Séance du 6 avril 1999
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Raffarin, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Raffarin. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, au moment de dresser le bilan de ces nombreuses journées de débat, je souhaite commencer par dire que, à mes yeux et aux yeux du groupe des Républicains et Indépendants, cette discussion a été très fertile sur bien des sujets.
Je tiens à saluer l'excellent travail de la commission spéciale et à rendre hommage à son président, M. Jean François-Poncet.
Je souhaite également dire mon admiration à M. Gérard Larcher pour le tonus dont il a fait preuve, du début à la fin, montrant à la fois qu'il était un homme de compétence mais aussi un homme de conviction.
Nous avons aussi apprécié la sagesse et l'expérience financière de M. Belot, de même que le savoir de l'homme de terrain, du président de conseil général qu'est M. Revet. Ils ont donné en permanence à nos débats la dimension du concret.
Je dirai que ce débat révèle, pour moi, trois acquis importants et positifs.
Dans ce match des acquis, de mon point de vue, le score est de deux à un : un pour vous, madame le ministre, et deux pour le Sénat.
Le premier acquis, celui que l'on vous doit, madame le ministre, je l'ai déjà dit et redit, c'est cette conception forte de l'aménagement du territoire autour de la contractualisation que vous avez défendue du début à la fin du débat.
Un principe nouveau d'aménagement du territoire s'impose : le contrat, qui en est l'outil majeur. La logique du partenariat s'impose face à la logique de la spécialisation. La logique du contrat s'impose face à la logique de la directive.
Avec cette démarche-là, vous êtes en avance, madame le ministre. Quand on examine le texte que M. Zuccarelli est en train de préparer, on se rend même compte que vous avez des longueurs d'avance. M. Zuccarelli, quant à lui, en reste encore à la spécialisation, à un certain nombre de confusions que nous ne voulons plus voir dans nos territoires : le contrat est, en effet, l'outil majeur de l'aménagement du territoire, ce contrat devant être précédé par des schémas, lieux de la cohérence.
La condition du contrat, c'est le schéma, et le but du contrat, c'est le projet. Schéma, contrat, projet, je suis favorable à cette nouvelle et intéressante trilogie de l'aménagement du territoire.
Dans cette optique, je me réjouis de l'importante innovation que constitue le vote de l'amendement sur le schéma des équipements sportifs. On ne peut pas affirmer que le sport est une fonction majeure de l'insertion dans la vie, qu'il est, pour les jeunes, un facteur d'intégration et ne pas avoir une vision globale de la répartition des équipements sportifs sur l'ensemble du territoire.
Le mérite du deuxième acquis revient, de mon point de vue, au Sénat, qui a redéfini la notion de pays.
L'idée de pays conçu comme un espace nouveau s'impose. Il s'agit non pas d'une nouvelle collectivité territoriale, d'un nouvel échelon administratif, d'une structure bureaucratique et technocratique, mais d'un espace de projets, souple et efficace, organisé en syndicat mixte.
Le pays est, je le crois, un élément très important. Vous l'aviez présenté comme l'un des éléments majeurs de votre projet de loi d'orientation, madame le ministre. Nous lui avons donné de la souplesse. Nous avons fait en sorte que la décision des communes soit respectée, que le pays n'étouffe pas la commune, qu'il ne soit pas bâti contre le département, qu'il soit mis en place en intelligence et en cohérence.
A l'issue de l'examen de ce texte, le pays apparaît comme un concept stratégique de bassin d'emplois, de bassin de vie et d'avenir et, en même temps, comme un concept de cohérence avec la commune, d'une part, le département et la région, d'autre part. Les travaux du Sénat sur ce concept ont été positifs.
Troisième acquis très important de ce débat, et le mérite en revient à M. Jean François-Poncet et aux membres de la commission spéciale, c'est le pacte d'entente entre les départements et les régions.
C'est un élément très important de notre discussion : la guerre département-région n'a pas eu lieu.
La notion de chef de file que le Sénat a proposée clarifie le débat dans la logique du contrat, les départements et les régions doivent s'entendre et nous avons fait en sorte que la construction soit supérieure à la destruction, que les égoïsmes soient combattus et que les partenaires s'engagent à travailler ensemble au développement de leur territoire.
Cette entente département-région est un grand acquis de notre débat et elle perdurera encore longtemps. Nous aurons d'ailleurs l'occasion de manifester publiquement notre soutien à cette conception, autour de vous, monsieur le président du Sénat, prochainement, à l'occasion de la réunion de l'assemblée des présidents de conseils généraux, à Deauville. Avec M. Jean-Paul Delevoye, le président de l'association des maires de France, avec M. Jean Puech, le président de l'association des présidents de conseils généraux, tous ensemble, nous montrerons que les collectivités veulent travailler ensemble, savent surmonter l'intérêt particulier pour oeuvrer dans l'intérêt de tous.
Voilà pour ce troisième acquis. Je suis peut-être un peu trop acteur pour être arbitre. Je sifflerai pourtant deux penalties, car il nous faut désormais surmonter deux difficultés.
Le premier penalty, nous en avons parlé ce matin, madame le ministre, je le siffle en raison du désolant vide économique de votre projet de loi, que je regrette beaucoup d'ailleurs.
M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur le sénateur.
M. Jean-Pierre Raffarin. Le vide économique de votre projet est désolant, disais-je, et la logique d'entreprise est absente de ce débat ! Comment donner de l'oxygène à notre territoire sans défendre les PME ?
Voici le second penalty : ne cassez pas la tirelire des régions rurales, madame le ministre ! L'objectif de zonage 5 B va être supprimé, la PAT risque d'être retirée aux zones rurales, les difficultés économiques sont de plus en plus lourdes dans ces parties de notre territoire et les financements y sont de plus en plus modestes. La tirelire de la ruralité est menacée, je vous demande d'être particulièrement vigilante, madame la ministre.
Pour toutes ces raisons, j'annonce, au nom du groupe des Républicains et Indépendants, que nous suivrons les propositions de la commission spéciale. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Permettez-moi, monsieur M. Raffarin, de m'associer aux félicitations méritées que vous avez adressées au rapporteur de la commission spéciale, laquelle avait été mise en place, sous l'autorité du président Jean François-Poncet, pour examiner ce projet de loi extrêmement important. Nous regrettons que l'urgence ait été déclarée, ce qui nous interdit de l'étudier plus à fond.
La parole est à M. Gerbaud.
M. François Gerbaud. Nous voici parvenus au terme d'un débat important qui a été conduit avec célérité et avec une volonté réfléchie par notre excellent, j'allais dire dynamique, j'allais ajouter inusable collègue, Gérard Larcher.
