SEANCE DU 17 DECEMBRE 2001
M. le président.
L'amendement n° 71 rectifié, présenté par M. Charasse et les membres du groupe
socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
« Après l'article 26
bis
, insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« A. - Au titre de l'année 2001, le prélèvement opéré sur les recettes de
l'Etat au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs est
diminué de 300 millions de francs.
« B. - Au titre de l'année 2001, un prélèvement de 300 millions de francs est
opéré sur les recettes de l'Etat pour majorer à hauteur de 300 millions de
francs la régularisation de la dotation globale de fonctionnement pour 2000
prévue à l'article L. 1613-2 du code général des collectivités territoriales.
»
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je n'ai pas l'intention, ici, de créer des difficultés particulières au
Gouvernement, mais nous sommes tout de même là pour exposer un certain nombre
de problèmes, et celui qui est sous-jacent à l'amendement n° 71 rectifié est
bien réel.
Comme vous le savez, mes chers collègues, le collectif budgétaire comporte une
disposition qui résulte d'une initiative de notre collègue député M. Bonrepaux
et qui prévoit d'attribuer à certains groupements un prélèvement de 200
millions de francs opéré sur la régularisation de la DGF pour 2000. Cette
régularisation a été actée par le comité des finances locales lors de sa
réunion du mois de juillet dernier et elle a été largement annoncée à travers
le pays : 1 024 millions de francs, 0,82 % de la DGF pour 2001 ; tels sont les
chiffres qui ont été diffusés un peu partout auprès des élus locaux.
Certaines collectivités locales ont déjà pris en compte, par anticipation,
cette régularisation bien qu'elle ne soit pas encore notifiée.
Sans remettre en cause l'amendement de M. Bonrepaux, il faut bien dire que ce
prélèvement de 200 millions de francs, qui ampute le montant de la
régularisation d'un cinquième, peut avoir, dans un certain nombre de cas, des
effets assez perturbateurs. Je propose donc d'utiliser un stock de reports
accumulés au centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, au
titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs, qui, après le
dernier comité des finances locales, représenterait 315 millions de francs,
pour abonder la régularisation de 2000 versée en 2001.
Je formule cette proposition pour compenser l'effet de l'amendement Bonrepaux,
bien sûr, mais aussi parce que, à l'occasion d'un débat assez complexe lors de
la dernière réunion du comité des finances locales, nous nous sommes aperçus
que ce stock de 300 millions de francs ne pouvait pas être utilisé dans la
mesure où la loi n'a rien prévu à cet égard. Autrement dit, cette somme peut
être stockée et s'accroître indéfiniment, d'année en année.
Le comité des finances locales a décidé d'en utiliser une partie pour
augmenter cette année de plus de 5 % la dotation spéciale individuelle pour le
logement des instituteurs, ce qui est assez important. Mais les représentants
du ministère du budget au sein du comité des finances locales ont voté contre
cette disposition, estimant que ce prélèvement était illégal. Et je dois dire,
madame le secrétaire d'Etat, qu'ils avaient raison puisque la loi n'a pas prévu
la manière d'utiliser cette somme. Jusqu'à nouvel ordre, seul le Parlement peut
en disposer, non le comité des finances locales.
Je propose donc de laisser 15 millions de francs « dormants » sur les 315
millions de francs en stock, pour procéder l'année prochaine aux ajustements
indispensables - il y a toujours des erreurs à rectifier ou des oublis à
réparer - et de basculer 300 millions de francs sur la régularisation de la DGF
de l'année 2001.
Bien entendu, madame le secrétaire d'Etat, si vous aviez une utilisation
différente à nous proposer, je serais preneur. Mais je pense qu'il est
dangereux de laisser une telle somme dormante, inutilisée. J'ai peur que
certains ministres ne s'aperçoivent un jour de son existence et que, au lieu de
la distribuer aux collectivités locales, alors qu'elle leur revient - c'est
bien à ce titre, en effet, qu'elle figure dans les comptes de l'Etat -, ils ne
la distribuent sous diverses formes à un certain nombre de services
administratifs ou d'agents de ces services.
Par conséquent, c'est à la fois pour compenser le dispositif mis au point par
M. Bonrepaux mais aussi au nom de la prudence que je propose cette solution au
Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission, très attentive à cet amendement, se
félicite que notre collègue Michel Charasse ait trouvé ce petit gisement qui,
pour être modeste, n'en est pas moins appréciable, et approuve sa démarche.
Vous voyez, madame le secrétaire d'Etat, que nous nous efforçons tous d'aller
dans le sens de la mobilisation de ressources publiques inemployées.
Les besoins en matière de logement des instituteurs étant sans doute
aujourd'hui moins pressants compte tenu des changements intervenus dans les
statuts des personnels d'encadrement de l'éducation nationale, la dotation
prévue à cet effet laisse effectivement apparaître une poche de crédits
inemployés qui ne peuvent pas être consacrés à un autre objet. Or c'est une
rubrique qui peut être utilement désactivée pour faire des choses utiles et
nécessaires, en l'occurrence pour compléter l'allocation globale des ressources
de fonctionnement des communes.
