PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre le rapport pour 2002 de l'inspection générale des affaires sociales intitulé Politiques sociales de l'Etat et territoires, établi en application de l'article 42 de la loi du 28 mai 1996 portant diverses mesures d'ordre sanitaire, social et statutaire.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
DIVERSES DISPOSITIONS RELATIVES
À L'URBANISME, À L'HABITAT
ET À LA CONSTRUCTION
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 160, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction. [Rapport n° 175 (2002-2003) et avis n° 171 (2002-2003).]
La discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que le titre V du projet de loi, comprenant les articles 20 à 22 relatifs aux pays, sera discuté ce soir, à la reprise de la séance.
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES À L'URBANISME
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, la commission demande la réserve des amendements n° 137 et 180 rectifié, visant à insérer un article additionnel après l'article 6 quater, jusqu'après l'examen de l'amendement n° 245, tendant aux mêmes fins.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée.
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 111-3 du code de l'urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Peut également être autorisée, sauf dispositions contraires des documents d'urbanisme et sous réserve des dispositions de l'article L. 421-5, la reconstruction d'un bâtiment dont il reste l'essentiel des murs porteurs. »
Le sous-amendement n° 240, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par l'amendement n° 76 pour compléter l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, remplacer les mots : "la reconstruction d'un bâtiment dont il reste l'essentiel des murs porteurs" par les mots : "la restauration d'un bâtiment dont il reste l'essentiel des murs porteurs, à condition d'en conserver les principales caractéristiques et de respecter les traditions architecturales locales". »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 76.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, de nombreux bâtiments traditionnels en zone rurale, particulièrement en montagne, faisant partie intégrante de notre patrimoine et des cultures locales, sont aujourd'hui à l'abandon et, de ce fait, dans un état de vétusté avancée. Ce sont des ruines. Ce triste visage de nos campagnes est accentué par l'impossibilité, la plupart du temps, de restaurer ces bâtiments en raison de l'interprétation extrêmement restrictive de la notion de ruines par l'administration.
Ce constat est d'autant plus regrettable que, parfois - malheureusement pas suffisamment souvent -, des maîtres d'ouvrage attachés à ce patrimoine souhaitent le restaurer pour lui redonner vie.
Cet amendement vise donc à préciser la notion de ruines en vue de faciliter leur reconstruction et, ainsi, de favoriser la renaissance de nos hameaux par la valorisation de notre patrimoine.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter le sous-amendement n° 240 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 76.
M. Gilles de Robien, ministre. Le Gouvernement est favorable à la restauration du patrimoine, sous réserve qu'elle soit qualitative. Telle est la raison du dépôt du sous-amendement n° 240.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. La commission des affaires économiques, favorable à la sauvegarde de ce patrimoine, émet un avis favorable sur l'amendement n° 76, ainsi que sur le sous-amendement n° 240, qui tend à permettre de conserver la qualité architecturale des bâtiments reconstruits.
M. le président. La parole est à M. José Balarello, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 240.
M. José Balarello. Je suis tout à fait favorable à l'amendement n° 76 et au sous-amendement n° 240.
J'attire cependant votre attention, monsieur le ministre, sur les pratiques, s'apparentant à une véritable casuistique, de certaines directions départementales de l'équipement.
Je citerai le cas, typique, d'une ancienne grange qui avait encore sa toiture et pouvait donc être restaurée. Malheureusement, le jeune couple l'ayant achetée pour en faire sa résidence principale a dû, au cours des travaux, démolir les murs périmétraux pour les reconstruire ensuite à l'identique, après avoir édifié un mur en parpaings derrière. On leur refuse maintenant le permis de construire au motif qu'ils ne pouvaient pas reconstruire une ruine, ce qu'était devenue la grange puisque les murs en avaient été démolis ! Cela me paraît vraiment aberrant !
