SEANCE DU 17 DECEMBRE 2001
M. le président.
L'amendement n° 40, présenté par Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 220
octies
du code général des impôts, il est
inséré un article ainsi rédigé :
«
Art...
-
I
. - Un crédit d'impôt est accordé aux établissements
de crédit ayant consenti des prêts aux mineurs au rapatriement énumérés par le
2° de l'article 2 du décret n° 99-469 du 4 juin 1999 relatif au désendettement
des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée.
« Ce crédit d'impôt est égal au montant des sommes restant dues au titre des
prêts accordés avant le 31 décembre 1990 par ces établissements de crédit aux
personnes citées à l'alinéa précédent, en vue de leur installation ou de la
reprise de l'entreprise d'un grand-parent et qui rencontrent de graves
difficultés les rendant incapables de faire face à leur passif.
«
II
. - Ce crédit d'impôt est imputé sur le montant de l'impôt sur les
sociétés dû à compter de l'année d'imposition 2002. Lorsque son montant excède
celui de la cotisation dont est redevable l'établissement de crédit,
l'imputation de l'excédent est reportée sur l'impôt de l'année suivante.
«
III
. - Un décret fixe les conditions d'application du présent
article. »
« II. - La perte de recettes est compensée pour l'Etat par la majoration à due
concurrence des droits mentionnés à l'article 919 A du code général des impôts.
»
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
L'article 44 de la loi du 30 décembre 1986 a prévu la remise en capital,
intérêts et frais de certains prêts accordés aux rapatriés réinstallés dans une
profession non salariée ou à leurs enfants, repreneurs de l'exploitation ou
héritiers.
Toutefois, certaines personnes, qui étaient mineures au moment du
rapatriement, en ont été exclues, essentiellement par méconnaissance de ces
situations particulières. Il s'agit notamment de pupilles de la nation du fait
de la guerre d'Algérie ou des autres combats en Afrique du Nord, ou encore
d'orphelins se trouvant dans des situations voisines. Aucun d'eux n'était pris
en compte par les textes existants.
Pour remédier à cette situation, ces catégories figurent parmi les
bénéficiaires du dispositif créé par le décret du 4 juin 1999 relatif à l'aide
au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée,
qui prévoit une aide de l'Etat dans la limite de 500 000 francs et de 50 % du
passif.
Il serait souhaitable, ne serait-ce que sur un plan symbolique, qu'une mesure
analogue à celle que prévoit l'article 44 de la loi du 30 décembre 1986 soit
prise au bénéfice de ces catégories, alignant leur situation sur celle qui est
faite aux majeurs lors du rapatriement et à leurs enfants, héritiers ou
repreneurs.
En raison du décalage générationnel, la date limite de souscription des prêts
effaçables serait portée au 30 décembre 1990.
Les personnes susceptibles de bénéficier d'une telle disposition sont peu
nombreuses, et le coût de la mesure serait d'environ 40 millions de francs. Au
demeurant, les dépenses entraînées par le décret du 4 juin 1999 pour le
désendettement des personnes concernées seraient réduites en raison de
l'application de la présente mesure de remise, qui prendrait la forme d'un
crédit d'impôt accordé aux établissements prêteurs, à une partie de leur
passif.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nos collègues mettent l'accent sur un fait qui
constitue sans doute une injustice et qui relève, en tout cas, d'un oubli ou
d'une erreur de la loi.
Il serait bon, avant d'aller plus loin - le dispositif est en effet assez
complexe - de connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement ne peut qu'être sensible à l'objectif
visé par les auteurs de cet amendement, qui tend à créer un crédit d'impôt au
bénéfice des établissements de crédit qui ont consenti des prêts aux mineurs au
moment du rapatriement, crédit d'impôt qui serait égal au montant des sommes
restant dues au titre des prêts accordés avant le 31 décembre 1990.
Cependant, le dispositif ainsi proposé ne me paraît pas tout à fait
satisfaisant. En effet, je ne pense pas que la création d'un nouveau dispositif
fiscal, par nature compliqué, soit la meilleure façon de résoudre le problème
soulevé.
Par ailleurs, l'amendement ne prévoit pas explicitement la remise des dettes
par les établissements de crédit, et je crains que, du fait de sa rédaction, il
ne soit plus profitable aux banques, pour lesquelles les charges qui
résulteraient de l'insolvabilité de leur débiteur sont bien entendu déductibles
du résultat imposable, qu'aux rapatriés eux-mêmes.