Je crois que, faisant fi des passions et des a priori , nous avons fait oeuvre utile. D'une certaine manière, j'oserai même dire que nous avons été secourables. Il me semble en effet que nous vous avons évité, madame la ministre, de subir ce que j'appellerai le principe d'Archimède nouveau qui pourrait ainsi s'énoncer : en matière d'aménagement du territoire, tout corps juridique plongé dans un milieu hostile ou inquiet reçoit de ce milieu une poussée inverse à son poids législatif. (Sourires.)
Ce fut le cas, et c'est pour éviter cet accueil de l'inappliquable par une poussée du bas vers le haut, que nous avons voulu écarter de vous cet implacable phénomène dont, semble-t-il, vous avez pris cependant le parti.
Tout au long de nos travaux, nous avons eu pour seuls objectifs de contribuer, de manière déterminante, à la définition des grands choix qui conditionnent l'aménagement et le développement du territoire, qui contribuent à la cohésion nationale et qui n'opposent pas le monde urbain au monde rural, pas plus qu'ils n'opposent région et département, cela vient d'être dit.
Cette approche, commune à l'ensemble de la majorité sénatoriale, était nécessaire face à un texte modeste, présenté pourtant par ses auteurs comme une révision significative de la loi du 4 février 1995. Les modifications adoptées par le Sénat étaient nécessaires, car ce texte n'apportait aucune avancée sur la modernisation de la démocratie locale et sur le droit à l'expérimentation.
Nécessaire, également, car ce texte trop technocratique niait le rôle du Parlement en supprimant, notamment, l'observatoire de l'aménagement du territoire créé en 1995.
Nécessaire, ensuite, car ce texte aboutissait à une fonctionnarisation de la politique d'aménagement et de développement du territoire en mettant en place de fortes prérogatives de l'administration chargée d'élaborer les choix stratégiques et les schémas de services collectifs.
Nécessaire, encore, car idéologique, ce texte abrogeait le schéma national d'aménagement du territoire, supprimant ainsi toute péréquation financière entre les acteurs régionaux et locaux et il manifestait son hostilité à la réalisation de nouvelles infrastructures, niant par là même toute transversalité.
Nécessaire, aussi, car ce texte renforçait le déséquilibre entre les villes et les campagnes et favorisait l'hyperagglomération au détriment des villes moyennes.
Nécessaire, enfin, car ce texte était révélateur du manque de coordination gouvernementale en ne prenant pas en compte les autres projets de loi actuellement ou prochainement en discussion au Parlement, à savoir le projet de loi sur l'intercommunalité et le projet de loi sur la réforme de l'intervention économique des collectivités locales. Il n'apportait, en effet, aucune réponse sur l'organisation institutionnelle et sur la répartition de l'exercice des compétences entre les différents niveaux de collectivités.
Sous l'impulsion de la commission spéciale à laquelle je tiens à rendre un particulier hommage pour la qualité de son travail et de ses propositions, surtout à M. le président, Jean François-Poncet, à M. le rapporteur, Gérard Larcher et à ses « coadjuteurs », qui ont su faire leur jugement, la Haute Assemblée a pu ainsi rééquilibrer ce texte.
Sur leurs propositions, le Sénat a su renforcer le droit du Parlement. Il a su définir, sans modifier la répartition actuelle des compétences, le rôle de collectivité chef de file pour la mise en oeuvre d'actions communes menées, par la voie conventionnelle, par plusieurs collectivités territoriales. Il a su préparer l'élaboration d'un schéma directeur du Bassin parisien et d'un plan pour le développement des zones rurales en difficulté. Il a su rétablir une procédure de constatation des pays et assouplir le dispositif proposé pour les agglomérations. Il a su redonner leur vraie place aux infrastructures d'aménagement du territorie et protéger les espaces périurbains.
Pour toutes ces raisons ainsi énumérées, le groupe du Rassemblement pour la République votera ce texte, tel qu'il a été modifié par la Haute Assemblée, en espérant que nous serons compris et entendus par les députés. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Au terme de notre débat, il apparaît clairement, madame la ministre, que votre texte, qui visait à modifier la loi du 4 février 1995, a lui-même subi les foudres de ceux qui avaient fortement inspiré celle-ci il y a cinq ans.
A regret, j'ai pu constater que le discours tenu par les membres de la majorité sénatoriale et leur conception de l'aménagement du territoire national n'ont que peu évolué, alors que la loi Pasqua a montré ses insuffisances.
La majorité sénatoriale ne renie aucunement les dispositions qu'elle avait adoptées voilà cinq ans. C'est tout à son honneur, mais j'y vois pour ma part un refus ou une incapacité chronique, chez certains de nos collègues, à s'imprégner des mouvements de la société, des exigences nouvelles qui émergent à l'égard des politiques publiques, des services publics, des élus locaux,...
M. Dominique Braye. Vous êtes orfèvre en la matière !
M. Gérard Le Cam. ... d'une aspiration renouvelée chez nos concitoyens de prendre part à la gestion du territoire pour mieux faire valoir des préoccupations jusqu'ici étouffées, telles que le cadre de vie, la sécurité de l'emploi, la qualité de l'environnement, l'accès à des services de proximité de qualité.
Si certaines propositions émises par la commission spéciale et adoptées par le Sénat obtiennent, pour une part, notre assentiment - je pense en particulier au rôle accru donné au Parlement ou à la meilleure place réservée à l'institution départementale - j'observe cependant qu'elles ne sont pas dénuées de paradoxes et de contradictions apparentes.
Il est désormais admis que les schémas de services collectifs - j'en resterai à cette appellation - seront adoptés par la loi, sous la forme d'un rapport annexé avant le 31 décembre 1999.
Notre groupe ne peut qu'approuver une démarche qui consiste à associer davantage le Parlement à l'élaboration des schémas définis dans une perspective de vingt ans et qui touchent aux secteurs vitaux de notre pays.
Pour autant, les moyens préconisés par ce projet de loi pour repérer les projets sur le terrain, pour consulter l'ensemble des acteurs sociaux, économiques et associatifs ont été quelque peu remis en cause.
C'est ainsi que les CRADT ont été transformées en organes politiques composés par ceux-là mêmes qui décident de la politique régionale d'aménagement du territoire et excluent, de fait, la représentation syndicale.
Il en va de même pour le conseil de développement, constitué auprès des pays ou des communautés d'agglomération, que le Sénat a jugé bon de supprimer.
Cela relève, il est vrai, d'une approche assez particulière de la politique d'aménagement du territoire à la fois centralisée et dirigiste, par laquelle on impose des projets nationaux aux acteurs locaux qui ne sont consultés in fine que pour approuver sans autre alternative ou pour légitimer les choix effectués par d'autres. C'est en ce sens que notre groupe avait, en son temps, critiqué la loi Pasqua et le schéma national d'aménagement et de développement du territoire ; c'est dans le même sens que nous critiquons aujourd'hui la philosophie des schémas directeurs d'équipement et de services.
