compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
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PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
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DÉcisions du Conseil constitutionnel
M. le président. Par lettre en date du 25 novembre 2004, M. le président du Conseil constitutionnel a fait connaître à M. le président du Sénat que le Conseil constitutionnel avait rendu sept décisions, prises le jour même en application de l'article 59 de la Constitution, relatives au contentieux des élections sénatoriales du 26 septembre 2004 et par lesquelles:
- ont été rejetées les requêtes concernant les élections sénatoriales du 26 septembre 2004, respectivement de la Seine-Maritime, de la Savoie, de Saône-et-Loire, du Haut-Rhin, de l'Yonne et pour la désignation des sénateurs représentant les Français établis hors de France ;
- ont été annulées les opérations électorales qui se sont déroulées le 26 septembre 2004 dans le département du Bas-Rhin pour la désignation de cinq sénateurs.
Acte est donné de cette communication.
Ces décisions du Conseil constitutionnel seront publiées au Journal officiel à la suite du compte rendu de la présente séance.
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loi de finances pour 2005
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2005, adopté par l'Assemblée nationale (n os 73,74).
Nous en sommes parvenus à la discussion des articles de la première partie.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que, conformément aux conclusions de la conférence des présidents, nous aurons, mardi 30 novembre 2004, à seize heures, un débat sur les recettes des collectivités locales, à la suite duquel nous examinerons les articles 20, 25 et 29 à 34, ainsi que les articles additionnels avant ou après les articles 29 à 34.
En outre, le mercredi 1er décembre, à neuf heures trente, nous examinerons l'article 43 relatif au prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes.
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. - IMPÔTS ET REVENUS AUTORISÉS
A. - Dispositions antérieures
Article 1er
I. - La perception des impôts, produits et revenus affectés à l'Etat, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et organismes divers habilités à les percevoir continue d'être effectuée pendant l'année 2005 conformément aux lois et règlements et aux dispositions de la présente loi de finances.
II. - Sous réserve de dispositions contraires, la loi de finances s'applique :
1° A l'impôt sur le revenu dû au titre de 2004 et des années suivantes ;
2° A l'impôt dû par les sociétés sur leurs résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2004 ;
3° A compter du 1er janvier 2005 pour les autres dispositions fiscales.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
B. - Mesures fiscales
Article 2
I. - Le I de l'article 197 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1 est ainsi rédigé :
« 1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 4 334 € le taux de :
« - 6,83 % pour la fraction supérieure à 4 334 € et inférieure ou égale à 8 524 € ;
« - 19,14 % pour la fraction supérieure à 8 524 € et inférieure ou égale à 15 004 € ;
« - 28,26 % pour la fraction supérieure à 15 004 € et inférieure ou égale à 24 294 € ;
« - 37,38 % pour la fraction supérieure à 24 294 € et inférieure ou égale à 39 529 € ;
« - 42,62 % pour la fraction supérieure à 39 529 € et inférieure ou égale à 48 747 € ;
« - 48,09 % pour la fraction supérieure à 48 747 €. » ;
2° Au 2, les sommes : « 2 086 € », « 3 609 € », « 800 € » et « 590 € » sont remplacées respectivement par les sommes : « 2 121 € », « 3 670 € », « 814 € » et « 600 € » ;
3° Au 4, la somme : « 393 € » est remplacée par la somme : « 400 € ».
II. - Au deuxième alinéa de l'article 196 B du même code, la somme : « 4 338 € » est remplacée par la somme : « 4 410 € ».
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, sur l'article.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'article 2 du présent projet de loi de finances porte, comme c'est souvent le cas, sur le barème de l'impôt sur le revenu des personnes physiques.
Cette année, tel qu'il se présente dans le cadre de cet article, le barème fixé pour l'impôt marque une pause relative dans le mouvement entrepris ces dernières années pour la baisse globale du poids et du rendement de l'impôt sur le revenu.
En effet, le projet de loi de finances pour 2005 ne contient d'autre mesure nouvelle essentielle qu'une réévaluation des limites des tranches d'imposition, tandis que quelques dispositions strictement ciblées vont être proposées, tant en première qu'en seconde partie, et ce pour des montants relativement modestes, à l'exception notable de la réduction accordée pour les emplois à domicile.
Dans les faits, la situation au regard de l'impôt sur le revenu est connue : les contribuables sont nombreux - plus de 33 millions de foyers fiscaux, majoritairement composés d'une seule personne, d'ailleurs - mais une part importante de ces contribuables n'est pas imposable, du fait de la modicité des ressources des intéressés.
Pour autant, l'orientation fixée par l'article 2 du projet de loi de finances présente plus d'un défaut et appelle d'autres solutions que celles qui ont pu être mises en oeuvre ces dernières années.
On ne peut d'ailleurs oublier que, cette année, avec la croissance attendue du produit de l'impôt de plus de 1,5 milliard d'euros nets - due, pour l'essentiel, à l'évolution spontanée du produit de l'impôt -, nous sommes aussi confrontés, pour ce qui concerne les particuliers, notamment les salariés et les retraités, à un alourdissement des prélèvements sociaux proportionnels assimilables à l'impôt sur le revenu.
Comme nous l'avons souligné, la réforme de l'assurance maladie accroît ainsi de 900 millions d'euros la contribution sociale généralisée des salariés et de 750 millions d'euros celle des pensionnés et retraités. Nous sommes donc loin de la baisse annoncée depuis 2002 et, pour le plus grand nombre, c'est même à la hausse que l'on devrait constater l'évolution réelle.
Pour autant, l'article 2 conduit à réduire à la portion congrue l'impôt progressif, laissant une place de plus en plus grande aux droits indirects. Il contribue également à faire de la contribution sociale généralisée le véritable impôt sur le revenu, proportionnel au demeurant, et touchant plus largement chaque contribuable. De surcroît, le rendement de la CSG est autrement plus spectaculaire que celui qui résulte de l'impôt progressif, puisqu'il s'en faut désormais de 10 milliards d'euros pour que les cotisations perçues soient équivalentes.
A force de polariser l'attention sur le barème de l'impôt, on en oublie le véritable débat : celui qui porte sur l'assiette même de l'impôt et qui, de fait, en restreint dangereusement le rendement.
Quand à peu près 87 % de l'assiette de l'impôt sur le revenu sont constitués par les salaires ou revenus assimilés et par les pensions et retraites, chacun mesure aisément que toute baisse des taux du barème n'est pas une avancée de la justice sociale et fiscale. Aussi, agir sur les taux ne suffit pas. Il convient de poser, encore une fois, la question de la prise en compte des revenus du capital et du patrimoine dans l'assiette de l'impôt, dans un véritable respect du principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt.
Nous pourrions être ouverts à toute réduction des taux d'imposition - respectant, au demeurant, la progressivité et l'efficacité de l'impôt - si, dans le même temps, des efforts étaient accomplis pour une extension de son assiette, mettant notamment fin au principe des prélèvements libératoires qui sont autant de niches fiscales fort coûteuses qui ne profitent d'ailleurs qu'à proportion de ce que chaque contribuable peut consacrer aux placements concernés.
C'est pourquoi il est largement temps de poser la question du devenir des dispositifs divers de correction de l'impôt sur le revenu que nous connaissons et qui constituent autant d'éléments de dévitalisation de l'impôt progressif. Pour chaque disposition dérogatoire - et cette remarque ne vaut pas que pour l'impôt sur le revenu -, pour chaque niche fiscale, on doit s'interroger sur le coût, le rendement et l'efficacité économique et sociale de la mesure proposée.
Nous pourrions sans doute prolonger le débat sur l'impôt sur le revenu si nous procédions dès aujourd'hui à cet examen critique de l'ensemble de la dépense fiscale consacrée à modifier l'application du barème de l'impôt sur le revenu, modification qui représente un volume de plus de 39 milliards d'euros, soit plus des deux tiers du produit attendu de l'impôt lui même. Mais en aurions-nous le temps dans le cadre des délais constitutionnels ? Toujours est-il qu'il le faudrait !
Telles sont les quelques observations que les membres du groupe communiste républicain et citoyen souhaitaient formuler à l'occasion de l'examen de cet article 2, qui porte sur l'impôt sur le revenu.
M. le président. L'amendement n° I-82, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les deux derniers alinéas du texte proposé par le 1° du I de cet article pour le 1 de l'article 197 du code général des impôts :
« - 48 % pour la fraction supérieure à 39 529 euros et inférieure ou égale à 48 747 euros ;
« - 54 % pour la fraction supérieure à 48 747 euros. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement répond à deux exigences : d'une part, la réduction du déficit de l'Etat et, d'autre part, la justice fiscale et sociale. En effet, en proposant, comme nous le faisons, de relever les taux d'imposition des deux tranches les plus élevées du barème progressif, nous permettons de dégager pour l'Etat quelques marges de manoeuvre financières susceptibles d'être utilisées à bon escient et de favoriser, par exemple, la poursuite de telle ou telle politique de solidarité nationale.
Au-delà de notre proposition, ce qui est en cause, c'est bel et bien le fait que, dans notre pays, l'impôt sur le revenu est profondément marqué par une forte concentration des revenus imposables sur les plans tant sociologique que géographique, notamment. J'en veux pour preuve que près de 50 % des contribuables sont aujourd'hui exonérés de toute imposition et que ce taux est même supérieur à 60 % dans nombre de départements, de villes ou de quartiers.
Ainsi, selon les renseignements que j'ai pu obtenir, plus de quinze départements, y compris des départements fortement urbanisés, comptent aujourd'hui moins de 40 % de contribuables effectivement redevables d'une cotisation au titre de l'impôt sur le revenu.
Quand on y regarde de plus près, on constate que l'impôt sur le revenu est un impôt assez nettement parisien, comme peuvent l'être la taxe professionnelle, la taxe sur la valeur ajoutée ou l'impôt sur les sociétés. En effet, sept des huit départements de la région d'Ile-de-France sont en tête du classement s'agissant du revenu moyen par foyer fiscal.
Quant à la pause dans le mouvement de baisse de l'impôt sur le revenu, comment ne pas rappeler que l'acquis de cette baisse est assez fortement concentré sur le million de contribuables qui acquittent un montant d'impôt supérieur à 7 500 euros et qui ont été et seront les principaux bénéficiaires de la mesure ?
Rassurez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues : nous ne préconisons pas de peser de manière excessive sur le fruit du travail de chacun. Mais force est de constater que les efforts du Gouvernement n'ont jusqu'ici visé qu'une infime partie des assujettis, à savoir ceux dont le revenu total comporte souvent bien d'autres éléments que le simple revenu d'activité.
Cependant, nous estimons que la réalité de l'impôt sur le revenu appelle clairement d'autres solutions que celle qui consiste à en écraser le caractère redistributif, comme le prévoit la rédaction actuelle de l'article 2.
De surcroît, ainsi que nous l'avons déjà indiqué, nous croyons, en la matière, à des mesures plus ciblées, portant par exemple sur l'assiette, que ce soit sur son extension ou sur sa redéfinition, plutôt qu'à une mesure générale qui ne profite, finalement, qu'à quelques centaines de milliers de contribuables.
Tel est le sens de cet amendement, que nous vous invitons à adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je profiterai de cette première intervention dans notre débat budgétaire pour vous livrer quelques considérations sur l'impôt en général et sur l'impôt direct sur la personne en particulier.
L'impôt témoigne de l'appartenance à une communauté et de la volonté de partager des valeurs communes. C'est en effet en payant l'impôt que l'on adhère à une communauté nationale et que l'on contribue au financement des services publics. L'impôt est donc un élément central du débat politique et social et la structure de l'impôt ainsi que les conditions générales et la définition de la fiscalité doivent être le reflet de la société.
En France, l'impôt sur le revenu, mes chers collègues, est très concentré, voire trop concentré, et l'amendement de Thierry Foucaud - que, bien entendu, la commission des finances, dans sa majorité, combat - me donne l'occasion de procéder à quelques rappels.
En 1999, 64,2 % du produit global de l'impôt sur le revenu émanaient des 10 % des contribuables les plus imposés. En 2002, ces mêmes contribuables participaient à cet impôt à hauteur de 74,6 %.
Parallèlement, qu'en était-il des 50 % de contribuables qui paient le moins d'impôts sur le revenu ? La réponse à cette question devrait satisfaire l'auteur de l'amendement : en 1999, ces derniers s'acquittaient de 3,3 % du total du produit de l'impôt sur le revenu. En 2002, leur contribution est passée à 0 %, la prime pour l'emploi ayant été créée dans l'intervalle.
La prime pour l'emploi est un crédit d'impôt. Elle est, vous le savez, restituée. La direction générale des impôts nous apprend ainsi - ces données sont reproduites à la page 10 du volume I du rapport de la commission - que les 50 % de contribuables qui paient le moins d'impôt bénéficient donc, en quelque sorte, d'un impôt négatif représentant 4,3 % du produit global de l'impôt, puisque cette somme leur est restituée.
Il faut être raisonnable ! Je rappelle que la politique conduite depuis 2002, qui a permis d'abaisser le barème de l'impôt sur le revenu de 10 %, a été une bonne politique, une politique d'efficacité et d'équité sociale. Et nous devons nous tenir prêts, monsieur le secrétaire d'Etat, à reprendre la baisse des taux de l'impôt sur le revenu dès que la conjoncture économique et budgétaire nous le permettra.
Il faut également considérer comme un tout, me semble-t-il, les contributions versées par les personnes physiques. A la vérité, la contribution sociale généralisée et l'impôt sur le revenu forment aujourd'hui un seul et même impôt sur les personnes physiques.
Comme cela a été rappelé, les besoins de financement des organismes sociaux vont croissant et le prélèvement social a récemment augmenté, presque à due proportion de la baisse du prélèvement fiscal. Il faut donc diminuer la dépense publique, la dépense de l'Etat, afin de pouvoir abaisser le niveau du prélèvement fiscal si l'on veut maintenir les prélèvements obligatoires à un niveau constant, en regroupant Etat et organismes sociaux.
J'ai estimé devoir procéder à ce rappel au début de notre débat et je remercie Thierry Foucaud de m'avoir permis de le faire.
En conclusion, je réaffirme, bien entendu, que la commission des finances a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Foucaud, nous avons tous, je l'espère - le Gouvernement, la majorité, l'opposition -, le souci de dynamiser l'emploi dans notre pays et de bénéficier d'un taux de croissance suffisant, alimenté par les investissements, la consommation et les exportations.
Si nous voulons dynamiser l'emploi, il ne faut pas écraser notre pays sous le poids de la fiscalité. Or nos concitoyens ont souvent le sentiment, à juste titre, que la fiscalité est trop forte dans notre pays. Pour cette raison, je suis naturellement opposé à votre amendement, monsieur Foucaud. Par ailleurs, je fais miennes les autres raisons qu'a exposées M. le rapporteur général.
J'ajoute, sans vouloir vous être désagréable, que M. le Premier ministre a annoncé cette semaine dans une interview au journal La Tribune que le Gouvernement envisageait, si la situation économique le permet, de poursuivre l'année prochaine la baisse des impôts sur le revenu. Nous avons déjà baissé cet impôt de 10 % et le Président de la République s'était engagé sur ce point sur l'ensemble de son quinquennat. Nous essaierons donc, l'an prochain, si nous le pouvons, de poursuivre dans cette voie.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Les explications de M. le rapporteur général prouvent une fois encore le bien-fondé de notre démarche.
M. Marini nous a indiqué, chiffres à l'appui, que, aujourd'hui plus qu'hier, une minorité de Français gagne plus, s'enrichit plus et détient plus de richesses...
M. Roger Karoutchi. Ils travaillent plus !
M. Thierry Foucaud. ... que cette partie des Français que la majorité, notamment sénatoriale, appelle « la France d'en bas ». Cette dernière, en effet, s'appauvrit toujours un peu plus. (M. Roger Karoutchi fait un signe de dénégation.)
Peut-être aurais-je dû mettre une fois encore en regard les 230 millions d'euros que coûte la prime pour l'emploi et les 900 millions d'euros de la CSG ou la ponction de 750 millions d'euros sur les retraites et les pensions.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La prime pour l'emploi coûte 2,3 milliards d'euros !
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2
M. le président. L'amendement n° I-186 rectifié, présenté par M. Fouché, Mme Gousseau et M. A. Dupont, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le dernier alinéa de l'article 63 du code général des impôts, après les mots : « les revenus qui proviennent » sont insérés les mots : « des activités liées à l'exercice de la profession de maréchal-ferrant, ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Adeline Gousseau.
Mme Adeline Gousseau. L'article 22 de la loi de finances de 2004 a permis de considérer comme bénéfices de l'exploitation agricole les revenus provenant des activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques, ainsi que ceux qui proviennent de l'exploitation d'équidés adultes dans le cadre de loisirs, à l'exclusion de ceux qui proviennent des activités de spectacle.
Il en résulte que ces activités relèvent désormais du régime agricole de la taxe sur la valeur ajoutée.
Cet amendement vise à étendre aux activités liées à l'exercice de la profession de maréchal-ferrant le régime applicable aux bénéfices agricoles.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je rappelle que l'an dernier, sur l'initiative de la commission des finances, le statut fiscal des entreprises équestres a été modifié et que ces dernières ont été rattachées au régime des bénéfices agricoles.
Cette réforme, me semble-t-il, monsieur le secrétaire d'Etat, a été utile, car elle a permis, en particulier en milieu rural, de conforter et de développer les activités d'entreprises particulièrement utiles.
La question que soulève cet amendement est de savoir si la logique qui vaut pour la filière équestre peut être appliquée aux maréchaux-ferrants. La commission s'interroge. Certains arguments plaident en ce sens...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Peut-être aussi, monsieur le secrétaire d'Etat. Nous attendons donc que vous nous éclairiez sur ce point.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Eclairer la commission des finances n'est pas à la hauteur des capacités et du savoir du Gouvernement ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.) J'essaierai tout de même de répondre à l'invite de M. le rapporteur général.
Madame la sénatrice, chacun sait à quel point M. Fouché, coauteur de cet amendement, est attaché à la ruralité, en particulier dans son beau département de la Vienne.
L'article 22 de la loi de finances de 2004 harmonise le régime fiscal des entreprises ou exploitations intervenant dans le secteur équestre. Il a été décidé que le régime des bénéfices agricoles s'appliquait à l'ensemble des activités s'inscrivant - je vais éclairer M. le rapporteur général - « dans le cycle biologique de l'animal », c'est-à-dire l'élevage, la préparation et l'entraînement des chevaux.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ah ! C'est une question de cycle biologique...
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Tout le débat est là et il peut nous occuper de longues heures !
Quoi qu'il en soit, madame la sénatrice, il ne semble pas au Gouvernement que ce soit le cas de l'activité de maréchal-ferrant - cette belle activité qui nous rappelle à tous notre enfance -, car elle est exercée de manière autonome et ne s'inscrit pas naturellement dans le cycle biologique de l'animal.
Toutefois - et tout est dans ce « toutefois » -, dans le cas où un éleveur de chevaux, par exemple, pratiquerait cette activité de manière accessoire, l'ensemble de ses activités relèverait alors, bien entendu, du régime des bénéficies agricoles.
Pour l'ensemble de ces raisons qui, j'en suis persuadé, madame la sénatrice, vous auront profondément convaincue, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, sachant que l'activité des éleveurs de chevaux sera considérée de la manière la plus large possible.
M. le président. Madame Gousseau, l'amendement n° I-186 rectifié est-il maintenu ?
Mme Adeline Gousseau. Non, je le retire, monsieur le président : j'ai bien noté le « toutefois » de M. le secrétaire d'Etat.
M. le président. L'amendement n° I-186 rectifié est retiré.
M. Michel Moreigne. Je reprends cet amendement, monsieur le président, et je le rectifie afin de ne viser que les maréchaux-ferrants itinérants.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-186 rectifié bis, présenté par M. Moreigne, et ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le dernier alinéa de l'article 63 du code général des impôts, après les mots : « les revenus qui proviennent » sont insérés les mots : « des activités liées à l'exercice de la profession de maréchal-ferrant itinérant, ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si les maréchaux-ferrants itinérants n'avaient recours qu'à un mode de traction hippomobile, et non automobile, leurs activités s'inscriraient bien dans le cycle biologique de l'animal. (Sourires.) La commission pourrait alors changer d'avis et être favorable à cet amendement, mais je crains que ce ne soit pas le cas.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Et si la traction est effectuée par des moutons ? (Rires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Plus sérieusement, la question qui est posée est celle de l'inscription de l'activité dans le cycle biologique du cheval.
Les intentions de la commission des finances, l'année dernière, étaient de promouvoir l'élevage, les différents clubs d'équitation, quelles que soient leurs structures, et la profession d'entraîneur de chevaux de course. Souvenons-nous d'ailleurs des problèmes que cela a posés en termes de taxe professionnelle pour les communes sur le territoire desquelles sont concentrées ces activités !
Nous n'avions pas, à l'époque, évoqué les activités de service liées à cette filière. Or, dans le passé, il y avait dans nos campagnes un nombre considérable de maréchaux-ferrants. Aujourd'hui, ces activités sont si concentrées qu'un jeune maréchal-ferrant qui s'établit a, selon moi, un très bon métier, il peut travailler beaucoup et gagner vraiment très correctement sa vie.
Il me semble donc qu'au-delà de la question de fiscalité qui est posée, il s'agit bien plutôt d'inciter les jeunes à apprendre ce très beau métier : je crois, mes chers collègues, que nous ferions oeuvre utile en faisant la promotion des maréchaux-ferrants.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-186 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° I-297 rectifié ter, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux, MM. Darniche, Retailleau, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - L'article 75 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 75 - Lorsqu'un exploitant agricole soumis à un régime réel d'imposition étend son activité à des opérations dont les résultats entrent dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et de celles des bénéfices non commerciaux, il est tenu compte de ces résultats pour la détermination des bénéfices agricoles à comprendre dans les bases de l'impôt sur le revenu. »
II - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-299 rectifié, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux, MM. Darniche, Retailleau, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 8° de l'article 81 du code général des impôts est complété par les mots : « ainsi que les rentes d'incapacité permanente servies en application des articles L. 7526 et L. 7529 du code rural, »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-39, présenté par MM. Dassault et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Après le 3° de l'article 83 du code général des impôts, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° Les dépenses et les charges familiales liées au paiement du loyer ou au remboursement d'emprunt pour le logement ainsi que les aides familiales. »
II. La perte de recettes pour le budget de l'Etat résultant de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Cet amendement a un objectif social. Il vise à augmenter le revenu des familles en leur permettant d'en déduire certaines charges.
Une famille est comme une entreprise : elle a des revenus et des charges. Le revenu imposable devrait donc être constitué par la différence entre ces revenus et ces charges, comme pour une entreprise. D'ailleurs, que dirait-on si les entreprises étaient imposées sur leur chiffre d'affaires ? Il s'agit bien de cela : une famille est imposée sur ce qu'elle gagne, en somme sur son chiffre d'affaires, puis elle dépense ce qui lui reste pour vivre.
J'estime que l'amendement n° I-39 permettrait, à des degrés divers, de tendre vers quatre objectifs : l'amélioration de l'habitat, grâce à la déduction des loyers des revenus imposables ; l'accès à la propriété, grâce à la déduction des charges d'emprunt ; l'emploi, grâce à la déduction du coût de l'aide familiale, défendue hier par M. Sarkozy ; l'augmentation du pouvoir d'achat, grâce à un revenu supérieur du fait d'impôts moins élevés.
Certes, cet amendement paraît devoir entraîner un moindre rapport de l'impôt sur le revenu, mais, compte tenu de ses conséquences positives sur l'habitat, l'accès à la propriété, l'emploi et le pouvoir d'achat, donc sur l'activité en général, il devrait surtout avoir pour effet de faciliter la croissance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le débat ainsi ouvert est utile. Depuis longtemps, de bons esprits s'interrogent sur la fiscalité des familles et sur la possibilité de considérer ces dernières comme des entreprises, c'est-à-dire de les autoriser, à l'image des entreprises, à déduire leurs charges pour dégager, en quelque sorte, un résultat fiscal.
Il est clair que de telles idées ne sont pas véritablement applicables dans le contexte budgétaire qui est le nôtre. Elles ne pourraient devenir effectives sans que l'Etat subisse une perte significative - et même très significative - de recettes fiscales.
Toutefois, à l'examen de la liste des déductions de toute nature qui viennent amputer le produit de l'impôt sur le revenu, on peut en arriver à se demander si un système plus global et plus clair autorisant la déduction de diverses charges n'aboutirait pas à un résultat intéressant.
Ne disposant naturellement pas des éléments d'étude économique et des chiffrages qui lui permettraient de juger de la faisabilité d'une telle révolution de l'impôt sur le revenu, la commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement, tout en réaffirmant que les 45 milliards d'euros de déficit budgétaire de l'année 2005 ne laissent pas place à de grandes innovations dans le domaine fiscal.
Le budget de 2005 est un budget de stabilisation : il faut stabiliser le déficit et l'endettement avant d'être en mesure de pratiquer une politique fiscale réellement innovante.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Je remercie M. Dassault d'ouvrir avec talent, comme il le fait souvent, un débat ; mais je dois lui dire que sa proposition se heurte, en dehors des aspects relatifs à l'équilibre budgétaire qu'a rappelés M. le rapporteur général, à différents obstacles.
En premier lieu, monsieur le sénateur, seules sont déductibles du revenu imposable les dépenses engagées en vue d'acquérir le revenu. Or, dans le cas particulier que vous évoquez, votre proposition reviendrait à autoriser la déduction de dépenses à caractère personnel et viderait ainsi l'impôt sur le revenu d'une partie de sa substance.
En second lieu, et vous le savez bien pour être maire d'une grande ville, la législation sociale organise déjà largement la prise en charge des dépenses liées au logement, notamment à travers l'aide personnalisée au logement.
S'agissant du logement, j'ajoute, mais vous le savez déjà, que le projet de loi de finances contient une disposition, dont on a beaucoup parlé, qui rénove le dispositif du prêt à taux zéro et permettra d'élargir considérablement son assise.
Sous le bénéfice de ces observations, qui, je l'espère, auront retenu votre attention, je vous serais reconnaissant, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Dassault, l'amendement est-il maintenu ?
M. Serge Dassault. J'aimerais bien que l'on aille un peu plus loin - pas nécessairement aujourd'hui - et que l'on établisse un bilan de cette proposition.
Il est vrai qu'elle induit une réduction des recettes de l'impôt sur le revenu, mais il s'agirait de savoir dans quelle mesure. Aujourd'hui, on n'en sait rien, et il serait bon qu'une étude soit réalisée par le ministère des finances.