En outre, j'observe que la rédaction proposée autoriserait un établissement
financier à bénéficier tous les ans d'un crédit d'impôt sur les mêmes dettes,
ce qui, je pense, ne correspond pas au souhait de M. Foucaud et de ses
collègues.
Comme le note l'exposé des motifs de l'amendement, le décret du 4 juin 1999,
qui a instauré le dispositif d'aide au désendettement des rapatriés, a permis
d'inclure certaines catégories de bénéficiaires qui n'entraient pas dans le
champ des dispositifs antérieurs, notamment celui de l'article 44 de la loi de
1986. Ce dispositif visait un champ précis de prêts très spécifiques qui
étaient accordés au moment du rapatriement, différent du champ du crédit
d'impôt présenté dans l'amendement, lequel entraînerait d'autres demandes
reconventionnelles.
La CONAIR, la commission nationale de désendettement des rapatriés, est
actuellement en charge des dossiers visés par l'amendement.
Par ailleurs, les difficultés rencontrées lors du démarrage du nouveau
dispositif sont en passe d'être résolues.
Sur la base du rapport de l'Inspection générale des finances qui a été très
récemment remis au Gouvernement, Mme Guigou annoncera prochainement plusieurs
mesures de modification du décret de juin 1999 destinées à accélérer le
traitement des dossiers et à améliorer le fonctionnement de ce dispositif.
Pour cette raison, je souhaite, monsieur Foucaud, que vous retiriez cet
amendement.
M. le président.
Quel est, maintenant, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Derrière toutes ces considérations administratives,
il y a des situations humaines.
Nos collègues évoquent le cas de personnes qui étaient mineures lors de leur
rapatriement - des orphelins, qui plus est - et qui n'étaient donc pas en état
de reprendre une activité économique.
M. Foucaud a précisé qu'il s'agissait d'une quarantaine de personnes, dont la
situation n'était toujours pas réglée, précisément sans doute parce que leur
nombre limité ne leur permettait pas de figurer parmi les priorités des
gouvernements successifs et des services de l'Etat concernés.
Peut-être, sur un plan strictement technique, le dispositif qui nous est
proposé n'est-il pas pleinement satisfaisant. Cependant, madame le secrétaire
d'Etat, pourriez-vous vous engager à ce que ces situations soient examinées en
tant que telles ?
L'esprit de la loi de 1986 permet de penser que ces situations auraient dû
être englobées dans les différentes procédures de désendettement. Si elles ne
l'ont pas été, c'est probablement pour des raisons de forme plus que pour des
raisons de fond. Pouvez-vous donc, madame le secrétaire d'Etat, prendre
l'engagement de faire traiter de manière positive les dossiers dont il s'agit,
ce qui serait tout simplement conforme à l'équité ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je rappelle que la CONAIR est actuellement en charge
des dossiers qui sont visés par l'amendement de M. Foucaud, et je ne doute pas
qu'elle aura à coeur de les traiter promptement, étant entendu que, comme je
l'ai indiqué, Mme Guigou prépare actuellement un texte visant à faciliter et à
accélérer le traitement des dossiers par la CONAIR.
M. le président.
Monsieur Foucaud, l'amendement est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Ayant entendu l'engagement de Mme la secrétaire d'Etat de faire en sorte que
soit rapidement réglée la situation de cette quarantaine de personnes, je le
retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 40 est retiré.
L'amendement n° 47, présenté par M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 19 de l'ordonnance n° 67-830 du 27 septembre 1967 relative à
l'aménagement des conditions du travail en ce qui concerne le régime des
conventions collectives, le travail des jeunes et les titres-restaurant est
complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les collectivités publiques et leurs établissements peuvent attribuer le
titre-restaurant :
« - dans le cas où ils n'ont pas mis en place de dispositif propre de
restauration collective, aux agents qu'ils ne peuvent pas faire bénéficier, par
contrat passé avec un ou plusieurs gestionnaires de restaurants publics ou
privés, d'un dispositif de restauration compatible avec la localisation de leur
poste de travail ;
« - dans le cas où ils ont mis en place un dispositif propre de restauration
collective, aux agents qu'ils ne peuvent faire bénéficier, compte tenu de la
localisation de leur poste de travail, ni de ce dispositif ni d'un dispositif
de restauration mis en place par contrat passé avec un ou plusieurs
gestionnaires de restaurants publics ou privés.
« Les conditions d'application de cette disposition sont précisées par décret.
»
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Notre collègue Paul Loridant a déjà eu l'occasion de défendre ici un tel
amendement.
