SEANCE DU 3 OCTOBRE 2002
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le ministre des finances, je veux attirer votre attention sur
l'impact direct et indirect de la politique de l'emploi de votre gouvernement
sur le budget des collectivités locales.
M. René-Pierre Signé.
Triste politique !
M. Gérard Delfau.
Cette politique se caractérise par le transfert massif de l'argent public vers
les entreprises et donc par un désengagement rapide de l'Etat en matière d'aide
au retour à l'emploi dans le cadre du secteur associatif semi-public ou
public.
Reprenons la liste - non exhaustive - des mesures déjà prises ou annoncées.
Dès juillet, une circulaire du ministère du travail prévoyait le gel du
recrutement d'emplois-jeunes, avant leur disparition. Mes chers collègues,
cette décision plaçait les communes et les associations devant le fait accompli
et, généralement, la municipalité a dû prendre le relais pour assurer la
rentrée.
Depuis, des restrictions drastiques ont été annoncées concernant le nombre de
contrats emploi solidarité. Or ce dispositif, au fil des ans, est devenu
déterminant dans le retour à l'emploi des personnes en difficulté. Il fournit,
en outre, un appui non négligeable aux associations et aux communes en matière
de personnel salarié.
M. Hilaire Flandre.
C'est surtout cela !
M. Gérard Delfau.
Dans le même ordre d'idées, le dispositif des contrats emploi consolidé, qui
permet à l'Etat de financer de façon dégressive le retour à un emploi pérenne,
serait amputé, y compris pour les contrats déjà signés.
Enfin, nous avons appris avec inquiétude que plusieurs milliers de postes de
surveillant dans les collèges et les lycées seraient supprimés et nous avons
entendu avec beaucoup d'étonnement M. Luc Ferry, ministre de l'éducation
nationale, suggérer, chers collègues de la majorité, que les collectivités
pourraient assumer leur financement, ainsi que celui des postes
d'aide-éducateur, dans le cadre de la réforme de la décentralisation.
M. Didier Boulaud.
Il n'y a plus de sous !
M. Jean Chérioux.
Parce que vous avez tout dépensé. Vous avez vidé les caisses de l'Etat !
M. Alain Gournac.
Cinq ans !
M. Gérard Delfau.
Enfin, j'apprends que la dotation au réseau national des comités de bassin
d'emploi ne serait pas reconduite, et ce pour la première fois depuis quinze
ans.
Si nous additionnons toutes ces mesures, nous constatons un appauvrissement
considérable de la contribution de l'Etat aux dépenses en personnel du secteur
associatif et à la rémunération des salariés non titulaires des communes ; ce
sont les cantines, les crêches, les activités sportives, de loisirs et de
soutien scolaire ainsi que les structures de développement économique local qui
feront les frais de cette orientation. A chaque fois, les communes et,
éventuellement, les départements seront sollicités pour se substituer à la
défaillance de l'Etat.
(Protestations sur les travées du RPR.)
M. René-Pierre Signé.
C'est la vérité ! L'Etat est défaillant !
M. Gérard Delfau.
Seules les collectivités locales riches seront à même de faire face aux
besoins.
M. le président.
Votre question, s'il vous plaît, monsieur Delfau !
M. Gérard Delfau.
Je vais y arriver, monsieur le président, si l'on ne m'interrompt pas.
(Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Nous voudrions savoir quel serait le coût total de ces mesures, qui sont
éparpillées dans divers fascicules budgétaires, et quel mécanisme correcteur
vous avez prévu pour éviter que votre gouvernement ne porte atteinte à
l'autonomie et à l'équilibre financier de nos communes, de nos départements et
de nos régions !
(Applaudissements sur les travées du RDSE et sur les travées
socialistes.)
M. Jean-Pierre Schosteck.
C'était avant le printemps 2001 qu'il fallait poser cette question !
M. le président.
Je vous fais remarquer, mes chers collègues, que des élèves de la région
parisienne sont présents dans nos tribunes et vous regardent.
M. Didier Boulaud.
Ils doivent savoir qu'il n'y aura plus de surveillants dans leurs collèges
!
M. le président.
Leurs maîtres leur demandent d'être silencieux pendant la classe. C'est un
silence et une écoute de même qualité que je vous invite à observer pendant la
réponse de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, à qui
je donne la parole.
M. Francis Mer,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, il est clair que, en matière
d'emploi, notre politique est différente de celle que menait le précédent
gouvernement.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Roland Muzeau.
Cela se voit effectivement dans les chiffres du chômage !
M. Francis Mer,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Notre politique,
elle, est fondée sur des emplois marchands, c'est-à-dire sur des emplois qui
créent de la valeur, ces emplois permettant en outre d'accroître la
qualification des personnes.
Ainsi notre politique s'oriente-t-elle principalement vers le développement
des contrats d'apprentissage, dont le nombre atteindra 375 000 l'année
prochaine, soit une augmentation de 7 %.
Vous le savez, notre politique facilite l'emploi des jeunes, y compris des
jeunes non qualifiés, grâce à des contrats à durée indéterminée, à travers
lesquels des employeurs s'engagent auprès de jeunes pour qu'ils prennent pied
dans la vie active.
(Très bien ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de
l'Union centriste.)
M. Didier Boulaud.
C'est ce qu'on verra ! Il faudra faire les comptes !
M. Francis Mer,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Cela, monsieur le
sénateur, ne nous empêche pas de veiller à la nécessaire continuité de la
politique antérieure, particulièrement en ce qui concerne les emplois
solidarité et les contrats emploi consolidé, qui ont été évoqués tout à l'heure
par Mme Ameline.
M. Raymond Courrière.
Donnez-nous vos chiffres !
M. Francis Mer,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Dans ce domaine
comme dans d'autres, nous témoignons de notre volonté de conduire une politique
non pas une fois par an, au moment du budget, mais tous les jours !
Nous aurons donc les moyens - si c'est nécessaire, ils varieront en fonction
de la conjoncture - d'augmenter la capacité d'intervention en faveur de ce type
d'emplois, y compris pour les collectivité locales et les associations.
Les collectivités locales, monsieur le sénateur, n'ont d'ailleurs pas été
oubliées dans le projet de loi de finances pour 2003. En effet, même si ce
n'était pas évident eu égard aux contraintes budgétaires actuelles, nous
proposons de renouveler le contrat de croissance et d'emploi avec les
collectivités locales, ce qui leur permettra d'être associées à la croissance
de l'économie française, que nous espérons aussi forte que possible.
M. René-Pierre Signé.
C'est la méthode Coué !
M. Francis Mer,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Par ailleurs,
nous avons manifesté notre confiance envers l'esprit de responsabilité des
collectivités locales en introduisant une certaine déliaison entre les taux de
taxe d'habitation et de taxe professionnelle. Je suis certain que cette preuve
de confiance sera mise à profit par les collectivités locales pour contribuer
au développement de notre économie.
(Bravo ! et applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
M. Didier Boulaud.
Nous n'avons pas droit au déficit budgétaire, monsieur le ministre !
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