Peut-on, mes chers collègues, tout à la fois vouloir la démocratie élective au niveau national et refuser la démocratie participative au niveau local ?
Autre paradoxe de ce texte modifié par le Sénat : une plus grande place reconnue aux départements mais, en revanche, une orientation affichée et désormais inscrite dans la loi en faveur de l'insertion du territoire national dans l'ensemble européen et l'asservissement des politiques publiques nationales en matière d'aménagement du territoire aux choix de la Commission de Bruxelles.
Se profile clairement, au travers de plusieurs amendements retenus par la majorité de nos collègues, une Europe fédérale subdivisée en circonscriptions régionales dont les contours dépasseraient les limites administratives aujourd'hui reconnues, voire annuleraient les frontières nationales.
C'est indéniablement un pas supplémentaire vers des abandons de souveraineté dans des domaines de compétences qui ne sont pas aujourd'hui reconnus à l'Union européenne.
En quelque sorte, cette orientation nouvelle de notre législation anticipe sur des directives chargées de mettre en place le futur schéma de développement de l'espace communautaire.
Là où le texte confiait un rôle pivot à la région, le Sénat préconise de reconnaître cette dernière comme chef de file de la politique d'aménagement du territoire, préparant ainsi une hiérarchisation des compétences et une recomposition d'ampleur de notre territoire national.
Les territoires considérés comme des variables économiques parmi d'autres se trouveraient en quelque sorte « épurés » de leurs identités sociale, géographique, culturelle, environnementale, dans le seul souci de localiser et de canaliser le flux de capitaux vers les centres d'activités où la rentabilité est maximale et immédiate.
Notre rapporteur mentionnait, en exergue de son rapport, sa volonté, fort louable, de mettre l'homme au centre de toute politique publique. A la lecture de ce texte remanié, j'ai le regret de constater que cette préoccupation n'apparaît pas et que c'est bien davantage l'intérêt des firmes multinationales qui prime dans les propositions votées par la majorité de notre assemblée. (Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, et de l'Union centriste.)
J'en veux pour preuve les nouvelles possibilités données aux grandes agglomérations de gérer et d'installer elles-mêmes des infrastructures de télécommunication au péril des missions de services publics, de la péréquation géographique des tarifs ou de l'égal accès des citoyens.
Je note également la volonté qui se dégage d'approfondir et d'accélérer la transposition de la directive postale au profit d'un hypothétique « service universel » sans garantie pour les usagers et encore moins pour le personnel de La Poste.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Gérard Lecam. J'évoquerai ensuite l'ouverture de la gestion des maisons de services publics aux entreprises privées faisant ainsi entrer la logique de profit contre le principe de l'égalité d'accès de tous les citoyens à des services de proximité.
Enfin, les amendements adoptés sur l'initiative de nos collègues Raffarin et Oudin ne visent d'autres objectifs que de satisfaire des intérêts financiers et spéculatifs qui, loin d'aménager le territoire, vont accélérer sa dislocation. (Sourires sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Nous proposions, pour notre part, l'instauration de fonds régionaux pour l'emploi et le développement fondés sur une redistribution, sous contrôle démocratique, des richesses accumulées au profit de la création d'emplois et du développement d'activités locales grâce à un meilleur ancrage des entreprises dans le territoire.
L'idée essentielle est de valoriser les multiples atouts de nos régions au profit du plus grand nombre et non pas de concentrer les activités autour de quelques pôles « d'excellence » économiques sans contrepartie en termes d'emploi et d'aménagement du territoire.
A la mise en concurrence des territoires, nous préférons, quant à nous, la mise en cohérence des intérêts locaux dans un cadre national adapté et décentralisé faisant jouer pleinement les péréquations interrégionales et intrarégionales.
Le groupe communiste républicain et citoyen n'a pas trouvé de réponse aux préoccupations que je formulais en introduction à ce débat. J'y dénote tout au contraire des motifs d'inquiétude supplémentaires déjà présents dans la loi Pasqua, mais cette fois-ci renforcés et prolongés par les amendements de la majorité sénatoriale. Aussi, nous voterons contre ce texte profondément modifié. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Dominique Braye. C'est une surprise !
Un sénateur du RPR. Belle évolution de la pensée !
M. le président. La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger. Conformément aux engagements du Premier ministre, le Gouvernement a mis en chantier tout un ensemble de réformes, dont ce projet de loi, qui traduisent une conception plus moderne, plus citoyenne aussi, de l'aménagement du territoire au service de l'emploi, de la justice sociale et de la réduction des inégalités territoriales.
Ce projet de loi ne fait pas table rase du passé : les dispositions jugées intéressantes de la loi du 4 février 1995 - loi qui n'a paradoxalement pas toujours été appliquée, notamment par les gouvernements de droite qui l'ont inspirée - sont soit maintenues, soit améliorées ; je pense aux nouvelles règles d'urbanisme, aux zonages, aux mesures en faveur des zones rurales, aux fonds d'intervention ou encore à la notion de pays.
Ce projet de loi promeut de nouvelles idées pour faire naître des dynamiques de projet sur des territoires pertinents et met en place de nouveaux outils ; je pense tout particulièrement aux schémas de services collectifs ou encore aux nouvelles possibilités de contractualisation dans le cadre des pays et des agglomérations.
Le projet de loi ne fait pas table rase du passé, ai-je dit. En revanche, la majorité sénatoriale a, quant à elle, fait table rase du projet de loi. Elle en a refusé les innovations majeures, et nous avons vu, au cours des débats, des logiques différentes s'affronter sans jamais trouver de convergence sur les points les plus importants.
J'en donnerai quelques exemples.
L'article sur les pays a été complètement réécrit. Tous les éléments de souplesse introduits par l'Assemblée nationale ainsi que toutes les propositions permettant de prendre en compte la diversité des situations locales ont été supprimés ; je pense à la possibilité de se constituer en GIP pour contractualiser ou encore au recours à la convention pour régler les différentes situations de chevauchement territorial ou, enfin, à la distinction entre périmètre d'étude et périmètre définitif. Cela correspondait à des demandes fortes des acteurs locaux du développement durable.
Les schémas de services collectifs ont été remplacés par des schémas directeurs d'équipement et de services. La majorité sénatoriale a ainsi clairement exprimé son refus de penser l'aménagement du territoire en fonction des besoins et des services à rendre à la population. Elle a préféré s'en tenir à une logique de l'offre, à une logique peu soucieuse des deniers publics.
Cette attitude a atteint son paroxysme avec le rétablissement des cinq schémas unimodaux des transports qui ont été prévus par la loi de 1995 et qui, je le rappelle, n'ont jamais pu être mis en oeuvre par leurs auteurs. C'est la négation même de la notion de développement durable. C'est en fait un encouragement au tout routier malgré l'aspiration de la population à une meilleure qualité de vie. C'est aussi le refus de penser le déplacement des femmes, des hommes et des marchandises de manière cohérente en utilisant les atouts des différents modes de transport.
