SEANCE DU 17 DECEMBRE 2001
M. le président.
« Art. 5. - Il est institué pour 2001, au profit du budget de l'Etat, un
prélèvement exceptionnel de 460 millions de francs sur les réserves du bureau
de recherches géologiques et minières. »
L'amendement n° 9, présenté par M. Marini, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 5. »
La parole est à M. le raporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le Bureau de recherches géologiques et minières, ou
BRGM, est un établissement public qui mérite toute la considération du
Parlement.
Il accomplit une tâche difficile, notamment en cas de risque de catastrophe
naturelle lorsque nos concitoyens sont menacés par des inondations, par
exemple. Ses techniciens, ses experts, jouent alors un rôle précieux.
Le BRGM a aussi pour fonction de maintenir, dans certains domaines
stratégiques, l'autonomie d'approvisionnement de notre pays en matière
minérale.
Nous savons par ailleurs que, au cours des années passées, il a opéré, dans
des conditions sans doute délicates, un retour à l'équilibre de son compte
d'exploitation. Or c'est le moment qui est choisi pour prélever une somme
significative sur sa trésorerie.
Madame le secrétaire d'Etat, j'insiste sur le fait que la commission ne nie
pas le pouvoir légitime de l'Etat de « rapatrier », si je puis dire, dans son
propre compte des montants issus d'un établissement comme le BRGM. L'Etat,
quasi-actionnaire de cet établissement public, est juge de l'allocation des
actifs entre sa quasi-filiale et lui-même.
Cela dit, il faut étudier l'origine économique des flux. En l'occurrence, les
recettes exceptionnelles que l'Etat souhaite rapatrier apparaissent liées à la
cession d'actifs miniers. Deux opérations décrites dans le rapport se sont
traduites par des recettes exceptionnelles de 570 millions de francs. Cette
somme correspond au produit de cessions de participations à des partenaires
industriels.
Dans le passé, le BRGM a déjà eu l'occasion de céder des participations. Il
s'agit en effet d'un établissement public qui exerce directement certaines
tâches et d'une sorte de
holding
détenant des participations de droits
miniers dans toute une série de sociétés, un peu partout dans le monde.
En revanche, c'est, à ma connaissance, la première fois qu'un prélèvement
serait opéré par l'Etat à partir de produits de cessions d'actifs du BRGM. Le
statut juridique incertain de ce prélèvement, les considérations relatives aux
besoins propres du BRGM et d'autres entreprises publiques conduisent la
commission à souhaiter la suppression de l'article 5.
Madame le secrétaire d'Etat, nous n'aurions pas élevé de contestations si vous
aviez proposé d'affecter les ressources issues de ces cessions d'actifs du BRGM
au compte spécial du Trésor n° 902-24 permettant d'allouer des dotations de
capital à d'autres entreprises publiques. Il est défendable de mobiliser des
ressources en capital pour apporter des dotations à des établissements qui en
auraient besoin comme Réseau ferré de France, Charbonnages de France, les mines
de potasse d'Alsace et GIAT Industries.
A l'inverse, qualifier de dividende une ressource issue de la cession de
certains actifs nous semble contraire à la nature économique des transactions
réalisées. Nous ne saurions donc accepter, même pour une somme de 460 millions
de francs, d'intégrer dans la définition de l'équilibre budgétaire de l'Etat,
au sens européen, des recettes qui ne devraient pas y figurer. En effet, il
s'agit bien, je le répète, de recettes issues de cession d'actifs, de recettes
en capital qui doivent être affectées à un compte en capital et qui n'ont pas
lieu d'être prises en compte pour la détermination, au sens européen, du solde
de loi de finances.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
J'ai bien noté, monsieur le rapporteur général, que
vous n'étiez pas réellement hostile au rattachement au budget de l'Etat de ces
sommes qui résultent, comme vous l'avez rappelé vous-même, d'opérations
exceptionnelles. Notre différend, si je puis dire, porte plutôt sur
l'orientation de ces sommes vers le compte d'affectation spéciale, selon votre
proposition, ou vers le budget général, selon l'article 5 du projet de loi de
finances rectificative.
Nous avons préféré rattacher cette recette au budget général. En effet, il ne
s'agit pas directement d'une cession de titres. Comme vous l'avez souligné, les
principales remontées de trésorerie vers l'établissement sont le résultat de
transactions.
Par ailleurs, pour verser ces sommes au compte d'affectation spéciale, il eût
fallu une disposition législative spécifique permettant de modifier l'intitulé
de ce compte pour y affecter les produits de cessions du BRGM.
M. Michel Charasse.
C'est d'initiative gouvernementale !
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Cette solution ne paraissait pas appropriée dans la
mesure où les différentes participations qui ont été cédées étaient des
participations secondaires par rapport à l'activité principale du BRGM. Or nous
n'avons jusqu'à présent proposé au Parlement de telles mesures que pour les
entreprises publiques dont le seul objet était de détenir des participations
financières, qui constituaient donc de purs
holdings
.
Voilà la raison pour laquelle ces sommes sont reversées au budget général dans
l'article 5. Aussi vous demanderai-je, monsieur le rapporteur général, de bien
vouloir retirer cet amendement.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur le rapporteur général ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9.
M. Eric Doligé.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Doligé.
M. Eric Doligé.
Depuis des années, je suis avec beaucoup d'intérêt le devenir du BRGM, qui est
situé à Orléans et qui a été présidé par un certain nombre de personnalités,
dont M. Hubert Curien.
M. Michel Charasse.
Et par M. Claude Allègre !
M. Eric Doligé.
Je me souviens des difficultés que nous avons eues, à l'époque, pour obtenir
des financements susceptibles d'équilibrer le fonctionnement de cet
établissement et des nombreux licenciements qui ont eu lieu en son sein.
Le BRGM doit rester compétitif pour affronter la concurrence internationale,
qui est forte. L'opération qui consiste à prélever sur les réserves de cet
établissement 460 millions de francs pour les reverser au budget général de
l'Etat est donc, selon moi, une opération assez dangereuse, dans la mesure où
la situation financière actuelle peut ne pas perdurer. Je souhaite donc que
l'on n'affaiblisse pas le BRGM, qui connaît actuellement un fonctionnement
équilibré.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 5 est supprimé.
Article 6