SEANCE DU 3 OCTOBRE 2002


M. le président. Je vais maintenant donner la parole à M. Roland Muzeau en remplacement de M. Jack Ralite, qui vient de faire savoir à la présidence qu'il ne pourrait être parmi nous en cet instant.
Vous avez la parole, mon cher collègue.
M. Roland Muzeau. Monsieur le ministre, pourquoi votre gouvernement fait-il de la démolition du logement HLM l'affichage et l'axe de sa politique ?
Détruire ce qui le mérite, oui. Mais qu'est-ce qu'une politique de démolition d'abord et de construction ensuite, chiffrée pour le premier terme, floue pour le second ? Pourquoi ne pas promouvoir plutôt une politique de construction d'abord et de démolition ensuite et, fort de l'expérience d'Aubervilliers et de Saint-Denis, j'ajouterai d'abord de démolition de l'habitat insalubre où sévissent la « mal-santé », la « mal-vie » ?
La construction de logements sociaux est une priorité nationale. La crise du logement touche 3 millions de personnes, ce qui nécessiterait des crédits substantiels pour la réhabilitation et l'entretien du patrimoine HLM, à défaut de quoi l'effort de mixité sociale serait vain.
Avec le projet de loi de finances pour 2003, le Gouvernement tourne le dos à cette démarche, abandonne les défavorisés et les ménages modestes, qui ne trouvent pas place dans votre double affichage : destruction d'HLM et dispositions facilitant l'accession à la propriété.
Il faut construire du logement social. Paris ne peut plus faire face aux demandes, qui dépassent annuellement les 100 000 pour 5 000 possibilités.
A Aubervilliers, il y a plus de 2 700 demandes annuelles pour 100 possibilités.
En Ile-de-France, les squats collectifs se développent.
Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu'il faudrait prendre en compte la spécificité de ces lieux et de leurs territoires sinistrés mettant en péril le « vivre ensemble » ?
Il faut une politique du logement social, certes, mais plus encore une politique sociale du logement. L'éradication de l'habitat insalubre exige un plan d'urgence, le niveau du prix du foncier exige une véritable intervention d'Etat, le besoin en logements sociaux exige l'application de la loi SRU concernant le taux de 20 % de ces logements par ville. Tout cela doit être jumelé avec un développement du secteur locatif privé contractualisé et un refus du déconventionnement des logements sociaux opérés par la SCIC, la société centrale immobilière de la Caisse des dépôts et consignations.
M. Alain Gournac. C'est toujours le même disque !
M. Roland Muzeau. La loi Besson de 1990 a établi une obligation de moyens. Il faut une obligation de résultat, ce qui omplique que, comme le réclame unanimement le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, l'instauration d'une possibilité de recours juridique du citoyen exclu de l'accès au logement.
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Muzeau !
M. Roland Muzeau. J'y viens, monsieur le président, mais je suis sans cesse interrompu ! (Exclamations sur les travées du RPR.)
Etes-vous prêt, monsieur le ministre, à financer véritablement cette démarche - autrement que par le recours à des crédits existants minorés par votre gel des crédits inscrits pour 2002 -, à faire une expérimentation de cette démarche à l'échelle de l'Ile-de-France et, enfin, à établir un droit au logement opposable ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser M. Gilles de Robien, qui assiste aujourd'hui, à Lyon, au congrès de l'Union nationale HLM et ne peut donc répondre à la question que M. Muzeau a posée au nom de M. Ralite.
Monsieur le sénateur, trop de logements HLM sont aujourd'hui devenus obsolètes et ne répondent plus aux besoins des habitants, qu'il s'agisse de qualité, de surface nécessaire ou même du minimum de confort sanitaire. Trop souvent aussi, les quartiers dans lesquels ils se situent sont devenus des zones de non-droit.
La démolition suivie de la reconstruction est alors un moyen pour redonner une qualité de vie à ces quartiers et à leurs habitants.
C'est cette politique que le Gouvernement soutient, même s'il entend la mener avec discernement et, surtout, respect pour les hommes et les femmes qui habitent ces quartiers.
Démolir ne doit pas avoir pour conséquence de réduire l'offre de logements HLM là où subsistent encore des besoins et des listes d'attente trop longues.
C'est pourquoi, contrairement à ce que vous déclariez à l'instant, monsieur le sénateur, le Gouvernement a prévu dans son projet de budget un programme de 12 000 démolitions, niveau jamais atteint jusqu'à présent, mais aussi et surtout la création de 54 000 nouveaux logements aidés.
M. Alain Gournac. Et voilà !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Car démolir ne peut se concevoir sans un véritable projet urbain, avec un vrai programme de reconstruction sur le site ou à proximité. Il doit donc y avoir démolition, puis relogement des habitants, et dans des conditions meilleures que celles qu'ils connaissent aujourd'hui, cela va de soi.
Monsieur le sénateur, l'objectif n'est pas seulement de bâtir un nouvel espace de vie, un nouveau « morceau de ville » : il est aussi de refonder une communauté sociale.
Les collectivités locales seront, dans ce domaine comme dans bien d'autres, en première ligne, ce qui implique un travail de concertation avec les habitants, les associations et les bailleurs.
Pour l'avenir, comme le souhaite le Premier ministre, les procédures seront améliorées grâce à une meilleure association des partenaires concernés.
Dans cette tâche, l'Etat prendra toute sa part, avec humilité mais aussi, sachez-le, monsieur le sénateur, avec ténacité. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

INCIDENCE DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI
SUR LE BUDGET DES COLLECTIVITÉS LOCALES