Les dispositions en faveur d'un approfondissement de la démocratie participative ont été systématiquement repoussées. Les acteurs locaux du développement durable sont mis sur le banc de touche : les conseils de développement créés auprès des pays et des agglomérations ont été supprimés.
M. Gérard Delfau. Oh oui !
M. Jacques Bellanger. Comme je l'ai indiqué au cours des débats, le Sénat a inventé par ailleurs un nouveau type de démocratie : la démocratie virtuelle. Il propose l'adoption par la loi des schémas, mais sous forme d'un rapport annexé sans valeur normative.
Enfin, plusieurs dispositions ont été adoptées qui ne peuvent que fragiliser la présence des services publics sur le territoire. Certes, deux de nos amendements portant sur ce sujet ont été adoptés. Je pense notamment à celui qui vise à prévenir la fermeture de plusieurs services publics sur un même territoire. Néanmoins, le Sénat a supprimé toutes les références aux maisons de services publics, qui constituent pourtant un moyen intéressant d'améliorer les services rendus aux usagers en regroupant en un même lieu plusieurs services publics.
Je pense aussi à la suppression de la définition du service universel postal, qui risque de fragiliser La Poste.
Je pense encore à l'amendement qui désormais permet aux collectivités locales de construire des réseaux de télécommunications sans aucun garde-fou. C'est là une atteinte grave au principe de péréquation tarifaire au coeur même du service public des télécommunications. C'est une mesure contraire à l'aménagement du territoire, puisque seules les collectivités qui disposent de moyens importants pourront réaliser ce genre d'investissement.
Je pense enfin à l'amendement qui a pour effet d'entamer le monopole de la SNCF pour l'exploitation des infrastructures ferroviaires.
En résumé, c'est La Poste, la SNCF et France Télécom, trois entreprises au coeur du service public, dans sa composante aussi bien sociale que d'aménagement du territoire, qui ont été attaquées !
Enfin, je conclurai sur une critique plus générale de la démarche suivie par la majorité du Sénat. Celui-ci s'est trop souvent positionné en termes d'opposition, voire d'exclusion. Il n'a pas réfléchi en termes de maillage du territoire, d'intégration des territoires, notamment ceux qui sont les plus en difficulté. Il en est resté à la loi de 1995, jouant pour cela l'opposition entre ville et campagne. De même, il a refusé de fédérer les énergies locales pour porter des projets de développement ; il a opposé démocratie représentative et démocratie participative au lieu de jouer leur complémentarité.
M. Gérard Delfau. Eh oui !
M. Jacques Bellanger. Dans ces conditions, nous ne voterons pas le texte proposé par la majorité sénatoriale. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le travail accompli au cours de ces deux semaines de débats intenses et riches a permis de rétablir une vision volontariste de l'aménagement du territoire.
Permettez-moi, monsieur le président, de saluer le travail accompli par la commission spéciale, son président M. Jean François-Poncet et ses rapporteurs MM. Gérard Larcher, Claude Belot et Charles Revet.
Le Sénat a largement amélioré un texte qui était initialement déséquilibré et dépourvu de véritable ambition. En effet, l'aménagement du territoire, ce n'est pas seulement se laisser porter là où les courants nous poussent ; c'est agir de façon volontaire pour rééquilibrer et infléchir des tendances.
Le Sénat a donc rééquilibré le texte en faveur des zones rurales, tout en veillant à éviter une guerre opposant la ville à la campagne.
Le Sénat a procédé à un rééquilibrage au sein même de l'espace européen.
Le Sénat a rééquilibré le texte en faveur des départements qui, avec la région, avec les pays, avec les communes, avec les communautés de communes, doivent être et rester un acteur essentiel de l'aménagement du territoire.
Le Sénat a enfin rééquilibré le texte en faveur du Parlement et de l'action parlementaire. Grâce à ce travail, le Parlement sera véritablement associé à la définition de la politique d'aménagement du territoire.
Le Sénat a su faire prévaloir une vision pragmatique de notre pays.
Il a souhaité mettre le projet de loi d'orientation en cohérence avec le projet de loi relatif à l'intercommunalité, dont la discussion s'engage cette semaine.
Il a renforcé le texte d'un volet économique indispensable à la mise en oeuvre d'une politique d'aménagement du territoire.
Voilà donc, monsieur le président, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles le groupe de l'Union centriste votera le projet de loi, tel qu'il a été amendé par le Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Gérard Larcher, rapporteur de la commission spéciale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Larcher, rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais d'abord remercier l'ensemble de mes collègues qui viennent de formuler à l'égard de la commission spéciale et de ses rapporteurs des appréciations qui, pour être variables, n'en ont pas moins toutes reconnu l'esprit de dialogue et la volonté d'aboutir qui ont animé nos discussions.
Au terme de ces débats, je tiens aussi à rendre un hommage personnel à l'implication de Mme la ministre dans les travaux du Sénat. Souvent seule au banc du Gouvernement, elle a porté toute son attention aux amendements en discussion. Nous avons passé trente-sept heures ensemble, et j'ai bien conscience, en tant que rapporteur de la commission spéciale, d'en avoir utilisé une bonne part...
Comme l'a fortement souligné ce matin M. François-Poncet, je me dois toutefois de déplorer à mon tour une certaine intransigeance du Gouvernement sur un certain nombre de points majeurs.
Je regrette en particulier que, ce matin même, la solidarité gouvernementale ait contraint Mme la ministre à rejeter l'essentiel d'un dispositif économique et fiscal dont au fond - j'en suis convaincu - elle ressentait la nécessité, et pour lequel M. Raffarin a plaidé avec tant de talent !
Il faut impérativement privilégier le développement économique, le développement de nos petites et moyennes entreprises sur les territoires les plus fragiles.
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Nous croyons qu'il n'y a pas de politique d'aménagement du territoire sans la volonté claire d'apporter une réponse équilibrée et pacifiée entre équipements et services, territoires ruraux, milieux naturels et agglomérations,...
M. René-Pierre Signé. Mais nous sommes d'accord !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... mais aussi entre les différentes infrastructures modales, que ce soit le rail, la route, le fleuve ou les télécommunications.
Le Sénat a abordé ce texte avec la volonté de l'enrichir, sans nostalgie, mais aussi sans oublier l'apport qu'avait constitué le texte défendu par MM. Pasqua et Hoeffel à la fin de l'année 1994, texte dont je rappellerai, qu'il a, car on a trop tendance à l'oublier, connu 96 textes d'application.
Les travaux du Sénat ont permis de remanier le projet issu de l'Assemblée nationale sur un certain nombre de sujets ; permettez-moi d'en évoquer quelques-uns.