La question a été portée devant le tribunal administratif, et j'espère, monsieur le ministre, que vous ferez cesser de telles décisions, ne serait-ce que par voie de circulaire interprétative.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 240.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 76, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 1 est présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 77 est présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des lois.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 121-7 du code de l'urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dépenses exposées par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale pour les études, l'élaboration, la modification et la révision de leurs documents d'urbanisme sont inscrites en section d'investissement de leur budget. Elles ouvrent droit aux attributions du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée. »
« II. - La perte de recettes résultant pour le budget de l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 140, présenté par MM. Goulet, Le Grand et de Montesquiou, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 121-7 du code de l'urbanisme est complété in fine par deux alinéas ainsi rédigés :
« Ces frais d'étude, d'élaboration, de révision ou de modification des documents d'urbanisme peuvent être inscrits dans la section d'investissement des budgets communaux, prévue à l'article L. 2311-1 du code général des collectivités territoriales.
« Lorsqu'elles engagent de tels frais, les collectivités locales et leurs groupements peuvent prétendre à ce titre aux attributions du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée. »
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1.
M. Dominique Braye, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, d'inscrire en section d'investissement de leur budget les dépenses entraînées par les études, l'élaboration, la modification et la révision de leurs documents d'urbanisme, dépenses que, nous le savons, les modifications législatives que nous adoptons rendent de plus en plus lourdes. Ces dépenses seront ainsi assimilées à des dépenses d'investissement, ce qui permettra aux communes et aux EPCI de récupérer la TVA par l'intermédiaire du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, le FCTVA.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 77.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Les études d'urbanisme coûtent de plus en plus cher, compte tenu de la nouvelle physionomie des documents d'urbanisme. Il est donc important de les rendre éligibles au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.
M. le président. L'amendement n° 140 n'est pas soutenu.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Le Gouvernement comprend parfaitement la préoccupation des membres des commissions. Malheureusement, il ne peut pas être favorable à ces amendements qui, s'ils étaient adoptés, aboutiraient à modifier les principes d'intervention du FCTVA et à ne plus tenir compte de la distinction entre dépenses d'investissement et dépenses de fonctionnement, prévue par les règles de la comptabilité publique applicables aux collectivités locales.
M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont, pour explication de vote.
M. Ambroise Dupont. J'ai souvent dit à M. le ministre que j'étais favorable à l'inscription, dans la section d'investissement du budget de nos communes, des dépenses liées aux études d'urbanisme.
Il n'y a pas que la récupération de la TVA qui est importante. Dans les budgets communaux, on tente toujours de contenir les dépenses inscrites en section de fonctionnement, et l'on considère que les dépenses inscrites en section d'investissement, qui s'étalent dans le temps, peuvent au contraire être un peu plus élevées. Par conséquent, le fait d'inscrire ces dépenses dans la section d'investissement prouverait la qualité d'investissement à long terme de ces études d'urbanisme, justifiant parfaitement l'intérêt que l'on peut y porter.
Je suis naturellement favorable aux amendements n°s 1 et 77, mais j'aurais même été satisfait par le passage de l'inscription de ces dépenses de la section de fonctionnement à la section d'investissement sans argent à la clé.
M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, pour explication de vote.
M. Daniel Reiner. Nous sommes naturellement très favorables à l'évolution que nous proposent les commissions. Il s'agit d'ailleurs là d'une demande très ancienne.
Le Gouvernement nous dit aujourd'hui qu'une telle évolution est impossible compte tenu des règles de la comptabilité publique applicables aux collectivités locales. Mais nous sommes là pour changer éventuellement les règles ! En effet, il faudra bien un jour donner suite de manière favorable à cette demande. Il s'agit effectivement, comme le disait notre collègue Ambroise Dupont, d'investissements sur le très long terme. L'inscription de ces dépenses en section d'investissement paraît donc tout à fait justifiée. Et si, accessoirement, une telle inscription ouvrait droit aux attributions du FCTVA, tout le monde en serait naturellement satisfait.
Dans le même esprit, nous proposerons, par l'amendement n° 193, tendant à insérer un article additionnel après l'article 5, que les communes ne disposant pas d'un service d'urbanisme puissent demander à l'Etat de leur apporter les concours techniques leur permettant de procéder à l'élaboration de leur carte communale. Cet esprit est également celui de la décentralisation : il s'agit d'aider les communes à établir des documents de qualité.