Par ailleurs, je trouve anormal qu'un contribuable paie des impôts puis en récupère une partie : c'est une perte de temps et un surcroît d'activité inutile. Il vaudrait mieux qu'il paie moins d'emblée et qu'on lui reverse moins, et c'est en partie l'objet de la déductibilité des loyers que je propose d'instituer. L'Etat verse en effet des sommes importantes pour prendre en charge une grande partie des loyers de certains contribuables, mais, si ces derniers avaient davantage de moyens en supportant moins d'impôts, peut-être pourraient-ils payer eux-mêmes, et l'Etat paierait en définitive moins. C'est une possibilité qui mérite d'être étudiée.
Je reviens aussi à la question de la déductibilité des charges liées à l'emploi d'une aide familiale, dont personne ne parle, alors que M. Sarkozy a dit hier qu'il fallait favoriser l'emploi dans ce secteur. C'est une façon de créer des emplois et c'est utile pour les familles, qui, souvent, n'ont pas les moyens d'y recourir.
Si vous estimez, monsieur le secrétaire d'Etat, que la déductibilité des loyers est une proposition trop coûteuse, pourquoi ne pas alors accepter au moins la déductibilité des charges liées à l'emploi d'une aide familiale ?
Certes, le coût de la proposition ainsi limitée n'est pas davantage connu, mais je pense que, pour de nombreuses familles aux revenus limités - même si elles ne paient pas forcément beaucoup d'impôts -, le fait de pouvoir déduire du revenu imposable le coût des aides familiales serait un progrès appréciable.
De même, il serait utile du point de vue social de permettre la déduction des coûts des aides à domicile en faveur des retraités et des personnes handicapées qui n'ont pas beaucoup de moyens.
Je vais néanmoins retirer l'amendement, tout en exprimant le souhait que la question de la déductibilité des charges, en particulier des charges liées à l'emploi des aides familiales, soit étudiée d'un peu plus près.
M. le président. L'amendement n° I-39 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-207, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 85 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 85 - Les déductions ou réductions du revenu imposable, autres que celles mentionnées aux 1° et 3° de l'article 83 ne peuvent avoir pour effet de réduire le revenu auquel s'appliquent les dispositions de l'article 193 de plus de 40 % par rapport à son montant hors application de ces déductions ou réductions ».
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Si chaque dispositif fiscal dérogatoire introduit par le législateur peut se justifier, il est cependant choquant que des contribuables fortunés puissent, par le cumul de ces avantages, réduire considérablement leur contribution à l'impôt sur le revenu.
L'amendement présenté prévoit donc un plafonnement global de la réduction du revenu imposable procurée par l'ensemble de ces dispositifs.
La réduction maximale pourrait ainsi être de 40 %, en dehors de l'application de l'abattement de 10 % pour frais professionnels et de la déduction des cotisations sociales. Les divers plafonds applicables à chaque réduction ou déduction resteraient, bien sûr, applicables.
L'intérêt d'une telle mesure réside dans sa capacité à limiter fortement les effets d'aubaine liés à la multiplicité des « niches fiscales » existantes. Il reviendrait donc à chaque contribuable d'arbitrer entre différents dispositifs d'incitation fiscale, en fonction de ses propres objectifs d'allocation de ses revenus.
Cette solution permettrait de parvenir rapidement à une réduction sensible du coût des dispositifs fiscaux dérogatoires - 50 milliards d'euros, selon le Conseil des impôts, qui additionne les dispositifs destinés aux ménages et aux entreprises -, alors qu'une initiative de la majorité ou du Gouvernement, qui préfèrent accroître encore les avantages liés à la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, se fait toujours attendre en la matière.
Une des premières décisions du gouvernement de Lionel Jospin en 1997 avait été de réduire l'importance des niches fiscales pour leur rendre leur finalité originelle, à savoir favoriser la création d'emplois. Pour cette raison, l'avantage fiscal lié à la création d'emplois à domicile avait été ramené à un niveau qui, tout en favorisant l'emploi, n'en faisait pas un cadeau fiscal pur et simple. C'est dans le même esprit qu'avait été réformée la loi Pons.
Le plafonnement que nous proposons a pour but d'éviter les déductions excessives qui profitent toujours aux mêmes. Pour ce faire, il ne nous semble pas déraisonnable de plafonner l'ensemble des réductions d'impôt ou des déductions du revenu imposable à 40 % de ce revenu, ou à défaut à 20 %, comme nous le proposerons dans l'amendement de repli n° I-208. Il n'est ni absurde ni incongru de faire en sorte que de gros contribuables n'échappent plus totalement à l'impôt par le jeu du cumul des niches fiscales.
Ce n'est pas en prétendant défendre les contribuables modestes par la multiplication des niches fiscales que le Gouvernement convaincra nos compatriotes de son souci de justice.
Le ministre des finances - encore en exercice - nous a dit hier son souci de simplifier notre système fiscal en supprimant toutes les niches sans intérêt économique ou social, mais, pour le moment, on ne voit rien venir dans ce sens et certaines de ces niches vont même être consolidées !
Il y aura bien une perte de recettes par la remise en cause de l'impôt de solidarité sur la fortune, mais il n'y aura ni suppression ni limitation de l'effet anti-redistributif des niches fiscales pour les contribuables soumis à l'impôt sur le revenu.
Mme Nicole Bricq. C'est très juste !
M. le président. L'amendement n° I-208, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 85 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 85 - Les déductions ou réductions du revenu imposable, autres que celles mentionnées aux 1° et 3° de l'article 83 ne peuvent avoir pour effet de réduire le revenu auquel s'appliquent les dispositions de l'article 193 de plus de 20 % par rapport à son montant hors application de ces déductions ou réductions ».
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Je considère que cet amendement de repli a été défendu.
M. le président. L'amendement n° I-209, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est inséré avant le dernier alinéa de l'article 193 du code général des impôts un alinéa ainsi rédigé :
« Les réductions d'impôt, autres que celle résultant du quotient familial mentionné à l'article 194, et les crédits d'impôt, ne peuvent avoir pour effet de réduire l'impôt sur le revenu d'un montant total de plus de 7 500 euros, ni de porter au-delà de ce montant la somme de l'impôt réduit et de l'impôt restitué. ».
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Dans le même esprit que les précédents, cet amendement prévoit que la réduction maximale de l'impôt obtenue grâce à la combinaison de plusieurs dispositifs sera limitée à 7 500 euros, soit, par exemple, le maximum de l'avantage dont pourrait bénéficier un contribuable au titre de la réduction d'impôt pour un emploi à domicile si la hausse du plafond proposée par le Gouvernement était acceptée.
Seraient exclus du calcul de ce total les effets de l'application du quotient familial.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces amendements nous renvoient à des contradictions bien réelles de notre système fiscal.
De très nombreuses « encoches » - déductions, dégrèvements, régimes sur mesure, faveurs corporatives - se sont empilées au fil du temps et affectent non seulement l'impôt sur le revenu, mais l'ensemble de nos impôts. Tout cela nuit à la bonne lisibilité de l'impôt et à son produit.
Si nous avions complètement les mains libres, monsieur le secrétaire d'Etat, nous procéderions vraisemblablement à une baisse importante du barème d'ensemble de l'impôt et nous supprimerions tous ces régimes spécifiques. C'est, en tous cas, ce qu'en théorie nous devrions faire.
Or ceux qui ont tenté, un jour ou l'autre, de s'attaquer aux niches fiscales existantes ont constaté qu'à l'instar des anfractuosités rocheuses où s'abritent des crabes tout au long de nos côtes - notamment dans votre beau département, monsieur le secrétaire d'Etat -, il était dangereux d'y mettre la main.
C'est une question de cohérence, sans doute de courage politique, mais aussi de continuité dans l'effort. Aussi, avant de donner l'avis de la commission sur ces trois amendements, je me permettrai de redire au Gouvernement que la commission des finances est très attachée à ce que soit envisagée une action volontariste de réduction méthodique, organisée et persévérante des régimes préférentiels et des niches fiscales.
La commission déplore d'ailleurs que, de temps en temps - aujourd'hui encore -, il en soit créé ou creusé de nouvelles, ce qui ne lui semble pas être une bonne chose sur le plan de la politique fiscale générale.
Cela étant, et tout en souhaitant, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez nous dire quelles sont les intentions du Gouvernement sur ce sujet au-delà de l'année 2005, j'en viens aux amendements proprement dits.
Sur l'amendement n° I-207, la commission souhaite entendre le Gouvernement concernant précisément cette question d'ordre général de la réduction des niches fiscales.
Par ailleurs, la commission est défavorable à l'amendement n° I-208 parce qu'il lui semble que la toise proposée est un peu trop basse.
Elle est également défavorable à l'amendement n° I-209 parce qu'il en résulterait un accroissement de la pression contributive moyenne, une augmentation de la progressivité de l'impôt et une concentration encore plus forte de l'impôt pour certaines tranches de revenus.
Telles sont, mes chers collègues les quelques considérations que je voulais vous livrer. En l'état actuel des choses, et en attendant d'entendre avec intérêt les propos de M. le secrétaire d'Etat, il ne me semble pas que ces amendements puissent être adoptés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le débat sur les niches fiscales est récurrent. A leur sujet, M. le rapporteur général a fait allusion non pas aux dogues, comme le veut l'habitude, mais aux crabes, sans doute pour rendre hommage à la vocation maritime de mon département. (Sourires.)
Avec Nicolas Sarkozy, nous avons toujours indiqué que nous souhaitions sinon réduire les niches fiscales, du moins les recenser afin d'étudier s'il était souhaitable de les maintenir dans leur totalité.
Vous avez d'ailleurs pu observer qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi pour le soutien à la consommation et à l'investissement, voté cet été par votre assemblée, nous avons limité dans le temps les niches fiscales de type dérogatoire. Je considère d'ailleurs qu'il est toujours excellent de limiter, lorsque les circonstances s'y prêtent, la durée des mesures législatives, ainsi que l'a d'ailleurs toujours prôné la commission des lois de l'Assemblée nationale, où j'ai siégé pendant dix ans avec certains de vos collègues présents dans cet hémicycle.
Pour autant, toutes les mesures fiscales d'allégement ne sont pas des niches fiscales. On ne saurait parler, par exemple lorsque l'on crée ou développe la prime pour l'emploi, d'avantages catégoriels exorbitants par rapport au droit commun ! Certains avantages ont une légitimité sociale ou économique, d'autres profitent fréquemment à des personnes âgées de condition modeste : tel est le cas du quotient familial accordé aux anciens combattants âgés de plus de soixante-quinze ans, de l'exonération d'impôts pour supplément de retraite attribuée aux personnes ayant élevé une famille nombreuse, ou encore de l'abattement dont bénéficient les personnes de condition modeste âgées de plus de soixante-cinq ans.
Il faut donc être réaliste et donc maintenir tout ce qui est utile.
Il va de soi, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est défavorable à vos trois amendements, mais j'ajoute, s'agissant de l'amendement n° I-209, que votre proposition remettrait en cause une mesure à laquelle le Gouvernement est très attaché : la réduction d'impôt pour les emplois familiaux. Si nous appliquons cette mesure, ce n'est pas pour diminuer l'impôt de celles et ceux qui ont recours à cette formule, mais parce qu'elle permet de créer de nombreux emplois nouveaux.
Ainsi, j'observe, dans la collectivité dont je suis l'élu, que de très nombreuses personnes effectuant une heure de jardinage chez l'un, une heure de travail chez l'autre, ont été sorties du chômage ou de l'économie « grise » ou « noire » grâce aux chèques-emploi service, qui permettent désormais de les déclarer aux organismes sociaux ou au fisc.
Pour toutes ces raisons, monsieur Massion, le Gouvernement, répondant ainsi à la sollicitation de M. le rapporteur général, se déclare défavorable à vos trois amendements.
M. le président. La parole est à M. Marc Massion, pour explication de vote sur l'amendement n° I-207.
M. Marc Massion. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les interventions de M. le rapporteur général et de monsieur le secrétaire d'Etat.
Or, si M. le secrétaire d'Etat nous a rappelé, à juste raison, un certain nombre des mesures existantes, il ne s'est pas prononcé sur l'accumulation des avantages fiscaux que j'ai dénoncée en défendant mes amendements. Il ne s'agit pas de détailler les mesures en vigueur, mais de constater cette accumulation. Le Gouvernement l'accepte-t-il, ou est-il d'accord pour la limiter ?
C'était tout le sens de mon dernier amendement, sur le fond duquel je n'ai pas obtenu de réponse.
M. le président. L'amendement n° I-286 rectifié, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux, MM. Darniche et Retailleau, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Le 2 de l'article 150-0 D du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les gains nets déterminés dans les conditions mentionnées au 1 sont réduits d'un abattement de 10 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième.
« Un décret fixe les obligations déclaratives incombant aux intermédiaires »
II. La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs mentionnée aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-204, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans les premier, deuxième, troisième, cinquième et dernier alinéas de l'article 199 quater C du code général des impôts, les mots : « réduction d'impôt » sont remplacés par les mots : « crédit d'impôt ».
II. Cette disposition est applicable à compter de l'imposition des revenus perçus en 2004.
III. Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
IV. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Cet amendement vise à transformer en crédit d'impôt l'actuelle réduction d'impôt accordée au titre des cotisations syndicales.
Il s'agit par là d'apporter une aide à la syndicalisation, le dialogue social ne reposant pas, en France, sur des bases suffisamment larges s'agissant des salariés.
A cette fin, nous proposons de transformer en crédit d'impôt les aides existantes mises en place par un gouvernement de gauche et consistant en une réduction d'impôt au titre des cotisations syndicales, afin que les salariés modestes non imposables puissent également profiter de cet avantage fiscal et, par là même, participer plus activement à la vie syndicale et sociale.
Vu le niveau du taux de syndicalisation des salariés français, qui est très bas comparé à celui des autres pays de l'Union européenne, une telle mesure peut être qualifiée de mesure d'intérêt général puisqu'il s'agit, en fait, en favorisant le syndicalisme, de promouvoir la démocratie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est un peu surprise : notre excellent collègue Marc Massion, nous demandait, à l'occasion de l'examen des précédents amendements, de contingenter les avantages fiscaux divers et variés, et voilà qu'il nous propose d'agrandir une niche existante !
Mme Marie-Thérèse Hermange. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par conséquent, en vertu du principe de cohérence, la commission ne peut qu'y être défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° I-212, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article 199 quater F du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « d'une réduction de leur impôt sur le revenu » sont remplacés par les mots : « d'un crédit d'impôt ».
2° Dans le deuxième alinéa et dans l'avant-dernier alinéa, les mots : « de la réduction d'impôt » sont remplacés par les mots : « du crédit d'impôt ».
II. Cette disposition est applicable à compter de l'imposition des revenus perçus en 2004.
III. Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
IV. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. M. le rapporteur général sait parfaitement que les amendements nos I-209 et I-204 ne concernaient pas le même public !
L'amendement n° I-212 vise à transformer en crédit d'impôt l'actuelle réduction d'impôt accordée au titre des frais de scolarité des enfants poursuivant des études secondaires ou supérieures.
Le nombre des familles en difficulté augmente sans cesse. Les études sont de plus en plus chères et les frais d'inscription dans les universités, les frais de transport et de logement s'alourdissent.
Dès lors, la simple réduction d'impôt paraît socialement assez injuste : scolariser ses enfants dans l'enseignement supérieur coûte moins cher si l'on bénéficie d'une réduction d'impôt que si l'on ne peut, malheureusement, rien déduire.
Certes, il existe des aides comme les bourses, mais, outre qu'elles sont difficiles à obtenir, leur montant est faible, il augmente peu, et les critères de ressources sont très restrictifs puisqu'il faut avoir atteint un certain degré de pauvreté pour y prétendre.
Vous allez proposer d'indexer l'ISF sur le coût de la vie, mais les bourses, elles, ne sont pas indexées, ou le sont très faiblement. De plus en plus de familles ne peuvent pas continuer à payer les études de leurs enfants, et ces derniers se voient contraints de les interrompre.
Nous tenons à insister la nécessité de transformer certaines réductions d'impôt en crédit d'impôt pour que tous les Français soient concernés non seulement par les mesures d'incitation qui peuvent être prises, mais aussi par celles qui existent déjà.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous touchons là un sujet important qui appelle certainement des améliorations, mais je ne pense pas que nous puissions, dans l'immédiat, donner suite à cette demande car elle pourrait être assez coûteuse : elle a été évaluée à plus de 160 millions d'euros.
En outre, il serait sans doute bon d'engager sur la prise en charge du coût de l'éducation une réflexion plus globale, qui pourrait utilement prendre place dans une approche renouvelée - que, pour ma part, j'appelle de mes voeux - de l'enseignement supérieur.
L'enseignement supérieur, tant en ce qui concerne ses filières, son organisation, son autonomie que l'accompagnement social des enfants, doit sans aucun doute faire l'objet au Parlement d'une réflexion globale, et nous espérons que le Gouvernement nous y conviera.
Dans l'intervalle, la commission ne peut souscrire à une démarche aussi ponctuelle. Elle a donc émis un avis défavorable, tout en marquant par avance l'intérêt qu'elle porte aux propos que va tenir M. le secrétaire d'Etat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement a écouté avec attention l'analyse de M. le rapporteur général.
La mesure que vous proposez, monsieur Massion, est extrêmement coûteuse. Par ailleurs, nous sommes au début d'une réflexion sur notre système éducatif : le rapport Thélot vient d'être publié ; le Premier ministre a annoncé que le ministre de l'éducation nationale, qui s'est déjà exprimé sur ce sujet, allait présenter un certain nombre de réformes très importantes pour notre système de scolarité, et je crois qu'une réflexion globale s'impose sur l'ensemble !
J'ajoute que, lors de la dernière rentrée scolaire, la Gouvernement a encore versé l'allocation de rentrée scolaire sous condition de ressources, dont nous sommes heureux et fiers mais qui, chaque année, pèse plus lourdement sur les finances de la collectivité.
En conséquence, la mesure que vous proposez ne nous paraît pas souhaitable dans l'immédiat.
M. le président. La parole est à M. Marc Massion, pour explication de vote.
M. Marc Massion. Je voudrais attirer de nouveau l'attention du Gouvernement sur les difficultés que rencontrent certains étudiants.
Nous avons ainsi mis en place dans ma commune, suivis en cela par les élus de plusieurs agglomérations rouennaises -Oissel, notamment, dont mon ami Thierry Foucaud est le maire - un « contrat municipal étudiant ». De la sorte, ce sont maintenant les communes qui prennent en charge une partie du coût des études des jeunes, les familles n'étant plus en mesure de l'assumer.
Ce que je dis est grave et je peux vous assurer que, si ma commune n'avait pas consenti cet effort, la moitié des 200 étudiants qui en bénéficient chaque année auraient abandonné leurs études.
En contrepartie de leur apport à la vie de la commune, nous leur versons une aide de 10 000 francs par an. Pour un étudiant qui étudie hors de sa région - un étudiant qui, par exemple, est domicilié à Rouen et qui étudie à Paris -, cette aide peut aller jusqu'à 36 000 francs par an, ce qui est important.
L'ensemble de ces aides représente d'importantes sommes pour une commune ! Nous avons choisi parmi les priorités et il serait souhaitable que le Gouvernement fasse, lui aussi, de tels choix en faveur de la formation en général et de l'aide aux étudiants en particulier.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-210, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa du 1°, les mots : « une réduction d'impôt » sont remplacés par les mots : « un crédit d'impôt ».
2° Dans le deuxième alinéa du 1°, les mots : « de la réduction » sont remplacés par les mots : « du crédit d'impôt ».
3° Le troisième alinéa du 1° est ainsi rédigé :
« Le crédit d'impôt est égal à 50 % du montant des dépenses effectivement supportées, retenues dans la limite de 2 200 € pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2003. Ce plafond est porté à 4 400 € pour les contribuables mentionnés au 3° de l'article L. 3414 du code de la sécurité sociale, ainsi que pour les contribuables ayant à leur charge une personne, vivant sous leur toit, mentionnée au 3° dudit article, ou un enfant donnant droit au complément d'allocation d'éducation spéciale prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 5411 du code de la sécurité sociale ».
4° Dans le quatrième alinéa du 1°, les mots : « de la réduction » sont remplacés par les mots : « du crédit ».
5° Dans l'avant-dernier alinéa du 1° et dans le 2°, les mots : « la réduction » sont remplacés par les mots « le crédit ».
II. Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Il s'agit de transformer une niche fiscale destinée à quelques familles très aisées en réel outil d'aide fiscale aux ménages, et ce au bénéfice de l'emploi en France.
Comme le soulignait le Conseil des impôts dans son rapport de 2003 consacré à la fiscalité dérogatoire, la réduction d'impôt prévue pour favoriser l'emploi d'une personne à domicile profite actuellement « essentiellement aux foyers fiscaux dont les tranches de revenus sont les plus élevées, avec l'impossibilité, pour les foyers non imposables, de bénéficier de cet avantage ».
Le Conseil démontrait notamment que, sur plus de 2 millions de déclarants, seul 1,3 million de foyers a pu bénéficier d'une réduction fiscale.
Le Conseil étudiait en conséquence la mise en place d'un crédit d'impôt dans les proportions proposées par notre amendement, c'est-à-dire à coût constant pour l'Etat, toutes choses restant égales par ailleurs.
Il soulignait de plus qu'« une telle réforme pourrait accroître la demande de services de proximité des bénéficiaires potentiels ».
Ainsi, en terme d'emplois créés, notre proposition serait nettement plus justifiée que les hausses de plafond proposées en 2003 et 2004 par le Gouvernement.
Parallèlement, la critique du ministre de l'économie et des finances annonçant, le 22 septembre 2004, lors de sa conférence de presse de présentation du budget, que le passage d'une réduction d'impôt à un crédit d'impôt, pour intéressante qu'elle soit, représenterait un coût prohibitif supérieur à 700 millions d'euros, est clairement invalidée par cette proposition.
M. le président. L'amendement n° I-211, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après les mots : « limite de », la fin de la première phrase du troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi rédigée : « 6 900 € pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2004. ».
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Alors que la hausse du plafond des dépenses prises en compte au titre de la réduction d'impôt pour l'emploi d'une aide à domicile en 2003 ne profitait au maximum, selon l'aveu même du rapporteur général, qu'à 70 000 familles très aisées, le Gouvernement et la majorité sont incapables de fournir une quelconque preuve de son effet positif sur l'emploi.
La revalorisation de ce plafond constitue pourtant une mesure systématiquement mise en oeuvre par la majorité actuelle, dés lors qu'elle en a l'occasion. Le plafond, initialement fixé à 3 811 euros, a ainsi été relevé à 3 964 euros par la loi de finances de 1994, puis à 13 720 euros dans le cadre du budget de 1995. Alors que les députés socialistes avaient réduit ce plafond de moitié dans le budget de 1998, la majorité propose aujourd'hui de l'augmenter de nouveau pour le porter à 15 000 euros en 2005.
En trois ans, le plafond aura ainsi été relevé de 118 %, atteignant 7 400 euros pour les dépenses engagées en 2002, puis 10 000 euros pour les dépenses engagées en 2003, et enfin 15 000 euros aujourd'hui.
La majorité ne peut éternellement se cacher derrière le prétexte que la mesure a été mise en place par un gouvernement socialiste, et il se doit d'admettre que les hausses massives du plafond des dépenses prises en compte font totalement changer cette mesure de cible et de nature.
Dès lors, en conformité d'ailleurs avec vos multiples engagements de remettre en cause les niches fiscales qui n'auraient pas fait la preuve indéniable de leur utilité, il vous est proposé de revenir au plafond préexistant en 2002, soit 6 900 euros.
L'adoption de cet amendement représenterait une économie importante pour l'Etat puisque le coût prévu des hausses du plafond représente à terme un montant supérieur à 150 millions d'euros par an. Cette économie permettrait, à équilibre budgétaire quasiment inchangé par rapport au cadre fixé par le Gouvernement, de revenir sur la décision de supprimer 4 800 postes au sein de l'éducation nationale, ces derniers pouvant être judicieusement redéployés vers les zones d'éducation prioritaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il est aberrant de vouloir consentir des avantages fiscaux à des foyers qui ne sont pas assujettis à l'impôt ; la réduction d'impôt, qui est une incitation fiscale, est un procédé qui n'est pertinent que pour ceux qui payent des impôts !
M. Michel Charasse. Et la prime pour l'emploi ?
M. Philippe Marini, rapporteur général La prime pour l'emploi est un processus complexe, dont la paternité est partagée. Il serait d'ailleurs certainement opportun de se demander avec M. le secrétaire d'Etat si, avec cette prime, l'économie française en a bien pour son argent, c'est-à-dire 2,3 milliards d'euros.
La commission est résolument défavorable aux amendements qui viennent d'être présentés, car ces derniers accroîtraient de manière excessive la progressivité et la concentration de l'impôt sur le revenu, qui ont déjà atteint un niveau bien trop important.
S'agissant de l'incitation à employer des aides à domicile, je répète à mes collègues de l'opposition qu'ils font vraiment fausse route en ciblant leurs attaques sur cette mesure. En effet, ils ne voient toujours que les « riches », selon leurs propres conceptions, mais ils ne voient pas les personnes modestes qui, grâce à cette mesure, accèdent à un emploi ou retrouvent un circuit « officiel ». Leur vision des choses ne me semble pas très sociale ; elle est en tout cas peu attentive à la situation de ceux qui peuvent être embauchés grâce à de telles mesures.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Lors de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de loi de finances, le Gouvernement a accepté deux amendements importants.
Le premier vise à donner une dimension familiale à l'emploi d'un salarié à domicile, puisque nous avons accepté de baisser le plafond de 15 000 euros à 12 000 euros, avec la possibilité d'ajouter 1 500 euros à ce montant par enfant à charge.
Le deuxième amendement voté à l'Assemblée nationale, sur une proposition du groupe de l'UDF - j'en prends à témoin M. Jégou - reprise ensuite et appuyée par le groupe de l'UMP, concerne une mesure très intéressante que j'aurais l'occasion de vous présenter : le crédit d'impôt pour garde d'enfants. Nous avons, grâce au travail des députés, considérablement amélioré la mesure par rapport à la première version présentée dans le projet de loi de finances.
C'est la raison pour laquelle, étant satisfait de ce dispositif, je suis opposé aux amendements qui viennent d'être présentés par M. Massion.
M. le président. La parole est à M. Marc Massion, pour explication de vote sur l'amendement n° I-210.
M. Marc Massion. Nous aimerions bien connaître les effets exacts de ces mesures car, à chaque fois que l'on aborde ce problème, le Gouvernement et la majorité nous rétorquent que nous ignorons les effets positifs de ces mesures sur l'emploi.