Le premier touche à l'équilibre entre pays et agglomérations, territoires souples et vivants, territoires de projet et de solidarité, et non échelon administratif supplémentaire,...
M. René-Pierre Signé. Qui le conteste ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... qui doivent naître de la volonté des élus et non pas du coup de crayon des préfets. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Nous avons réalisé, me semble-t-il, une avancée substantielle en ce qui concerne la notion de chef de file ; M. Raffarin voulait bien le reconnaître tout à l'heure.
Il est significatif que le texte qui résulte de nos travaux ait recueilli l'assentiment des régions, des départements et des communes. Je suis convaincu que le triptyque schéma-contrat-projet sort renforcé par le texte du Sénat. Puisse le Gouvernement être attentif aux progrès ainsi opérés !
Nous avons par ailleurs inscrit les collectivités territoriales au coeur du développement des technologies de communication en prévoyant, notamment, qu'elles pourraient mettre leurs infrastructures de télécommunications à la disposition de tout exploitant autorisé dans le respect de la libre concurrence, mais aussi que les techniques hertziennes, satellitaires et filaires soient mises à la disposition de l'ensemble du territoire.
Le Sénat a ainsi concrétisé l'engagement du Gouvernement et répondu au souhait que M. le président du Sénat avait exprimé il y a deux semaines. C'est une question essentielle pour la société de l'information.
C'est sur l'initiative du Sénat, et tout particulièrement - rendons-lui justice pour cette initiative - sur celle de notre collègue Mme Bardou, que nous avons mis en place un schéma directeur d'équipements et de services sportifs.
Le Sénat a également montré sa détermination à mener une authentique politique de développement durable reposant sur une véritable politique foncière et non pas sur une incantation ou sur un protectionnisme qui serait intégriste.
C'est à cet objectif qu'ont répondu nos amendements relatifs, au péri-urbain qui, par-delà les dénominations, marquent une véritable volonté de durabilité,...
M. René-Pierre Signé. Que reste-t-il à la gauche ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... les amendements relatifs à la limitation des possibilités de révision des POS dans les communes qui ne disposent pas de schéma directeur, ainsi que l'amendement portant sur la possibilité d'achat de terrains agricoles grâce au produit de la taxe départementale sur les espaces naturels sensibles, et au rôle que les SAFER doivent jouer aux côtés de ces collectivités, en faveur du maintien de l'agriculture.
Madame la ministre, la politique d'aménagement et de développement durable du territoire me paraît effectivement devoir être autre chose qu'un projet de gauche un jour, un projet de droite un autre jour. Ce doit être un projet pour la France, pour l'avenir de la France et de sa place en Europe, pour l'avenir de toute la France, sans que soient mis en opposition les territoires ruraux et les villes, reposant sur la solidarité nationale dans un monde que nous savons devenir plus urbain, mais duquel ne doit pas être exclu le territoire rural dont notre pays a besoin. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste. - M. Signé s'exclame avec ironie.)
M. le président. Monsieur Signé, écoutez l'orateur !
M. Gérard Larcher, rapporteur. M. Signé vient de faire sa grande entrée dans le débat. Il est donc normal qu'il se fasse entendre ! (Sourires et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Il nous est apparu impossible que le Parlement, qui est dépositaire de l'ensemble de la légitimité nationale, soit écarté, de fait, du contrôle et des propositions de la politique d'aménagement du territoire. C'est sa fonction constitutionnelle.
Je me dois également d'évoquer l'indispensable mise en oeuvre d'une péréquation et d'une discrimination positive, qui passent, qu'on le veuille ou non, mes chers collègues, par les zonages, seul élément qui nous permette de compenser les inégalités territoriales, mais aussi l'émergence d'une conception non pas passéiste, monsieur Le Cam, mais dynamique du service public.
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Gérard Larcher, rapporteur. Mes chers collègues, tout en craignant que la procédure d'urgence et une certaine raideur gouvernementale ne soient fatales, dans quelques heures, à la réussite de la commission mixte paritaire, je souhaite que les travaux du Sénat concourent à enrichir le contenu d'un texte qui a vocation à compléter les vues qui étaient déjà les nôtres et à créer les conditions d'un aménagement dynamique du territoire de la France pour les vingt prochaines années.
En terminant, je voudrais remercier particulièrement M. le président François-Poncet avec qui, une fois de plus, nous nous sommes retrouvés sur ces sujets, et avec qui nous avons partagé des expériences qui sont somme toute différentes.
J'ai le souvenir, voilà maintenant vingt jours, d'avoir fait découvrir à M. François-Poncet, du haut d'une colline un peu artificielle qui domine une ville nouvelle de l'Ile-de-France, un territoire qui, à la fois, allie un développement exceptionnel et de grandes poches de pauvreté...
M. Jean-Pierre Raffarin. Le premier TUP !
M. Gérard Larcher, rapporteur. ... et de lui avoir dit que cela aussi, c'était la réalité de l'aménagement et de l'équilibre du territoire.
J'ai également le souvenir de M. le président François-Poncet me répondant alors qu'une seule de ces entreprises dans le département de Lot-et-Garonne serait capable de dynamiser le département et à la fois de renforcer ses capacités et de lui ouvrir des possibilités pour les temps qui viennent.
Je voudrais le remercier de nous avoir apporté son expérience et sa foi dans l'aménagement et le développement du territoire.
Je remercierai aussi MM. les rapporteurs Claude Belot et Charles Revet, qui, comme l'a dit M. Raffarin, nous ont fait part des expériences qu'ils conduisent dans leur département.
Merci à tous les membres de la commission spéciale qui se sont beaucoup impliqués dans ces travaux, en y apportant leurs préoccupations et la richesse de leur expérience.
Monsieur le président du Sénat, je tiens enfin à remercier nos collaborateurs et pas simplement pour respecter la tradition, mais parce que - et M. François-Poncet nous a pris en flagrant délit - ils ont consacré un certain nombre de jours du Seigneur à préparer les rapports avec le rapporteur de la commission spéciale. (Sourires.) Ils se sont ainsi mobilisés pendant un mois au service des travaux du Sénat.
J'exprime aussi ma gratitude à celles et ceux dont nous avons sollicité la contribution parfois en racontant des histoires de vaches parthenaises ou de cycles cellulaires et microbiologiques, ce qui pouvait leur causer quelques difficultés, difficultés dont ils se sont très bien sortis. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Monsieur le rapporteur, la présidence s'associe aux compliments justifiés que vous avez adressés aux personnels qui ont travaillé aux côtés des membres de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d'orientation sur l'aménagement et de développement durable du territoire.
Par ailleurs, je vous remercie d'avoir rappelé le voeu que j'avais formé voilà déjà quelque temps en matière de communication et de transmission.
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, permettez-moi d'ajouter quelques mots de conclusion à l'issue de ce long débat.
