SEANCE DU 5 JUIN 2001
M. le président.
Par amendement n° 76 rectifié, MM. Schosteck, Fournier, Joyandet et les
membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer,
après l'article 5
ter
, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le II de l'article 22 du code des marchés publics, le mot : "égal" est
remplacé par les mots : "deux fois supérieur". »
La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet.
Cet amendement très simple a pour objet de permettre aux assemblées des
collectivités locales de procéder à l'élection de deux suppléants par membre
titulaire des commissions d'appel d'offres, au lieu d'un actuellement, et ainsi
de doubler le nombre de ces suppléants.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission est tout à fait favorable à cet
amendement, car il s'agit d'une disposition pratique de nature à améliorer le
fonctionnement concret de nos commissions d'appel d'offres pour des raisons
évidentes.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'avis du Gouvernement est tout à fait défavorable à
cette disposition qui déresponsabiliserait les membres actuels des commissions
d'appel d'offres.
Monsieur le rapporteur général, ce n'est pas parce qu'on a des difficultés à
réunir des commissions d'appel d'offres dont les membres soient en nombre
suffisant pour qu'elles délibèrent valablement qu'il ne faut pas insister à
nouveau sur l'importance de ces commissions et sur le fait qu'il est de la
responsabilité quasi éthique des membres des assemblées délibérantes d'y
participer lorsqu'ils ont été désignés.
Cet amendement, que je peux, sans être agressif, qualifier de « laxiste »,
n'encouragera pas la prise de responsabilité, qui est à la racine même de
l'engagement des élus dans ces commissions.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout cela est bien beau et chacun ne peut
naturellement qu'y souscrire et vous entendre avec plaisir sur ce terrain des
grands principes, monsieur le secrétaire d'Etat.
Cela étant dit, dans une équipe municipale jeune et dynamique ne comportant
plus de retraités, qui, puisque tout le monde a une activité professionnelle,
une vie active, peut participer à ces commissions d'appel d'offres ? Celles-ci
siègent aux heures où les entreprises - on peut, dans leur intérêt, le supposer
- travaillent, de même d'ailleurs que les services publics lorsqu'il s'agit de
fonctionnaires. Par conséquent, ce n'est pas un secret, les collectivités ont
de plus en plus de difficultés à trouver des élus disponibles pour siéger
régulièrement au sein de ces commissions.
Bien entendu, vous avez mille fois raison, c'est une mission, c'est une
responsabilité...
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
C'est même la plus importante !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Bien entendu ! Mais je me permets de vous renvoyer,
monsieur le secrétaire d'Etat, aux sempiternelles discussions sur le statut de
l'élu, sur sa disponibilité...
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
C'est un autre problème !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mais non, ce n'est pas un autre problème : c'est « le
» problème ! Il est bien beau de dire à un élu que telle est sa mission, que
c'est une question d'éthique et qu'il doit y aller ! Mais encore faut-il que ce
soit matériellement et concrètement possible !
Or, l'un de nos collègues nous soumet justement une déposition de nature à
assouplir la contrainte : plus de suppléants permettront le partage, la «
mutualisation » de la tâche dans l'équipe.
Pour ma part, cette disposition me semble plutôt relever du bon sens et être
issue de l'expérience concrète, même si, sur le plan des principes, monsieur le
secrétaire d'Etat, j'applaudis naturellement au son de la trompette que vous
nous avez fait entendre tout à l'heure.
M. le président.
Monsieur Joyandet, l'amendement n° 76 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Joyandet.
Oui, monsieur le président.
Je suis, moi aussi, assez étonné de la réponse de M. le secrétaire d'Etat.
Puisque l'on parle de principes, de transparence des marchés publics, par
exemple, sachez que le fait de doubler le nombre de suppléants permettrait
d'informer un plus grand nombre de conseillers municipaux sur ce qui se passe
dans les commissions d'appel d'offres, lesquelles - je confirme ce qu'a dit M.
le rapporteur - ne seraient plus réservées à quelques-uns. En outre, cette plus
grande transparence permettrait une meilleure transmission des informations au
sein d'une même équipe.
Je suis, par conséquent, d'autant plus étonné de la réponse de M. le
secrétaire d'Etat que je ne vois que des avantages à cette proposition.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 76 rectifié.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je comprends bien les motivations de M. Schosteck - on en a longuement parlé
en commission aussi d'ailleurs - et je ne suis pas complètement en désaccord
avec la réponse de M. le secrétaire d'Etat. A mon avis, il faudrait arriver à
trouver un moyen terme.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ce qui est manifestement visé dans ce texte -
je parle sous le contrôle de ses auteurs -, c'est la situation des plus grandes
collectivités : conseils généraux, conseils régionaux, grandes villes, mais
peut-être surtout des conseils généraux.
Dans mon propre département, la commission d'appel d'offres siège pratiquement
toutes les semaines, parfois deux jours par semaine, de façon ininterrompue. Le
fait de bloquer les membres de la commission d'appel d'offres aussi longtemps,
aussi systématiquement, alors que les conseillers généraux ont des activités
professionnelles et que l'on trouve, effectivement, de moins en moins de
personnes à la retraite, n'ayant donc que cela à faire, peut poser un
problème.
