Séance du 12 mai 1999
M. le président. « Art. 48. - Après l'article 38 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée, il est inséré un article 38-1 ainsi rédigé :
« Art. 38-1 . - La Commission bancaire entend le président du directoire du fonds de garantie pour toute question concernant un établissement pour lequel elle envisage de provoquer la mise en oeuvre du fonds de garantie ou pour lequel elle envisage de proposer à celui-ci d'intervenir à titre préventif.
« Le président du directoire est également entendu, à sa demande, par la Commission bancaire. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements présentés par M. Marini, au nom de la commission.
L'amendement n° 61 rectifié tend, dans le premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 38-1 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, après les mots : « le président du directoire », à insérer les mots : « et le président du conseil de surveillance ».
L'amendement n° 62 vise à rédiger comme suit le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 38-1 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 :
« Le président du directoire et le président du conseil de surveillance sont également entendus, à leur demande, par la Commission bancaire. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre ces deux amendements.
M. Philippe Marini, rapporteur. Ces deux amendements procèdent de la même logique.
L'amendement n° 61 rectifié a pour objet, dans la ligne de ce qui a été dit tout à l'heure, de bien mettre en évidence la responsabilité des professionnels dans ces mécanismes de fonds de garantie.
L'expression des professionnels, c'est leur représentation au conseil de surveillance du fonds et naturellement le président de celui-ci. C'est pourquoi il a semblé utile à la commission de bien préciser que le président du conseil de surveillance, et pas seulement le président du directoire, peut être entendu à sa demande par la Commission bancaire. Nous instituons donc une symétrie entre le président du conseil de surveillance et le président du directoire.
La rectification proposée par l'amendement n° 62 reflète exactement le même esprit.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons discuté, à l'occasion du CECEI, de la différence qui existe, dans l'esprit du Gouvernement et dans le texte, entre le président du conseil de surveillance du fonds et le président du directoire. Nous étions parvenus ensemble à la conclusion que c'était bien le président du directoire qui devait représenter le fonds vis-à-vis de l'extérieur, parce que c'était lui qui exerçait la réalité du pouvoir, qui avait l'information et qui, en conséquence, était responsable.
Il n'y a pas en soi d'inconvénient majeur à ce que le président du conseil de surveillance puisse aussi être entendu, sinon que nous introduisons une sorte de dyarchie, et donc de dilution de responsabilités, dans les informations qui peuvent être données aux organismes de contrôle par le fonds de garantie.
Pourquoi empêcher que le président du conseil de surveillance soit entendu, me direz-vous ? Il n'y a pas de raison en soi, sauf que cela peut conduire la Commission bancaire à recevoir des déclarations différentes de la part du président du directoire et de la part du président du conseil de surveillance.
S'agissant d'un organisme qui a une vocation de contrôle, c'est particulièrement gênant ; ensuite, en cas de mauvais fonctionnement, on dira : M. Untel avait dit cela, même si l'autre avait dit autre chose.
Sur un sujet aussi sensible concernant la protection des épargnants, il faut que les responsabilités soient clairement établies. Or, s'il faut choisir entre les deux personnalités, c'est évidemment le président du directoire qui détient la responsabilité. C'est ce qui a conduit le Gouvernement à demander, lors de la précédente séance, le retrait d'un amendement dans lequel il était mentionné que c'était le président du conseil de surveillance qui pourrait intervenir.
Dans la même ligne, je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, d'en rester au texte initial. En effet, dans la mesure où le président du conseil de surveillance et le président du directoire diraient exactement la même chose, la mesure proposée ne poserait pas de problème. Mais s'ils disent exactement la même chose, elle est inutile.
Dans la mesure où ils diraient des choses différentes, cela poserait un problème.
Dans ces conditions, autant faire simple et laisser au président du directoire, comme le prévoit la loi sur les sociétés la représentation extérieure de la structure.
Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je ne crois pas que ce qui est en cause, ce soit la représentation du fonds de garantie. Le cas n'est donc pas similaire, me semble-t-il, à celui de la représentation d'une société anonyme par le conseil de surveillance et le directoire. Nous sommes plutôt dans le domaine du prudentiel et de la transmission des informations utiles pour l'appréciation et la prise de décisions de la commission bancaire.
En effet, en cas de dualité d'informations, celles-ci peuvent ne pas être absolument concordantes. Mais c'est à la commission bancaire d'apprécier et de prendre ses responsabilités. Plus elle aura d'éclairage, mieux elle fera son métier.