Je voudrais naturellement, chacun le comprendra, joindre mes remerciements à ceux qui ont été adressés à M. Larché et à ses deux collègues rapporteurs.
Sur un des sujets les plus compliqués, les plus vastes qui soient, le Sénat n'a bénéficié que d'un très court laps de temps et je vous assure que c'était un véritable tour de force que de mener à bien l'examen d'un tel texte dans de telles conditions. M. le rapporteur y est parvenu. Je ne dirai pas qu'il nous a surpris, parce que son énergie infatiguable nous est depuis longtemps connue ; je ne l'ai jamais vu refuser l'obstacle, il faut dire que c'est un cavalier émérite. (Sourires.) En l'occurrence, l'obstacle était élevé ; il l'a abordé avec l'acquis d'un très grand nombre d'études consacrées à la plupart des sujets qui sont au coeur de l'aménagement du territoire, qu'il s'agisse des télécommunications, des zones suburbaines, des infrastructures de transport. Ce bagage lui a permis de réagir très vite, et je l'en remercie, comme je le remercie pour l'amitié qui nous lie et qui a été présente à chaque moment de ce débat.
Le débat a porté sur ce que j'ai la faiblesse de considérer comme l'un des principaux sujets conditionnant l'avenir de notre pays. C'est en même temps l'un des sujets qui, depuis une bonne vingtaine d'années, progresse le moins. On peut se demander pourquoi.
Ma réponse personnelle est que l'aménagement du territoire n'est pas perçu, dans ce que j'appellerai les « sphères parisiennes », c'est-à-dire principalement la haute administration, comme prioritaire. Il est perçu comme une sorte de vache sacrée, à laquelle il faut rendre de pieux hommages mais qu'il n'y a pas lieu de prendre trop au sérieux.
A qui, d'ailleurs, aurait un doute quant à la validité du jugement que je viens de porter, il suffirait, mes chers collègues, de considérer la hauteur des crédits qui, année après année, sont accordés à l'aménagement du territoire. Je ne me souviens pas d'un ministre chargé de ce dossier qui se soit félicité de l'accroissement des crédits de son budget. Au demeurant, cet accroissement est généralement présenté en pourcentage, car la mesure de départ est si faible que, en volume, l'augmentation apparaît pour ce qu'elle est : dérisoire !
C'est malheureusement cette situation qui explique que la fracture territoriale n'ait cessé de s'aggraver dans notre pays.
Par rapport à l'époque où le général de Gaulle l'avait mis sur orbite, l'aménagement du territoire a indiscutablement reculé dans les préoccupations de l'Etat. A l'inverse, il mobilise plus que jamais les collectivités communales, départementales et régionales, la décentralisation ayant beaucoup contribué à cette mobilisation.
Voulant ignorer les conséquences de ce déficit d'efforts, on n'attribue pas aux carences de l'aménagement du territoire certaines des conséquences qu'elles entraînent.
Quand des parents d'élèves descendent dans la rue pour protester contre la fermeture d'une école - c'est ce qui se passe en ce moment même aux quatre coins de mon département - quand des banlieues à risques flambent, quand des élus se révoltent contre la fermeture de leur bureau de poste - et la liste n'est pas close ! - il ne faut voir là rien d'autre que des conséquences de la faillite de l'aménagement du territoire.
Et que l'on ne vienne pas nous dire que cette situation est fatale ! Un pays comme l'Autriche a surmonté cette prétendue logique d'urbanisation qu'on ne pourrait faire reculer.
L'Autriche avait, il y a trente ans, la même proportion d'actifs agricoles que la France ; dans l'intervalle, cette proportion a diminué exactement au même rythme qu'en France. En revanche, la population rurale, elle, est restée rigoureusement stable parce que l'Autriche a réussi à installer dans son espace rural des activités et des emplois qui le font vivre, elle a réussi à préserver, entre l'urbain et le rural, l'équilibre qu'il est effectivement souhaitable de maintenir.
Comme en 1995, la commission spéciale souhaitait doter la France d'une grande loi sur l'aménagement du territoire. La loi de 1995 avait tout ce qu'il fallait pour être une grande loi : elle était ambitieuse et réaliste.
M. René-Pierre Signé. Elle n'est pas allée au bout !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Elle n'a pas été appliquée comme elle aurait pu l'être et comme elle l'aurait été si le temps lui avait été prêté. (Très bien ! sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Bernard Piras. La dissolution !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Mais cette loi avait un défaut rédhibitoire, mes chers collègues : elle était l'oeuvre de la précédente majorité. D'un tel défaut, il est difficile de se relever !
M. René-Pierre Signé. Ça !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Celle de 1999 connaîtra-t-elle un meilleur sort ? Si j'étais vous, je serais prudent !
La commission spéciale a donc amendé le texte mais avec la volonté de le rééquilibrer et non pas d'en faire une oeuvre partisane.
M. Dominique Braye. Et idéologique !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Et idéologique : pourquoi pas ?
M. René-Pierre Signé. Le mot est de trop !
M. Gérard Delfau. M. Braye parle en orfèvre !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Elle n'a pas cherché - elle aurait pu le faire - à revenir à la loi de 1995.
Elle a repris à son compte, madame la ministre, la notion de développement durable. Cela ne lui était d'ailleurs pas difficile : nous l'approuvions spontanément, tout en espérant que le mot « durable » ne devienne pas une sorte d'incantation, un tic de langage ; l'idée est forte, juste, et mérite un meilleur sort.
La commission spéciale a admis la suppression du schéma national d'aménagement du territoire, auquel l'Assemblée nationale a eu beaucoup de mal à renoncer. Et que l'on ne nous dise pas que le fait de prévoir, comme la commission spéciale l'a proposé et fait voter, que les schémas de services seront annexés à une loi de Plan revient à réintroduire le schéma national par la fenêtre alors qu'il est sorti par la porte !
Mais je suis tout de même frappé de constater que les schémas de services seront soumis, étudiés et commentés par toutes les collectivités régionales, et probablement départementales, et que seul le Parlement n'en aura pas connaissance. Il y a là, permettez-moi de le dire, un très sérieux coup de canif dans les règles de la démocratie, et je suis surpris que certains l'acceptent aussi facilement. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste et du RPR.)
Quoi qu'il en soit, la commission spéciale a repris à son compte l'idée des schémas de services. C'est une bonne idée, et nous avons complété le dispositif.
C'est dire que nous avons fait autant de pas en avant qu'il était possible pour nous inscrire dans la philosophie du nouveau texte.
Bien sûr, nous l'avons amendé. Mais qu'attendait-on du Sénat ? Nous l'avons amendé avec la volonté de le rééquilibrer : nous souhaitions instaurer un équilibre entre zones urbaines et zones rurales, entre infrastructures et services.