Nous sommes donc très favorables à ces deux amendements.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Bien évidemment, nous soutenons tout à fait ces deux amendements identiques qui répondent à une vieille revendication des élus. J'ajoute que nous y sommes d'autant plus favorables que, bien souvent, nous nous appuyons, pour réaliser un certain nombre de projets et donc pour inscrire en section d'investissement les dépenses qui y sont liées, sur les études menées qui ont permis de définir les grandes lignes des projets. On nous dit toujours que l'on ne peut inscrire en section d'investissement les dépenses liées à une étude que si cette dernière fait ensuite l'objet de travaux. Les amendements n°{s 1 et 77 s'inscrivent tout à fait dans cette démarche.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 1 et 77.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
M. le président. « Art. 1er. - Les quatre premiers alinéas de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Dans les communes situées à moins de quinze kilomètres de la périphérie d'une agglomération de plus de 50 000 habitants au sens du recensement général de la population, ou à moins de quinze kilomètres du rivage de la mer, qui ne sont pas couvertes par un schéma de cohérence territoriale applicable, le plan local d'urbanisme ne peut être modifié ou révisé en vue d'ouvrir à l'urbanisation une zone d'urbanisation future délimitée après le 1er juillet 2002 ou une zone naturelle.
« Dans les communes mentionnées au premier alinéa et à l'intérieur des zones d'urbanisation future ouvertes à l'urbanisation après l'entrée en vigueur de la loi n° du portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction, il ne peut être délivré d'autorisation d'exploitation commerciale en application des 1° à 6° et du 8° du I de l'article L. 720-5 du code de commerce ou d'autorisation de création des salles de spectacles cinématographiques en application du I de l'article 36-1 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat.
« Il peut être dérogé aux dispositions des deux alinéas précédents soit avec l'accord du préfet donné après avis de la commission départementale des sites et de la chambre d'agriculture soit, lorsque le périmètre d'un schéma de cohérence territoriale incluant la commune a été arrêté, avec l'accord de l'établissement public prévu à l'article L. 122-4. La dérogation ne peut être refusée que si les inconvénients éventuels de l'urbanisation envisagée sur l'urbanisation des communes voisines, sur l'environnement ou sur les activités agricoles sont excessifs au regard de l'intérêt que représente pour la commune la modification ou la révision du plan ».
L'amendement n° 78, présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Au début du premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer les quatre premiers alinéas de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, après les mots : "Dans les communes", insérer les mots : "qui sont". »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 78.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 144 est présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils et Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 190 est présenté par MM. Reiner, Dauge, Domeizel, C. Gautier, Mano, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, remplacer les mots : "50 000 habitants" par les mots : "15 000 habitants". »
L'amendement n° 142, présenté par MM. François-Poncet, Gouteyron, Courtois et Doublet, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer les quatre premiers alinéas de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, remplacer les mots : "50 000 habitants" par les mots : "80 000 habitants". »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour défendre l'amendement n° 144.
Mme Marie-France Beaufils. L'article 1er du présent projet de loi illustre finalement de manière relativement explicite ce qui peut animer les membres de la majorité parlementaire en matière de révision des règles du droit de l'urbanisme.
On peut en effet admettre que les lois les plus récemment votées ayant un effet sur ces questions, que ce soit la loi Voynet, la loi Chevènement ou la loi Gayssot, présentent quelques contradictions ou entraînent pour le moins certaines interprétations contradictoires. Mais si j'ai bien compris, vous envisagez prochainement, monsieur le ministre, de déposer de nouveaux textes sur ces sujets.
Toutefois, ce qui est en jeu ici est, de notre point de vue, d'une autre nature.
En effet, au motif de simplifier certaines règles, vous nous proposez de restreindre de manière sensible le champ d'application de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme portant sur les schémas de cohérence territoriale, les SCOT.
En fait, il s'agit, pour des motifs qui me semblent discutables - prétendument des simplifications de procédures ou des enjeux considérés comme moindres -, de permettre une urbanisation dans de plus vastes zones du territoire, particulièrement en zone périurbaine, et de laisser plus de latitude aux élus locaux pour opérer des choix d'aménagement.