Il faut bien savoir que le président du directoire - vous avez dit, lors d'une précédente séance, monsieur le ministre, que tel était votre sentiment - qui devrait présenter le profil d'une personnalité rompue à la pratique du métier bancaire ou du métier des assurances, sera le responsable permanent, au quotidien, de cette nouvelle entité ; il en sera l'exécutif en quelque sorte.
Le président du conseil de surveillance, lui, aura pour fonction de représenter la place, les souscripteurs des différents titres que nous avons évoqués, donc de représenter l'actionnariat.
Ils pourront l'un et l'autre ne pas avoir tout à fait le même angle de vue et ne pas faire remonter les mêmes informations auprès de la commission bancaire.
Pour ces raisons, monsieur le ministre, je ne suis pas complètement convaincu par ce que vous avez dit. Je ne crois donc pas devoir retirer mes amendements, même si je reconnais que le président du directoire est naturellement le patron opérationnel de la structure.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je constate à mon grand regret, monsieur le rapporteur, que je ne vous ai pas convaincu, mais je dois surtout dire que vos propos m'ont plutôt inquiété.
En effet, si l'on prévoit deux interventions, à savoir celle du président du directoire, qui fait valoir les besoins de garantie et du fonds de garantie, car c'est son métier, et celle du président du conseil de surveillance, auquel vous venez d'attribuer la mission de représenter la place, c'est-à-dire les actionnaires, les cotisants, alors deux logiques différentes s'affronteront.
En effet, les actionnaires du fonds de garantie ont intérêt à ce que l'on limite le montant des indemnisations, car ce sont eux qui doivent payer. Or, c'est le contraire de ce que nous souhaitons faire, puisque nous voulons que le fonds de garantie intervienne préventivement et curativement et soit alimenté par les banques. Si vous considérez que le président du conseil de surveillance représente les actionnaires du fonds, c'est-à-dire les banques, et qu'il doit intervenir, il aura tendance à restreindre le champ d'action du fonds, ce qui va à l'encontre de la logique de fonctionnement de celui-ci.
Par conséquent, non seulement, comme je l'indiquais tout à l'heure, il risque d'y avoir des informations différentes, mais des positions carrément contradictoires risquent de s'opposer ; dans ce cas, c'est évidemment la position du président du directoire qui m'importe, car il a la mission de faire en sorte que le fonds de garantie garantisse, et non de faire en sorte qu'il dépense le moins d'argent possible, c'est-à-dire qu'il limite le plus possible la portée de ses actions préventives, et qu'il échappe à l'action curative. Si c'est pour en arriver là, mieux vaut ne pas prévoir de fonds de garantie du tout.
Nous voulons protéger l'épargnant. Ce sont les institutions financières, par solidarité de place, qui vont payer. Elles ne le feront pas de gaieté de coeur, même si, intellectuellement, elles comprennent bien que c'est nécessaire.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 61 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, (rapporteur.) Revoyons les compétences respectives du conseil de surveillance et du directoire, car il me semble utile de les rappeler pour la clarté de nos travaux.
Le conseil de surveillance exerce un contrôle permanent de la gestion du fonds. Il élabore le règlement intérieur du fonds de garantie et les règles d'emploi, ces règlements étant homologués par le ministre chargé de l'économie, après approbation par le CRBF.
Cela signifie que la répartition interne des compétences entre le directoire et le conseil de surveillance va devoir figurer dans le règlement intérieur du fonds, qui sera approuvé par arrêté.
En toute logique, il ne devrait pas y avoir d'ambiguïté dans les compétences respectives du conseil de surveillance et du directoire ; naturellement, le ministre et le CRBF y veilleront.
Cependant, si vous le souhaitez, monsieur le ministre, et compte tenu de l'excellente atmosphère dans laquelle se déroule cette discussion, j'acccepte bien volontiers de retirer les amendements n°s 61 rectifié et 62.
Il n'empêche que le président du conseil de surveillance sera une personnalité de la place qui, sans avoir de rôle opérationnel quotidien dans la gestion du fonds, pourra, de par sa nature et sa position, recueillir éventuellement des bruits et des informations qui pourrraient échapper au président du directoire.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il en fera part au président du directoire.
M. Philippe Marini, rapporteur. Certes, en effet, il pourra en faire part au président du directoire et, le cas échéant, avec la formalisation nécessaire pour que ses mandants puissent considérer qu'il a bien rempli son rôle.
Mais arrêtons là ; on peut considérer qu'ainsi le mécanisme fonctionnera de façon équilibrée.
M. le président. Les amendements n°s 61 rectifié et 62 sont retirés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 48.
(L'article 48 est adopté.)
Chapitre II
Garanties des assurés
Article 49