Utiliser mieux les infrastructures qui existent : oui, bien sûr ! Inclure dans le coût des infrastructures la totalité des coûts indirects, y compris ceux qui peuvent résulter des atteintes portées à l'environnement : oui, bien sûr ! Partir des besoins et non pas d'une politique de l'offre : oui, bien sûr !
Seulement, mes chers collègues, à qui appartient-il d'évaluer les besoins ? Est-ce à la technostructure parisienne que nous sommes prêts à confier cette charge ? N'est-ce pas plutôt à ceux qui représentent la population ? N'est-ce pas plutôt aux élus, que la population a investis de la charge de la représenter ? Et que demandent les élus ? Je les ai entendus encore récemment lors de la réunion qui s'est tenue à Bordeaux : ils ne rejettent pas la notion de services, mais ils demandent des infrastructures supplémentaires, ils demandent le désenclavement. Ainsi, avec les « schémas de services et d'équipements », nous avons proposé un compromis correspondant très exactement à ce que les populations souhaitent.
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Nous voulions instaurer également un équilibre entre les collectivités territoriales, notamment entre les départements et les régions.
La commission spéciale avait la chance de compter parmi ses membres les présidents des principales organisations de collectivités territoriales. En proposant, non pas de toucher aux compétences des différentes collectivités, mais de faire en sorte qu'il y ait une collectivité chef de file dans l'exercice de ces compétences, nous avons permis que soit accomplie une avancée dans un domaine qui n'en en a connu aucune en vingt ans. C'est pourquoi je ne parviens pas encore à comprendre pour quel motif le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cette proposition.
Enfin, nous avons cherché à rétablir un équilibre entre les préoccupations concernant l'environnement et les préoccupations économiques. Il est vrai que, tel qu'il nous a été présenté, le texte n'avait d'autre contenu économique que virtuel. C'est d'ailleurs ce qu'a fait remarquer le rapporteur du Conseil économique et social : « La place légitime faite aux préoccupations environnementales ne devait pas l'être au détriment du développement économique et de la croissance pour la création d'emplois. »
Nous avons fait des propositions qui sont issues du travail réalisé par notre collègue Jean-Pierre Raffarin et qui sont directement inspirées par l'expérience du terrain. Je crois que nous aurions tous pu écrire les mêmes amendements.
Ces propositions, j'ai été désolé de voir le Gouvernement les rejeter.
D'ailleurs, sur presque toutes les propositions que nous avons formulées, vous avez malheureusement émis, madame la ministre, un avis défavorable. J'ai fait le compte de vos avis favorables, pour en avoir le coeur net : ils sont peu nombreux et portent sur des points secondaires.
M. René-Pierre Signé. Et c'était comment, avant ?
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. En vérité, à l'issue de ce débat, madame la ministre, je suis à la fois déçu et inquiet.
Je suis déçu de ce refus systématique d'ouvrir le dialogue.
Je suis aussi déçu, cher collègue Bellanger, parce que, en 1995, la majorité avait clairement marqué qu'elle était prête à ne pas suivre le gouvernement d'alors lorsqu'il lui semblait que les propositions de ce dernier n'étaient pas opportunes. Nous avons d'ailleurs eu, sur l'un des principaux sujets, l'université thématique, un débat véhément avec le ministre de l'époque, mais nous n'avons pas baissé pavillon devant ce que l'administration avait suggéré à ce ministre.
Or, quasi systématiquement, le groupe socialiste a aligné ses votes sur les avis défavorables émis par Mme la ministre. Mais je fais de la politique depuis suffisamment longtemps pour ne pas m'en inquiéter outre mesure !
Il reste, madame la ministre, que, si la commission mixte paritaire, comme il est probable, s'aligne sur les positions que vous avez prises, elle échouera, et que le texte comportera des lacunes telles que l'aménagement du territoire demeurera l'objet d'un voeu pieux.
Croyez-moi, on ne fera pas d'aménagement du territoire sans un grand effort sur les infrastructures, quelles qu'elles soient, pas seulement routières.
M. Bernard Piras. Ah ! Pas seulement routières !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Mais, bien entendu ! Nous n'avons jamais dit qu'il n'y avait que les infrastructures routières à prendre en compte !
Nous ne ferons pas d'aménagement du territoire sans qu'une impulsion décisive soit donnée à la création d'entreprises dans les zones rurales, sans que soit consenti un effort de revitalisation de nos zones rurales, sans que soit systématiquement exploitée la position centrale du territoire français en Europe, sans que la croissance de la région parisienne soit quantitativement limitée pour être réorientée vers la qualité.
Or, de tout cela, il n'est pas question dans la loi.
Par ailleurs - et c'est ma seconde inquiétude - si la commission mixte paritaire adopte la position que je redoute qu'elle ne prenne, alors, chers amis, la loi qui en résultera sera une loi partisane, et elle vivra ce que vivent de telles lois, c'est-à-dire qu'elle vivra ce que vivent les majorités qui les ont imposées. C'est ce que nous voulions éviter et je ne suis pas sûr que nous y soyons parvenus.
M. Dominique Braye. Bravo !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Et par avance, vous justifieriez, si telle était la conclusion, les amendements et la loi nouvelle qu'il faudra bien faire voter quand les majorités changeront. Croyez-moi, ce va-et-vient législatif ne débouche sur rien. Il crée une situation dont le pays, seul, fait les frais.
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Jean François-Poncet, président de la commission spéciale. Nous ne relèverons pas ainsi l'immense défi de l'aménagement du territoire. Nous ne comblerons pas ainsi la fracture territoriale et nous n'assurerons pas ainsi la place qui revient à la France en Europe. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le président, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, j'ai eu l'occasion, au cours des deux dernières années, de vous exposer longuement les objectifs du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire que j'ai eu l'honneur de défendre devant vous, projet dont Jacques Bellanger a bien voulu rappeler, voilà quelques instants, qu'il ne faisait pas, loin de là, table rase de la loi du 4 février 1995.
Je ne reprendrai pas une nouvelle fois cette présentation. Je rappellerai simplement qu'en révisant la loi du 4 février 1995 le Gouvernement a voulu placer au coeur de la politique d'aménagement et de développement du territoire les objectifs de création d'emplois, de solidarité nationale et régionale et de développement durable. Pour atteindre ces objectifs, il propose d'aider les territoires qui s'organiseront autour d'un projet et de consacrer cet effort commun dans un contrat.
M. Raffarin a bien voulu reconnaître que le lien fort ainsi établi entre les schémas, les projets et les contrats constituait une innovation qui méritait de retenir l'attention. Cette idée se traduira demain dans les pays et les agglomérations dont les projets pourront être appuyés par les contrats de plan.