On ne peut pourtant ignorer, au début de ce débat, que l'un des principaux enjeux d'un développement équilibré du territoire dans les années à venir réside dans la manière dont les parties du pays encore peu peuplées seront urbanisées et aménagées : une grande cohérence entre développement urbain, présence d'activités économiques ou commerciales, préservation des terres agricoles, des espaces de détente et naturels, etc., est nécessaire. Or cela ne peut se concevoir sans une approche globale, ce que permettent les SCOT. C'est une démarche qui, me semble-t-il, doit être poursuivie si l'on veut éviter tout ce que nous connaissons déjà aujourd'hui : la duplication à l'infini de zones d'activités commerciales qui viennent petit à petit mettre en péril le commerce de centre-ville, la réalisation de lotissements dans des secteurs non préservés des inondations, l'insuffisance du réseau de transport public conduisant à de nouvelles difficultés dans les communications, une urbanisation qui vide des centres-bourgs au profit de hameaux sans que les services publics indispensables à la vie des habitants puissent suivre cette nouvelle organisation.
Ce sont ces maux que nous pouvons éviter en appliquant largement les principes de la cohérence territoriale.
C'est en ce sens que, en prenant acte de la nouvelle rédaction de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, nous invitons le Sénat à adopter l'amendement n° 144, qui vise à situer l'effort à un niveau pertinent : celui des agglomérations en devenir.
Cela participera notamment à la revitalisation des centres urbains de taille moyenne, dont on sait qu'ils constituent l'un des outils fondamentaux d'un aménagement plus équilibré du territoire.
C'est aussi de cette façon que l'on s'engagera dans une vraie démarche de développement durable, plus respectueuse de l'environnement, permettant que les accords de Kyoto ne soient pas que des accords de principe.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à adopter notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, pour défendre l'amendement n° 190.
M. Daniel Reiner. Lors de la discussion générale, j'ai attiré l'attention des honorables parlementaires sur cette question qui nous paraît tout à fait fondamentale.
Les SCOT constituent une avancée majeure de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ou loi SRU. A l'époque, le choix avait été fait de limiter l'urbanisation à quinze kilomètres autour des agglomérations de 15 000 habitants. Or porter le seuil à 50 000 habitants réduit considérablement la portée de cette mesure.
En effet, de nombreuses petites agglomérations ne seront plus incitées de manière claire à réaliser un SCOT, puisque l'urbanisation ne sera pas gelée dans les quinze kilomètres qui les entourent. Or les mêmes enjeux pèsent sur ces petites agglomérations - j'en ai cité hier le nombre : 173 agglomérations, englobant plus de 8 000 communes - que sur les agglomérations de plus grande taille : pression foncière, développement rapide des moyens de transport en commun, maîtrise des flux de véhicules, déboires paysagers s'agissant notamment des entrées de ville, qualité de l'environnement. Il faut donc naturellement inciter aussi ces petites agglomérations à s'organiser.
Je reprends là les arguments développés par M. Gérard Larcher, dans son rapport rédigé en 1997. L'actuel président de la commission des affaires économiques mettait alors l'accent sur ces espaces périurbains, désignés comme lieux d'« ignorance mutuelle » entre population d'origine rurale et population d'origine urbaine. Il préconisait une relance vigoureuse des schémas directeurs, prédécesseurs des SCOT.
Il nous faut bien comprendre que la France est maintenant un pays au mode de vie urbain, dont la diffusion et les questions qu'il soulève affectent l'ensemble du territoire national.
Nous avons tous conscience que le foncier se raréfie, et ce au voisinage non seulement des métropoles, mais aussi des agglomérations moyennes. On pourrait même considérer que nous avons, en certaines circonstances, gaspillé du foncier et qu'il est hautement souhaitable de ne plus agir ainsi.
Monsieur le ministre, vous m'avez répondu hier, avec un brin d'ironie, qu'il n'était naturellement pas interdit aux agglomérations de moins de 50 000 habitants, voire de moins de 15 000 habitants, de réaliser un SCOT. Mais chacun a bien compris qu'en levant cette contrainte, qui visait en quelque sorte à geler l'urbanisation future en supprimant l'interdiction de construire qui pesait sur les zones NA d'urbanisation future, en faisant passer la barre à 50 000 habitants, nous procédons à un assouplissement qui nuit profondément à l'ensemble du territoire.
Nous avons intérêt à ne pas multiplier les territoires non maîtrisés pour y implanter des services, des commerces ou des industries.
Le retour au seuil de 15 000 habitants ne procède pas simplement de la volonté idéologique d'en revenir au texte voté par la précédente majorité. C'est une mesure parfaitement nécessaire pour compléter le travail qui a été fait par la loi SRU et pour donner une dimension supplémentaire à l'incitation destinée aux agglomérations.
