après le sixième alinéa (4°), il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il y a demande de secret conformément au 4° ci-dessus, celle-ci doit être formulée expressément et mentionnée au procès-verbal. Le procès-verbal doit également mentionner que le demandeur a été informé de la possibilité de faire connaître ultérieurement son identité, qui ne pourra être communiquée qu'à l'enfant majeur et sur demande expresse de ce dernier. » ;
« 5° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "trois mois" sont remplacés par les mots : "deux mois" et les mots : "un an" sont remplacés par les mots : "six mois". »
Par amendement n° 44, MM. Mazars et Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, M. Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste proposent :
I. - Dans le texte présenté par le 3° de l'article 30 pour le 4° de l'article 62 du code de la famille et de l'aide sociale, de remplacer les mots : « des renseignements ne portant pas atteinte à ce secret » par les mots : « tous renseignements ou documents complémentaires ».
II. - Dans le texte présenté par le 4° de cet article, pour insérer un alinéa après le sixième alinéa (4°) de l'article 62 du code de la famille et de l'aide sociale, après les mots : « ultérieurement son identité », d'insérer les mots : « ou de lever le secret sur celle-ci ».
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat. Cet amendement visait à compléter des dispositions qui n'ont pas été retenues, il n'a donc plus d'objet.
Il tendait essentiellement à ne pas limiter les renseignements fournis par les parents aux seuls renseignements non identifiants et à les étendre éventuellement à l'histoire et aux raisons de cette situation.
Il visait également à lever le malentendu entre le secret et l'anonymat.
M. le président. L'amendement n° 44 n'a plus d'objet.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 16, présenté par M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires sociales, tend à rédiger comme suit la seconde phrase du texte présenté par le 4° de l'article 30 pour être inséré après le sixième alinéa (4°) de l'article 62 du code de la famille et de l'aide sociale : « Le procès-verbal doit également mentionner que le demandeur a été informé qu'il pourra faire connaître ultérieurement son identité et que le représentant légal de l'enfant sera informé de la levée du secret de cette identité qui ne sera communiqué sur demande expresse qu'à l'enfant majeur, ou à ses ayants droit majeurs s'il est décédé. »
L'amendement n° 12, déposé par M. Dejoie au nom de la commission des lois, vise à rédiger comme suit la seconde phrase du neuvième alinéa de l'article 30 : « Le procès verbal doit également mentionner que le demandeur a été informé qu'il pourrait faire connaître ultérieurement son identité et que le représentant légal de l'enfant sera informé de la levée du secret de cette identité qui ne sera communiquée qu'à l'enfant majeur et sur demande expresse de ce dernier. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 16.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à permettre aux ayants droit du pupille de l'Etat, si celui-ci est décédé, d'avoir connaissance de l'identité de la ou des personnes qui l'ont remis au service d'aide sociale, si toutefois ils en font la demande expresse.
Cette disposition sera conforme à une jurisprudence de la commission d'accès aux documents administratifs en date du 4 janvier 1996. La CADA a estimé que les enfants majeurs de pupilles de l'Etat décédés, ainsi que leurs descendants en ligne directe pouvaient également avoir communication de documents à caractère nominatif.
Vous savez qu'il est actuellement procédé à de nombreuses recherches généalogiques. En outre, il peut être important d'avoir accès à certains renseignements médicaux sur ses ascendants.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 16 et défendre l'amendement n° 12.
M. Luc Dejoie, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 16. Par voie de conséquence, je retire l'amendement n° 12.
M. le président. L'amendement n° 12 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 16 ?
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Cet amendement vise à informer le représentant légal de l'enfant que ses parents biologiques ou l'un des deux ont levé le secret de leur identité.
Une telle disposition peut en effet paraître utile afin que les parents adoptifs en soient prévenus pour se préparer psychologiquement et, surtout, pour préparer psychologiquement l'enfant à cet élément très important de son histoire personnelle.
Elle peut cependant présenter un risque de perturbation de la vie familiale en rendant les parents adoptants détenteurs d'une information essentielle que certains d'entre eux n'auraient peut-être pas souhaité connaître et qu'ils devront gérer jusqu'à la majorité de l'enfant.
En effet, deux situations sont alors possibles.
Des parents peuvent considérer que l'enfant est en état de recevoir cette information, et ils la lui communiquent. Tous les enfants ne sont sans doute pas dans un état psychologique tel qu'ils puissent attendre d'être majeurs pour accéder à leur dossier. Une telle information peut donc être la cause d'une grave déstabilisation psychologique.
A l'inverse, si les parents considèrent que l'enfant n'est pas en état d'intégrer cette information et ne la portent pas à sa connaissance, les risques de blessure psychologique de l'enfant seront grands lorsqu'il découvrira que ses parents adoptants en avaient été informés.
Il n'est pas certain, au surplus, que les parents adoptants soient désireux d'avoir connaissance de la levée du secret.
Or, en pareille matière, il faut peut-être prendre également en compte ceux qui trouveraient qu'il s'agit de quelque chose de trop lourd à porter.
Mais il est vrai, monsieur le rapporteur, que, sur ce sujet, comme je l'ai dit à l'issue de la discussion générale, la vérité est complexe et plurielle.