Le projet met plus l'accent sur le développement économique et l'initiative que sur la péréquation fiscale qui, si elle est nécessaire, ne constitue pas l'alpha et l'oméga de la politique d'aménagement du territoire. Enfin, le projet de loi affirme que, faire de l'aménagement et du développement du territoire, c'est commencer par s'interroger sur les besoins des populations, sur les moyens d'y répondre dans les meilleures conditions économiques à long terme et non quadriller le territoire d'équipements au coût extravagant et à l'intérêt économique et social contestable.
Pour ma part, je suis, vous le savez, peu expérimentée au regard de certains dans cet hémicycle, mais je préfère vraiment faire du développement durable sans en parler plutôt que d'en parler sans jamais en faire. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Dominique Braye. C'est ce que vous faites tous les jours !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Au cours des trente-sept heures que nous avons passées ensemble, si, sur certains thèmes, le débat a été vif mais passionnant, en revanche, s'agissant des infrastructures, il m'a semblé long mais sans surprise. Vous cherchiez l'équilibre, avez-vous dit, monsieur le rapporteur. Personnellement, j'ai l'impression que c'est le maintien des déséquilibres actuels et du statu quo que vous avez choisi.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Vous n'avez pas bien écouté.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Le projet de loi suggère une planification territoriale plus décentralisée, une concertation aussi large que possible de la population, la définition d'objectifs précis et d'indicateurs de suivi et d'évaluation des politiques publiques. Ce sont autant de moyens qui permettront d'aller dans le sens d'un développement économique et social durable.
La commission spéciale a fait état, dans le débat général, de son esprit d'ouverture et de son approche constructive des problèmes. Certes, le Sénat a maintenu sans changement les articles 7, 8, 13 et 27 mais ce ne sont pas ceux qui ont la plus grande portée. Toutefois, il a réécrit très largement la majeure partie du texte, selon une grille préétablie et strictement respectée, à l'exception notable, et presque surprenante, de quelques dispositions de l'article 22 relatif aux services publics.
J'ai manifesté, tout au long de cette lecture, une grande disponibilité et j'ai écouté attentivement les propositions du Sénat. C'est ainsi que j'ai été amenée à accepter vingt-trois amendements sur les quatre-vingt-six présentés par la commission spéciale et soixante-dix amendements sur les deux cent soixante-dix déposés par les sénateurs, dont cinquante émanaient de la majorité sénatoriale.
Il s'agit, notamment, de la place de l'être humain à l'article 1er, de l'association des départements aux procédures de l'aménagement du territoire et de la prise en compte des politiques européennes aux articles 2, 4 et 5. Ce sont autant de points qui, à mon sens, ne sont pas secondaires.
La place du Parlement qui avait été renforcée à l'Assemblée nationale a pu être précisée, sans pour autant recourir à un dispositif de « législation virtuelle », en permettant au Sénat et à sa délégation parlementaire de débattre des futurs schémas de services ainsi que de leur cohérence entre eux et avec les politiques européennes. Ces schémas de services, qui intègrent de nouveaux équipements mais qui ne s'y résument pas, auront sur une échéance et un champ larges.
Les pays restent des territoires de projets. Ils ne sont pas, je le répète, de nouvelles entités administratives qui auraient je ne sais quelle vocation à se substituer aux départements. Je regrette, comme MM. Le Cam et Bellanger, que vous ayez supprimé les conseils de développement, signe concret de la prise en compte par les élus de la mobilisation des acteurs de la vie économique et de la vie tout court dans des pays pertinents.
M. René-Pierre Signé. Très bien !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il y a belle lurette qu'on le dit, les élus ne sont pas les seuls à pouvoir prétendre représenter les aspirations, la créativité et la dynamique des territoires. Le reconnaître par la validation des conseils de développement aurait été, me semble-t-il, à l'avantage du Sénat, comme cela a été à celui de l'Assemblée nationale.
M. René-Pierre Signé. Ils sont arriérés !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Les agglomérations sont également, à l'origine, des territoires de projets et de contrats, que le Gouvernement souhaite voir anticiper une nouvelle étape de l'organisation urbaine dotée de compétences fortes et fiscalement solidaire, en contrepartie de la bonification de la dotation globale de fonctionnement.
Le Gouvernement a également écouté avec attention vos propositions concernant l'évolution des services publics et précisé les dispositifs d'accompagnement et les garanties pour les territoires les plus en difficulté, sans pour autant pouvoir accepter un principe de compensation automatique, déresponsabilisant pour les services publics, que l'Etat ne contrôle pas toujours totalement, comme pour les collectivités.
Enfin, le Gouvernement s'est montré réceptif à vos propositions concernant le milieu périurbain, à un titre près.
Force est toutefois de constater que les multiples propositions d'ouverture du Gouvernement ont fait l'objet d'un rejet systématique et constant de votre assemblée, sur l'initiative de la commission spéciale.
Vous n'avez accepté aucun des amendements du Gouvernement, fussent-ils, comme pour l'expérimentation des transports régionaux, très proches de ceux que présentait le Sénat.
L'esprit des schémas de services, les dispositions relatives aux pays et aux agglomérations, les dispositions financières pour les milieux naturels ou pour les zones de revitalisation rurale s'en trouvent bouleversés. L'économie générale du texte est donc remise en cause après vos travaux.
J'éprouve, au terme de ce débat, un sentiment de déception, car nous sommes bien loin de vos professions de foi initiales. Je donnerai un exemple : vous avez avancé l'idée de chef de file, à laquelle le Gouvernement aurait pu être très sensible s'il ne s'était agi de démanteler purement et simplement deux des compétences majeures des régions au profit des autres collectivités locales, notamment des départements.
C'est donc avec quelque regret que je dois constater les divergences profondes entre le texte qui vous a été proposé et celui qui est soumis à votre vote. J'ai néanmoins quelque espoir que le long débat que nous venons d'avoir aura non seulement permis d'éclairer les choix et les orientations du Gouvernement mais aussi d'apaiser, au-delà des interprétations et des exégèses qu'il avait engendrées, les inquiétudes que vous aviez formulées.
J'espère également qu'il aura permis de consolider les bases des outils qu'il propose aux pays, aux collectivités territoriales et aux acteurs locaux pour la prochaine génération de contrats. En ce sens, et sans vouloir pousser plus loin la métaphore footbalistique tentée tout à l'heure par M. Raffarin, les observateurs en concluront sans doute qu'il ne s'agissait pas tout à fait d'un match nul.
Mon dernier mot sera pour les personnels du Sénat auxquels j'ai infligé une diction parfois rendue imprécise par la fatigue. Je pourrais l'imputer aux longues chevauchées nocturnes imposées par M. le rapporteur, mais je n'oserais l'affirmer. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission spéciale.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 88:
Nombre de votants | 320 |
Nombre de suffrages exprimés | 319 |
Majorité absolue des suffrages | 160 |
Pour l'adoption | 219 |
Contre | 100 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
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