C'est le devoir du Sénat, représentant des collectivités locales, de défendre les agglomérations plus petites, qui sont aux prises avec les mêmes difficultés que les grandes.
M. le président. L'amendement n° 142 n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Les auteurs des amendements n°s 144 et 190 veulent en revenir à la logique de la loi SRU. En abaissant la barre de 50 000 à 15 000 habitants, ils veulent faire disparaître une amélioration apportée par l'Assemblée nationale.
Que M. Reiner me permette de le lui dire de façon très amicale, il a une curieuse conception de l'incitation ! En effet, il nous dit que les communes ne seront pas incitées parce qu'elles n'auront plus leur territoire gelé. Or dans ces conditions, a contrario, on ne peut plus parler d'incitation mais de contrainte.
En revanche, je remercie le Gouvernement, qui, lui, incite les communes de moins de 15 000 habitants à élaborer des SCOT en leur offrant, ainsi qu'aux EPCI qui en prévoiront, une aide de 1 euro par habitant, ce qui n'est pas négligeable.
Il ne faudrait pas que nos collègues confondent l'obligation de réaliser des SCOT, dans certaines conditions, dans un certain périmètre, et le fait de pouvoir en élaborer un.
De toute façon, nous faisons confiance aux élus locaux, qui comprendront l'intérêt des SCOT et qui seront incités à en établir par les mesures contenues dans le projet de loi. Nous sommes favorables aux SCOT, mais nous voulons inciter les élus à s'y rallier sans contrainte.
La commission est donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Premièrement, il faut savoir que les capacités d'ingénierie de notre pays ne permettraient pas d'élaborer des SCOT pour toutes les agglomérations de 15 000 habitants. Il nous faut donc être réalistes.
Deuxièmement, il n'est pas interdit aux communes de moins de 50 000 habitants d'élaborer un SCOT. M. le rapporteur a très justement rappelé qu'une aide était même prévue à cet effet. Soit l'aide est accordée par l'agence de l'urbanisme s'il y en a une, soit une aide de 1 euro est accordée par habitant : nous incitons, mais nous n'obligeons pas.
Troisièmement, monsieur Reiner, madame Beaufils, je crains que vous ne fassiez une confusion entre la règle des 15 kilomètres et la règle d'élaboration des SCOT. Cette confusion pernicieuse a finalement contribué, dans le système précédent, au rejet des SCOT par les élus, car c'est ce point qui les irritait le plus. Je voudrais donc que l'on en revienne à une règle plus raisonnable, et le seuil de 50 000 habitants me paraissant aller dans ce sens, j'émets un avis défavorable sur ces deux amendements, que je qualifierai d'« amendements de nostalgie ». (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Mano, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Mano. Nous touchons là aux fondements de l'organisation du territoire.
Notre pays est-il une juxtaposition de 36 000 communes qui se répartissent l'espace et où chacun, au nom d'une certaine liberté, agit comme il veut ? Soit on considère que l'Etat a encore une fonction d'aménageur du territoire pour le bien des 60 millions d'habitants de notre pays, soit les maires, au nom de leur autonomie, considèrent qu'ils ont à gérer comme ils l'entendent l'espace qui est sous leur responsabilité.
Je pense que nous sommes en train d'accepter la négation d'un rôle essentiel de l'Etat. On recule devant des pressions exercées au nom d'une certaine liberté. Ce n'est pas ma conception de l'Etat. Voilà pourquoi je voterai les deux amendements proposés.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je dois dire d'abord que j'ai été très étonné que M. le ministre ne nous réponde pas, hier soir, au cours de l'intervention qu'il a prononcée à la fin de la discussion générale.
Aujourd'hui, vous nous dites, monsieur le ministre, que nous ne disposerions pas de l'ingénierie nécessaire à l'élaboration des SCOT pour les agglomérations de 15 000 habitants. Parallèlement, M. le rapporteur prétend que l'incitation marchera très fort et que, finalement, de nombreux élus en viendront aux SCOT. Dans ces conditions, finalement, on se retrouvera devant le même problème d'ingénierie !