Combien d'emplois - et surtout combien d'emplois a temps complet - ont-ils été créés ? Cela, le Gouvernement ne nous l'a jamais dit !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Je voudrais rappeler que la prise en charge à domicile d'un enfant, d'une personne âgée ou d'une personne handicapée coûte au minimum six fois moins cher au contribuable qu'une prise en charge dans une structure collective.
C'est d'ailleurs pour cette raison que, confronté à la problématique de la garde des enfants dans la capitale, Jean Tiberi, maire de Paris à l'époque, avait instauré une mesure permettant d'octroyer de 700 francs à 2 500 francs par mois à toute famille faisant garder son enfant à domicile ou par une assistante maternelle. Chaque année, 4 800 familles ont bénéficié de ce dispositif.
Mme Nicole Bricq. Forcément, il ne construisait pas de places de crèches !
Mme Marie-Thérèse Hermange. Ce chiffre est en effet à mettre en parallèle avec les 6 000 places de crèche que la municipalité actuelle propose de créer au cours de la présente mandature ; de tels investissements sont en effet lourds pour la collectivité !
Je profite donc de cette intervention pour dire que je regrette que cette disposition ait été récemment supprimée.
M. Philippe Goujon. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vais tenter de répondre à la curiosité de notre collègue Marc Massion s'agissant des conséquences de cette mesure sur l'emploi.
Le secteur des « services domestiques », ainsi intitulé par les statisticiens, a connu un fort développement ces dernières années. D'après la DARES, la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, le nombre d'heures travaillées dans le secteur des emplois familiaux est passé d'environ 300 millions en 1994 à plus de 500 millions en 1997, et à plus de 600 millions en 2003.
M. François Marc. Sans avantages fiscaux ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Grâce à des avantages fiscaux qui ont été modulés et qui ont déjà été accrus en 2002 et 2003. Et cette évolution va manifestement se poursuivre : grâce aux mesures que nous vous proposons d'adopter, il y aura beaucoup de créations d'emplois.
M. Michel Charasse. Combien d'emplois « au noir » y avait-il avant ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-206, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. A. Dans le premier alinéa de l'article 199 quindecies du code général des impôts, les mots : « une réduction d'impôt » sont remplacés par les mots : « un crédit d'impôt ».
B. A la fin de la première phrase du dernier alinéa du même texte, les mots : « cette réduction d'impôt » sont remplacés par les mots : « ce crédit d'impôt ».
II. Cette disposition est applicable aux sommes engagées à compter du 1er janvier 2004.
III. Ces dispositions ne sont applicables qu'aux sommes venant en réduction de l'impôt dû.
IV. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-205, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans le premier alinéa de l'article 199 quindecies du code général des impôts, le taux : « 25 % » est remplacé par le taux : « 50 % » et le montant : « 3 000 euros » par le montant : « 10 000 euros ».
II. Cette disposition est applicable aux sommes engagées à compter du 1er janvier 2004.
III. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Alors qu'il propose d'augmenter une nouvelle fois de 50 % le plafond des dépenses prises en compte au titre de la réduction d'impôt pour l'emploi à domicile, le Gouvernement a fait voter dans la loi de finances de 2004 une réforme de la réduction d'impôt accordée aux personnes âgées hébergées en unités de soin de longue durée et dans les maisons de retraite médicalisées qui s'avère largement défavorable.
En effet, prendre seulement en compte les frais liés à la dépendance à l'exclusion de ceux qui sont liés à l'hébergement conduit à fragiliser la situation financière de nombreuses personnes âgées. Certaines ne peuvent plus en effet assumer des dépenses qui, contrairement à leurs ressources, augmentent régulièrement.
Il convient donc de faire un geste dans leur direction. L'amendement n° I-205 propose ainsi une revalorisation du plafond et du taux de prise en compte des dépenses, ce plafond restant par ailleurs largement inférieur à celui qui est proposé pour la réduction d'impôt tendant à favoriser l'emploi à domicile.
L'actuel mécanisme ne prend pas en compte la situation des personnes âgées non imposables, qui ne bénéficient à ce titre d'aucune aide de nature fiscale. Aussi un crédit d'impôt présenterait-il un avantage certain pour toutes les personnes âgées qui vivent leurs derniers jours en maison de retraite, qu'elles soient imposables ou non.
Cette mesure permettrait, de plus, de ne pas pénaliser les familles contraintes de supporter des frais d'hébergement de leurs parents. C'est ce que nous vous proposons avec l'amendement n° I-206.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces amendements appellent, substantiellement, les mêmes remarques que les deux précédents.
En outre, si nous connaissons tous des problèmes douloureux liés à la difficulté de prendre en charge les dépenses d'hébergement de personnes très âgées, c'est le plus souvent au sein des classes moyennes qu'ils sont les plus aigus et, plus particulièrement, dans le cas des personnes qui ne bénéficient pas des aides sociales et qui se situent juste au-dessus des plafonds de ressources qui donnent droit aux mesures d'assistance. Or je n'ai pas le sentiment que ces amendements soient ciblés comme il conviendrait de ce point de vue.
C'est pourquoi, sous réserve d'entendre l'avis du Gouvernement, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos I-206 et I-205.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement partage l'avis défavorable de la commission sur ces deux amendements.
M. le président. L'amendement n° I-231, présenté par MM. Repentin, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 91 de la loi n° 2003590 du 2 juillet 2003 « urbanisme et habitat » est abrogé.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Déposé sur l'initiative de notre collègue Thierry Repentin, cet amendement vise à supprimer le dispositif de soutien en faveur de l'investissement locatif dit « amortissement Robien ».
S'il était un véritable dispositif de soutien à l'investissement locatif destiné à répondre aux besoins en logement de la population, ce régime d'amortissement n'entraînerait pas notre critique. Mais il est avant tout un produit fiscal et financier qui est proposé aux particuliers non pas pour aider à résoudre la crise du logement, mais pour réduire leurs charges fiscales. Et l'on peut même dire que ce système alimente la crise du logement et la flambée des loyers.
Accordé sans contreparties sociales, ni sur le plan des ressources des locataires ni sur celui du montant des loyers, qui sont voisins de ceux qui sont pratiqués dans le secteur libre, ce dispositif permet de diminuer les impôts à la charge des investisseurs et de loger des ménages aux revenus très confortables, alors que son coût budgétaire est proche de celui de certains prêts attribués aux bailleurs sociaux. Ce n'est pas acceptable en termes de justice sociale !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est au contraire très attachée au dispositif « Robien », qui, par rapport au dispositif « Besson » adopté par l'ancienne majorité, produit probablement 30 000 logements neufs de plus chaque année. Il a donc un effet favorable sur la conjoncture et sur l'emploi dans les professions du bâtiment. En outre, c'est un régime efficace, en particulier dans nos villes moyennes, qui ont besoin de réalisations immobilières hors du secteur social, afin de contribuer à la diversité sociale de leurs quartiers.
Par conséquent, il n'est pas question, de notre point de vue, de supprimer un mécanisme aussi efficace.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le point de vue du Gouvernement est le même que celui de la commission.
En réalité, monsieur Massion, cet amendement reviendrait finalement à nous demander de ne pas relancer la construction de logements neufs à un moment où - vous le savez bien car vous êtes un élu de terrain - les besoins en logements locatifs sont très importants.
Le marché immobilier est aujourd'hui au bord de l'asphyxie dans les grandes villes, dans certaines zones frontalières, touristiques, ou encore sur le littoral.
J'ajoute que les mesures du dispositif « Robien » fonctionnent car - vous avez dû le lire dans la presse cette semaine - l'activité des entreprises du secteur du logement et du bâtiment a atteint, cette année, des chiffres historiques.
Il n'est pas question pour nous de supprimer un dispositif qui fonctionne. D'ailleurs, en matière de logement, nous irons plus loin puisque nous vous proposerons avec Marc-Philippe Daubresse une mesure visant à améliorer le système du prêt à taux zéro, afin de l'étendre aux logements anciens, d'élargir sa base et de faire en sorte qu'un grand nombre de nos concitoyens puissent accéder pour la première fois à un logement en propriété.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Jégou. Il n'est aucunement dans mon intention de polémiquer, mais je dois dire que je ne comprends pas qu'un tel amendement puisse être déposé. Surtout par votre groupe, monsieur Massion, qui a toujours souhaité défendre l'emploi !
Sans répéter les excellents propos qui ont été tenus par M. le secrétaire d'Etat et M. le rapporteur général, je constate comme eux la tension, liée à une demande très forte, qui pèse sur le secteur du logement. Je le vois bien dans la région d'Ile-de-France, dont je suis un élu, mais je pense que la situation est à peu près la même dans votre circonscription, monsieur Massion.
Le dispositif « Robien » a, certes - il ne faut pas s'en cacher - introduit une mesure d'exonération fiscale en faveur de ceux qui décident d'investir dans l'immobilier, mais il a aussi permis de loger à un prix préférentiel des familles dont les revenus se situent au-dessus du seuil leur donnant accès à un logement social, sans pour autant dépasser le plafond fixé par le dispositif.
J'ajoute, enfin, qu'il est d'usage de dire que chaque logement construit génère deux emplois. Et les chiffres que nous atteignons cette année dans ce domaine nous permettent de dire que, aujourd'hui, dans le bâtiment, tout va !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-231.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3
Les montants figurant dans l'article 200 sexies du code général des impôts sont remplacés par les montants suivants :
|
Anciens montants |
Nouveaux montants |
Au A du I |
12 176 |
12 383 |
|
24 351 |
24 765 |
|
3 364 |
3 421 |
Au 1° du B du I, au 3° du A du II et au B du II |
3 372 |
3 507 |
Au 1° du A du II |
11 239 |
11 689 |
Aux 1° et 2° du B du I, aux 1° et 3° (a et b) du A du II et au C du II |
15 735 |
16 364 |
Au 3° (b et c) du A du II |
22 478 |
23 377 |
Aux 1° et 2° du B du I, aux 3° (c) du A du II et au C du II |
23 968 |
24 927 |
Au 3° (a et b) du A du II |
80 |
81 |
Au B du II |
33 |
34 |
66 |
68 |
|
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.
M. Bernard Vera. Cet article 3 appelle plusieurs observations.
Il serait, à vous entendre, monsieur le secrétaire d'Etat, la preuve de votre politique de justice sociale ; en tout cas, c'est ainsi que vous le considérez.
Les apparences pourraient vous donner raison : la prime pour l'emploi n'est-elle pas augmentée, en effet, de 4 % ? Malheureusement, la réalité est tout autre : en euros constants, l'augmentation n'est que de 2,3 %, pour peu que l'on retienne un niveau d'inflation calculé sur la base, pourtant contestable, de l'indice des prix.
Surtout, il faut traduire concrètement ce que représente cette revalorisation face à toutes les augmentations qui frappent nos concitoyens : pour chacun des huit millions et demi de ménages bénéficiaires, elle se situera, selon les tranches, entre 1 et 3,5 euros par mois !
Les chiffres sont cruels. Ils le sont d'autant plus que nous pouvons les rapporter à toutes les hausses de tarifs ou de cotisations sociales décidées dans le même temps : croyez-vous sincèrement que cette maigre revalorisation comblera ne serait-ce que les hausses de l'essence et du fioul ? Pour les ménages qui se chauffent au fioul domestique, l'augmentation de ce dernier atteint 30 % en un an, soit, en valeur, 250 à 300 euros, contre 15 à 45 euros d'augmentation de la prime pour l'emploi... La comparaison est édifiante !
Quant à la hausse moyenne du prix de l'essence - en supposant que l'on ne fasse qu'un plein par mois -, elle se traduit par une dépense supplémentaire de 8 à 12 euros, à comparer, là encore, avec vos 1 à 3,5 euros de plus par mois !
Encore ne s'agit-il là que de l'appréciation que l'on peut porter sur les conséquences de la flambée des prix du pétrole sur le budget des ménages.
Mais allons plus loin, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues : comme nous l'avons vu, le barème de l'impôt sur le revenu ne connaît pas de modification sensible cette année, l'article 2 se contentant de procéder, cette fois, à une simple indexation.
C'est donc un montant supplémentaire de 2,5 milliards d'euros nets que l'Etat percevra au titre de l'impôt sur le revenu, dont 1,5 milliard sera ponctionné directement dans la poche des salariés.
De plus, avec la réforme de l'assurance maladie, les mêmes salariés verront leur contribution sociale généralisée s'accroître de 900 millions d'euros, tandis que l'application du forfait de 1 euro par visite médicale en ville conduira à ponctionner 700 millions de plus sur leurs revenus. Et je ne parle pas ici de l'augmentation prévisible, de 2 % à 10 % selon les organismes mutualistes, qui découlera de la même réforme.
Je ne parle pas non plus des effets de la hausse des impôts locaux, impôts qui sont bien souvent les seuls que les salariés « bénéficiant » de la prime pour l'emploi ont effectivement l'impression de payer.
Bien sûr, nous n'allons pas voter contre l'article 3. Mais nous tenions à dénoncer la faiblesse de la revalorisation proposée et la réalité de la diminution du pouvoir d'achat des plus modestes.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je souhaite revenir quelques instants sur la prime pour l'emploi.
Je rappelle que le coût de ce dispositif s'établit à 2,435 milliards d'euros pour 2004, contre 2,3 milliards d'euros en 2003.
Si l'on se souvient de l'origine de cette mesure, on peut se demander si elle est toujours bien conforme à ce que ses initiateurs souhaitaient.
Que devait être la prime pour l'emploi, sinon une incitation à travailler ? Elle était conçue et présentée ainsi, c'est-à-dire comme un différentiel suffisant entre le non-travail et le travail.
On considérait, à juste titre, que ceux qui se trouvent dans l'inactivité bénéficient - heureusement ! - de filets de sécurité, notamment de mesures sociales, de prestations d'assistance, de conditions tarifaires plus favorables ici ou là. Mais la différence entre le non-travail et le travail n'étant alors plus suffisante, il fallait apporter quelque chose de plus aux salariés modestes, les mettre dans une situation plus favorable par rapport à ceux qui sont dans l'inactivité et les encourager à progresser dans leur évolution professionnelle.
Naturellement, il ne faut pas oublier que, si les dispositifs sociaux, les mesures de protection et d'assistance, sont sans doute tout à fait nécessaires, ils peuvent avoir à la longue des effets pervers et encourager dans la non-activité des personnes qui n'ont pas vocation à rester toujours sur le bord du chemin et qu'il faudrait vraiment réinsérer dans la vie professionnelle.
Voilà quelle était l'utilité de la prime pour l'emploi.
Aujourd'hui, il peut être intéressant de se demander si c'est bien toujours la fonction remplie par un dispositif qui coûtera 2,4 milliards d'euros en 2005.
Nos collègues députés se sont montrés sensibles à cette question à plusieurs reprises et ils se sont interrogés sur le délai de mise en place de la prime par rapport au retour à l'emploi, se demandant si une prime qui est payée un an après le retour à l'emploi avait encore un caractère incitatif en la matière. En effet, un an après, les conditions objectives où l'on se trouvait à l'origine sont oubliées !
L'an dernier, le Gouvernement a entendu cet appel de bon sens et a mis en place un système optionnel pour que le versement de la prime pour l'emploi intervienne plus tôt, c'est-à-dire, compte tenu des différentes contraintes et de toute cette mécanique compliquée à gérer, environ six mois après le retour au travail.
Mais l'on peut se demander si le délai de six mois représente vraiment un grand progrès dans l'esprit de nos concitoyens, d'autant que, le régime étant optionnel, le taux de demande pour bénéficier plus tôt de la prime s'est révélé extrêmement faible, comme M. le secrétaire d'Etat l'a souligné hier.
Par conséquent, ce système de la prime pour l'emploi pose vraiment un problème aujourd'hui à la commission des finances, qui réfléchit au bon emploi des deniers publics.
A la vérité, les remarques que vient d'exprimer M. Vera peuvent nous renforcer dans notre sentiment, parce qu'il semble bien que, pour lui, la prime pour l'emploi représente simplement du pouvoir d'achat supplémentaire, autrement dit une distribution d'argent à des personnes de condition modeste. Or, si cette dernière n'a pas un effet incitatif au retour au travail, la mesure aura complètement manqué sa cible.
C'est pourquoi la majorité de la commission peut reprendre à son compte - sans en suivre ni les principes ni la philosophie, bien sûr - la question qui a été soulevée par notre collègue.
Aussi, nous souhaiterions beaucoup, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'une vraie réflexion puisse intervenir au cours de l'année 2005 non plus sur les modalités administratives, mais sur le fond même de ce dispositif.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Je souhaite compléter les propos de M. le rapporteur général.
Monsieur Vera, selon vous, le taux d'augmentation de la prime pour l'emploi est insuffisant. Chacun peut avoir son avis sur le sujet, mais je tiens à préciser que nous avons augmenté la prime de 4 % ; l'inflation étant de 1,7 %, c'est, en euros constants, une augmentation de 2,3 %, ce qui n'est pas négligeable. Cela étant, la vraie question est ailleurs : à quoi sert aujourd'hui la prime pour l'emploi.
En visitant de très nombreux centres des impôts - dont un récemment dans votre département de l'Essonne, monsieur Vera -, j'ai pu constater, après avoir discuté non pas avec les directeurs mais avec les employés qui sont au contact des contribuables et qui procèdent au versement de cette prime, que celle-ci était mal comprise. En effet, nombre de nos concitoyens qui perçoivent la prime pour l'emploi ne savent pas très bien de quoi il s'agit. Comme la prime pour l'emploi est versée au cours de la même période que l'allocation de rentrée scolaire, dont j'ai parlé tout à l'heure, les deux versements sont mal compris. Avec Nicolas Sarkozy, nous avons donc demandé qu'un courrier explicatif soit envoyé aux personnes concernées.
De plus, la procédure à suivre pour pouvoir bénéficier de la prime pour l'emploi est très compliquée. Lorsqu'une personne a réalisé divers travaux, lorsqu'elle a enchaîné plusieurs contrats à durée déterminée, elle doit remplir toute une paperasserie très compliquée et le contribuable doit ainsi faire plusieurs allers-retours à son centre des impôts.
Je l'ai déjà indiqué hier dans la discussion générale - et M. le rapporteur général l'a rappelé -, très peu de personnes ont demandé à bénéficier de cette prime, alors que nous pensions qu'il s'agissait d'une bonne mesure. En outre, j'ai noté, monsieur Vera, que, dans votre département, cela posait de nombreux problèmes aux agents des impôts, qui ont, de ce fait, un contact difficile avec les travailleurs sociaux. Bref, le dispositif ne fonctionne pas très bien.
Le Gouvernement a maintenu le principe de la prime pour l'emploi, qui avait été adopté par la majorité précédente à l'Assemblée nationale, mais, dans un intérêt social et pour veiller à bien utiliser l'argent public, nous devrons engager une réflexion sur la question. Les services de mon ministère vont réfléchir sur le sujet et, comme je l'ai demandé à la commission des finances de l'Assemblée nationale, je demande à M. le président de la commission des finances et à M. le rapporteur général de nous faire des propositions en la matière.
Soyons clairs : il s'agit non de remettre en cause ce dispositif social, mais de faire en sorte qu'il soit mieux compris par les assurés et que l'argent public soit mieux utilisé.
A cet égard, monsieur Vera, l'un de vos collègues m'a dit tout à l'heure en aparté qu'il s'était aperçu que la plupart des bénéficiaires de cette prime la versaient directement sur leur livret A. Elle n'est donc pas utilisée au quotidien pour la famille, pour les enfants, pour la vie sociale.
Par-delà les groupes politiques, engageons cette réflexion ensemble pour faire en sorte que la prime pour l'emploi réponde à la volonté de la représentation nationale.
M. le président. Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président. L'amendement n° I-213, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans le premier alinéa du 1° du A du II de l'article 200 sexies du code général des impôts, le taux : « 4,6 % » est remplacé par le taux : « 6,6 % » et dans le deuxième alinéa du 1° du A du II de ce même article, le taux : « 11,5 % » est remplacé par le taux : « 16,5 % ».
II. Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. La perte de recettes pour l'Etat résultant de l'application de cette disposition est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Par cet amendement, il s'agit justement de revenir sur les modalités d'application de la prime pour l'emploi, qui devait à l'origine être mise en oeuvre graduellement pour représenter en 2003 l'équivalent d'un treizième mois pour un salarié payé au SMIC.
Comme vous l'avez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement a choisi d'interrompre ce processus à compter de l'été 2002. En dépit d'ajustements opérés en faveur des personnes travaillant à temps partiel et de l'annonce de « coups de pouce » dans chaque projet de loi de finances, le Gouvernement a refusé une hausse sensible de la prime pour l'emploi.
Dans le projet de budget pour 2005, ce refus touche une nouvelle fois les ménages les plus modestes.
Monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur général, vous avez rappelé le coût de la mesure, ainsi que les revalorisations et les indexations qui ont été accordées cette année. La prime pour l'emploi a bien connu une hausse de 4 %, mais ce taux est encore inférieur aux 4,5 % annoncés en 2004.
Par ailleurs, eu égard au nombre de personnes concernées, qui est estimé à plus de 8,5 millions, et sans tenir compte de l'érosion monétaire, le bénéfice brut de la mesure serait de 2,25 euros par mois.
Avec l'adoption de l'amendement n° I-213, on mettrait en oeuvre la dernière phase de la prime pour l'emploi. Son coût serait de l'ordre de 1 milliard d'euros,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Rien que cela !
M. François Marc. ...soit l'équivalent de la ponction réalisée par le Gouvernement à travers l'élargissement de l'assiette de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, qui a été décidé dans le cadre du projet de loi portant réforme de l'assurance maladie.
Cette mesure s'adresserait, en priorité, à des foyers disposant de revenus modestes et dont la plupart ne sont pas imposables. Son effet de relance de la consommation, et donc de la croissance, serait ainsi important et immédiat. De plus, son effet en matière d'incitation au retour à l'activité est avéré.
A en croire les explications que M. le rapporteur général nous a données tout à l'heure, la prime pour l'emploi ne serait pas forcément une mesure incitative dès lors qu'il y a un décalage de six mois ou d'un an entre le versement de la prime et le retour à l'emploi. Mais j'observe que le même grief n'a pas été invoqué à propos des avantages octroyés à certaines catégories plus aisées, dont elles ne bénéficieront qu'un an ou un an et demi après, et je cherche à comprendre la logique de ce raisonnement : ce qui n'est pas considéré comme un obstacle pour les catégories aisées le serait pour les catégories les plus modestes !
Au-delà des modalités de mise en oeuvre de cette aide publique, je crois pouvoir dire que se pose en arrière-plan la question des destinataires de cette politique.
Nous avons le sentiment que le fait d'aider les plus modestes, et ainsi de favoriser la consommation, constitue une avancée et nous y sommes, pour notre part, très sensibles.
C'est pourquoi cet amendement répond à la logique sous-tendue par la création de la prime pour l'emploi et permet le bon aboutissement du dispositif tel qu'il a été conçu initialement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est défavorable à une mesure qui n'est pas compatible avec les exigences actuelles de nos finances publiques.
Cette mesure nous montre bien toute l'ambiguïté du dispositif : il faudrait surtout s'interroger, mes chers collègues, sur l'efficacité de cette prime en termes de création d'emplois. En effet, il ne s'agit pas d'arroser davantage de plus larges catégories de personnes de condition modeste ou moyenne, fussent-elles très estimables, mais de mettre en place une mesure efficace en termes de création d'emplois.
Il ne s'agit pas ici d'augmenter la rémunération de ceux qui ont déjà un travail, mais de changer le regard que portent sur le travail ceux qui n'y ont pas encore accédé, ...
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... mais qui peuvent y être conduits par le biais de différents dispositifs. Or, nous le savons, cela dépend de tout un ensemble d'éléments, de la souplesse de l'économie, de la capacité à créer des emplois, des incitations qui peuvent être adressées tant aux créateurs et aux dirigeants d'entreprise - ce sont eux qui peuvent faciliter l'accès à l'emploi en créant des postes de travail - qu'aux personnes qui ont rencontré des problèmes et qui ont bénéficié de dispositifs d'assistance grâce auxquels ils ont pu faire face à leurs besoins vitaux, mais qu'il faut absolument inciter à se sortir le plus vite possible de leurs difficultés, dans leur intérêt, dans celui de leur famille et dans l'intérêt général de l'économie.
La manière dont François Marc a présenté son amendement nous montre bien la déviation dont font l'objet les raisonnements de certains quant à la prime pour l'emploi.
Quoi qu'il en soit, monsieur le secrétaire d'Etat, M. le président de la commission des finances et moi-même avons bien entendu votre appel tout à l'heure et nous allons nous efforcer d'engager une réflexion pour pouvoir définir ensemble un dispositif plus efficace en termes de création d'emplois dans notre pays. Mais son coût devrait être similaire, voire moindre, car notre objectif demeure toujours de vouloir diminuer les dépenses : sinon, nous ne jouerions pas notre rôle !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-213.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 4
A l'article 199 novodecies du code général des impôts, la somme : « 10 € » est remplacée par la somme : « 20 € ».
M. le président. L'amendement n° I-83, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. L'article 4 prévoit de faire passer de dix à vingt euros le montant de la réduction d'impôt accordée à tous les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu qui transmettent leur déclaration par voie cybernétique.
Cette mesure profite avant tout aux personnes qui ont les moyens de financer un ordinateur et, bien entendu, une connexion à Internet. L'égalité devant l'impôt dont vous parliez tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, semble ainsi mise à mal, même si le Gouvernement vient de lancer une campagne visant à promouvoir la diffusion de l'informatique et l'accès à Internet et a mis en place une opération permettant aux jeunes étudiants d'acquérir un ordinateur portable moyennant un euro par jour pendant trois ans : certes, ces actions sont un pas vers une plus grande égalité, mais ce début de démocratisation est loin de concerner tous les Français.
Aujourd'hui, nombre de nos concitoyens n'ont ni les moyens financiers de s'acheter un ordinateur ni l'envie de contracter un emprunt pour acquérir un outil qui leur semble parfois superflu tant ils se demandent comment ils vont joindre les deux bouts à la fin du mois.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que la fracture numérique est une réalité pour les habitants de notre pays même si Internet est, il est vrai, un formidable outil de communication.
En quoi est-il démocratique d'imposer, par la voie d'une incitation financière, la déclaration électronique ?
Sans aucun doute, le Gouvernement doit vouloir poursuivre son action en faveur d'une plus grande démocratisation de cet outil, qui est toujours plus présent, mais il ne faut pas pénaliser les populations qui ne peuvent accéder facilement à l'informatique, et il ne faut pas non plus occulter les aspects financiers de la question.