Il s'agit de clarifier le régime des titres-restaurants en élargissant le
champ des bénéficiaires aux agents de la fonction publique.
L'ordonnance du 27 septembre 1967 réglementant les titres-restaurants et son
décret d'application du 22 décembre 1967 visent les salariés sans préciser si
les fonctionnaires peuvent prétendre au bénéfice de cette mesure.
Aucun texte postérieur n'a abordé ce point. Néanmoins, depuis l'entrée en
vigueur de l'ordonnance de 1967, les personnels de la fonction publique d'Etat
ou de la fonction publique locale ont progressivement bénéficié du
titre-restaurant.
En outre, le Conseil d'Etat, à la suite d'une démarche contentieuse, a
officialisé l'existence des titres-restaurants dans la fonction publique.
Néanmoins, depuis lors, une interprétation se développe tendant à considérer
qu'il convient de limiter la valeur de la participation de l'Etat ou des
collectivités dans les titres de restaurant.
Il s'ensuit une très grande hétérogénéité des situations entre les différentes
collectivités locales, qui est notamment source de nombreux contentieux.
Il est urgent de mettre fin à cette situation en confirmant dans la loi le
principe d'un accès des fonctionnaires aux titres-restaurants, pour clarifier
les modalités qui en résulteront.
Cet amendement a pour objet d'ouvrir aux collectivités publiques et à leurs
établissements, sous certaines conditions, la possibilité de mettre en place au
bénéfice de leurs agents le titre-restaurant.
Il vise à compléter le dispositif de restauration des agents publics, centré
sur la restauration collective, en ouvrant aux collectivités la possibilité de
proposer une formule alternative de restauration aux agents ne pouvant accéder
à ce dispositif pour des raisons d'éloignement géographique.
Tel est donc l'objectif de cet amendement que je vous demande d'adopter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais saluer la constance de notre collègue
Paul Loridant, qui a déposé en 1999 et en 2000 des amendements analogues sur
lesquels le Gouvernement a émis deux ans de suite un avis défavorable. En 1999,
la commission s'en est remise à la sagesse du Sénat et l'amendement a été
adopté. En 2000, à la demande de la commission des finances, qui a invoqué des
raisons techniques, M. Loridant a accepté de retirer son amendement.
Rappelons que nous sommes confrontés à un double problème : problème
d'insécurité juridique, d'abord, puisque l'ordonnance de 1967, qui institue le
titre-restaurant, réserve le bénéfice de ce dernier aux seuls salariés du
secteur privé ; problème d'inégalité entre fonctionnaires, ensuite, puisque
certaines collectivités donnent
de facto
accès aux titres-restaurants à
leur personnel, et d'autres pas.
L'amendement qui nous est soumis se heurte, me semble-t-il, à une difficulté
quant à sa constitutionnalité, ce qui conduirait logiquement à l'écarter mais
il convient de rappeler, madame le secrétaire d'Etat, que votre prédécesseur
s'était engagé, en 1999, à faire étudier le sujet par ses services pour
parvenir, dans ce domaine à l'égalité entre les agents de la fonction
publique.
En 2000, vous nous avez vous-même indiqué que vous disposiez sur ce sujet
d'une note datée du mois d'octobre 2000 et intitulée : « Enquête sur la
restauration administrative ». Cette note précisait l'existence de problèmes
quant aux modalités de gestion de cette affaire.
Vous nous aviez également indiqué l'an dernier que vous envisagiez, dans le
cadre d'un schéma interministériel en cours de discussion avec le ministre de
la fonction publique, de permettre l'utilisation du ticket-restaurant dans des
conditions très précises et à titre strictement dérogatoire pour tenir compte
de la situation particulière des agents qui n'ont pas accès à un restaurant
administratif.
Madame le secrétaire d'Etat, la commission souhaiterait entendre votre avis
avant de se prononcer sur l'amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, j'avais en effet
indiqué l'an dernier que nous disposions d'une étude. C'est la raison pour
laquelle je vais aujourd'hui donner mon accord à l'amendement n° 47. Ce dernier
vise à apporter une réponse aux situations particulières des agents qui, du
fait de l'éloignement géographique, ne peuvent avoir accès à des établissements
de restauration collective. Il s'agit donc de remédier à certaines
insuffisances constatées dans des cas exceptionnels sans remettre en cause le
principe de la restauration collective auquel, vous le savez, monsieur Foucaud,
le Gouvernement est attaché et pour la défense duquel il a engagé des frais
importants.
M. le président.
Quel est, maintenant, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 47, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances rectificative, après l'article 2.
Article 2 bis