SEANCE DU 17 AVRIL 2001
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à Mme Printz pour explication de vote.
Mme Gisèle Printz.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, améliorer
notre dispositif de sécurité sanitaire par la création d'une nouvelle agence
chargée de la sécurité sanitaire environnementale apparaît aujourd'hui comme un
impératif incontournable.
En effet, les interactions entre la santé de l'homme et l'environnement ne
sont plus à démontrer. Tout concourt désormais à une prise de conscience
collective des risques environnementaux et à une inquiétude bien légitime de la
population.
L'actualité récente, avec son lot de crises environnementales, et nos lacunes
évidentes en matière de connaissance et d'évaluation de ces risques rendent
chaque jour plus pressante la mise en place d'un dispositif adéquat afin de
prévenir comme de prémunir.
Cependant, bien que nous nous accordions tous sur la nécessité de compléter
dans le champ de l'environnement notre dispositif de sécurité sanitaire, nous
en sommes encore, après deux lectures et l'échec d'une commission mixte
paritaire, à tergiverser sur les meilleurs moyens d'y parvenir.
Certes, je ne peux nier sans mauvaise foi les conciliations nées des
divergences ni l'apport des navettes successives, la création de l'IRSN en est
d'ailleurs l'exemple le plus significatif. Mais je crois qu'il convient
maintenant de raisonner en termes d'urgence et d'efficacité.
En ce qui concerne le contenu de la future agence, il peut sembler à première
vue extrêmement séduisant d'y intégrer l'INERIS en tant que noyau dur, comme le
CNEVA l'avait été pour l'AFSSA. Mais si nous ne voulons pas que notre agence
santé-environnement devienne une agence environnement-santé, il faudra
nécessairement orienter petit à petit les compétences de ce modeste organisme,
presque exclusivement centré sur la sécurité environnementale et limité aux
seuls risques industriels, afin de développer la partie sanitaire. Cela
signifie également qu'il faudra procéder à un aménagement statutaire de la
structure et de son personnel.
Non seulement tout cela prendra du temps, mais il n'est pas dit pour autant
que, par cette intégration, l'agence gagnera en efficacité. En effet, si nous
voulons une agence dotée d'un champ de compétence le plus large possible, afin
de répondre à des facteurs multiples touchant à une variété de milieux, nous
devons absolument éviter d'orienter dès le départ l'agence vers des risques
spécifiques au détriment de tous les autres.
En outre, compte tenu du caractère hétérogène et incohérent des organismes qui
interviennent à différents niveaux dans le domaine de l'environnement, notre
priorité doit être d'ordonner et d'organiser l'existant en vue d'une efficacité
optimale.
C'est pourquoi il est essentiel que le rôle premier de la nouvelle agence soit
celui de coordinateur en matière de sécurité sanitaire environnementale. Elle
doit donc être un moteur pour le renforcement de la recherche en ce domaine.
Cela n'exclut pas qu'une fois le système national d'expertise rationalisé, elle
puisse intégrer en son sein plusieurs de ces organismes.
Enfin, s'agissant des compétences de l'Institut de radioprotection et de
sûreté nucléaire, à un moment où il apparaît de plus en plus inopportun de
distinguer le contrôle de la sûreté des installations nucléaires et celui de
leur incidence sur la santé, il semble nécessaire de privilégier des domaines
de recherche plus larges et indépendants, afin de doter cet institut d'une
capacité d'expertise la plus grande possible.
Il convient donc de ne pas exclure la recherche en sûreté sur les réacteurs,
étant entendu que celle-ci porterait non pas sur les réacteurs eux-mêmes, mais
bien sur la sûreté de ceux-ci, la radioprotection et la radioécologie.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste sera contraint d'émettre un vote
négatif.
M. le président.
La parole est à M. Doublet.
M. Michel Doublet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe du
Rassemblement pour la République avait, lors des deux premières lectures, suivi
le raisonnement de notre excellent rapporteur qui avait l'ambition de donner
davantage de poids à la nouvelle agence française de sécurité sanitaire
environnementale en la dotant d'un noyau dur constitué à partir de deux
établissements publics existant, l'INERIS et l'OPRI.
En effet, les insuffisances de la conception et le manque de moyens du nouvel
organisme ne pouvaient pas lui permettre de mener à bien les missions qui lui
étaient confiées par cette proposition de loi.
Nous pensons au contraire que, à l'heure où les Français sont de plus en plus
sensibles à la qualité de leur environnement, qu'il soit naturel, professionnel
ou domestique, au moment où les législations européennes ont vocation à se
rapprocher, il est essentiel de créer une structure forte. Ainsi que l'a
souligné M. le rapporteur, la France ne peut rester en retrait sur un sujet
aussi majeur. Or la majorité plurielle de l'Assemblée nationale a de nouveau
repoussé les dispositions que le Sénat avait adoptées et a opté, en nouvelle
lecture, pour une agence d'objectifs aussi privée de moyens que de
financements.
Notre groupe partage la volonté de M. le rapporteur de s'opposer à la création
d'un énième collège d'experts, dont nous ne dénigrons pas la qualité, mais qui
risque d'alourdir les structures existantes, sans pour autant améliorer la
sécurité sanitaire en matière d'environnement.