Le coût engendré par l'adoption de l'article 4 est, il est vrai, symbolique, puisque la mesure est évaluée entre 10 millions et 20 millions d'euros, mais - et c'est peut-être là l'essentiel - on ne peut oublier, à ce stade du débat, qu'est également en question la disparition progressive d'emplois budgétaires au sein de la direction générale des impôts puisque, comme vous le savez, le recours à la télédéclaration constitue un gain possible de productivité pour une administration qui est, chaque année, mise à contribution pour réduire la dépense publique.
A cet égard, la direction générale des impôts et la direction générale de la comptabilité publique connaissent depuis plus de quinze ans une réduction constante de leurs effectifs. Comme nous l'avons rappelé lors de la discussion générale, cette situation ne fera que perdurer avec le projet de loi de finances pour 2005.
Je tenais à formuler ces quelques remarques, mes chers collègues. Certes, pour ceux qui ont accès à Internet, il est toujours sympathique de bénéficier d'une réduction de vingt euros, mais considérons, je le répète, les pertes d'emploi qui sont à la clef. En la matière, je ne rappellerai pas les déclarations de la majorité sénatoriale quant aux effectifs des services publics, pas plus que celles du Gouvernement, car nous l'avons largement fait hier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est surprise, car le dispositif de l'article 4 est incitatif : il associe les contribuables aux progrès qui peuvent être réalisés en matière d'organisation et de productivité de l'Etat. Au demeurant, c'est le président de la commission des finances, M. Jean Arthuis, qui en a pris l'initiative en déposant un amendement l'année dernière, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2004. Nous ne pouvons donc qu'être défavorables à l'amendement n° I-83.
J'ajoute - M. Foucaud, qui me connaît bien, n'y verra aucune méchanceté à son endroit - que la démarche de notre collègue semble montrer un certain archaïsme de la formation politique à laquelle il appartient. Je ne comprends vraiment pas que l'on puisse être opposé à l'idée d'intéresser les contribuables à un gain de productivité en les encourageant à utiliser les moyens les plus modernes de télécommunications, d'autant qu'il n'est question ici que d'une somme très réduite.
De plus, bien évidemment, personne n'est obligé de s'équiper d'un ordinateur. Moi-même, je le confesse, j'aurais beaucoup de mal à utiliser ces méthodes... (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Tout d'abord, le Gouvernement tient à rendre hommage au président de la commission des finances, car il considère que son incitation était bonne et il a souhaité, avec son accord, faire encore un peu mieux. C'est la raison pour laquelle nous proposons de passer cette année de dix à vingt euros.
J'ai bien entendu vos objections, monsieur Foucaud, mais ce n'est pas à vous que j'apprendrai que ce gouvernement a décidé, au cours du CIADT du mois de septembre, de développer l'accès à Internet et au haut débit. Ainsi, la fracture informatique est en train de se réduire : même les communes très rurales ou très éloignées auront bientôt accès au haut débit sur l'ensemble du territoire.
Par ailleurs, certaines collectivités - c'est le cas de la mienne, je ne sais pas si c'est le cas de la vôtre, monsieur Foucaud - ont créé des lieux d'accès gratuit à Internet pour nos concitoyens. Les jeunes, les adolescents, mais aussi toutes les autres générations peuvent ainsi venir à la mairie et rester gratuitement pendant une heure ou deux sur Internet ; ils peuvent utiliser à leur gré les différents sites proposés, en particulier les sites publics, qui sont naturellement gratuits d'accès.
J'ajoute enfin que nous améliorons considérablement, avec la déclaration en ligne, le travail de nos agents. J'ai eu l'occasion de le constater : je pensais moi aussi qu'ils préféraient la bonne vieille déclaration que nous connaissons tous, mais ce n'est pas du tout le cas. Interrogez les dans votre département : ils vous diront qu'ils préfèrent travailler sur écran et sur une déclaration par Internet, parce que c'est propre, carré, clair, sans ratures, et c'est une remarquable amélioration de leurs conditions de travail.
De plus, cela nous permet d'améliorer la productivité de nos services. Autant l'Etat a besoin de plus de gardiens de prison, de policiers, de gendarmes et de magistrats, autant il peut faire des économies dans des services d'organisation ou de fonctionnement. C'est une bonne gestion des finances publiques !
C'est donc dans le souci d'une bonne gestion à la fois des finances publiques et des conditions de travail de nos agents que nous augmentons cette incitation en la portant à vingt euros.
J'ajoute que nous en sommes actuellement, monsieur Foucaud, à 1 600 000 déclarants - chiffre qui a quasiment doublé dans tous les départements - et que l'objectif pour l'an prochain est de passer à 2 500 000. Dans des pays qui, pourtant, ont du retard sur le plan économique par rapport à la France - je pense à des grands pays d'Amérique latine comme le Chili -, 85 % des personnes concernées déclarent et payent leurs impôts par Internet !
Il s'agit d'une évolution à laquelle on ne peut échapper ; elle est bonne pour le contribuable, pour les agents des impôts, et donc pour notre pays.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je tiens à saluer le Gouvernement, qui a pris l'initiative de doubler la réduction d'impôt que nous avions proposée dans la loi de finances pour 2004. Nous l'avions d'ailleurs fait en seconde partie, parce que nous étions conscients que ces dispositions ne pouvaient pas s'appliquer aux revenus de 2003 faisant l'objet d'un paiement de l'impôt en 2004. Nous voulions ainsi surmonter ce qui jusqu'alors avait créé beaucoup d'inhibitions, à savoir l'éventuelle sanction du Conseil constitutionnel. Et ce dernier, saisi, a confirmé que les dispositions proposées étaient recevables.
Il s'agit, comme l'a rappelé M. le secrétaire d'Etat, d'intéresser les Français à la réforme de l'Etat. Il n'est pas indifférent que le contribuable ait recours à la télédéclaration ou reste sur les modes de déclaration traditionnels !
Je ne comprends donc absolument pas ce qui a pu inspirer l'amendement proposé par le groupe communiste républicain et citoyen. Comment pouvez-vous faire obstacle à ce point à la modernisation de l'Etat ?
Depuis hier, nous ne cessons d'en appeler à la maîtrise de la dépense publique, à une meilleure répartition de l'impôt, à l'attractivité du territoire et à la compétitivité de l'économie. Comment dans ces conditions être conséquent, sinon en mettant l'Etat en ligne avec tous les citoyens, les contribuables, les responsables politiques et les fonctionnaires qui, comme le rappelait M. le secrétaire d'Etat au budget, sont tous très désireux d'entrer dans la modernité et l'efficacité ?
Je salue donc l'initiative du Gouvernement et je me permets d'exprimer le souhait que l'on puisse intéresser tous les contribuables à ce recours à la télédéclaration ; je pense notamment aux déclarations de TVA, qui pourraient sans doute bénéficier de ce système. Les incitations pourraient consister en des dates d'effet, de prise en compte des règlements.
Il y a là un potentiel de productivité tout à fait considérable et je me réjouis que la loi de finances pour 2005 nous permette de franchir une étape décisive : tous les citoyens doivent être directement intéressés à la modernisation de l'Etat ; et, lorsque leur comportement entre dans cette démarche de modernité, il faut qu'ils y trouvent une récompense.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Les explications de M. le secrétaire d'Etat, de M. le rapporteur général et de M. le président de la commission des finances ne me satisfont pas.
Cela étant, je connais la malice de M. le rapporteur général et je lui réponds que l'archaïsme n'est pas toujours du coté où on le croit...
Vous parlez d'amélioration, mais je pense que l'on aurait pu exprimer les choses autrement pour tenter d'être positif. Or, dans le cas présent, amélioration signifie parfois suppression, j'en ai fait la démonstration en ce qui concerne la direction des services.
Pour nous, amélioration veut dire progression. Or les effectifs n'augmentent pas, notamment au sein du service public, je l'ai rappelé hier en évoquant les milliers de postes qui allaient être supprimées. Et, si M. le rapporteur général et M. le secrétaire d'Etat m'avaient dit que, dans le cadre de cette amélioration, on va supprimer des emplois d'un coté pour les reconduire de l'autre dans l'éducation nationale, par exemple, peut-être n'aurais-je pas eu à intervenir à nouveau.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il y a 45 milliards d'euros de déficit, monsieur Foucaud !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'en moque !
M. Thierry Foucaud. Votre objectif est bien de supprimer du personnel dans les services publics et, en ce sens, même si nous ne pouvons pas condamner la personne qui va profiter de ces vingt euros, nous ne pouvons que nous prononcer contre la disparition de personnels dans les services publics. Votre proposition n'est, en quelque sorte - je le dis sans malice, et prenez le positivement -, qu'une manigance continuelle afin de supprimer du personnel.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quel archaïsme !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J'avoue ma stupéfaction. Nous avons, monsieur Foucaud, 45 milliards d'euros de déficit, et vous nous dites que, si l'on informatise en télédéclarant, il y aura peut-être moins de fonctionnaires.
M. Thierry Foucaud. J'en ai fait la démonstration !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est sans doute votre contribution à l'emploi... Mais peut-être devriez-vous alors taxer l'utilisation des ordinateurs, qui réduisent l'emploi dans les entreprises ?
En fait, il s'agit surtout de libérer les fonctionnaires de tâches qui peuvent être traitées autrement et d'avoir un Etat parfaitement efficace.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ils en sont restés à 1917 ! Et il n'y avait pas d'ordinateurs !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J'ai bien noté, en tout cas, que votre seule préoccupation était que l'on va ainsi supprimer des emplois.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Je ne veux pas polémiquer, monsieur Foucaud, mais je préfère, dans la mesure où nous pouvons faire des économies à la comptabilité publique, au Trésor et aux impôts, supprimer, dans le budget que nous vous présentons cette année, 2 000 postes au ministère des finances - c'est-à-dire ne pas remplacer des fonctionnaires qui partent à la retraite - et créer, comme nous le faisons, des postes de magistrats et de gardiens de prison, parce qu'aucun ordinateur ne les remplacera ! C'est une bonne gestion des affaires publiques de l'Etat.
M. Thierry Foucaud. Et des enseignants ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Nous créons également des postes d'enseignants là où ils sont nécessaires ! Nous utilisons donc l'argent public intelligemment, et cette mesure y contribue. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
Les primes versées par l'Etat après consultation ou délibération de la Commission nationale du sport de haut niveau aux sportifs médaillés aux jeux Olympiques et Paralympiques de l'an 2004 à Athènes ne sont pas soumises à l'impôt sur le revenu. - (Adopté.)
Article 6
I. - Le e du 5 de l'article 158 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'établissement de l'impôt des redevables pensionnés au 31 décembre 2003 dont la pension a fait l'objet d'un premier versement mensuel en 2004, il n'est pas tenu compte des arrérages correspondant aux deux derniers mois de l'année 2003. »
II. - Un décret précise les obligations déclaratives des débiteurs de pensions auxquelles s'appliquent les dispositions du présent article.
M. le président. L'amendement n° I-1, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le I de cet article :
I. - Après le deuxième alinéa du e du 5 de l'article 158 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des deux alinéas précédents sont également applicables pour l'établissement de l'impôt des redevables pensionnés au 31 décembre 2003 dont la pension a fait l'objet d'un premier versement mensuel en 2004, les arrérages mentionnés au deuxième alinéa s'entendant des arrérages échus en 2004. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit de rétablir l'article 6 dans la rédaction initiale proposée par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article additionnel après l'article 6
M. le président. L'amendement n° I-37, présenté par MM. Lambert et A. Dupont, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. 1° Dans le 1° du I de l'article 156 du code général des impôts, le montant : « 53 360 € » est remplacé par le montant : « 60 000 € » ;
2° Le même texte est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant mentionné au premier alinéa est révisé chaque année selon les mêmes modalités que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.».
II. Les dispositions du 2° du I s'appliquent à compter de l'imposition des revenus de l'année 2005.
III. Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président, au nom de la commission des finances.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-37 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances a accepté ce matin cet amendement.
Aux termes de l'article 156 du code général des impôts, l'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal, sous déduction notamment du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation des déficits provenant d'exploitations agricoles lorsque le total des revenus nets d'autres sources excède 53 360 euros, ces déficits pouvant cependant être admis en déduction des bénéfices de même nature des années suivantes jusqu'à la sixième inclusivement.
Notre collègue Alain Lambert propose de porter ce plafond à 60 000 euros et d'introduire un mécanisme d'indexation sur le barème de l'impôt sur le revenu.
Ce dispositif nous est apparu à la fois avisé et modéré. Il permet de ne pas pénaliser les exploitants agricoles dont le conjoint exerce une activité non agricole.
Cette mesure produira notamment des effets favorables dans la filière « cheval », à laquelle Alain Lambert, comme le président de la commission des finances et votre rapporteur général, sont extrêmement attachés.
Pour toutes ces raisons, je préconise l'adoption de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est favorable à cet amendement et il lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-37 rectifié bis.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 6.
Article 7
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. - L'article 6 est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du troisième alinéa du 1, les mots : « à compter de l'imposition des revenus de l'année du troisième anniversaire de l'enregistrement du pacte » sont supprimés ;
2° Au 7 :
a) Au premier alinéa, les mots : « l'année au cours de » sont remplacés par les mots : « à compter de la date à » ;
b) Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ;
3° Il est complété par un 8 ainsi rédigé :
« 8. a. Lorsque le pacte prend fin au cours de l'année civile de sa conclusion ou de l'année suivante pour un motif autre que le mariage entre les partenaires ou le décès de l'un d'entre eux, chaque membre du pacte fait l'objet d'une imposition distincte au titre de l'année de sa conclusion et de celle de sa rupture, et souscrit à cet effet une déclaration rectificative pour les revenus dont il a disposé au cours de l'année de souscription du pacte.
« b. Lorsque les personnes liées par un pacte civil de solidarité se marient entre elles, les dispositions du 5 ne s'appliquent pas. Lorsque leur mariage intervient au cours de l'année civile de la rupture du pacte ou de l'année suivante, les contribuables font l'objet d'une imposition commune au titre de l'année de sa rupture et de celle du mariage. Ils procèdent, le cas échéant, à la régularisation des déclarations effectuées au titre de l'année de la rupture. »
B. - L'article 7 est ainsi rédigé :
« Art. 7. - Les règles d'imposition, d'assiette et de liquidation de l'impôt ainsi que celles concernant la souscription des déclarations, prévues par le présent code en matière d'impôt sur le revenu pour les contribuables mariés, sont applicables dans les mêmes conditions aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité, sous réserve des dispositions du 8 de l'article 6. »
C. - A l'article 239 bis AA, après les mots : « ainsi que les conjoints » sont insérés les mots : « et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil ».
D. - Le deuxième alinéa de l'article 777 bis est ainsi rédigé :
« Le bénéfice de l'application de ces taux est remis en cause lorsque le pacte prend fin au cours de l'année civile de sa conclusion ou de l'année suivante pour un motif autre que le mariage entre les partenaires ou le décès de l'un d'entre eux. »
E. - Le deuxième alinéa du III de l'article 779 est ainsi rédigé :
« Le bénéfice de cet abattement est remis en cause lorsque le pacte prend fin au cours de l'année civile de sa conclusion ou de l'année suivante pour un motif autre que le mariage entre les partenaires ou le décès de l'un d'entre eux. »
F. - L'article 764 bis est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « ou par un ou plusieurs enfants mineurs ou majeurs protégés du défunt ou de son conjoint » sont remplacés par les mots : «, par le partenaire lié au défunt par un pacte civil de solidarité ou par un ou plusieurs enfants mineurs ou majeurs protégés du défunt, de son conjoint ou de son partenaire » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « ou de son conjoint » sont remplacés par les mots : «, de son conjoint ou de son partenaire ».
II. - Les dispositions des A et B du I s'appliquent à compter de l'imposition des revenus de 2004.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, sur l'article.
M. Thierry Foucaud. « Le PACS, c'est la fin de la famille. » C'est au bénéfice de ce type d'arguments que nous avions pu entendre, ces dernières années, d'éminents membres de la majorité sénatoriale s'élever contre toute idée d'un traitement fiscal équilibré des personnes pacsées au regard de la situation des personnes mariées.
J'ai entendu parler tout à l'heure d'archaïsme, mais c'est parce que nous croyons en la famille - ne nous en veuillez pas - que nous ne pouvons que nous féliciter de constater que les préoccupations des personnes pacsées ont enfin trouvé droit de cité dans le cadre de la loi de finances.
On notera d'ailleurs qu'aucune estimation de la dépense fiscale qui pourrait découler de cette équité nouvelle n'est effectuée à l'appui de cet article. Est-ce à dire que, depuis que la question est posée, on s'est finalement rendu compte que le jeu s'effectuait en quelque sorte à somme nulle, et que la baisse des impôts des uns pouvait fort bien être compensée par la hausse des impôts des autres ?
Qu'est ce qui, dans le passé, pouvait motiver les cris d'orfraie de certains, sinon leur refus obstiné de tenir compte des évolutions de la société et de ce que l'on peut appeler les valeurs et la morale individuelles et collectives ?
Qu'est ce qui, par ailleurs, motive cette soudaine conversion de la majorité parlementaire et du Gouvernement au traitement équitable des pacsés au regard des autres contribuables ?
Nul doute que c'est le simple examen de la réalité qui a conduit le Gouvernement à proposer l'adoption de cet article.
Le PACS n'a pas de couleur politique et ce choix de vie commune ne fait que correspondre à ce qui procède de l'intime et de la relation existant entre deux personnes. Il faut laisser aux êtres humains le libre choix de leur mode de vie, leur morale personnelle étant sans doute aussi respectable que celle qui découle de la stricte application de la règle plus communément admise.
Le PACS n'est pas un instrument d'optimisation fiscale ; il n'est que la simple reconnaissance de faits de société qui participent de l'évolution des choses et de ce qui constitue, aujourd'hui, une partie du paysage social dans lequel nous nous situons aujourd'hui.
Qu'il ait fallu attendre ce projet de loi de finances pour 2005 pour voir ces mesures entrer en vigueur est regrettable.
Ce sont là quelques points que nous nous devions de souligner à l'occasion de la discussion de cet article, sur lequel nous demanderons un scrutin public.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-36 rectifié, présenté par MM. Lardeux, Seillier, Retailleau et Detcheverry, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Denis Detcheverry.
M. Denis Detcheverry. La disposition proposée par l'article 7 entraînerait une diminution des recettes de l'Etat, diminution dont la justification est incertaine et dont le montant n'est pas indiqué. La représentation nationale devrait ainsi se prononcer sans être parfaitement informée de l'ensemble de la question.
Il ne paraît pas opportun d'accorder à des couples dont le projet familial est inexistant ou inconsistant le bénéfice de l'imposition commune. Cela reviendrait, en effet, à offrir une rémunération publique à une affection qui ne doit pas sortir du domaine privé.
Le PACS n'a pas à devenir un simple instrument d'optimisation fiscale qui se résumerait en une sorte de communauté réduite à la feuille d'impôt commun.
Adopter une telle mesure ouvrirait la porte à des revendications beaucoup plus exigeantes en matière de mariage ou d'adoption.
M. le président. L'amendement n° I-214, présenté par MM. Michel, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. Après le F du I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
G. - Après les mots : « est soumise », la fin du premier alinéa de l'article 777 bis du code général des impôts est ainsi rédigée : « aux taux indiqués dans le tableau II de l'article 777 ».
II. Pour compenser la perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus, compléter cet article par le paragraphe suivant :
... - La perte de recettes pour l'Etat résultant de l'alignement en matière de droits de succession des modalités d'imposition au sein d'un pacte civil de solidarité sur celles des personnes mariées est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. En matière de droits de succession, les modalités d'imposition des personnes mariées et celles des partenaires au sein d'un PACS ne sont pas alignées : ainsi, bien que les conditions de durée soient allégées, les tarifs appliqués aux pacsés restent défavorables par rapport à ceux dont bénéficient les époux. Le présent amendement prévoit donc un alignement des taux.
Alors qu'il avait été fait grand cas, notamment dans la presse, d'une nouvelle fiscalité opposable aux personnes liées par un PACS, on aurait pu s'attendre à ce que, toute discrimination ayant disparu, la situation des couples pacsés soit alignée sur celle des couples mariés. Or force est pourtant de constater que la suspicion demeure à l'égard du PACS et que l'expression « optimisation fiscale » est utilisée dans l'exposé des motifs du projet de loi.
En matière de droits de succession et de droits de mutation à titre gratuit, nous assistons même à une régression, notamment en ce qui concerne les délais, puisqu'il est prévu que l'abattement spécifique et les taux applicables en matière de successions pourront être mis en cause en cas de rupture du PACS dans l'année en cours ou dans l'année qui suit, disposition qui ne figure pas, aujourd'hui, dans le code général des impôts.
De plus, la différenciation demeure notable en matière d'abattements spécifiques et de taux.
Telle est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, qui vise, moins pour l'abattement que pour les taux, à un alignement de la situation des couples pacsés sur celle des couples mariés et à l'instauration d'une parfaite égalité entre eux.
Un grand pas serait heureusement franchi si nous faisions disparaître une discrimination qui n'a plus de raison d'être cinq ans après l'entrée en vigueur du PACS, alors même que 300 000 personnes ont déjà choisi cette institution pour organiser leur vie commune.
J'ajoute que c'est sur l'initiative de notre collègue Jean-Pierre Michel que cet amendement a été déposé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces deux amendements sont d'inspirations tout à fait opposées.
Mme Nicole Bricq. On ne refait pas le débat !
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, estimant devoir appliquer le principe in medio stat virtus, est donc défavorable aux deux.
A titre personnel, cependant, et en vertu de la « clause de conscience », je voterai pour l'amendement de M. Detcheverry.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Cette discussion commune de deux amendements qui ont un sens différent est intéressante.
M. le président. Cela permet de marquer les divergences !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Nicolas Sarkozy et moi-même avons voulu tenir compte de l'évolution de la situation. Lorsque j'étais député - Mme Bricq s'en souvient ! - je n'ai pas voté cette disposition et les débats, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, avaient été vigoureux, c'est le moins que l'on puisse dire.
Aujourd'hui, par cet article 7, le Gouvernement tient compte des réalités et souhaite aligner les conditions fiscales des couples pacsés sur celles des couples mariés.
Par conséquent, il émet un avis défavorable sur l'amendement de suppression n° I36 rectifié comme sur l'amendement n° I-214, qui lui paraît aller trop loin.
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote sur l'amendement n° I-36.
M. Serge Dassault. Je suis scandalisé ! Si l'Etat a décidé d'accorder des avantages fiscaux à la famille, c'est pour l'encourager à se constituer, puis à avoir des enfants. Ce n'est pas pour inciter deux individus à vivre ensemble. S'ils désirent vivre ensemble, soit ! Mais il n'y aucune raison de leur offrir des avantages fiscaux.
Je suis donc totalement opposé à une disposition qui va à l'encontre de l'avenir de la famille et de l'avenir de la France.
M. le président. Je mets aux voix l'article 7.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 49 :
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 159 |
Pour l'adoption | 304 |
Contre | 13 |
Le Sénat a adopté.
Article 8
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le 33° de l'article 81, il est inséré un 33° bis ainsi rédigé :
« 33° bis Les indemnités versées, sous quelque forme que ce soit, aux victimes de l'amiante ou à leurs ayants droit par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante en application de l'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) ou par décision de justice ; »
2° L'article 775 bis est ainsi modifié :
a) Il est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Au titre des réparations des préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux, aux personnes atteintes d'une pathologie liée à une exposition à l'amiante. » ;
b) Dans le premier alinéa, les mots : « aux 1°, 2°, 3° et 4° » sont remplacés par les mots : « aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° ».
II. - Les dispositions du 1° du I sont applicables aux indemnités perçues depuis la date d'entrée en vigueur de l'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 précitée.
III. - Les dispositions du 2° du I s'appliquent aux successions pour lesquelles une indemnité est versée ou due en réparation des préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux causés à la personne atteinte d'une pathologie liée à une exposition à l'amiante. - (Adopté.)
Article 8 bis
L'article 72 D bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans le troisième alinéa du I, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;
2° Dans l'avant-dernier alinéa du I, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » et le mot : « cinquième » par le mot : « septième » ;
3° Dans le dernier alinéa du I, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;
4° Dans le II, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept ». - (Adopté.)
Demande de réserve
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. A ce stade du débat, nous avons examiné vingt et un amendements. Il en reste quinze à examiner avant de parvenir à l'article 9 bis et aux amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 9 bis, qui portent sur l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF. Leur discussion ne sera sans doute pas achevée avant dix-huit heures quarante-cinq. Or le Gouvernement souhaite que la séance puisse être levée au plus tard à vingt heures. Dans ces conditions, il est exclu de pouvoir traiter entièrement la question de l'ISF ce soir. Je suggère donc de reporter cette discussion à lundi matin, neuf heures trente.
Par conséquent, en application de l'article 44 alinéa 6 du règlement du Sénat, je demande, au nom de la commission des finances, la réserve de l'article 9 bis et des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 9 bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Afin de préserver la qualité des débats, le Gouvernement accède, naturellement, à la demande de la commission.
M. le président. La réserve est ordonnée.
Article 8 ter
I. - Le II de l'article 73 B du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après les mots : « 1er janvier », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « 2005 un contrat d'agriculture durable dans les conditions définies aux articles R. 311-1, R. 311-2 et R. 341-7 à R. 341-20 du code rural. » ;
2° A la fin du dernier alinéa, les mots : « contrat territorial d'exploitation » sont remplacés par les mots : « contrat d'agriculture durable ».
II. - Les dispositions relatives aux contrats territoriaux d'exploitation, prévues au II de l'article 73 B du même code dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2004, demeurent applicables.
M. le président. L'amendement n° I-2, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le deuxième alinéa (1°) du I de cet article :
1° Après le mot : « souscrivent », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2008 un contrat d'agriculture durable dans les conditions définies aux articles R. 311-1, R. 311-2 et R. 341-7 à R. 341-20 du code rural. » ;
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La mesure introduite par l'Assemblée nationale concernant les jeunes agriculteurs ayant souscrit un contrat d'agriculture durable et bénéficiant d'un avantage fiscal est bonne. Pour autant, elle ne nous semble pas avoir vocation à s'appliquer de façon pérenne.
