SEANCE DU 26 JUIN 2001


M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 137, MM. Paul Girod, Bimbenet et Delfau proposent d'insérer, après l'article 17 sexies A, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L.4151-7 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé:
« L'admission dans ces écoles est subordonnée à la réussite au concours organisé à la fin de la première année du cycle des études médicales. »
Par amendement n° 139, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 17 sexies A, un article additionnel ainsi rédigé:
« I. - L'article L.4151-7 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'admission dans ces écoles en vue de la préparation du diplôme d'Etat de sage-femme est subordonné au classement en rang utile à l'issue des épreuves de l'examen organisé en fin de première année du premier cycle des études médicales. »
« II. - Ces dispositions sont applicables à compter de la rentrée de l'année universitaire 2002-2003. »
La parole est à M. Paul Girod, pour présenter l'amendement n° 137.
M. Paul Girod. Depuis quelques mois, la presse se fait l'écho de l'émotion intense qui règne parmi les sages-femmes.
Celles-ci ont, très légitimement, attiré l'attention sur le « rang » secondaire qui leur est attribué par rapport aux autres professions de santé, en particulier par rapport aux obstétriciens, en même temps que sur les difficultés de plus en plus grandes qu'elles rencontrent dans l'exercice d'une profession extrêmement délicate.
Rappelons-nous que nous sommes tous passés, d'une manière ou d'une autre, entre leurs mains ! Elles ont d'ailleurs utilisé un slogan extrêmement sympathique dans leurs manifestations, rappelant qu'elles nous avaient tous vus à un moment de notre vie où les vêtements étaient inutiles !...
Les sages-femmes ont également fait remarquer que, de plus en plus, les tribunaux mettaient leur responsabilité en cause car, pendant les grossesses, avant et après les accouchements, elles sont amenées à assurer des actes, en tout cas à prendre des décisions pour lesquelles leur responsabilité peut être mise en cause de la même manière que celle d'un médecin de plein exercice.
Elles demandent par conséquent des mesures de dignité - avant même des mesures de compensation financière - afin d'assurer la reconnaissance due à ce métier délicat, en particulier l'intégration de leur formation dans le tronc commun des formations médicales.
Je crois que c'est le minimum.
Nous aurons sûrement ensuite à décliner d'autres mesures sur le cursus réel, définitif, de la formation initiale et de la formation permanente des sages-femmes, leur permettant d'occuper, au sein des professions médicales, la place qui est la leur et le rang qui leur est dû.
Cet amendement constitue un premier pas, me semble-t-il, vers la solution de ce malentendu qui règne entre la nation et cette profession éminemment estimable.
J'ai vu avec quelque étonnement que le Gouvernement, qui, pendant fort longtemps, a été sourd à ces arguments, se résolvait, peut-être parce qu'un amendement sénatorial ouvrait une brèche, à faire un pas dans le même sens - Mme la secrétaire d'Etat va nous le dire en présentant l'amendement n° 139.
Quoi qu'il en soit, je me réjouis que ce projet de loi de modernisation sociale soit peut-être l'occasion, pour le Gouvernement, de prendre conscience qu'il était dans une impasse en cette matière et que ces personnes - parce qu'il n'y a pas que des femmes qui exercent cette profession - méritent une considération accrue.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat, pour défendre l'amendement n° 139 et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 137.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. Cet amendement a pour objet de réaliser le recrutement des étudiants sages-femmes par le biais de l'examen de fin de première année du premier cycle des études médicales. Ses dispositions permettent l'extension de la procédure dérogatoire lancée à Grenoble depuis plus de dix ans et récemment étendue à d'autres écoles pour l'accès aux études de sages-femmes.
J'ai entendu plusieurs fois M. Bernard Kouchner prendre l'engagement de faire en sorte que cette procédure soit mise en place. L'accès aux études de sages-femmes via la première année du premier cycle des études médicales devient donc la règle commune. Il répond par ailleurs aux besoins de la formation et aux demandes croissantes de la profession.
Il s'agit, en l'occurrence, d'une pratique courante, qui est mise en oeuvre ou est en passe de l'être dans 80 % des écoles de formation.