Notre groupe approuve donc les propositions du rapporteur de la commission des
affaires sociales de garantir de nouveau l'intégration de l'INERIS dans
l'agence tout en préservant le statut des personnels, de préciser l'intitulé de
l'agence concernant ses compétences en matière de prévention des risques
industriels et chimiques et de lui donner des compétences d'évaluation et
d'expertise.
Quant à la création de l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire,
résultat de la fusion de l'OPRI et de l'IPSN, introduite en deuxième lecture à
l'Assemblée nationale, nous ne pouvons que réitérer nos regrets quant à la
procédure employée.
Le Gouvernement met ainsi en place la première étape du projet de réforme du
système français de radioprotection, de contrôle et de sécurité sanitaire
annoncé il y a quelques mois dans un texte qui concernait un tout autre débat.
Notre groupe renouvelle sa désapprobation à l'égard de cette méthode tout à
fait contestable sur la forme.
Quant au fond, la précipitation du Gouvernement a engendré une grande
confusion dans la rédaction du dispositif. Si nous approuvons cette fusion,
nous ne pouvons accepter un texte imprécis et ambigu. Notre groupe approuve
donc la volonté de la commission de rétablir le texte adopté en deuxième
lecture, qui améliore considérablement la proposition de loi, en excluant
notamment les activités de recherche en sûreté sur les réacteurs nucléaires du
nouvel établissement et en précisant la nature des tutelles qui auront vocation
à s'exercer sur ce nouvel organisme.
Pour toutes ces raisons, notre groupe votera ce texte de loi tel qu'il ressort
des travaux de notre Haute Assemblée.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Claude Huriet,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Claude Huriet,
rapporteur.
Je veux d'abord remercier notre collègue Michel Doublet et
ceux qui ont voté les amendements de la commission des affaires sociales.
Je veux aussi dire à Mme Printz qu'elle m'a donné un moment de satisfaction,
hélas ! très fugitif. En effet, je ne sais pas à quoi elle faisait référence
lorsqu'elle a souligné l'apport des navettes successives. Peut-être
s'agissait-il de l'introduction, au travers d'un cavalier, de l'institut de
radioprotection et de sûreté nucléaire.
Il faut se souvenir que cette volonté tardive du Gouvernement de répondre
partiellement aux propositions du rapport Le Déaut procédait d'une initiative
du Sénat. C'est bien parce que nous avons introduit en première lecture l'OPRI
comme l'une des structures porteuses de la future agence que le Gouvernement,
au travers de différents amendements de l'Assemblée nationale, est parvenu à
l'IRSN. Il est d'ailleurs assez curieux de voir que l'objectif premier n'a pas
été atteint et que, en revanche, un objectif fixé ultérieurement a, lui, été
atteint, montrant par là même certaines incohérences dans l'attitude et la
volonté politique du Gouvernement et de la majorité qui le soutient.
Permettez-moi de vous dire, madame Printz, que j'ai regretté que vous n'ayez
pas été membre de la commission mixte paritaire lorsque vous avez dit que la
situation actuelle était caractérisée par un manque de cohérence. Vous avez
parlé d'organismes hétérogènes et incohérents. Je vous applaudis !
Vous avez également dit que les propositions du Sénat, dans sa majorité,
tendaient à mettre en place une structure extrêmement séduisante eu égard à
l'organisme voulu par le Gouvernement, que vous avez qualifié de « modeste ».
Je ne doute pas que si vous aviez été présente en commission mixte paritaire
vous auriez pu exprimer la voix qui nous a manqué pour parvenir à un accord.
C'est donc sur cette satisfaction mitigée et sur ce regret que je termine mon
intervention, non sans vous remercier, monsieur le ministre, d'avoir bien voulu
participer au débat que vous avez pris, hélas ! en cours de route. En effet, si
vous aviez pu exercer les fonctions et les responsabilités qui sont désormais
les vôtres, peut-être auriez-vous été plus écouté que la majorité sénatoriale
et peut-être aurions-nous eu davantage de chances de parvenir au résultat dont
chacun de nous s'est prévalu ce soir au travers de la création des agences qui
ont doté la France de dispositifs enviables. Il est dommage que ces dispositifs
n'aient pas pu être complétés, ce soir, par une véritable Agence de sécurité
sanitaire environnementale.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je souhaite tous vous remercier. Les compliments de M.
le rapporteur me sont allés droit au coeur, même si les suppositions sont
faciles.
En réalité, tout cela me paraît très positif, parce que nous menons ce combat
ici, ensemble, depuis dix ans...
M. Claude Huriet,
rapporteur.
Depuis l'Agence du médicament !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Effectivement, depuis l'Agence du médicament, qui a été
créée, vous vous en souvenez, dans des circonstances un peu rapides, et qui est
très efficace. Des centaines de personnes y travaillent, à la satisfaction
générale et pour le plus grand bien de l'idée de santé publique.
Ensuite, a été créée l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments,
puis, maintenant, cette agence française de sécurité sanitaire
environnementale.
Sans votre travail, sans votre obstination, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, notre pays serait moins bien doté en matière de
sécurité et de santé publique. Je tiens à vous en remercier.
Rien n'est terminé ! Nous allons faire évoluer ces agences à partir d'un
effectif que vous jugez, pour le moment, trop réduit. Quarante postes sont
prévus. Il y en aura d'autres ! Vous verrez que, dans les années, voire les
mois à venir, nous développerons ce travail pour le bien de tous.
M. le président.
Monsieur le ministre, nous apprécions les paroles d'espoir que vous venez de
prononcer.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
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