Cet amendement tend donc à limiter cet avantage fiscal à trois ans. Au terme de cette période, le point pourra être fait sur l'efficacité de la mesure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° I-197 rectifié, présenté par MM. César, Murat, Detcheverry et Vasselle, est ainsi libellé :
I - Après le I de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - L'article 1647-00 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1°. Dans le dernier alinéa du I, remplacer les mots : « à compter de 2002, aux jeunes agriculteurs installés à compter du 1er janvier 2001 et qui ont souscrit un contrat territorial d'exploitation dans les conditions définies aux articles L. 311-3, L. 341-1, R. 311-2, R. 341-7 à R.341-13 et R.341-14 à R.341-15 » par les mots : « à compter de 2006, aux jeunes agriculteurs installés à compter du 1er janvier 2005 et qui ont souscrit un contrat d'agriculture durable dans les conditions définies aux articles R. 311-1, R. 311-2 et R. 341-7 à R. 341-20 » ;
2°. Dans la première phrase du II, remplacer les mots : « à compter du 1er janvier 2001 et qui ont souscrit un contrat territorial d'exploitation dans les conditions définies aux articles L. 311-3, L. 341-1, R. 311-2, R. 341-7 à R. 341-13 et R. 341-14 à R. 341-15 » par les mots : « à compter du 1er janvier 2005 et qui ont souscrit un contrat d'agriculture durable dans les conditions définies aux articles R. 311-1, R. 311-2 et R. 341-7 à R. 341-20 ». »
II - Dans le II de cet article, remplacer les mots :
prévues au II de l'article 73 B du même code
par les mots :
prévues au II de l'article 73 B et à l'article 1647-00 bis du code général des impôts
III - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - 1° Les pertes de recettes pour les collectivités territoriales résultant des dispositions relatives aux contrats d'agriculture durable figurant à l'article 164700 bis du code général des impôts sont compensées à due concurrence par une majoration de leur dotation globale de fonctionnement.
2° Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du 1° ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Detcheverry.
M. Denis Detcheverry. L'article 1647-00 bis du code général des impôts instaure un dégrèvement de droit de 50 % de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les jeunes agriculteurs qui soit bénéficient des aides à l'installation ou de prêts à moyen terme spéciaux, soit ont souscrit un contrat territorial d'exploitation.
Le dégrèvement complémentaire pris sur délibération des collectivités locales, prévu au même article, s'applique dans les mêmes conditions.
Dans la mesure où les contrats territoriaux d'exploitation ont été remplacés par les contrats d'agriculture durable, il serait cohérent d'adapter le code général des impôts à cette évolution. Tel est l'objet du présent amendement.
L'Assemblée nationale a déjà procédé à cette mise en cohérence en première lecture pour les dispositions de l'article 73 B relatives à l'abattement sur le bénéfice des jeunes agriculteurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à étendre le dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties aux parcelles exploitées par de jeunes agriculteurs liés à l'Etat par un contrat d'agriculture durable.
Je rappelle qu'à la suite de déclarations récentes faites dans le département du Cantal des idées de réforme de la taxe foncière sur les propriétés non bâties ont été avancées. La commission des finances, sur l'initiative de son président Jean Arthuis, a constitué un groupe de travail sur ce sujet.
Par ailleurs, nous ne sommes pas en mesure de disposer ni de l'évaluation du coût qu'induirait cette extension ni de la compensation qui devrait être accordée aux collectivités territoriales bénéficiaires de la taxe foncière sur les propriétés non bâties.
Pour ces raisons et tout en exprimant son intérêt pour la démarche ainsi présentée, la commission souhaite, à ce stade, le retrait de l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Detcheverry, l'amendement n° I-197 rectifié est-il maintenu ?
M. Denis Detcheverry. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-197 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 8 ter, modifié.
(L'article 8 ter est adopté.)
Article 8 quater
I. - Le I de l'article 154 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du premier alinéa, la somme : « 2 600 € » est remplacée par la somme : « 13 800 € » ;
2° Dans le deuxième alinéa, les mots : « admise dans la limite d'une rémunération égale au plus à trente-six fois le montant mensuel du salaire minimum de croissance » sont remplacés par les mots : « intégralement admise ».
II. - Les dispositions du I sont applicables aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2005. - (Adopté.)
Article 8 quinquies
Après le troisième alinéa de l'article 199 decies E du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ouvrent également droit à la réduction d'impôt, dans les mêmes conditions, les logements faisant partie d'une résidence de tourisme classée et située dans le périmètre d'intervention d'un établissement public chargé de l'aménagement d'une agglomération nouvelle créée en application de la loi n° 70-610 du 10 juillet 1970 tendant à faciliter la création d'agglomérations nouvelles. » - (Adopté.)
Article 9
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après l'article 775 bis, il est inséré un article 775 ter ainsi rédigé :
« Art. 775 ter. - Il est effectué un abattement de 50 000 € sur l'actif net successoral recueilli soit par les enfants vivants ou représentés ou les ascendants du défunt et, le cas échéant, le conjoint survivant, soit exclusivement par le conjoint survivant. » ;
2° Au b du I et au II de l'article 779, la somme : « 46 000 € » est remplacée par la somme : « 50 000 € » ;
3° L'article 788 est ainsi modifié :
a) Les I, II et III deviennent respectivement les II, III et IV ;
b) Il est inséré un I ainsi rédigé :
« I. - L'abattement mentionné à l'article 775 ter se répartit entre les bénéficiaires cités à cet article au prorata de leurs droits dans la succession. Il s'impute sur la part de chaque héritier déterminée après application des abattements mentionnés au I de l'article 779. La fraction de l'abattement non utilisée par un ou plusieurs bénéficiaires est répartie entre les autres bénéficiaires au prorata de leurs droits dans la succession. »
II. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2005.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.
Mme Nicole Bricq. Nous arrivons à l'examen de la mesure que le ministre d'Etat a présentée comme relevant d'un « choix de société ». Cela mérite donc que l'on s'y arrête.
L'objectif affiché par le Gouvernement est d'exonérer de l'impôt tout patrimoine transmis dont la valeur n'excède pas 100 000 euros. Ce seuil n'a pas été choisi par hasard : il correspond au montant du patrimoine moyen des ménages français. Pour l'opinion, dans l'imaginaire, ce montant renvoie à la « modeste maison familiale ».
Or, et c'est là toute l'habileté du ministre, quand on examine de près cette mesure, on s'aperçoit qu'il ne s'agit pas de cela ! Ces 100 000 euros correspondent, en fait, à ce que recevra un seul héritier. L'écart est donc considérable : nous sommes loin de l'image de la « modeste maison familiale » !
En effet, une famille dont le patrimoine théoriquement imposable atteint 300 000 euros échappe déjà aux droits de succession. Avec les 20 % d'abattement, ce patrimoine peut être plus important. En outre, des possibilités d'évasion existent encore : je pense aux meubles meublant, par exemple les tableaux de maître présents dans la résidence principale, ou à l'assurance vie.
Le rapporteur général a publié, voilà deux ans, un rapport fort intéressant : « Succession et donations : des mutations nécessaires »,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'en suis fier !
Mme Nicole Bricq. ...dans lequel il relève que la grande majorité des 360 000 successions ouvertes chaque année ne sont pas taxées : « seul un petit quart des successions donnerait lieu à perception de droits. »
La mesure, on le voit bien, ne vise pas les petits patrimoines.
J'écarte d'emblée les très gros patrimoines, qui sont soumis à l'impôt de solidarité sur la fortune, c'est-à-dire les trente plus grandes fortunes de France, dont la richesse est estimée à 800 millions d'euros : pour ceux-là, 50 000 euros de plus ou de moins ne changent évidemment rien.
Seules sont donc concernées par cette mesure les familles aisées qui ont constitué elles-mêmes leur patrimoine, souvent d'ailleurs à partir d'un héritage.
Voilà le « choix de société » que prône M. Nicolas Sarkozy. Bien sûr, nous ne le partageons pas. (M. Roger Karoutchi s'exclame.)
C'est étonnant de la part de celui que l'on surnomme « l'Américain »...
M. Alain Gournac. Pas nous !
M. Roger Karoutchi. C'est vous qui l'appelez ainsi !
Mme Nicole Bricq. ...et qui ne conteste pas ce qualificatif !
M. Roger Karoutchi. C'est mieux que « le Soviétique » !
Mme Nicole Bricq. Force est de reconnaître qu'il fait preuve de constance, puisqu'il défendait déjà cette mesure lorsqu'il était ministre du budget sous le gouvernement de M Balladur il y a dix ans.
Sa démarche s'appuie sur une logique de solidarité privée au sein de la famille, qui plus est unie par les liens du mariage puisque cela concerne aussi les enfants issus d'un couple marié.
Or une autre logique existe, qui consacre le mérite individuel, l'efficacité économique et la création de richesses.
Nicolas Sarkozy puise très souvent ses idées outre-Atlantique. Il n'est pas besoin d'aller si loin : il suffit de se rendre outre-Manche, chez nos voisins anglais ! Dans ces deux pays, l'héritage y est très fortement taxé. C'est favorable au dynamisme économique.
En définitive, le Gouvernement a préféré une logique de rentier à une logique d'activité,...
M. Roger Karoutchi. C'est l'inverse !
M. Alain Gournac. N'importe quoi !
Mme Nicole Bricq. ...une logique de solidarité privée à une logique de redistribution sociale. Nous sommes loin de l'image de la « modeste maison familiale » acquise à la sueur de son front !
C'est pourquoi nous vous proposerons dans un instant un amendement de suppression de l'article 9.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° I-84 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° I-215 est présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° I-84.
M. Thierry Foucaud. Avec cet article 9, nous entrons de plain-pied dans le domaine de la fiscalité du patrimoine, dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle polarise toute l'attention de la majorité sénatoriale, et de la majorité gouvernementale dans son ensemble.
Avec cet article, il s'agit de modifier la législation sur les droits de succession. Parmi les mesures contenues dans ce projet de loi de finances, finement ciblées pour profiter aux ménages les plus aisés, la réduction des droits de succession que prévoit l'article 9 est très révélatrice d'une manière de travestir la réalité par une présentation orientée et des exemples judicieusement choisis.
La présentation par le ministre est on ne peut plus sympathique : j'estime, dit-il, que lorsqu'on a travaillé toute sa vie, on a le droit de laisser à ses enfants en franchise d'impôts ce qui représente le produit de son travail. C'est magnifique : quelle envolée, quel talent !
Il s'agirait ainsi d'une mesure favorable aux classes moyennes, donc à un grand nombre de nos concitoyens. Cette démarche procède, au fond, de la même manoeuvre idéologique que la réduction en pourcentage de l'impôt sur le revenu : un grand nombre de ménages y gagnent un peu et un petit nombre, niché à l'extrémité supérieure de l'éventail des bénéficiaires, y gagnent beaucoup. Le subterfuge consiste à ne parler que du nombre de gagnants, en taisant soigneusement ce que gagne chaque catégorie.
Des universitaires et des journalistes, attentifs et curieux, ont d'ailleurs démonté le mécanisme de ce subterfuge. Certains, très consciencieux, se sont même fait aider par des notaires.
Le premier exemple est celui d'un conjoint survivant sans enfant. Grâce à la réforme proposée, avec un patrimoine de 100 000 euros, l'héritier est exonéré de tout droit et économise 2 470 euros. S'il hérite de 200 000 euros, la note fiscale passe de 22 170 euros à 12 170 euros, soit une économie de 10 000 euros. Pour des patrimoines plus élevés, allant de 400 000 euros à 600 000 euros, le montant économisé plafonne à 10 000 euros dans le premier cas, et à 10 400 euros dans le second. L'efficacité de la réforme est donc à son sommet pour les veufs qui héritent de 200 000 euros.
Le deuxième exemple est celui d'un conjoint survivant de soixante-cinq ans avec un enfant. On a supposé que l'époux survivant utilisait la possibilité ouverte par la loi du 3 décembre 2001 de disposer de tout l'héritage en usufruit, l'enfant conservant la nue-propriété. Puisque le parent a soixante-cinq ans, l'usufruit est évalué forfaitairement à 40 % de la valeur du bien. Pour un patrimoine de 100 000 euros, la réforme n'apporte rien au conjoint survivant, déjà exonéré dans le système actuel ; l'enfant, lui, fait une économie de 1 150 euros.
Si la succession s'élève à 200 000 euros, le gain est plus substantiel : le conjoint survivant n'économise que 200 euros, mais l'enfant gagne 6 800 euros. Si l'héritage atteint 400 000 euros, voire 600 000 euros, la réduction d'impôt est de 4 000 euros pour le conjoint et de 6 800 euros pour l'enfant. Les gains les plus importants sont donc, en valeur absolue, pour les successions comprises entre 200 000 euros et 400 000 euros.
Le troisième et dernier exemple est celui d'un conjoint survivant avec deux enfants. Les héritiers sont, comme auparavant, exonérés de tout droit s'ils se partagent 100 000 euros. Si l'actif s'élève à 200 000 euros, le conjoint économise 200 euros et chaque enfant 1 150 euros. Ce n'est encore qu'au-delà de 400 000 euros que la réforme abaisse substantiellement les droits dus par les trois héritiers de 11 600 euros en tout.
Et le journaliste conclut ainsi : « La réforme s'avère peu efficace pour les petits patrimoines que le dispositif actuel épargnait déjà, et concerne au premier chef les transmissions dépassant 200 000 euros [...]. En 2000, seuls 10 % des successions portaient sur un actif supérieur à 222 373 euros, selon un rapport sur la fiscalité de novembre 2002, réalisé par le rapporteur général Philippe Marini. La réforme ne devrait donc profiter qu'à une minorité d'héritiers. » C'est la vérité !
Au vu de ces observations, nous ne pouvons que vous inviter, mes chers collègues, à adopter cet amendement de suppression de l'article 9 et à le faire par scrutin public.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l'amendement n° I-215.
Mme Nicole Bricq. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-132, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
I. - Supprimer le 1° du I de cet article.
II. - Dans le 2° du I de cet article, remplacer la somme :
« 50 000 € »
par la somme :
« 60 000 € »
III. - Supprimer le 3° du I de cet article.
IV. - Pour compenser la perte de recettes pour l'Etat résultant des dispositions ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes résultant éventuellement, pour l'Etat du I du présent article sont compensées, à due concurrence, par un relèvement des droits visés à l'article 150 V bis du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Afin de concentrer l'effort fiscal sur les enfants, cet amendement tend à substituer un abattement général à une hausse de l'abattement particulier pour les descendants.
M. le président. L'amendement n° I-3, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Compléter in fine le 3° du I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
c) Dans le premier alinéa du II, le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 57 000 € ».
II.- Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus, compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
..- La perte de recettes résultant pour l'Etat du relèvement de l'abattement au titre des droits de succession est compensée par la création à due concurrence d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances vous invite, mes chers collègues, à vous intéresser, dans le cadre de cette réforme, au sort des fratries qui vivent sous le même toit. Nous préconisons que, en cas de décès d'un frère ou d'une soeur, l'abattement dont bénéficie le survivant soit revalorisé et porté au même niveau que l'abattement prévu pour les personnes ayant conclu un PACS.
Nous soumettons l'octroi du bénéfice de cette mesure à des conditions bien précises de résidence et d'âge. Ainsi, le survivant doit avoir vécu sous le même toit depuis plus de cinq ans à la date du décès de son frère ou de sa soeur et être âgé de plus de cinquante ans.
Nous pensons qu'une telle mesure d'équité sera bien accueillie par une catégorie sociale à laquelle on ne s'intéresse que rarement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques nos I-84 et I-215, ainsi que sur l'amendement n° I-132 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour la bonne information de ceux de nos collègues qui ont déposé des amendements de suppression, je souhaite procéder à un certain nombre de rappels.
Premièrement, dans le budget général de l'Etat, le montant des recettes tirées des droits de succession a triplé depuis 1980.
Deuxièmement, les taux du barème reflètent toujours la brutale augmentation à laquelle il a été procédé en 1983. A cette époque, en effet, le taux marginal applicable en ligne directe a été doublé, passant de 20 % à 40 %.
Troisièmement, l'absence d'actualisation de ce barème continue de peser très lourdement. Ainsi, le seuil de 7 600 euros, soit environ 50 000 francs, seuil en deçà duquel le taux de prélèvement en ligne directe est de 5 %, n'a pas changé depuis 1959. C'est-à-dire qu'en ne tenant compte que de la dérive monétaire, il aurait fallu, en 2003, retenir un seuil de 63 563 euros pour conserver le niveau réel de 1959.
Ajoutez à cela que nombre de mesures partielles ont été prises au fil du temps et vous comprendrez que tout milite ici en faveur d'une vraie réforme des droits de succession. Le présent article est un bon pas en ce sens. Cela ne fait pas tout, mais c'est déjà substantiel.
Je pense personnellement, et je dois dire que la majorité de la commission partage cette opinion, qu'il s'agit là d'une excellente disposition du projet de loi de finances initiale pour 2005.
Il n'est point besoin, mes chers collègues, de faire appel à des experts extérieurs pour savoir quels seront les résultats de la réforme ; il suffit de se reporter au rapport écrit de la commission, où vous trouverez des cas chiffrés et où j'espère démontrer combien cette réforme est favorable aux familles. En effet, plus il y a d'enfants bénéficiaires d'une succession, plus le dispositif est favorable.
Donc, mes chers collègues, pour la majorité de la commission, l'article 9 est tout à fait bienvenu.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Roger Karoutchi. C'est vrai !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... et il suffit de le compléter en y ajoutant le cas des fratries, comme nous le préconisons.
S'agissant enfin de l'amendement n° I-132 qui a été présenté par M. Badré, le sujet est très technique. Pour résumer, nos collègues préconisent un mode de calcul différent pour aboutir à peu près au même résultat. Cependant, après une lecture très attentive, il nous apparaît que le dispositif du Gouvernement est, certes, plus compliqué que celui que nous proposent nos collègues de l'Union centriste, mais qu'il est aussi plus favorable aux enfants.
C'est la différence essentielle entre les deux formules, qui, pour le reste, sont vraiment très proches. C'est la raison pour laquelle, lorsque nous aurons entendu les explications de M. le secrétaire d'Etat, les auteurs de l'amendement n° I-132 devraient pouvoir le retirer sans état d'âme et voter une réforme qui est, me semble-t-il, tout à fait excellente.
Autrement dit, monsieur le président, la commission est défavorable aux amendements identiques de suppression nos I-84 et I-215 et souhaite le retrait de l'amendement n° I-132.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est fier de présenter à la Haute Assemblée cet article 9. Il s'agit tout simplement de rendre les droits de succession inexistants pour un petit héritage.
Mme Nicole Bricq. Pas si petit !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. J'ignore ce qu'il en est dans votre département, madame le sénateur, mais, si je prends l'exemple du mien, que je connais bien, c'est à peu près l'héritage d'une petite maison qui se trouvera ainsi libéré de tout droits de succession.
C'est une mesure sociale et, comme l'a très bien indiqué M. le rapporteur général, à vocation familiale.
Par conséquent, nous demandons à la Haute Assemblée de ne pas voter les deux amendements identiques de suppression.
Quant à l'amendement présenté par M. Badré, c'est une question d'appréciation. Sans céder le moins du monde à l'autosatisfaction, je préfère, comme M. le rapporteur général, la rédaction du Gouvernement, qui est plus simple. Je vous invite donc, monsieur Badré, à retirer cet amendement, en sachant que la mesure que vous proposez est tout à fait dans l'esprit de l'article 9.
En revanche, s'agissant de l'amendement n° I-3 de la commission, qui concerne le sort des fratries, j'y suis tout à fait favorable. Le dispositif que nous propose la commission des finances correspond à des situations que nous connaissons bien sur le terrain.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, je souhaiterais rectifier l'amendement n° I-3, par souci de coordination.
Il faudrait indiquer que le 3° du I de l'article 9 est complété par deux alinéas. Outre le c) prévu dans l'amendement initial, il faudrait ajouter un d) ainsi rédigé : « Dans le I II, les mots "mentionnés au II" sont remplacés par les mots : "mentionnés au III" ». C'est assez ésotérique, mais c'est ainsi qu'il nous faut procéder pour des raisons strictement techniques.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° I-3 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, et qui est ainsi libellé :
I.- Compléter in fine le 3° du I de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
c) Dans le premier alinéa du II, le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 57 000 € »
d) Dans le III, les mots : "mentionnés au II" sont remplacés par les mots : "mentionnés au III"
II.- Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus, compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
..- La perte de recettes résultant pour l'Etat du relèvement de l'abattement au titre des droits de succession est compensée par la création à due concurrence d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Compte tenu de l'objet très social de cet amendement, et parce qu'il répond à un souci de bon sens, je lève le gage, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-3 rectifié bis.
Je mets aux voix les amendements identiques nos I-84 et I-215.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 50 :
Nombre de votants | 302 |
Nombre de suffrages exprimés | 302 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 152 |
Pour l'adoption | 118 |
Contre | 184 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Monsieur Badré, l'amendement n° I-132 est-il maintenu ?
M. Denis Badré. Je le retire, monsieur le président, pour répondre au double souci de M. le rapporteur général et de M. le secrétaire d'Etat.
Je voudrais saluer à mon tour, après M. le rapporteur général, l'importance de l'article 9. Le présent amendement avait pour objet d'enrichir encore, si c'était possible, cet article.
Puisque M. le secrétaire d'Etat considère que son texte est plus simple que le nôtre, je rends les armes dans ce concours de simplicité. Mais je nourris un petit regret, car notre amendement tendait à privilégier les enfants. Il faudra approfondir notre réflexion pour voir si nous pouvons faire mieux la prochaine fois.
M. le président. L'amendement n° I-132 est retiré.
La parole est à M. Thierry Foucaud, contre l'amendement n° I-3 rectifié bis.
M. Thierry Foucaud. Le paragraphe I de l'article 788 du code général des impôts - qui devient le paragraphe II avec le présent projet de loi - dispose :
« Pour la perception des droits de mutation par décès, il est effectué un abattement de 15 000 euros sur la part de chaque frère ou soeur, célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, à la double condition :
« 1° Qu'il soit, au moment de l'ouverture de la succession, âgé de plus de 50 ans ou atteint d'une infirmité le mettant dans l'impossibilité de subvenir par son travail aux nécessités de l'existence ;
« 2° Qu'il ait été constamment domicilié avec le défunt pendant les cinq années ayant précédé le décès. »
Il s'agit donc, si l'on suit le raisonnement de M. le rapporteur général, de donner un sérieux coup de pouce fiscal aux successions ouvertes lorsqu'on procède à la répartition des biens entre membres d'une même fratrie.
Le relèvement de l'abattement, pratiqué pour le conjoint survivant et les descendants en ligne directe dans le cadre de l'article 775 ter, serait, par symétrie, pratiqué également pour l'article 788, qui porte sur les fratries.
On pourrait fort bien trouver légitime cette proposition si l'on n'atteignait pas un niveau d'abattement sans commune mesure avec la réalité de l'actif successoral de la plupart des successions ouvertes.
Monsieur le rapporteur général, 57 000 euros, c'est tout simplement trop, même s'il s'agit de prendre en compte la nécessaire et légitime solidarité familiale.
Cela suffit amplement pour que nous invitions le Sénat à rejeter cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 9
M. le président. L'amendement n° I-127 rectifié, présenté par M. Lambert, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Après l'article 776 sont créées dans le code général des impôts deux articles additionnels ainsi rédigés :
« Art. ... - I. Pour la liquidation des droits de donation, les dettes du donateur qui sont mises à la charge du donataire dans l'acte de donation avec l'accord du créancier sont déduites lorsque leur montant est inférieur à la valeur vénale des biens donnés et que leur existence au jour de la donation est dûment justifiée par tout mode de preuve compatible avec la procédure écrite.
« II. Les dettes du donateur qui sont transférées au donataire et qui ont été contractées pour l'achat de biens compris dans la donation et exonérés de droits de donation ou dans l'intérêt de tels biens, sont imputées par priorité sur la valeur desdits biens.
« III. Les dettes dont la déduction est demandée sont détaillées, dans l'acte de donation, article par article.
« Ce dernier doit également mentionner que l'accord du créancier de la dette transférée a été recueilli.
« Art. ... - Toutefois ne sont pas déductibles :
« 1) Les dettes échues depuis plus de trois mois au jour de l'acte de donation, à moins qu'il ne soit produit une attestation du créancier en certifiant l'existence à cette époque dans la forme et suivant les règles déterminées à l'article L 20 du livre des procédures fiscales ;
« 2) Les dettes consenties par le donateur au profit du donataire ou de personnes interposées. Sont réputées personnes interposées les personnes désignées dans le dernier aliéna de l'article 911 et dans l'article 1100 du code civil ;
« Néanmoins, lorsque la dette a été consentie par un acte authentique ou par acte sous seing privé ayant date certaine avant la donation, le donataire et les personnes réputées interposées ont le droit de prouver la sincérité de cette dette et son existence au jour de la donation ;
« 3) Les dettes hypothécaires garanties par une inscription périmée depuis plus de trois mois, à moins qu'il ne s'agisse d'une dette non échue et que l'existence n'en soit attestée par le créancier dans les formes prévues à l'article L 20 du code des procédures fiscales ; si l'inscription n'est pas périmée, mais si le chiffre en a été réduit, l'excédent est seul déduit, s'il y a lieu ;
« 4) Les dettes en capital et en intérêts pour lesquelles le délai de prescription est accompli, à moins qu'il ne soit justifié que la prescription a été interrompue. »
II - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-127 rectifié bis.
La parole est à M. le rapporteur général, pour le présenter.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le dispositif prévu par cet amendement de notre excellent collègue Alain Lambert est tout à fait intéressant.
Il vise, pour la liquidation des droits de donation, à déduire de la valeur brute du patrimoine transmis les dettes du donateur transférées au donataire.
Il s'agit donc d'introduire dans le droit fiscal la prise en compte des donations avec charge, qui sont de nature à accélérer les transmissions anticipées de patrimoine et à répondre, pour une part, à l'enjeu démographique lié au vieillissement de la population.
Aujourd'hui, en application des articles 758 et suivants du code général des impôts, l'assiette des droits de donation est constituée par le patrimoine brut transmis.
Or, dans les cas de transmission d'une entreprise individuelle, le donataire est fréquemment mis en situation de reprendre également le passif sans possibilité de le déduire de l'assiette des droits de mutation.
Dans les donations entre parents et enfants portant sur un bien immobilier, la transmission peut être facilitée dès lors que les enfants acceptent de reprendre à leur compte le remboursement de l'emprunt ayant permis l'achat du bien en question. Or, là encore, les droits de donation sont calculés sur la valeur vénale de l'immeuble.
Le présent amendement tend donc à permettre de lever un blocage réel qui freine un nombre significatif de donations. Il vise à instaurer un certain nombre de garde-fous pour éviter d'éventuels abus.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission y est très favorable et c'est la raison pour laquelle je me suis permis de le reprendre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est embarrassé. En effet, cet amendement ayant été déposé par M. Lambert, il a naturellement fait l'objet d'un travail approfondi. La disposition proposée est très intéressante, mais nous n'avons pas eu le temps d'en évaluer toutes les conséquences ni d'étudier la façon dont nous pourrions l'intégrer dans les textes actuellement en vigueur.