L'argument de M. le ministre n'est donc pas valable, ou alors il faudrait mettre en doute les propos de M. le rapporteur, ce que nous ne ferons évidemment pas.
Par ailleurs, si le fait de ne pas fixer de règles ou d'en réduire le nombre suffisait pour que l'aménagement du territoire soit harmonieux aux portes de nos agglomérations, à l'entrée des villes, dans les zones périurbaines, dans les actions de rurbanisation, cela se saurait et se verrait.
Quand vous dites, monsieur le ministre, qu'il faut libérer les communes et les agglomérations des contraintes, j'entends bien que, pour vous, la meilleure des solutions serait qu'il n'y ait pas de règle, pas de schéma, pas d'expression de la volonté générale. Or c'est totalement contraire à la lettre et à l'esprit du rapport de la commission des affaires économiques, qui a plaidé avec beaucoup de conviction pour l'autre voie.
Au demeurant, monsieur le ministre, nonobstant ce que vous dites aujourd'hui sur les capacités d'ingénierie, vous n'aviez pas prévu, dans le projet de loi initial, de faire passer le seuil de 15 000 à 50 000 habitants. Vous avez donc présenté de bonne foi devant l'Assemblée nationale un texte qui maintenait cette disposition selon laquelle il était possible de mettre en place des schémas d'aménagement dans l'ensemble des agglomérations françaises. C'est, me semble-t-il, une nécessité, même si la position contraire peut être plus démagogique eu égard aux craintes exprimées par certains élus face à certaines complexités et à certaines difficultés qui incitent à tout laisser tomber.
En faisant marche arrière sur ce point, monsieur le ministre, vous jouerez contre l'aménagement du territoire et contre la beauté et l'harmonie de nos entrées de ville, qui sont déjà grandement mises à mal. Il faudrait plutôt consentir des efforts très importants et faire preuve d'une grande énergie pour inverser la tendance. Depuis quatre décennies, les entrées des villes sont saccagées. Aussi, monsieur le ministre, je ne comprends pas votre recul.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 144 et 190.
M. Jean-Pierre Sueur. M. le ministre n'a pas répondu !
M. Gilles de Robien, ministre. C'est toujours le même argument !
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 79, présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer les quatre premiers alinéas de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, après les mots : "quinze kilomètres du rivage de la mer", insérer le mot : "et". »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 79.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 2 est présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 80 est présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des lois.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer les quatre premiers alinéas de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, remplacer les mots : "zone d'urbanisation future" par les mots : "zone à urbaniser".
« II. - En conséquence, dans le deuxième alinéa du même texte, remplacer les mots : "zones d'urbanisation future" par les mots : "zones à urbaniser". »
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 2.
M. Dominique Braye, rapporteur. Cet amendement est d'ordre rédactionnel.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 80.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Amendement rédactionnel !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 2 et 80.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer les quatre premiers alinéas de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, remplacer les mots : "sur l'urbanisation des" par les mots : "pour les". »
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Cet amendement vise les dérogations accordées par le préfet aux deux alinéas précédents. Il tend non pas seulement à prendre en compte les inconvénients de l'urbanisation envisagée sur celle des communes voisines, mais également les autres inconvénients que pourrait avoir l'urbanisation envisagée pour les communes avoisinantes : accroissement des transports, effets sur le commerce, l'habitat, etc.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Cet amendement est l'illustration de la qualité du travail de la commission : sa rédaction est beaucoup plus précise que celle du texte initial.
Le Gouvernement y est évidemment favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer les quatre premiers alinéas de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, après les mots : "des communes voisines,", remplacer le mot : "sur" par le mot : "pour". »
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel et de coordination avec le précédent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer les quatre premiers alinéas de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, après les mots : "l'environnement où", remplacer le mot : "sur" par le mot : "pour". »
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel et de coordination avec les deux précédents.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 81 est présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des lois.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« A. - Compléter cet article par un II ainsi rédigé :
« II. - A la fin du cinquième alinéa du même article, le chiffre : "15 000" est remplacé par le chiffre : "50 000".
« B. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention : "I". »
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6.
M. Dominique Braye, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 81.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. Coordination !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 6 et 81.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
M. Jean-Pierre Sueur. M. le ministre ne nous a toujours pas répondu !
(L'article 1er est adopté.)