La rédaction proposée par le Gouvernement étant plus précise que celle de l'amendement n° 137, je suggère au Sénat d'adopter l'amendement n° 139, et comme ces deux amendements ont le même objet, je vous demande de retirer le vôtre, monsieur Girod.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 137 et 139 ?
M. Claude Huriet, rapporteur. Comme l'a dit tout à l'heure M. Paul Girod, tout permet de penser que le dépôt de son amendement a incité le Gouvernement non seulement à déposer le sien, mais aussi à chercher à faire mieux. Je crois que, sur le plan de la rédaction tout au moins, le Gouvernement y est parvenu.
Je propose donc à nos collègues Paul Girod et Gérard Delfau soit de retirer leur amendement, qui, sur le fond, recueille l'avis favorable de la commission, soit de le rectifier pour le rendre identique ou très semblable à celui du Gouvernement.
Sur la forme peu importe, puisque, grâce à vous, mon cher collègue, et aux cosignataires de l'amendement, un début de réponse aura été apporté au souci de reconnaissance des sages-femmes.
Je signale d'ailleurs une nouvelle fois à nos collègues que celles-ci appartiennent à une profession médicale. Si vous voulez avoir un dialogue fructueux avec les sages-femmes, ne parlez surtout pas, à leur sujet, de profession paramédicale ! Elles font partie des professions médicales,...
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. Exactement !
M. Claude Huriet, rapporteur ... ce qui signifie que la proposition de M. Paul Girod est en parfaite cohérence avec leur souci de reconnaissance.
A partir d'un tronc commun, on formera les professions médicales, médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes, sans compter d'autres professions qui sont, elles, authentiquement paramédicales.
M. Paul Girod. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Monsieur le président, je ne vais ni sombrer dans le ridicule qui consisterait à rectifier mon amendement en reprenant le texte du Gouvernement, ni faire perdre de temps au Sénat !
Je me réjouis que le Gouvernement ait enfin compris où était le début de solution d'un problème complexe. Je me réjouis - merci, monsieur le rapporteur, de l'avoir souligné - d'avoir peut-être été celui qui aura ébranlé la machine.
Je me rallie à l'amendement du Gouvernement et je retire le mien, monsieur le président.
Mais ce n'est qu'un premier pas !
M. le président. L'amendement n° 137 est retiré.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je me réjouis, madame le secrétaire d'Etat, mon cher collègue Girod, de cette conjonction quasi astrale (Sourires.) grâce à laquelle nous arrivons, enfin, à ce qui est une mesure de bon sens, que j'avais déjà préconisée en 1978...
M. Paul Girod. En 1979 !
M. Jean Delaneau, président de la commission. Vos souvenirs sont plus précis que les miens, mon cher collègue !
Tout finit par arriver, il suffit d'être patient.
En première année, l'étude de l'anatomie est la même, que ce soit pour un kinésithérapeute ou pour un médecin, par exemple. Ce n'est qu'après que les distinctions apparaissent.
D'autres professions pourront aussi bénéficier d'une partie au moins de ce tronc commun, qu'elles soient médicales - nous venons de rappeler que les sages-femmes avaient des responsabilités de plus en plus grandes - ou paramédicales.
Quant à l'appellation qui permettrait de désigner les hommes qui exercent la même profession que les sages-femmes, bien que j'y réfléchisse depuis au moins six mois, et malgré les appels que j'ai lancés de tous les côtés, je ne suis pas encore parvenu à la trouver !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 139.
M. Paul Girod. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Girod.
M. Paul Girod. Permettez-moi de faire remarquer que la profession de sages-femmes est déjà une profession médicale à part entière, puisque celles-ci prescrivent, ce qui n'est pas le cas pour les professions paramédicales.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. Tout à fait !
M. Paul Girod. Cette mesure constitue, je le répète, un premier pas important vers la mise en place d'un cursus reconnaissant leur statut. Je remercie le Gouvernement de l'avoir compris.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 139, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17 sexies A.
Mes chers collègues, la suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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