Monsieur. le rapporteur général, je vous propose de retirer cet amendement, sachant que le Gouvernement s'engage solennellement, devant la Haute Assemblée, à le reprendre dans le projet de loi de finances rectificative après l'avoir examiné avec M. Lambert et les membres de la commission des finances, afin d'en évaluer toutes les conséquences et d'en tirer les meilleurs enseignements.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais tout d'abord remercier M. le secrétaire d'Etat de sa réponse très ouverte et très amicale.
Je m'interroge simplement non pas sur le fond, mais sur la procédure : à la vérité, très peu de jours vont séparer l'examen du projet de loi de finances rectificative des travaux de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances.
Par conséquent, nous avons le choix : soit nous retenons ce dispositif aujourd'hui et nous le rectifierons en tant que de besoin en commission mixte paritaire ; soit nous y renonçons pour le moment et nous le présenterons de nouveau lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative. Dans les deux hypothèses, le résultat sera le même, d'autant que le calendrier est, à peu de jours près, identique.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la commission des finances s'engage à revoir ce texte sur le plan technique, en liaison avec vos services. Je pense que nous gagnerions un temps précieux en votant cet amendement, même imparfait, aujourd'hui. Bien entendu, nous apporterons toutes les modifications nécessaires avant la réunion de la commission mixte paritaire de sorte que le dispositif soit parfaitement coordonné avec l'ensemble du droit en vigueur.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. J'ai demandé à la commission de faire confiance au Gouvernement Le rapporteur général demande maintenant au Gouvernement de faire confiance à la commission. Je suis prêt, naturellement, à lui faire confiance.
M. Philippe Marini. rapporteur général. Une confiance réciproque !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Nous choisirons donc ensemble la meilleure rédaction en commission mixte paritaire.
J'ai entendu haut et fort l'engagement de M. le rapporteur général, que M. le président de la commission des finances va certainement confirmer. En conséquence, je lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-127 rectifié ter.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La confiance règne entre le Gouvernement et la commission des finances.
Je me porte garant des engagements que le rapporteur général vient de prendre. Je me réjouis que nous puissions dès aujourd'hui voter cette disposition de principe, qui est très importante.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 9.
M. Michel Charasse. C'est un vote provisoire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Définitif sur le principe !
M. le président. L'amendement n° I-41, présenté par MM. Dassault, Saugey et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I-
1. Le tableau I prévu par l'article 777 du code général des impôts pour le tarif des droits applicables en ligne directe est ainsi rédigé :
FRACTION DE PART NETTE TAXABLE / TARIF APPLICABLE
N'excédant pas 140 000 euros: 0%.
Comprise entre 140 000 euros et 800 000 euros : 10%.
Au delà de 800 000 euros : 20%.
2. Le tableau II prévu par l'article 777 du code général des impôts pour le tarif des droits applicables entre époux est ainsi rédigé :
FRACTION DE PART NETTE TAXABLE / TARIF APPLICABLE
N'excédant pas 140 000 euros : 5 %.
Comprise entre 140 000 euros et 800 000 euros : 10 %.
Au-delà de 800 000 euros : 20 %.
3. Le tableau III prévu par l'article 777 du code général des impôts pour le tarif des droits applicables en ligne collatérale et entre non-parents est ainsi rédigé :
FRACTION DE PART NETTE TAXABLE / TARIF APPLICABLE
Entre frères et soeurs :
N'excédant pas 23 000 euros : 0 %.
Supérieure à 23 000 euros : 20 %.
Entre parents jusqu'au quatrième degré inclusivement : 30 %.
Entre parents au-delà du quatrième degré et entre personnes non parentes : 40 %.
II.-
La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Je ne me fais aucune illusion sur le sort de cet amendement (Rires.) - je commence à comprendre - mais il faut quand même en parler.
Depuis 1982, sous le gouvernement de François Mitterrand, le taux d'imposition sur les successions est passé de 20 % à 40 %. Il a tout simplement doublé ! C'est le plus élevé d'Europe. Depuis cette date, aucun gouvernement, qu'il soit de gauche ou de droite, n'a voulu le modifier.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Jusqu'à M. Sarkozy !
M. Serge Dassault. Pourtant, de plus en plus de pays le suppriment ou envisagent de le supprimer.
Un tel impôt concerne, en réalité, toutes les familles, même les plus modestes. Or certaines d'entre elles doivent vendre la maison dont elles héritent, et souvent dans de mauvaises conditions, car elles n'ont pas les moyens de payer les droits de succession.
Par conséquent, quels que soient les revenus, il s'agit d'un impôt confiscatoire, qui détruit le patrimoine.
C'est encore plus grave lorsqu'il s'agit d'entreprises : la perception d'un tel impôt peut conduire au démantèlement de l'entreprise et, souvent, à la suppression d'un grand nombre d'emplois, voire à la fin d'une activité importante pour le pays.
On me dira qu'il n'y a d'argent pour revenir aujourd'hui sur cette disposition. C'est malheureusement vrai ! Je souhaiterais néanmoins que le Gouvernement prête une oreille attentive à notre proposition et réfléchisse à la possibilité d'introduire une telle mesure dans le projet de budget pour 2006. Cette disposition permettrait de réduire considérablement cet impôt, qui est démotivant pour les enfants.
En outre, cet impôt constitue un facteur important de délocalisations personnelles, sous prétexte de recevoir quelques milliards d'euros, ou de faire payer les riches, comme on dit.
M. François Marc. Voilà !
M. Serge Dassault. Mais s'il n'y a plus de riches, il ne restera plus que des pauvres en France (Rires.) et il n'y aura plus d'emplois. Les riches peuvent tout de même servir ! Il faut donc agir pour en conserver au moins quelques-uns et ne pas trop les matraquer. C'est une disposition de bon sens, qui correspond à la réalité économique et industrielle : lorsqu'on démotive ceux qui créent des richesses, ils quittent le territoire pour en créer ailleurs, en tout cas ils n'en créent plus en France.
Je souhaite donc que le Gouvernement m'assure qu'il étudiera favorablement cette mesure, pas aujourd'hui, naturellement, mais l'année prochaine.
Je tiens également à évoquer le mode d'évaluation des biens de succession, bien qu'il ne fasse pas l'objet de ce texte. A l'heure actuelle, cette évaluation est aléatoire : elle dépend de l'estimation du contrôleur des impôts. Les valeurs mobilières sont évaluées le jour du décès. Or le cours des actions ayant parfois considérablement baissé six mois plus tard, lors de la vente, les familles ne perçoivent même pas le montant des droits de succession à payer.
Les autres biens, par exemple les biens immobiliers, sont également évalués le jour du décès. Si l'estimation est trop élevée, les familles ne trouvent pas d'acquéreur. Elles peuvent alors être conduites à vendre le bien à un prix moindre, mais elles restent imposables sur le montant déterminé lors de l'évaluation. Tout cela est profondément injuste !
Je souhaiterais donc que les droits de succession soient calculés sur la valeur réelle du bien et non pas de manière forfaitaire, ce qui n'a souvent rien à voir avec le prix de vente lui-même.
Par ailleurs, il conviendrait de porter le délai de paiement des droits de succession de six mois à un ou deux ans, ce qui permettrait aux familles de vendre dans de bonnes conditions
Sans doute va-t-on me demander de retirer cet amendement, puisqu'il n'a aucune chance d'être adopté. (Sourires.) Toutefois, je souhaiterais que le Gouvernement réfléchisse à la suppression de cet impôt, comme c'est le cas en Italie et en Espagne, ou du moins à la réduction de son taux. Cela résoudrait de nombreux problèmes ! Il faudrait également revoir les modalités d'évaluation ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission constate des similitudes entre les réflexions qui viennent d'être formulées et les raisonnements qui ont été tenus dans le rapport d'information de 2002 : nous avions plaidé pour une restructuration en profondeur des droits de succession et de donation, pour une reprise, en profondeur également, du barème, que nous avions imaginé simplifié, comportant moins d'étapes, avec des taux sensiblement abaissés.
Monsieur Dassault, le coût du reprofilage du barème tel que vous le souhaitez s'élèverait à environ à 2,5 milliards d'euros. C'est considérable ! Vous avez du reste anticipé cette remarque : ce coût ne peut être assumé aujourd'hui par les finances publiques. L'année prochaine, la situation sera peut-être meilleure, mais je serais tout de même surpris que l'on puisse absorber 2,5 milliards d'euros d'un seul coup.
La mesure qui nous est proposée par le Gouvernement est une première étape positive. Certaines catégories de patrimoine bénéficient d'un effet à la baisse très sensible ; j'en ai d'ailleurs donné des illustrations dans le rapport écrit. Cette réforme est loin d'être négligeable : elle représente, si je ne me trompe, une baisse de 630 millions d'euros des recettes fiscales. Une partie du chemin est donc déjà parcourue, même s'il ne faut pas perdre de vue l'objectif d'ensemble que vous avez fort bien défendu.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Monsieur Dassault, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention. Vous avez raison de poser le problème de l'allègement des droits de succession. Mais vous avez bien compris que les marges de manoeuvre budgétaires qui sont les nôtres dans cette première période de reprise de la croissance ne nous permettent pas, pour l'instant, de retenir une telle proposition.
La loi de finances de 2003 et celle de 2004 - ce sera bientôt le cas de la loi de finances de 2005 - comportent un certain nombre de mesures destinées à alléger les droits de succession.
Je rappelle également une disposition que Nicolas Sarkozy et moi-même avons fait voter au printemps : il s'agit de la franchise de droits accordée aux dons exceptionnels. Pour l'instant, environ 4 milliards d'euros ont été transmis à des ayants droit grâce à cette mesure. Toutes ces politiques vont dans la direction que vous nous indiquez.
Cela étant, j'ai bien compris que votre sens de l'intérêt public allait vous conduire à retirer cet amendement et, par avance, je vous en remercie.
M. le président. Monsieur Dassault, l'amendement n° I-41 est-il maintenu ?
M. Serge Dassault. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-41 est retiré.
L'amendement n° I-148, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I- L'article 17 de la loi n° 20031311 de finances pour 2004 du 30 décembre 2003 est abrogé.
II- Au II de l'article 790 du code général des Impôts, après les mots : « réduction de 50 % », la fin de la phrase est supprimée.
III- La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. La loi de finances pour 2003 a instauré une réduction des droits pour les donations en pleine propriété, et ce à titre temporaire. Nous avions alors débattu des effets que pouvait avoir une telle disposition. Ils sont évidents : elle a encouragé la transmission anticipée du patrimoine en pleine propriété.
L'amendement n° I-148 tend donc à pérenniser cette mesure qui avait été votée pour un an.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis défavorable. En effet, cette mesure avait un caractère incitatif parce qu'elle était temporaire. En la pérennisant, vous en faites disparaître techniquement l'intérêt, monsieur Badré. En outre, une telle disposition serait trop coûteuse.
C'est pourquoi le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Badré, l'amendement est-il maintenu ?
M. Denis Badré. Je le maintiens, monsieur le président.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Dans ce cas, le Gouvernement est beau joueur et il lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-148 rectifié.
Je mets aux voix l'amendement n° I148 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 9.
L'amendement n° I-296 rectifié bis, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux, MM. Darniche, Retailleau, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le deuxième alinéa de l'article 793 bis du code général des impôts, la somme : « 76 000 euros » est remplacée par la somme : « 150 000 euros ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I40 rectifié, présenté par MM. Dassault, Saugey et Vasselle, est ainsi libellé :
I - Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 848 bis du code général des impôts, est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... Est soumise à une imposition fixe de 15 €, la déclaration prévue à l'article L.526-1 du code de commerce. »
II - La perte de recettes pour le budget de l'Etat résultant de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Il s'agit d'une mesure favorable aux artisans et aux petites et moyennes entreprises. Leurs représentants m'ont alerté sur une mesure qui leur paraît importante : la loi pour l'initiative économique du 1er août 2003.
Cette loi a permis à un certain nombre de responsables de PME et aux artisans de protéger leur résidence principale en cas d'éventuelles poursuites par les créanciers. A la suite d'une déclaration effectuée auprès d'un notaire, l'insaisissabilité est publiée au bureau des hypothèques.
C'est à l'occasion de l'application de ces dispositions que les problèmes se posent pour les chefs des petites entreprises individuelles. Une instruction fiscale soumet maintenant cette déclaration à un coût qu'ils trouvent prohibitif puisqu'ils doivent payer une taxe de publicité de 75 euros et l'hypothèque à hauteur de 0,1 % de la valeur de la résidence principale. Cela induit pour eux un coût supplémentaire d'évaluation du bien. C'est inacceptable : cela n'incite pas les créateurs d'entreprise et les chefs de PME à protéger leur résidence principale dans la mesure où des contraintes financières trop lourdes leur sont imposées.
Si nous voulons faire progresser l'accès à la propriété, je propose de lever ces barrières : le montant de la taxe de publicité pourrait s'élever à 15 euros au lieu de 75 euros et le salaire du conservateur être porté forfaitairement à 15 euros au lieu de 0,1 % de la valeur de la résidence principale. Voilà ce que les représentants de l'artisanat et des petites et moyennes entreprises demandent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement. En effet, les informations qui lui ont été transmises, et qui doivent encore être confirmées par le Gouvernement, lui laissent penser que l'abaissement des coûts intercalaires a déjà été, sinon décidé, du moins envisagé par la voie administrative.
Les 15 euros payés au titre de la taxe sur la publicité foncière et le forfait de 15 euros pour le salaire du conservateur des hypothèques semblent correspondre aux intentions du ministre de l'économie et des finances. Vous avez donc raison de vouloir donner une base législative à cette mesure, monsieur Dassault.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, confirmer les informations qui nous ont été transmises et sur lesquelles la commission des finances s'est appuyée pour émettre un avis favorable sur cet amendement ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement souhaite disposer de quelques jours pour étudier cette mesure, tant sur le fond que sur la forme. En effet, comme l'a souligné M. le rapporteur général, nous nous demandons si nous sommes dans le domaine législatif ou dans le domaine réglementaire.
Je prends l'engagement de travailler avec la commission des finances et avec M. Dassault, afin de présenter à la Haute Assemblée, lors de l'examen du collectif budgétaire, c'est-à-dire dans quelques jours, une solution qui sera peut-être d'ailleurs identique à celle qui est proposée dans l'amendement.
Par conséquent, je souhaite le retrait de l'amendement.
M. le président. Monsieur Dassault, l'amendement n° I-40 rectifié est-il maintenu ?
M. Serge Dassault. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-40 rectifié est retiré.
L'amendement n° I-216, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa du I de l'article 990 I du code général des impôts, le montant : « 152 500 euros » est remplacé par le montant : « 100 000 euros ».
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Toujours sans aucune justification en termes de croissance ou d'emploi, le Gouvernement a choisi, comme nous l'avons déjà dit tout à l'heure, de consacrer 630 millions d'euros à une remise en cause des droits de succession.
Ce faisant, il néglige, d'une part, la multiplicité des dispositifs d'abattement venant réduire le montant total de la succession et, d'autre part, le fait qu'une grande partie de la transmission s'effectue au travers de l'assurance-vie qui permet de léguer jusqu'à 152 500 euros en franchise de droits. Et cet abattement, au-delà duquel s'applique une taxation de 20 %, est accordé à chacun des bénéficiaires.
Pour éviter que les avantages fiscaux consentis aux personnes les plus aisées ne conduisent à une totale défiscalisation des successions, il est proposé de limiter la possibilité de transmission d'un patrimoine en exonération totale de droits au travers de l'assurance-vie à un montant comparable à celui qui est retenu par le Gouvernement pour les successions proprement dites, soit 100 000 euros.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° I217, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 1115 du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Cet amendement tend à supprimer l'exonération de droits de mutation accordée aux marchands de biens sans que l'objectif d'intérêt général soit évident.
Les marchands de biens sont des personnes qui achètent des biens immobiliers pour les revendre avec une plus-value. Ce qui distingue les marchands de biens, sur un plan fiscal en tout cas, c'est l'intention spéculative.
L'un des moyens privilégiés d'intervention de ces marchands de biens consiste à pratiquer ce que l'on appelle le « congé pour vente » à l'occasion d'une « vente à la découpe », moyen également privilégié par les fonds de pensions pour dégager rapidement des plus-values immobilières.
Ces acteurs ont trouvé chez les bailleurs institutionnels un inépuisable gisement de logements à bons prix. Depuis quelques années, en effet, les bailleurs institutionnels, plutôt que de rénover un parc ancien, cherchent à profiter des niveaux élevés du marché et procèdent à des ventes massives dans leur parc de logements. Ce phénomène a du reste été amplifié par la réforme fiscale des sociétés foncières engagée, au détour d'amendements d'origine sénatoriale, par l'actuelle majorité. Cette réforme a, si l'on peut dire, contribué à doper ce secteur puisque ces sociétés sont exonérées de plus-values immobilières, ce qui les incite à accélérer les opérations, voire à agir dans la précipitation.
Depuis deux ans, on assiste ainsi à une multiplication des congés à visées spéculatives. Ils sont devenus si nombreux que la plupart des spécialistes du marché de l'immobilier estiment qu'ils contribuent directement à accentuer la flambée des prix de l'immobilier.
La conséquence de ces opérations est l'éviction des classes moyennes et des locataires de condition modeste qui n'ont pas les moyens de racheter leur logement ou de supporter l'augmentation des loyers consécutive à la mise en vente.
Comme l'intérêt général ne justifie plus une telle exonération, nous proposons de la supprimer, de façon non rétroactive.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait défavorable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° I-4, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Le I de l'article 1717 du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Le paiement différé ou fractionné des droits en matière de droits d'enregistrement donne lieu à paiement d'intérêt.
« Toutefois, les différés de paiement demandés en raison des mutations par décès qui comportent dévolution de biens en nue-propriété peuvent être dispensés du paiement d'intérêt dans des conditions prévues par décret.
« Il en est de même, dans des conditions prévues par décret, des différés de paiement en raison des mutations par décès, pour les droits s'appliquant à l'immeuble constituant au jour du décès la résidence principale du défunt et du conjoint survivant ou du partenaire lié au défunt par un pacte civil de solidarité ou d'une personne définie au I de l'article 788 du code général des impôts, jusqu'au décès du bénéficiaire du différé ou à toute mutation intervenant antérieurement à ce décès. »
II.- La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée par la création à due concurrence d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à remédier à la situation, parfois douloureuse, du conjoint ou du cohabitant survivant - ce peut-être dans le cadre d'un PACS ou d'une fratrie - lorsqu'il est nécessaire de régler les droits de succession sur la valeur de la résidence principale et que le conjoint ou le cohabitant survivant souhaite demeurer dans cette résidence.
Nous connaissons tous des situations où, après avoir subi un traumatisme affectif, une personne traverse une période économiquement difficile parce qu'elle doit payer des droits pour demeurer dans sa propre habitation.
La commission des finances s'est attaquée à ce problème. Elle présente une proposition qui ne devrait pas coûter cher à l'Etat puisqu'elle induit un simple décalage de trésorerie.
La commission envisage donc d'instituer un différé de paiement sans intérêts pour la valeur de la résidence principale, différé dont le terme serait soit le décès du second cohabitant, soit la cession de la résidence principale. La base taxable demeurerait identique, mais l'impôt ne serait liquidé que lors de la survenance de l'un de ces deux événements. Cette mesure nous semble de nature à rassurer nombre de nos concitoyens.
J'ajoute que, l'année dernière, sur l'initiative de la commission des finances, qui souhaitait l'adoption d'une telle disposition depuis plusieurs années, le Sénat a voté une réforme du barème de l'usufruit et de la nue-propriété. Le barème existant se fondait, je le rappelle, sur les tables de mortalité de 1903 !
Nous avons donc procédé à un réajustement, grâce à Alain Lambert, qui occupait alors vos fonctions, monsieur le secrétaire d'Etat, tout en ayant conscience que cette réforme pourrait entraîner quelques effets pervers sur la situation des conjoints survivants.
Lorsqu'il s'agit de personnes âgées, le fait d'augmenter la valeur de l'usufruit - augmentation justifiée par l'allongement de la durée de la vie - peut se traduire, dans certains cas, par un relèvement significatif des droits de mutation à titre gratuit qui sont à la charge du conjoint survivant.
La commission des finances, alertée sur la situation difficile de ces personnes - notamment par les notaires, qui sont particulièrement sensibles à cette question - a cherché des parades en exonérant de droits les couples mariés qui passaient sous le régime de la communauté universelle. Cette mesure a d'ailleurs donné de bons résultats puisque nombre de personnes ont choisi ce régime.
Toutefois, cette option n'est pas toujours possible. C'est notamment le cas lorsque l'actif comprend des biens professionnels, avec des risques que l'on ne veut pas nécessairement partager en totalité. D'où les insatisfactions qui se sont manifestées. La présente proposition nous semble équitable dans la mesure où elle évite un traumatisme pour les personnes concernées, sans amputer les recettes fiscales de l'Etat, ce dernier ne supportant qu'un décalage de trésorerie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement considère qu'il peut régler ce problème par la voie réglementaire. Il prend l'engagement de le faire avant la discussion du projet de loi de finances rectificative, sous le contrôle de la commission des finances.
Si le Gouvernement ne parvient pas à proposer une solution avant cette échéance, il acceptera un amendement de la commission sur ce point lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur le rapporteur général ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je remercie M. le secrétaire d'Etat de sa réponse. Ce qui compte, c'est non pas la forme, mais le fond : les personnes qui se trouvent dans la situation que j'ai décrite doivent pouvoir bénéficier du sursis d'imposition. A la limite, peu importent les voies que nous suivrons pour y parvenir. L'important, c'est votre parole, monsieur le secrétaire d'Etat.
Si je vous ai bien compris, et je vous demande de me le confirmer, vous souscrivez, sur le fond, à la mesure que la commission propose dans cet amendement. (M. le secrétaire d'Etat fait un signe d'assentiment.)
Pour montrer la confiance que la commission fait au Gouvernement, en particulier à votre personne, monsieur le secrétaire d'Etat, je retire l'amendement n° I-4.
Si le Gouvernement ne parvient pas à élaborer un texte de nature réglementaire avant la discussion au Sénat du projet de loi de finances rectificative, la commission déposera à nouveau un amendement à cet égard.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, je souhaiterais que, dans la ligne de ce que le Sénat a déjà décidé sur proposition du président Arthuis, l'amendement n° I-5, qui vise l'ensemble des droits d'enregistrement et concerne donc indirectement l'impôt sur la fortune, soit intégré dans la réserve qui a été précédemment ordonnée, de manière qu'il soit également examiné lundi prochain.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Cette réserve va de soi, monsieur le président. Le Gouvernement y est donc tout à fait favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que, outre cet amendement n° I-5, l'article 9 bis ainsi que les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 9bis sont réservés jusqu'à lundi matin.
Article additionnel avant l'article 10 ou après l'article 13
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-10, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Avant l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Le III de l'article 219 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« III.- Les fondations reconnues d'utilité publique sont exonérées d'impôt sur les sociétés pour les revenus mentionnés au I. »
II.- Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'exonération d'impôt sur les sociétés pour les fondations reconnues d'utilité publique prévue au I ci-dessus sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Chacun se souvient que, dans la loi de finances pour 2004, figure une réforme importante des distributions de revenus à travers la suppression du régime du précompte mobilier, d'une part, et la quasi-suppression de l'avoir fiscal, d'autre part.
Or certaines entités qui détiennent dans leur patrimoine des actions sont particulièrement sensibles à la nouvelle situation ainsi créée et sont pénalisées dans les résultats de leur gestion : il s'agit, en particulier, des associations et des fondations reconnues d'utilité publique lorsqu'elles ont recours à une dotation placée pour l'essentiel en actions.
L'an dernier, monsieur le secrétaire d'Etat, la commission des finances avait, au sujet de la réforme de l'avoir fiscal, défendu un point de vue tout à fait opposé à celui de votre prédécesseur. Notre analyse était effectivement tout à fait différente et j'avais notamment mis en garde notre assemblée sur les effets collatéraux de la réforme pour les associations et les fondations reconnues d'utilité publique.
Notre excellent collègue Yann Gaillard avait, quant à lui, lors de l'examen du projet de loi relatif au mécénat, aux associations et aux fondations, soulevé un problème de même nature et proposé l'exonération totale d'impôt sur les sociétés des revenus des fondations reconnues d'utilité publique, revenus tirés de leur dotation. Cette proposition n'avait pas été totalement suivie et un compromis était alors intervenu.
En fait, monsieur le secrétaire d'Etat, la situation qui prévaut actuellement, de par la suppression de l'avoir fiscal, est une situation somme toute préjudiciable. C'est ainsi que, dans le cas de la Fondation de France, par exemple, la perte liée à la suppression de l'avoir fiscal peut être évaluée à 2 millions d'euros par an, somme qui ne pourra donc être investie dans les actions que cette fondation a vocation à soutenir.
Cela est regrettable, car il s'agit bien d'une rupture d'équilibre de gestion engendrée par la suppression de l'avoir fiscal.
Dès lors, il convient de revenir au fondement de la fiscalité des fondations et, à cet égard, je me suis référé à un avis qui avait été adopté par la section de l'intérieur du Conseil d'Etat et que je cite dans mon rapport écrit.
Il me semble que la spécificité des fondations est suffisamment nette et garantie par la loi pour que leur soit réservé un régime fiscal particulier. En effet, il est légitime de traiter les fondations reconnues d'utilité publique mieux que l'on ne traiterait des associations financées par des cotisations ou par des dons.
En conclusion, puisque les revenus du patrimoine constituent pour les fondations une source importante, voire la source principale de financement de leurs activités d'intérêt général, il paraît opportun, dès lors que l'avoir fiscal est remis en cause, de poser le principe d'une exonération d'impôt sur les sociétés au titre des revenus du patrimoine desdites fondations reconnues d'utilité publique.
M. le président. L'amendement n° I-149, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 219 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
A. Après le cinquième alinéa du I, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les fondations reconnues d'utilité publique, par dérogation, le taux de l'impôt sur les sociétés dû sur les revenus visés aux premier et deuxième alinéas est fixé à 3 %. »
B. En conséquence, dans le sixième alinéa les mots : « premier à cinquième alinéas » sont remplacés par les mots : « premier à sixième alinéas »
II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par la création, au profit de l'Etat, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement, même s'il va un peu moins loin, est quasiment identique à celui que vient de défendre M. le rapporteur général et auquel nous serions évidemment prêts à nous rallier.