Je souhaite que l'on n'en reste pas à cette réponse de M. le secrétaire
d'Etat, qui est une fin de non-recevoir. A l'évidence, cela poserait un
problème dans les plus petites communes. En effet, dans les conseils municipaux
de neuf membres, si trois d'entre eux sont titulaires à la commission, les six
autres seront tous membres suppléants de la commission d'appel d'offres ! Ce
n'est manifestement pas ce que veulent les auteurs. Cela veut dire, monsieur le
secrétaire d'Etat, qu'il faut énumérer les catégories de collectivités et fixer
un seuil de population...
M. Michel Mercier.
Ou donner une faculté plutôt qu'une obligation !
M. Michel Charasse.
Il faut en tout cas que ce ne soit pas une obligation. Mais je crois
d'ailleurs que c'est une faculté et que la rédaction de l'amendement n° 76
rectifié n'entraîne aucune obligation.
Je souhaite que, à la faveur de la navette, les points de vue se rapprochent,
afin de trouver un moyen terme qui soit convenable et qui corresponde
exactement au souci des auteurs de cet amendement, qui concerne manifestement
les plus grosses collectivités.
Vraiment, une commission qui siège de vingt-quatre heures à quarante-huit
heures, dans un gros conseil général - je parle sous le contrôle de M. Mercier
qui préside celui du Rhône - c'est courant, mais c'est énorme, et c'est tout le
temps ! Il y a en effet des marchés pour les routes, pour les bâtiments
scolaires, pour les collèges, pour les fournitures... Cela n'arrête pas ! C'est
toutes les semaines ! Il serait donc utile de pouvoir se faire suppléer un peu
plus.
Personnellement, je ne voterai pas l'amendement de nos collègues, parce que,
justement, il est trop général et qu'il porte indistinctement sur toutes les
collectivités locales sans tenir compte de la population. Mais je souhaite,
s'il est adopté, que la navette soit mise à profit, avec le concours du
Gouvernement, monsieur le secrétaire d'Etat, pour qu'une solution un peu
réaliste soit trouvée.
M. Alain Joyandet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet.
Je ne suis pas certain que l'exemple des conseillers généraux qui sont
rémunérés, et qui perçoivent donc une indemnité, soit le meilleur.
L'exemple le plus criant est celui des conseils municipaux, et pas
nécessairement de grandes collectivités, monsieurs Charasse, celui des
collectivités moyennes plutôt. Je suis maire d'une ville de 20 000
habitants...
M. Michel Charasse.
C'est déjà une grande ville !
M. Alain Joyandet.
C'est un gros village !
A moins d'être des privilégiés et d'avoir une situation permettant des
décharges horaires, les conseillers municipaux qui sont salariés du secteur
privé ne peuvent pas siéger en commission d'appel d'offres !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument ! Il faut voir la réalité.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
La solution préconisée par M. Charasse est excellente.
Au cours de la navette, nous aurons l'occasion de préciser les seuils auxquels
peuvent s'appliquer ces dispositions. Mais je reste convaincu que si la loi,
dans ses dispositions actuelles, a prévu des membres titulaires et des membres
suppléants, c'est bien pour remédier aux inconvénients de la situation qui a
été évoquée par plusieurs membres de la Haute Assemblée !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 76 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 5
ter
.
Par amendement n° 77 rectifié, MM. Schosteck, Oudin, Fournier, Joyandet et
Cazalet proposent d'insérer, après l'article 5
ter
, un article
additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 481-4 du code de la construction et de l'habitation est abrogé.
»
La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet.
Cet amendement, qui a pour objet d'abroger l'article L. 481-4 du code de la
construction et de l'habitation, vise à clarifier les règles de mise en
concurrence applicables aux contrats conclus par les sociétés d'économie
mixte.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission souhaite entendre le Gouvernement avant
de donner son avis.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Quel est, en définitive, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission n'a pas été en mesure d'étudier cette
proposition de façon aussi approfondie qu'il aurait été souhaitable. Si elle
reconnaît qu'une telle orientation serait utile, il lui semble qu'il serait
plus judicieux d'introduire une telle disposition dans la proposition de loi
tendant à moderniser le statut des sociétés d'économie mixte dont, M. Paul
Girod a pris l'initiative et qui est actuellement en navette. Elle permettra de
réexaminer globalement le régime de ces sociétés d'économie mixte.
Aussi, tout en reconnaissant l'utilité de la démarche de nos collègues, je
leur demande de bien vouloir retirer leur amendement.
M. le président.
L'amendement n° 77 rectifié est-il maintenu, monsieur Joyandet ?
M. Alain Joyandet.
Les contrats conclus par ces sociétés sont soumis à des dispositions parfois
contradictoires qu'il serait nécessaire de tirer au clair. Toutefois, à la
demande de M. le rapporteur général, je retire cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 77 rectifié est retiré.
Article additionnel après l'article 15 (priorité)