Sur ce point précis, le Gouvernement s'en remettra donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16.
M. Franck Sérusclat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat. Cet amendement nous paraît aller dans le bon sens. Cependant je m'interroge sur l'expression : « sur demande expresse ». Qui peut formuler cette demande ?
Une fois le secret levé, le représentant légal de l'enfant en sera informé, et cette identité sera communiquée « sur demande expresse ». Cette demande expresse émanerat-elle de l'enfant majeur ou de la personne qui a levé le secret ?
Par ailleurs, je regrette que l'on n'ouvre cette possibilité pour l'enfant qu'à sa majorité.
M. le secrétaire d'Etat a fait état d'une situation effectivement difficile : les parents adoptants peuvent être dans le secret de l'origine et ne pas pouvoir en parler à l'enfant qui le leur demande. Or, ce n'est pas forcément à la majorité que l'enfant cherche à connaître son origine. C'est plutôt vers l'âge de dix, douze ans, quand il est capable de faire preuve de discernement, c'est-à-dire de s'apercevoir qu'il n'a pas une famille biologique en raison de ses caractéristiques physiques, par exemple.
Je partage donc le souci du Gouvernement quant à cette connaissance par les parents adoptants, mais pour des raisons diamétralement opposées.
M. le secrétaire d'Etat craint une gêne pour la famille adoptante. Certes, la famille adoptante peut éprouver une gêne. Mais, pour moi, l'enfant qu'elle a adopté a, lui aussi, son identité.
Nous sommes en contradiction, comme en témoignent nos propos. Nous voulons tous que l'enfant soit heureux, se développe bien, mais, pour certains, si la famille adoptante était ennuyée, ce serait gênant.
Malgré ces réserves, nous voterons l'amendement n° 16.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, ne vaudrait-il pas mieux préciser : sur « leur » demande expresse.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour avis. Je pense, monsieur le président, que votre proposition est bonne. Cela dit, je suis réticent sur l'expression : « sur demande expresse de l'enfant majeur », car la loi prévoit que l'enfant majeur peut avoir connaissance de cette information.
Mme Monique ben Guiga. Pourquoi ne pas dire : sur « sa » demande expresse.
M. le président. Monsieur le rapporteur, il me semble que l'expression « sur leur demande expresse » exclut toute ambiguïté, même si elle est redondante.
M. Luc Dejoie, rapporteur. Monsieur le président, je n'y comprends plus rien !
L'identité ne sera communiquée sur demande expresse qu'à l'enfant majeur, c'est-à-dire à sa demande.
M. le président. Laissons à la commission mixte paritaire le soin de régler ce problème.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16.
Mme Joëlle Dusseau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau. Je vais voter cet amendement bien que sa rédaction ne me paraisse pas d'une clarté extrême.
Je me dois d'ajouter que « le demandeur », en fait, c'est la mère !... La mère a été informée qu'elle pourra faire connaître ultérieurement son identité !
Je pose à nouveau ma question en toute innocence : au nom de quoi dites-vous que la mère qui vient d'accoucher - c'est-à-dire « le demandeur » selon vos propres termes - pourra plus tard faire connaître son identité, qui ne sera communiquée à son enfant que lorsqu'il sera majeur ?
M. Pierre Fauchon. Il manque trois virgules !
Mme Joëlle Dusseau. Attention aux virgules ! Vous savez qu'elles ont été apportées par l'Assemblée nationale dans un drôle de sens. Ce n'est donc peut-être pas un mot à employer ici, monsieur Fauchon !
M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour avis. Monsieur le président, je vous propose une rédaction qui me paraît plus simple, à savoir : « la levée du secret de cette identité, qui ne sera communiquée qu'à l'enfant majeur, ou à ses ayants droit majeurs s'il est décédé, sur leur demande expresse ».
Mme Joëlle Dusseau. Le demandeur, c'est la mère, nous sommes bien d'accord ?
M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour avis. Oui.
Mme Joëlle Dusseau. Pauvre mère !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 16 rectifié, présenté par M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires sociales, et tendant à rédiger comme suit la seconde phrase du texte proposé par le 4° de cet article pour être inséré après le sixième alinéa (4°) de l'article 62 du code de la famille et de l'aide sociale :
« Le procès-verbal doit également mentionner que le demandeur a été informé qu'il pourra faire connaître ultérieurement son identité et que le représentant légal de l'enfant sera informé de la levée du secret de cette identité qui ne sera communiquée qu'à l'enfant majeur, ou à ses ayants droit majeurs s'il est décédé, sur leur demande expresse. »
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16 rectifié, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 45, M. Sérusclat, Mmes Dieulangard et ben Guiga, MM. Dreyfus-Schmidt et Mazars, et les membres du groupe socialiste proposent de supprimer le dernier alinéa (5°) de cet article.
Par amendement n° 17, M. Neuwirth, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa (5°) de ce même article :
« 5° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "un an" sont remplacés par les mots : "six mois". »
Monsieur Sérusclat, cet amendement n'a plus d'objet.
M. Franck Sérusclat. En effet.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 17.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 30, modifié.
(L'article 30 est adopté.)
Articles 30 bis et 30 ter