Pour ma part, je voudrais, au moment où des dispositions favorables sont prises pour les personnes physiques, insister sur les difficultés qu'engendre le dispositif actuel pour la Fondation de France et d'autres fondations tout aussi importantes.
Le Gouvernement a, par la voix du Premier ministre lui-même, exprimé sa très forte volonté de développer le rôle des fondations dans notre pays.
Dans cet esprit, afin de renforcer leurs moyens d'intervention, nous proposons que soit fixé un taux d'imposition réduit, de 3 %, sur les revenus du patrimoine des fondations reconnues d'utilité publique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° I-149 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement se situe effectivement dans le même esprit que l'amendement n° I-10 et je tiens à remercier nos collègues du groupe de l'Union centriste de s'associer à notre démarche.
En conséquence, je leur suggérerai de bien vouloir retirer leur amendement au profit de l'amendement n° I-10.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Naturellement, le Gouvernement est très favorable au développement des fondations, notamment de la Fondation de France.
J'ajoute qu'il existe dans notre pays de grandes fondations politiques dont le but est de favoriser l'engagement civique de nos concitoyens, fondations dont le Gouvernement approuve bien sûr également l'action.
Je vous rappelle que, si l'avoir fiscal a été supprimé pour les fondations, celles-ci bénéficient d'un dispositif spécifique, caractérisé par l'abattement applicable à l'impôt sur les sociétés au taux réduit dont elles sont redevables sur leurs revenus patrimoniaux, abattement qui a été relevé à 50 000 euros dans le cadre de la loi du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations. Cet abattement vise à prendre en compte la spécificité des fondations dont la vocation est avant tout à affecter le fruit d'un patrimoine à une cause, à une mission.
Par ailleurs, je rappelle que les dividendes de source française sont totalement exonérés de l'impôt sur les sociétés.
Les autres personnes morales de droit privé, à l'exception des associations, ne bénéficient ni d'une imposition à taux réduit pour les autres revenus patrimoniaux ni d'une exonération pour les dividendes de source française.
Enfin, je souligne que, depuis la loi du 1er août 2003 précitée, le Gouvernement a renforcé l'incitation fiscale qui permet d'encourager le financement privé des fondations.
C'est ainsi que, depuis l'entrée en vigueur de cette loi, les entreprises qui effectuent des dons au profit de fondations peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt égale à 60% des versements, ce qui constitue un doublement de l'avantage fiscal qui prévalait dans la version précédente du dispositif. Les dons effectués par des particuliers ouvrent également droit à une réduction d'impôt de 60%.
Au regard de ces explications, monsieur le rapporteur général, monsieur Jégou, vous comprendrez que le Gouvernement ne puisse être favorable à une accentuation de l'écart existant entre le régime fiscal dont bénéficient les fondations et celui dont bénéficient les autres personnes morales. Il y aurait là une dissymétrie que le Gouvernement ne saurait accepter.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Toute discussion peut, certes, donner lieu à des désaccords ; cela ne met pas en cause l'essentiel.
Cela étant, monsieur le secrétaire d'Etat, la commission souhaite maintenir son amendement, et ce pour deux raisons.
En premier lieu, il s'agit de traiter des conséquences de la réforme de l'avoir fiscal.
En effet, auparavant, les fondations ne demandaient rien à personne et équilibraient leur gestion financière grâce à l'avoir fiscal.
M. Michel Charasse. Qui ne demandaient rien à personne... cela reste à voir ! Elles font quand même la quête régulièrement ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur Charasse, je parle ici d'entités qui prennent en charge des oeuvres d'intérêt public : si elles n'existaient pas, ce sont les crédits publics, ceux de l'Etat et des collectivités locales, qui devraient être mobilisés pour réaliser les mêmes objectifs.
Quand je dis qu'elles ne demandaient rien à personne, cela signifie qu'elles étaient tout à fait satisfaites de leur situation sur le plan fiscal et qu'elles n 'étaient porteuse d'aucune revendication à cet égard.
Or, pour diverses raisons n'ayant rien à voir avec les fondations, a été incluse dans la loi de finances une disposition supprimant l'avoir fiscal et le précompte. Dès lors, ces fondations ont été touchées par un effet collatéral, alors qu'elles étaient en quelque sorte de simples spectatrices de la réforme. Ce sont les entreprises industrielles et commerciales qui ont bénéficié de la suppression du précompte
En ce qui concerne les particuliers et les souscripteurs d'actions, c'est une autre affaire sur laquelle nous reviendrons ultérieurement.
En second lieu, je voudrais insister sur la spécificité des fondations reconnues d'utilité publique : elles ont été créées selon une procédure elle-même très spécifique, elles doivent répondre à des critères particuliers et apporter des garanties tout aussi particulières de sérieux dans leur gestion et de bonne affectation des fonds qui leur sont dévolus.
Nous savons tous que, dans notre pays, par rapport à d'autres, la faiblesse des fondations pose un problème. Ainsi, en matière de recherche, d'action humanitaire ou de préservation du patrimoine, nous nous porterions beaucoup mieux si, comme les Anglo-Saxons, nous disposions de grandes fondations bénéficiant de l'indépendance la plus complète et recyclant des patrimoines privés à des fins d'intérêt général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ce que nous demandons ici, c'est simplement un ajustement, puisque, comme vous l'avez dit, les actions françaises font déjà l'objet d'une exonération. Il s'agit donc uniquement d'étendre cette exonération et de montrer à ces organismes d'intérêt public, au premier chef à la Fondation de France, que nous avons bien perçu les conséquences dommageables pour elles entraînait la réforme de l'avoir fiscal.
J'espère avoir été suffisamment clair sur un sujet somme toute assez technique.
En résumé, la commission des finances estime que sa démarche est tout à fait légitime et que la mesure proposée n'est pas d'une ampleur considérable. En effet, compte tenu du petit nombre de fondations qui pourront se prévaloir de cette mesure, le coût pour l'Etat devrait être très modéré.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le secrétaire d'Etat, ne pouvant vous suivre sur ce point particulier, la commission maintient son amendement.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement n° I-149 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. M. le rapporteur général a fait preuve d'un tel talent dans son plaidoyer que je ne me mesurerai pas à lui ! Je crois cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il faut retenir une phrase de ses propos : nous avons besoin de fondations puissantes. C'est important, car elles nous font défaut.
Pour la clarté du débat, nous retirons l'amendement n° I-149 au profit de celui qu'a défendu le rapporteur général, qui est de nature à permettre le développement des fondations. Avec M. Marini, nous espérons que cet amendement n° I-10 sera adopté.
M. le président. L'amendement n° I-149 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° I-10.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 10.
Article additionnel avant l'article 10
M. le président. L'amendement n° I-11, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Avant l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - A. - L'article 151 septies du code général des impôts est complété in fine par un paragraphe ainsi rédigé :
« VII. - Pour l'appréciation des limites prévues au présent article applicables aux titulaires de bénéfices non commerciaux membres d'une société civile de moyens mentionnée à l'article 239 quater A non soumise à l'impôt sur les sociétés, il est tenu compte des recettes réalisées par cette société, à proportion de leurs droits dans les bénéfices comptables. Toutefois, ces limites sont appréciées en tenant compte du montant global des recettes, lorsque la plus-value est réalisée par la société. »
B. - Dans le III de l'article 202 bis du code général des impôts, les mots : « et VI » sont remplacés par les mots : «, VI et VII ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée par la création à due concurrence d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement tend à insérer un article additionnel visant à préciser que les seuils d'exonération des plus-values professionnelles sont appréciés dans certains cas, pour les titulaires de bénéfices non commerciaux membres d'une société civile de moyens, au prorata de leurs droits dans ces sociétés.
En fait, si des membres d'une profession libérale, par exemple des avocats, des experts-comptables, des géomètres experts ou autres, ont constitué une société, il faut être certain que, lorsque l'un d'eux se retirera pour faire valoir ses droits à retraite, la question de la valorisation de ses parts et de la taxation de la plus-value ainsi dégagée sera réglée.
L'amendement n° I-11 a pour objet de rendre la structure sociétaire transparente : en d'autres termes, chacun sera taxé, le cas échéant, sur sa quote-part de plus-value dans l'ensemble du patrimoine de la société concernée.
Nous estimons donc que, pour les titulaires de BNC exerçant dans le cadre d'une société civile de moyens non assujettie à l'impôt sur les sociétés - les sociétés de capitaux ne sont pas visées -, les seuils de recettes pris en compte pour l'exonération des plus-values professionnelles doivent être appréciés à proportion des droits de l'associé aux bénéfices comptables de la société, sauf si la plus-value était réalisée par la société elle-même.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est très favorable à cet amendement, dont il lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-11 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 10.
Article 10
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Il est inséré un article 244 quater I ainsi rédigé :
« Art. 244 quater I. - I. - Les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel qui, après avoir cessé tout ou partie de leur activité imposable en France et transféré cette activité hors de l'Espace économique européen, la domicilient à nouveau au sens de l'article 4 B et du I de l'article 209, en provenance d'un pays situé hors de l'Espace économique européen, entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2007, bénéficient, sur agrément, d'un crédit d'impôt.
« N'ouvrent pas droit au bénéfice du crédit d'impôt les activités exercées dans l'un des secteurs suivants : transports, construction de véhicules automobiles, construction de navires civils, fabrication de fibres artificielles ou synthétiques, sidérurgie, industrie charbonnière, production, transformation ou commercialisation de produits agricoles, pêche, aquaculture, assurances, réassurances, crédit et capitalisation.
« II. - Ce crédit d'impôt est égal aux dépenses de personnel relatives aux emplois créés affectées d'un coefficient. Ce coefficient est de 0,5 pour les dépenses de personnel exposées au cours des douze mois suivant l'implantation, de 0,4 pour les dépenses exposées du treizième mois au vingt-quatrième mois, de 0,3 pour les dépenses exposées du vingt-cinquième mois au trente-sixième mois, de 0,2 pour les dépenses exposées du trente-septième mois au quarante-huitième mois et de 0,1 pour les dépenses exposées du quarante-neuvième mois au soixantième mois suivant l'implantation.
« III. - Lorsque l'activité est nouvellement implantée dans une zone éligible à la prime d'aménagement du territoire classée pour les projets industriels, les entreprises visées au I bénéficient en outre, pendant une période de trente-six mois suivant l'implantation, d'un crédit d'impôt calculé par période de douze mois en faisant application d'un taux au plus important des deux montants suivants : montant des dépenses de personnel relatives aux emplois créés ou montant hors taxes des investissements éligibles réalisés. Ce taux est égal à 10 % lorsque l'activité est nouvellement implantée dans une zone éligible à la prime d'aménagement du territoire classée à taux réduit pour les projets industriels. Il est porté à 15 % lorsque l'activité est implantée dans une zone éligible à la prime d'aménagement du territoire classée à taux normal pour les projets industriels, à 20 % lorsque l'activité est implantée dans une zone éligible à la prime d'aménagement du territoire classée à taux majoré pour les projets industriels et à 65 % lorsque l'activité est implantée dans un département d'outre-mer.
« IV. - Pour l'application des II et III, les dépenses de personnel comprennent les rémunérations et leurs accessoires, ainsi que les charges sociales dans la mesure où celles-ci correspondent à des cotisations obligatoires. En outre, la création d'un emploi doit résulter du recrutement en activité à temps plein ou partiel d'une personne pour laquelle les cotisations sociales sont acquittées auprès des organismes régis par le code de la sécurité sociale.
« V. - Pour l'application du III, les investissements éligibles s'entendent hors taxes. Leur montant comprend le prix de revient des immobilisations corporelles constituées du terrain, des bâtiments et des équipements ainsi que celui des brevets. Ces investissements doivent être liés à l'activité de l'entreprise bénéficiaire et correspondre à l'opération de relocalisation réalisée. Ils doivent être exécutés et inscrits dans les écritures de l'entreprise bénéficiaire pendant la période de réalisation de l'opération de relocalisation.
« VI. - Les taux prévus au III sont majorés de 10 points lorsque les entreprises visées au I sont des petites et moyennes entreprises telles qu'elles sont définies à l'annexe I au règlement (CE) n° 70/2001, de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises.
« VII. - Sans préjudice de l'application des III et VI, les entreprises visées au I peuvent bénéficier du crédit d'impôt en faveur des entreprises qui relocalisent tout ou partie de leur activité en France dans les limites prévues par le règlement (CE) n° 69/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis.
« VIII. - Lorsque le montant des dépenses ou des investissements éligibles définis aux IV et V est supérieur à 50 millions d'euros, le crédit d'impôt ne peut excéder un plafond déterminé en appliquant un taux égal à 50 % du taux régional défini au III pour la fraction supérieure à 50 millions d'euros et inférieure ou égale à 100 millions d'euros. La fraction des dépenses ou investissements éligibles supérieure à 100 millions d'euros n'est pas retenue pour le calcul du plafond.
« VIII bis. - Le montant du crédit d'impôt prévu par le présent article ne peut excéder le montant des dépenses de personnel ou des investissements éligibles réellement exposés par les entreprises visées au I.
« IX. - Le crédit d'impôt calculé par les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8, 238 bis L et 239 ter ou les groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater A, 239 quater B et 239 quater C qui ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés peut être utilisé par leurs associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements, à condition qu'il s'agisse de redevables de l'impôt sur les sociétés ou de personnes physiques participant à l'exploitation au sens du 1° bis du I de l'article 156.
« X. - L'agrément visé au I est accordé par le ministre chargé du budget dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies lorsque :
« a. L'ensemble des obligations légales fiscales et sociales étaient respectées lors de la cessation et du transfert ;
« b. La cessation et le transfert de l'activité ont eu lieu entre le 1er janvier 1999 et le 22 septembre 2004 ;
« c. Les biens et services produits dans le cadre de l'activité implantée sont de même nature que ceux produits préalablement à la cessation et au transfert de cette activité compte tenu des évolutions technologiques et économiques de l'activité ;
« d. Le financement des investissements éligibles définis au V est assuré à 25 % au moins par l'entreprise bénéficiaire du crédit d'impôt ;
« e. La société prend l'engagement de maintenir les emplois créés ou les investissements réalisés pendant une période minimale de cinq ans à compter de la nouvelle implantation.
« XI. - Le non-respect de l'engagement visé au e du X entraîne le reversement des crédits d'impôt obtenus en application du présent article.
« XII. - Les emplois ou les investissements afférents à l'opération de relocalisation dont le coût a déjà été pris en compte dans le cadre d'un régime d'aides ne sont pas pris en compte pour le calcul du crédit d'impôt. » ;
2° Il est inséré un article 199 ter H ainsi rédigé :
« Art. 199 ter H. - I. - Le crédit d'impôt défini au II de l'article 244 quater I est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle chaque période de douze mois s'achève, jusqu'à expiration de la période de soixante mois. Si le montant du crédit d'impôt excède l'impôt dû au titre de ladite année, l'excédent est restitué.
« II. - Le crédit d'impôt défini au III de l'article 244 quater I est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle chaque période de douze mois s'achève, jusqu'à expiration de la période de trente-six mois. Si le montant du crédit d'impôt excède l'impôt dû au titre de ladite année, l'excédent est restitué. » ;
3° Il est inséré un article 220 J ainsi rédigé :
« Art. 220 J. - Les crédits d'impôt définis aux II et III de l'article 244 quater I sont imputés sur l'impôt sur les sociétés dû par l'entreprise dans les conditions prévues aux I et II de l'article 199 ter H. » ;
4° Le 1 de l'article 223 O est complété par un j ainsi rédigé :
« j. Des crédits d'impôt dégagés par chaque société du groupe en application de l'article 244 quater I ; les dispositions de l'article 220 J s'appliquent à la somme de ces crédits d'impôt. »
II. - Un décret fixe les conditions d'application du I, notamment les obligations déclaratives incombant aux entreprises concernées et les conditions d'octroi et de retrait de l'agrément.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.
Mme Nicole Bricq. L'article 10 est important, car il a trait aux délocalisations.
Il est assez symptomatique que le débat sur les délocalisations ressurgisse dans des contextes déprimés, voire dépressifs : c'était le cas en 1993 - et M. Arthuis s'en souvient, puisqu'il avait rédigé un rapport à ce sujet - comme c'est le cas aujourd'hui, en 2004.
Mon propos n'est pas de banaliser les statistiques qui nous montrent que les délocalisations ne provoquent en réalité que 5 % des pertes d'emplois dans notre pays : je sais que, lorsqu'elles surviennent, elles sont très douloureuses et que localement, notamment dans les régions de mono-industrie, elles ont un effet désastreux et sont pourvoyeuses de malheur social.
Mais la menace de fond qui pèse sur la France comme sur l'Europe, c'est la perte de substance industrielle. Les délégations pour l'Union européenne tant du Sénat que de l'Assemblée nationale ont été saisies tout dernièrement d'un rapport du groupe de haut niveau sur la révision à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi : il y est malheureusement constaté que seuls deux pays consacrent plus de 3 % de leur production intérieure brute à la recherche et au développement, et la France n'en fait pas partie.
La politique industrielle européenne est toujours inexistante, hormis des balbutiements dans le secteur de la défense. En France, l'effort en matière d'éducation et de recherche est très insuffisant, et il n'y a plus de politique industrielle. Le rapport du Conseil d'analyse économique de MM. Fontagné et Lorenzi, remis au Premier ministre le 18 novembre, lance à ce sujet un cri d'alarme et souligne l'urgence d'une réaction de la sphère publique, qui doit, que ce soit à l'échelon européen, à l'échelon de l'Etat ou à l'échelon des régions, concentrer ses efforts sur quelques priorités sectorielles et géographiques.
Les mesures qui nous sont proposées dans le projet de loi de finances représentent 360 millions d'euros. Elles sont évidemment très insuffisantes pour répondre au problème et - selon une phrase de M. Marini qui figure dans le rapport général - leur impact sera très difficile - quasiment impossible, ajouterai-je - à mesurer.
Nous sommes très loin du compte ! Il nous faut des politiques publiques volontaires en faveur de l'industrie, des mesures de rattrapage sectoriel : or elles ne se lisent pas dans les budgets qui nous sont soumis, pas plus en recettes qu'en dépenses. Tant que nous n'aurons pas consenti cet effort, nous rencontrerons des difficultés, et nous finirons - j'espère que ce n'est pas ce que veut la majorité gouvernementale et sénatoriale - par voir notre modèle social compromis.
Il faut donc plaider pour que l'Etat retrouve une politique industrielle qu'il a depuis longtemps perdue de vue.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, sont sur le point d'être appelés en discussion des amendements, déposés par le Gouvernement, portant des numéros allant de I-318 à I-327. Or, lorsque la commission des finances s'est réunie ce matin pour examiner les amendements « extérieurs », le dernier amendement portait le numéro I-317.
Je salue la créativité du Gouvernement, mais la commission n'a pas eu le temps de se faire une opinion sur ses amendements. Si ceux-ci ont un contenu peu significatif, peut-être pourrons-nous prendre position en séance ; mais s'il s'avérait qu'ils soient plus substantiels, il se pourrait que je sois amené à demander une suspension de séance pour que la commission des finances se réunisse afin d'être en mesure d'exprimer en séance publique un avis éclairé.
Cela dit, monsieur le secrétaire d'Etat, j'exprime le souhait que le Gouvernement nous fasse connaître ses amendements suffisamment tôt, compte tenu du calendrier des séances publiques.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Je comprends parfaitement la position exprimée par M. le président de la commission des finances et, connaissant son impartialité, je lui laisse le soin de juger si ces amendements, qui, à mon avis, sont purement techniques et rédactionnels, peuvent être abordés sans réunion préalable de la commission. S'il ne le pensait pas, nous adopterions naturellement la méthode de travail qu'il souhaite.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-89, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Avec l'article 10, nous abordons le fameux plan « anti-délocalisations ».
Nous savons tous à quel point le phénomène des délocalisations est utilisé comme argument de chantage par certains patrons peu scrupuleux afin de peser sur l'emploi, sur les salaires et sur les droits sociaux.
L'article 10 tend à mettre en place une procédure favorable aux relocalisations d'entreprises. Si tel était réellement l'objectif, nous pourrions y souscrire ; mais nous sommes plus que perplexes face à l'instrument proposé.
Comme chaque fois que vous vous heurtez à un problème, vous n'avez qu'une seule réponse : réduire les impôts. Or il s'agit ici de tenter de rattraper des pays beaucoup moins développés que le nôtre. Je pose donc la question : quelle France nous prépare-ton ? Apparemment, dans tout modèle libéral, l'alignement ou le rapprochement en matière fiscale précède l'alignement ou le rapprochement en matière sociale. S'il s'agit de s'aligner sur la Pologne, sur la Chine, ou d'autres, c'est particulièrement inquiétant !
Le rapport Camdessus, en préconisant la fin du contrat de travail à durée indéterminée, la casse des droits sociaux et la privatisation de pans entiers de notre modèle social, marque le contexte de son empreinte. On peut relever d'autres marques de ce contexte dans les tentatives, avortées pour l'heure, d'amnistie fiscale pour les fraudeurs expatriés ou dans la fin de tout contrôle des licenciements.
Je soulignerai de nouveau l'étrange coïncidence qui lie la discussion sur l'impôt de solidarité sur la fortune et celle qui porte sur les exemptions fiscales des avoirs placés à l'étranger. Nous sommes bien dans un contexte résolument tourné vers les desiderata du patronat. Ce plan « anti-délocalisations », monsieur le secrétaire d'Etat, n'est qu'un prétexte pour continuer d'aller dans le sens de votre rêve de modèle libéral, qui est, globalement, le modèle anglo-saxon.
Ce qui est grave, c'est que vous cédez au chantage d'un certain nombre de patrons. Suivre cette surenchère, c'est d'ailleurs ce que vous faites depuis un moment, tout le monde peut le constater. Avec ces dispositions, vous continuez. Je dois dire que cela est insoutenable, car vous vous coupez progressivement de toute possibilité de redistribution des richesses dans notre pays.
L'autre aspect de cette démarche, c'est évidemment la remise en cause de la dépense publique, que vous prétendez trop forte alors que, bien souvent, elle est socialement utile.
Vous vous orientez vers la suppression de tout impôt. Après les zones franches dans les quartiers, faisons donc des zones franches dans des pôles de compétitivité, transformons la France en paradis fiscal, et pourquoi pas le monde entier !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si c'est le monde entier, il n'y a plus de paradis fiscal !
M. Thierry Foucaud. La solution, nous le rappelons, n'est pas à rechercher dans la réduction des impôts. Il ne faut pas faire de nouveau cadeau ni octroyer de subventions : il faut faire l'inverse. Nous ne pouvons y parvenir seuls, j'en suis d'accord ; mais il faudrait taxer les délocalisations fiscales, les transferts financiers, et même, comme l'a proposé le Président de la République, les transactions financières, c'est-à-dire taxer la spéculation.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la succession de mesures reposant sur la baisse du coût du travail est un échec pour la France. Vous savez bien que notre productivité est exemplaire, que le coût du travail est moins élevé en France qu'en Allemagne, qu'au Japon ou qu'aux Etats-Unis. Notre déficit tient dans cette précarisation de la vie que le MEDEF veut imposer et qu'en quelque sorte vous encouragez.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons, mes chers collègues, de supprimer l'article 10.
M. le président. L'amendement n° I-319, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Dans le premier alinéa du I du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater I du code général des impôts, remplacer la date :
31 décembre 2007
par la date :
31 décembre 2006
II. - Dans la deuxième phrase du V du même texte, après les mots :
des équipements
insérer les mots :
nouvellement acquis à l'état neuf
III. - Dans le VII du même texte, après les mots :
en France dans les limites
insérer les mots :
et conditions
L'amendement n° I-318, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le V du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater I du code général des impôts, par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Pour être éligibles au dispositif prévu au présent article, les investissements réalisés par les entreprises autres que les petites et moyennes entreprises mentionnées au VI et composés d'actifs immatériels doivent remplir les conditions suivantes :
« - être exploités exclusivement dans l'intérêt de l'entreprise bénéficiaire ;
« - avoir été acquis auprès d'un tiers aux conditions du marché ;
« - être considérés comme des éléments d'actif amortissables et être inscrits à l'actif du bilan de l'entreprise bénéficiaire.
« Le montant des investissements éligibles réalisés par les entreprises autres que les petites et moyennes entreprises mentionnées au VI et composés d'actifs immatériels ne doit en outre pas dépasser 25 % du montant total des investissements éligibles.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Monsieur Foucaud, nous ne savons pas d'avance si le crédit d'impôt que nous proposons en faveur des entreprises qui relocaliseraient leur activité en France va donner de bons résultats.
M. Thierry Foucaud. Chaque fois qu'on essaie quelque chose, cela ne marche pas et cela coûte cher au budget de la France !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Quoi qu'il en soit, nous devons essayer. Si par malheur cette mesure devait déboucher sur un échec, nous reviendrions dessus. Mais, face aux délocalisations, nous ne pouvons nous contenter de tenir des discours sans agir, comme en d'autres temps le parti socialiste devant les problèmes d'insécurité.
En l'occurrence, nous avons le courage d'agir et de tenter, comme c'est le devoir de tout responsable public.
M. Jean-Pierre Demerliat. C'est tenter pour échouer !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Les amendements nos I-319 et I-318 visent à mettre en conformité notre dispositif avec la réglementation communautaire. Pourquoi le faisons-nous maintenant par voie d'amendement ? Depuis la discussion à l'Assemblée nationale, nous avons reçu une lettre de la Commission nous donnant un certain nombre d'indications et nous en tenons compte dans ces deux amendements afin de rendre notre législation plus conforme à la réglementation communautaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission considère ce dispositif comme un signal.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous en avons parlé lors de la discussion générale, c'est la première fois que les risques de délocalisation sont pris en compte dans une loi de finances.
Pour autant, sur le plan technique, ces dispositifs seront-ils suffisamment puissants ? Nous l'apprécierons à l'expérience.
Je me suis efforcé, pour ma part, d'analyser l'article 10 de manière aussi détaillée et technique que possible, et je me permets de vous renvoyer, mes chers collègues, aux vingt-neuf pages de mon rapport écrit qui y sont consacrées.
Le problème est complexe parce qu'il y a non pas un crédit d'impôt mais deux. Il existe un crédit d'impôt de base et un crédit d'impôt supplémentaire. Du point de vue du droit communautaire, ce sont deux choses bien différentes, car le crédit d'impôt de base est soumis à la règle dite « de minimis », c'est-à-dire que l'on ne doit pas dépasser un avantage représentant 100 000 euros sur trois ans, alors que le crédit d'impôt supplémentaire, qui est une aide régionale spécifique, offre plus de liberté en vertu d'une sorte de « discrimination positive » en faveur de zones où la situation de l'emploi est particulièrement déprimée.