La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, comme vous l'avez indiqué,
l'Assemblée nationale a voté un prélèvement de 200 millions de francs sur le
montant de la régularisation positive de DGF au titre de l'année 2000 pour
abonder la DGF des communautés de communes à fiscalité additionnelle en 2001,
communautés de communes dont la dotation avait baissé en 2000 du fait des
évolutions de la composition de cette catégorie d'EPCI.
Vous proposez de compenser le prélèvement sur cette régularisation positive en
l'abondant par une réduction de la dotation spéciale instituteurs, ou DSI, qui
est rendue possible par l'existence de réserves accumulées par le CNFPT.
Je ne peux souscrire à votre proposition, même si je ne conteste pas
l'existence de ces excédents.
Vous le savez, la dotation moyenne des communautés de communes à fiscalité
additionnelle a diminué, en application des règles de répartition de la DGF des
groupements. L'Assemblée nationale a donc choisi d'opérer un redéploiement au
sein de la DGF ; c'était sans doute la solution la moins pénalisante pour les
autres bénéficiaires de la DGF. Ce prélèvement est en effet très faible - 200
millions de francs, je le rappelle - si on le rapporte aux progressions de la
DGF en 2001 et en 2002. Par conséquent, ce prélèvement en lui-même est
acceptable.
La réduction de la dotation spéciale instituteurs que vous proposez rendrait
difficile la répartition de cette dotation telle qu'elle a été décidée le 30
octobre dernier par le comité des finances locales, car elle nécessiterait que
le CNFPT consacre l'essentiel des réserves accumulées au titre de la gestion de
la DSI des années précédentes à la répartition de cette année, ce qui semble
difficile en l'absence de nouvelles délibérations du comité des finances
locales.
Ainsi que celui-ci en est convenu le 30 octobre, le mécanisme de répartition
de la DSI devra être modifié de manière à éviter l'apparition de nouveaux
excédents, ceux-ci ne témoignant pas d'une gestion optimale des deniers
publics.
Pour ce qui me concerne, je suis très favorable à ce que le sort des réserves
existantes soit examiné à ce moment-là et que l'on mette au point des
mécanismes qui évitent la reconstitution de nouveaux stocks d'excédents.
Par conséquent, mon souhait serait que l'on puisse mettre en oeuvre ce nouveau
dispositif pour la prochaine décision de répartition de la DSI, c'est-à-dire au
titre de 2003 ; cela signifie que la décision interviendrait au plus tard à
l'automne 2002.
Sous le bénéfice de cet engagement, je me permets de vous demander, monsieur
le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président.
Monsieur Charasse, accédez-vous au souhait de Mme le secrétaire d'Etat ?
M. Michel Charasse.
La situation est un peu plus compliquée que je ne l'imaginais. Je l'avoue, je
pensais naïvement que le report de crédits inutilisés était de 315 millions de
francs nets après fixation récente par le comité des finances locales du
montant de la dotation spéciale instituteurs par instituteur logé ou indemnisé.
Si l'augmentation de plus de 5 % que le comité des finances locales a décidée
représente une somme telle qu'en prélevant 300 millions de francs la décision
du comité des finances locales ne pourra pas être exécutée, mon objectif ne
sera évidemment pas atteint !
Madame le secrétaire d'Etat, la loi n'ayant pas prévu expressément la manière
dont on peut utiliser cette somme, le comité des finances locales ne peut rien
faire : celui-ci doit attendre que le législateur vote un texte le
précisant.
Dès lors, deux solutions peuvent être envisagées.
La première consiste à ramener le prélèvement immédiat de 300 millions à 200
millions de francs. Cela permettrait de compenser les conséquences de
l'amendement Bonrepaux.
La deuxième solution serait de renvoyer le règlement de cette question à
l'examen du projet de loi de Daniel Vaillant sur la démocratie de proximité,
donc au début de 2002 : on ne compense pas les conséquences de l'amendement
Bonrepaux cette année, mais on peut résoudre le problème à l'occasion de la
discussion de ce projet de loi, dont notre collègue Michel Mercier est le
rapporteur pour avis, au nom de la commission des finances.
Comme je ne veux pas improviser et puisqu'un texte auquel on peut « raccrocher
» cette question va nous être soumis très prochainement, ce qui nous permettra
d'apporter une solution pour l'exercice 2002, je retire cet amendement, me
réservant de le reprendre dans trois semaines.
Je souhaite que, d'ici là, le Gouvernement se rapproche de notre collègue
Michel Mercier, de façon à essayer de trouver une solution telle que ce tas de
noisettes revienne aux collectivités locales à qui il appartient et ne fasse
pas l'objet, demain, d'un prélèvement pour on ne sait quelle fantaisie !
(Sourires.)
M. le président.
L'amendement n° 71 rectifié est retiré.
Article 26 ter