Ce qui, à mon avis, motive les amendements du Gouvernement, c'est qu'il y a eu une certaine confusion entre ces deux catégories de crédit d'impôt, et c'est bien compréhensible vu la complexité du sujet. Les deux amendements qui nous sont présentés par M. le secrétaire d'Etat semblent y remédier : ils transcrivent la réalité du droit européen en la matière et, à titre personnel, j'y suis donc favorable.
Il est bien évident qu'on pourrait discuter à perte de vue sur la notion de délocalisation comme sur celle de relocalisation. Je cite dans mon rapport écrit l'excellent rapport d'information rédigé par M. Francis Grignon, au nom de la commission des affaires économiques, sur la difficulté de définir les délocalisations.
Si les délocalisations « pures », concernant la totalité des activités d'une unité de production, sont rares, il n'en reste pas moins qu'une partie de notre potentiel économique tend à s'évader et qu'il y a pas un risque d'hémorragie de capitaux et de main-d'oeuvre qualifiée. .
Mes chers collègues, l'année dernière, sous la conduite de M. le président de la commission des finances, certains d'entre nous se sont rendus en Chine pour visiter des entreprises qui, françaises à l'origine, y avaient été implantées. En vérité, nous n'avons que très rarement constaté de pures délocalisations. En général, les entreprises françaises vont en Chine pour aborder le marché chinois, et ce faisant créent un outil leur permettant de pénétrer d'autres marchés. Dès lors, pourquoi ne pas l'utiliser pour incorporer des productions qui auraient pu être implantées sur notre sol au lieu de ne concerner que la Chine ?
Cela étant, chaque entreprise a sa stratégie et son modèle propre, et les délocalisations caricaturales, « pures et parfaites », que ce soit en Pologne ou en Chine, sont extrêmement difficiles à trouver.
Nous sommes d'ailleurs allés également en Pologne, cette année, où nous avons visité une usine de pneumatiques d'une grande marque française, qui s'est développée dans le nord du pays et qui, parce qu'elle a des capacités assez importantes, desservira aussi une partie du marché européen. Par conséquent, ce ne sont pas des emplois que l'on a pris en France pour les créer en Pologne, ce sont des emplois qui ont été créés en Pologne, mais qui, au moins dans une certaine proportion, auraient pu être créés en France.
La notion de délocalisation est donc une notion complexe et la notion de relocalisation plus encore.
Comment délimiter le champ de cette mesure ? C'est extrêmement délicat. Il est important, en tout cas, que le Gouvernement prenne conscience des risques que court notre pays. Nous avons une là hirondelle ; espérons qu'elle fera le printemps ! Nous, nous songeons à des solutions structurelles beaucoup plus puissantes, mais il n'est pas temps d'en parler.
La commission émet, par conséquent, un avis défavorable sur l'amendement n° I-89 et un avis favorable sur les amendements nos I-319 et I-318.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Le Gouvernement doit être loué pour l'initiative qu'il a prise pour s'efforcer de remédier au phénomène des délocalisations, dont il a pris la mesure. C'est un signal encourageant, qui témoigne de ce que, pour le Gouvernement, il n'y a pas de fatalité en la matière.
Nous devons aller au bout de l'étude de ces mécanismes. Le rapporteur général l'a dit, une délégation de la commission des finances s'est rendue en Chine. Quand un industriel français s'installe en Chine, il y va pour le marché chinois, bien sûr, mais les autorités chinoises l'obligent à exporter une partie significative de la production qu'il réalise sur place. Dans ces conditions, je vous laisse imaginer le scénario : cela permet à tel président de groupe français d'évoquer le concept d' »entreprise sans usine ».
Pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, mais le dispositif que vous avez prévu ressemble un peu à une « usine à gaz ». Croyez-moi, lorsqu'une entreprise relocalisera ses activités en France, cela fera la une d'un certain nombre de journaux ! Ceux qui voudront faire de la communication pourront passer par ce dispositif, et cela marchera à tous les coups. Mais cela restera, à mon avis, tout à fait marginal.
Plus fondamentalement, il convient d'examiner avec objectivité nos prélèvements obligatoires. Une réflexion est en cours sur la taxe professionnelle, et je ne doute pas que la commission Fouquet parviendra à des conclusions répondant à la feuille de route tracée par M. le Premier ministre : « La taxe professionnelle est un impôt payé par les entreprises et j'entends que l'impôt qui se substituera à la taxe professionnelle reste un impôt à la charge des entreprises. »
Je trouve que ce raisonnement est historiquement daté. Monsieur le secrétaire d'Etat, tous les impôts payés par les entreprises en dehors de l'impôt sur les bénéfices sont des impôts de production et sont, en définitive, payés par les ménages. C'est un dispositif bien compliqué que celui qui oblige à transiter l'impôt par l'entreprise pour faire payer les ménages. Nous en reparlerons au moment du débat sur la taxe professionnelle, mais je vous mets en garde contre tous ces impôts qui sont des impôts de production.
Ces impôts de production sont des droits de douane à l'envers dans la mesure où seuls ceux qui produisent des biens et des services en France paient ces impôts, et ceux-ci, à l'heure de la globalisation de l'économie, deviennent des accélérateurs de la délocalisation des activités et des emplois, encourageant le nomadisme économique.
M. Denis Badré. Eh oui !
M. Jean Arthuis, président de la commission. Je pense que ces mesures sont intéressantes et que, par conséquent, on ne peut pas s'opposer aux amendements qui visent à les faciliter, mais la voie que nous avons proposée lors du débat sur l'évolution des prélèvements obligatoires nous paraît infiniment plus prometteuse.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote sur l'amendement n° I-319.
M. François Marc. Nous avons bien compris, en écoutant M. le président de la commission des finances, qu'une vaste réflexion était nécessaire sur ce sujet extrêmement sensible.
Le Gouvernement veut donner l'impression qu'il a élaboré un dispositif permettant de répondre à un problème crucial pour notre pays. Ces mesures ont été bricolées et la meilleure illustration en est qu'il lui faut venir en séance au Sénat apporter des corrections, parce que le dispositif initialement prévu n'était pas en conformité avec le droit européen. Par ailleurs, on ne sait absolument pas comment on pourra évaluer l'impact de ces « mesurettes ». Dans ces conditions, le groupe socialiste s'abstiendra.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Monsieur Marc, si un jour, dans votre département une entreprise décide de délocaliser ses activités, vous irez expliquer aux salariés que vous n'avez pas voté une mesure qui a le mérite d'exister et de tenter quelque chose. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Il est inséré un article 244 quater H ainsi rédigé :
« Art. 244 quater H. - I. - Les petites et moyennes entreprises imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 octies et 44 decies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt lorsqu'elles exposent des dépenses de prospection commerciale afin d'exporter en dehors de l'Espace économique européen des services, des biens et des marchandises.
« Les petites et moyennes entreprises mentionnées au premier alinéa sont celles qui ont employé moins de 250 salariés et ont soit réalisé un chiffre d'affaires inférieur à 50 millions d'euros au cours de la période mentionnée au IV, soit un total de bilan inférieur à 43 millions d'euros. L'effectif de l'entreprise est apprécié par référence au nombre moyen de salariés employés au cours de cette période. Le capital des sociétés doit être entièrement libéré et être détenu de manière continue, pour 75 % au moins, par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions. Pour la détermination du pourcentage de 75 %, les participations des sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation ou des sociétés unipersonnelles d'investissement à risque ne sont pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens des deuxième à quatrième alinéas du 12 de l'article 39 entre la société en cause et ces dernières sociétés ou ces fonds. Pour les sociétés membres d'un groupe au sens de l'article 223 A, le chiffre d'affaires et l'effectif à prendre en compte s'entendent respectivement de la somme des chiffres d'affaires et de la somme des effectifs de chacune des sociétés membres de ce groupe. La condition tenant à la composition du capital doit être remplie par la société mère du groupe.
« II. - Les dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt sont, à condition qu'elles soient déductibles du résultat imposable :
« a. Les frais et indemnités de déplacement et d'hébergement liés à la prospection commerciale en vue d'exporter en dehors de l'Espace économique européen ;
« b. Les dépenses visant à réunir des informations sur les marchés et les clients situés en dehors de l'Espace économique européen ;
« c. Les dépenses de participation à des salons et à des foires-expositions en dehors de l'Espace économique européen.
« Le crédit d'impôt est égal à 50 % de ces dépenses. Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit.
« III. - L'obtention du crédit d'impôt est subordonnée à la conclusion d'un contrat de travail avec un salarié affecté au développement des exportations ou au recours à un volontaire international en entreprise affecté à la même mission dans les conditions prévues par les articles L. 122-1 et suivants du code du service national.
« IV. - Les dépenses éligibles sont les dépenses exposées pendant les douze mois qui suivent l'embauche du salarié mentionné au III ou la signature de la convention prévue à l'article L. 122-7 du code du service national.
« V. - Le crédit d'impôt est plafonné pour chaque entreprise, y compris les sociétés de personnes, à 15 000 €. Ce montant est porté à 30 000 € pour les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, les associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin lorsqu'elles sont soumises à l'impôt sur les sociétés en vertu des dispositions du 1 de l'article 206, et les groupements mentionnés à l'article 239 quater répondant aux conditions mentionnées au I et ayant pour membres des petites et moyennes entreprises définies à ce même paragraphe lorsqu'elles exposent des dépenses de prospection commerciale pour le compte de leurs membres afin d'exporter des services, des biens et des marchandises. Ces plafonds s'apprécient en prenant en compte la fraction du crédit d'impôt correspondant aux parts des associés de sociétés de personnes mentionnées aux articles 8, 238 bis L et aux droits des membres de groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C.
« Lorsque ces sociétés ou groupements ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés, le crédit d'impôt peut être utilisé par les associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements, à condition qu'il s'agisse de redevables de l'impôt sur les sociétés ou de personnes physiques participant à l'exploitation au sens du 1° bis du I de l'article 156.
« Le crédit d'impôt ne peut être obtenu qu'une fois par l'entreprise. » ;
2° Il est inséré un article 199 ter G ainsi rédigé :
« Art. 199 ter G. - Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater H est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle la période mentionnée au IV du même article s'achève. Si le montant du crédit d'impôt excède l'impôt dû au titre de ladite année, l'excédent est restitué. » ;
3° Il est inséré un article 220 I ainsi rédigé :
« Art. 220 I. - Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater H est imputé sur l'impôt sur les sociétés dû par l'entreprise au titre du premier exercice clos après l'achèvement de la période mentionnée au IV de l'article précité. Si le montant du crédit d'impôt excède l'impôt dû au titre dudit exercice, l'excédent est restitué. » ;
4° Le 1 de l'article 223 O est complété par un i ainsi rédigé :
« i. Des crédits d'impôt dégagés par chaque société du groupe en application de l'article 244 quater H ; les dispositions de l'article 220 I s'appliquent à la somme de ces crédits d'impôt ; ».
II. - Un décret fixe les conditions d'application du I, et notamment les obligations déclaratives incombant aux entreprises concernées.
III. - Les dispositions du I s'appliquent aux dépenses exposées à compter du 1er janvier 2005.
M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-90, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet article 11 nous semble poser quelques problèmes de cohérence au regard des autres dispositions qui l'entourent immédiatement dans cette partie du texte.
Il s'agit en effet, ici, de faire bénéficier des entreprises d'un crédit d'impôt pour dépenses de prospection commerciale hors de l'Espace économique européen. Ne serait-ce pas une sorte d'aide à la délocalisation d'activités ?
Car enfin, prospecter commercialement dans des pays non membres de l'Espace économique européen - on pense évidemment rapidement aux pays émergents, aux « tigres » plus ou moins gros de la zone du Sud-Est asiatique -, n'est ce pas, bien souvent, le premier pas vers la délocalisation des activités ?
Par ailleurs, la mesure est destinée directement aux petites et moyennes entreprises définies selon des critères européens quant au seuil de chiffre d'affaires, de condition de détention du capital ou d'effectifs, ces mêmes petites et moyennes entreprises qui sont, pour l'essentiel, exclues du jeu quand il s'agit de distribuer les crédits d'aide à l'exportation et qui ne doivent, bien souvent, compter que sur la seule bonne volonté du « super-VRP » présidentiel pour faire connaître leurs activités.
A en croire l'évaluation du projet de loi lui-même - 10 millions d'euros -, le coût plutôt réduit de la mesure suffit presque, d'ailleurs, à en démontrer la faible portée.
Une telle incitation fiscale, dont la mise en oeuvre sera d'ailleurs aussi malaisée que n'importe quelle disposition du même ordre - on pense ici à l'application de l'article 44 sexies - et l'instruction pour le moins complexe, ne remplacera jamais l'aide plus pertinente qui proviendrait, par exemple, de la mobilisation d'une ligne spécifique « PME exportations » dans les comptes de la COFACE, comme nous l'avons souvent proposé.
M. le président. L'amendement n° I-157, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
I - Au premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, les mots : « en dehors de l'Espace économique européen » sont supprimés.
II - Pour compenser la perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension du crédit d'impôt visée au 1° du I à l'ensemble des exportations est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs mentionnée aux article 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. L'article 11 prévoit que le crédit pour dépenses de prospection commerciale ne s'applique que pour celles qui sont engagées en dehors de l'Espace économique européen.
Cette restriction géographique ne nous semble pas justifiée. En effet, lors d'une première démarche d'exportation, les PME se tournent généralement vers les marchés les plus proches, notamment ceux de l'Union européenne, qui sont considérés comme des marchés plus accessibles pour des exportateurs débutants.
Il est donc proposé d'élargir le champ d'application géographique de cette disposition en incluant l'Union européenne.
M. le président. L'amendement n° I-324, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I - Dans la première phrase du second alinéa du I du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, remplacer les mots :
au cours de la période mentionnée au IV
par les mots :
au cours de chaque période d'imposition ou exercice clos pendant la période mentionnée au IV
II - Dans la première phrase du dernier alinéa du II du même texte, après les mots :
Le crédit d'impôt
insérer les mots :
, calculé au titre de chaque période d'imposition ou exercice clos au cours desquels des dépenses éligibles ont été exposées,
III - Dans le IV du même texte, remplacer le mot :
douze
par les mots :
vingt-quatre
IV - Dans la deuxième phrase du V du même texte, remplacer les mots :
lorsqu'elles exposent
par les mots :
lorsqu'ils exposent
V - A la fin de la première phrase du texte proposé par le 2° du I de cet article pour l'article 199 ter G du code général des impôts, remplacer les mots :
de l'année au cours de laquelle la période mentionnée au IV du même article s'achève
par les mots :
des années au cours desquelles les dépenses définies au II de l'article 244 quater H ont été exposées
VI - A la fin de la première phrase du texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article 220 I du code général des impôts, remplacer les mots :
du premier exercice clos après l'achèvement de la période mentionnée au IV de l'article précité
par les mots :
des exercices au cours desquels les dépenses définies au II de l'article 244 quater H ont été exposées
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, permettez-moi de dire quelques mots sur les amendements précédents.
Avec l'amendement n° I-90, M. Foucaud combat une mesure visant à instituer un crédit d'impôt en faveur des PME. Or cette mesure est destinée à développer nos exportations, qui sont pourtant la base même de l'emploi dans notre pays !
La croissance est tirée par l'investissement, ces temps-ci de façon à peu près correcte. Elle l'est également par la consommation, même si nous avons eu récemment connu quelques soubresauts à cet égard ; en tout cas, elle l'a été pendant les deux premiers trimestres. Enfin, elle est tirée par les exportations. En Allemagne, la croissance est même tirée exclusivement par les exportations, alors qu'elle est inférieure à la nôtre ! C'est donc un besoin fondamental de nos PME.
Le Président de la République a d'ailleurs tenu à associer beaucoup de ces petites et moyennes entreprises françaises lors de son déplacement en Chine, car il s'agit d'un marché essentiel. De même, la semaine passée, lors de son déplacement au Mexique avec le Premier ministre du Québec, des PME françaises sont allées dans ce grand pays d'Amérique latine présenter leurs produits.
Nos grandes entreprises présentes à l'étranger y réalisent des performances tout à fait remarquables, mais les PME y sont faiblement implantées par rapport à leurs homologues de l'Union européenne.
Le dispositif présenté à l'article 11 est donc très important.
Avec l'amendement n° I-157, M. Badré en change un peu la nature en y incluant les dépenses de prospection commerciale destinées à exporter dans les autres pays de l'Espace économique européen.
Il faut savoir que nos PME sont déjà très présentes au sein de l'Union européenne puisqu'elles y réalisent déjà 73 % de leurs exportations. Bien sûr, on peut toujours faire mieux !
Notre objectif, monsieur Badré, est précisément d'aider les PME à sortir de l'Union européenne, qui est à nos portes ; on compte en effet, chaque jour, en dehors même des aéroports de Paris ou de Lyon, des dizaines de vols à destination de tous les pays européens. Même s'il reste des parts de marché à y gagner, nous devons aider les PME à sortir de ce cocon européen.
Je vous suggère donc, monsieur Badré, de retirer cet amendement, afin de nous permettre de « mettre le paquet » sur les investissements et les exportations à l'extérieur de l'Union européenne. Après tout, pour le groupe de l'Union centriste, qui est par nature européen, exporter en Europe, c'est un peu exporter en France ! (Sourires.)
J'en viens à l'amendement n° I-324.
Depuis que l'article 11 a été adopté par l'Assemblée nationale, les PME nous ont adressé un certain nombre de remarques par l'intermédiaire de leurs organisations professionnelles. Elles nous ont fait savoir, en particulier, que la durée de douze mois n'était pas suffisante pour une prospection commerciale, laquelle demande plus d'une année.
Nous avons tenu compte de cet argument de bon sens et c'est pourquoi il est proposé, dans cet amendement, de permettre à l'entreprise de bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses exposées au cours des vingt-quatre mois qui suivent l'embauche d'un salarié affecté au développement des exportations ou d'un volontaire international en entreprise.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-171 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union Centriste.
L'amendement n° I-191 est présenté par MM. Longuet, Nachbar, Zocchetto et Goujon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
A) Compléter le I du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« Le crédit d'impôt bénéficie également aux sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales visées par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 modifiée. »
B) Compléter in fine le III du même texte par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les sociétés visées au troisième alinéa du I ci-dessus, l'obtention du crédit d'impôt est subordonnée à l'existence d'un contrat de collaboration, au sens de l'article 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, avec un avocat auquel sera affectée la prospection commerciale visée au premier alinéa du I ci-dessus ».
C) Compléter in fine le IV du même texte par les mots :
ou l'affectation contractuelle à un avocat collaborateur de la prospection commerciale visée au premier alinéa du I ci-dessus.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
II - ... La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension à certains avocats collaborateurs, exerçant leurs activités au sein de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ou de sociétés de participations financières de professions libérales visées par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 modifiée, du crédit d'impôt pour les dépenses exposées au titre de la prospection commerciale afin d'exporter en dehors de l'Espace économique européen des services, des biens et des marchandises, est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré, pour présenter l'amendement n° I-171.
M. Denis Badré. Pour laisser à Philippe Goujon la possibilité de s'exprimer sur son propre amendement, je me contenterai de dire que l'amendement n° I-171 étend le crédit d'impôt aux cabinets d'avocats constitués en société. Je le laisse compléter cette présentation ! (Sourires.)
M. le président. Quelle courtoisie, monsieur Badré !
La parole est à M. Philippe Goujon, pour présenter l'amendement n° I-191.
M. Philippe Goujon. Une courtoisie coutumière au sein de cette assemblée, monsieur le président !
Il s'agit sûrement d'une très bonne disposition puisqu'elle est défendue, dans les mêmes termes, par deux groupes de la majorité sénatoriale !
Il serait, selon nous, tout à fait inéquitable que les incitations à l'exportation en dehors de l'Espace économique européen prévues pour les PME à l'article 11 sous la forme d'un crédit d'impôt égal à 50 % des dépenses de prospection commerciale, dans la limite de 15 000 euros, ne soient pas étendues aux cabinets d'avocats exerçant sous forme de sociétés, dont l'un des avocats collaborateurs est affecté à cette activité de prospection commerciale vers l'étranger.
Une telle mesure serait également tout à fait bénéfique pour nos entreprises, qui, à l'étranger, sont souvent exposées à des risques juridiques non négligeables.
M. le président. L'amendement n° I-325, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'avant-dernier alinéa (c) du II du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« d. les dépenses visant à faire connaître les produits et services de l'entreprise en vue d'exporter en dehors de l'Espace économique européen.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Cet amendement vise à étendre la mesure aux dépenses publicitaires, afin de permettre à l'entreprise de conquérir des marchés à l'export en faisant connaître dans les pays visés ses produits et services.
M. le président. L'amendement n° I-165, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
I - Dans le III du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, après les mots :
à la conclusion d'un contrat de travail
insérer les mots :
ou à la signature d'un avenant à un contrat de travail
II - En conséquence, dans le IV du même texte, après les mots :
l'embauche du salarié mentionné au III
insérer les mots :
ou la signature de l'avenant
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Cet amendement vise à permettre à une entreprise de confier la prospection à l'international à l'un de ses salariés, sans perdre pour autant le bénéfice du crédit d'impôt qui est ouvert par l'article 11 et dont l'octroi est actuellement subordonné à une embauche.
Il nous semble qu'une PME sera plus efficace si elle confie ce genre de mission à quelqu'un de l'entreprise qui connaît déjà le marché, le produit et les méthodes, l'objectif de fond étant d'aider les PME à exporter.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-133 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union Centriste.
L'amendement n° I-287 rectifié est présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux, MM. Darniche et Retailleau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I - Dans le IV du texte proposé par le 1° de cet article pour insérer un article 244 quater H dans le code général des impôts, remplacer les mots :
les douze mois
par les mots :
les trois exercices
II - Pour compenser la perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension du champ des dépenses éligibles visées au IV de cet article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs mentionnée aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré, pour présenter l'amendement n° I-133.
M. Denis Badré. M. le secrétaire d'Etat nous a expliqué, s'agissant du retour sur investissement, que la période d'un an était trop courte. C'est pourquoi il nous a proposé, avec l'amendement n° I-324, de l'étendre à deux ans.
Par cet amendement, nous proposons, quant à nous, que les PME puissent bénéficier du crédit d'impôt sur au moins trois ans.
M. le président. L'amendement n° I-287 rectifié n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-68 rectifié bis, présenté par MM. Leclerc et Karoutchi, Mme Debré, MM. Goujon et Murat, est ainsi libellé :
I - Compléter le IV du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, par les mots :
pour le premier crédit d'impôt et pendant les douze mois suivants pour le second
II - En conséquence, rédiger ainsi le dernier alinéa du V du même texte :
« Le crédit d'impôt peut être obtenu deux fois par l'entreprise. »
III - En conséquence, à la fin de la première phrase du texte proposé par le 2° du I de cet article pour l'article 199 ter G du code général des impôts remplacer les mots :
la période mentionnée au IV du même article s'achève
par les mots :
chacune des périodes mentionnées au IV du même article s'achève
IV - En conséquence, dans la première phrase du texte proposé par le 3° du I de cet article, pour l'article 220 I du code général des impôts, remplacer les mots :
de la période mentionnée
par les mots :
de chacune des périodes mentionnées
V - Pour compenser les pertes de recettes résultant des I à IV ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes pour l'Etat résultant de la possibilité pour les entreprises de bénéficier deux fois du crédit d'impôt visé à l'article 244 quater H du code général des impôts, est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 1001 du code général des impôts.
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos I-69 rectifié et I-70 rectifié, qui portent également sur le soutien aux PME à l'exportation.
L'amendement n° I-68 rectifié bis vise à permettre aux entreprises de bénéficier deux fois du crédit d'impôt.
L'amendement n° I-69 rectifié tend à augmenter le montant actuel du crédit d'impôt de 15 000 euros à 20 000 euros.
Enfin, l'amendement n° I-70 rectifié est un amendement de coordination avec le précédent, visant à remplacer la somme de 30 000 euros par celle de 40 000 euros.
M. le président. L'amendement n° I-326, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du V du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, remplacer la somme :
15 000 €
par la somme :
40 000 €
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Cet amendement, plus généreux que l'amendement n° I-69 rectifié, vise à porter le plafond du crédit d'impôt à 40 000 euros.
J'indique dès à présent que l'amendement n° I-327, qui fait suite à une directive récente du Premier ministre, vise à porter le plafond propre aux associations et groupements d'intérêt économique regroupant des petites et moyennes entreprises à 80 000 euros, afin de leur donner de véritables moyens d'action pour se tourner vers l'export.
M. le président. L'amendement n° I-69 rectifié, présenté par MM. Leclerc, Karoutchi et Goujon, Mme Debré et M. Murat, est ainsi libellé :
I - A la fin de la première phrase du premier alinéa du V du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, remplacer la somme :
15 000 euros
par la somme :
20 000 euros
II -Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes résultant pour l'Etat de la fixation à 20 000 euros du plafond de crédit d'impôt visé au V de l'article 244 quater H du code général des impôts est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 1001 du code général des impôts.
Cet amendement a déjà été présenté.
L'amendement n° I-327, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du V du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, remplacer la somme :
30 000 €
par les mots :
80 000 € pour la période de vingt-quatre mois mentionnée au IV
Cet amendement a déjà été présenté.
L'amendement n° I-70 rectifié, présenté par MM. Leclerc, Karoutchi et Goujon, Mme Debré et M. Murat, est ainsi libellé :
I - Dans la deuxième phrase du premier alinéa du V du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article 244 quater H du code général des impôts, remplacer la somme :
30 000 euros
par la somme :
40 000 euros
II - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes résultant pour l'Etat de la fixation à 40 000 euros du plafond de crédit d'impôt visé au V de l'article 244 quater H du code général des impôts pour les associations est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 1001 du code général des impôts.
Cet amendement a déjà été présenté.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est bien évidemment défavorable à l'amendement n° I-90 du groupe CRC. Il ne faut confondre exportations et délocalisations !
La commission partageant l'argumentation présentée tout à l'heure par M. le secrétaire d'Etat sur l'amendement n° I-157, relatif au crédit d'impôt, elle estime qu'il pourrait être retiré.
La commission n'a pas examiné l'amendement n° I-324 du Gouvernement, qui vise à une meilleure conformité avec droit communautaire. J'émets un avis favorable à titre personnel.
La commission est favorable aux amendements identiques nos I-171 et I-191.
A titre personnel, j'émets un avis favorable sur l'amendement n° I-325, qui étend le bénéfice du crédit d'impôt dans des conditions qui paraissent raisonnables.
Sur l'amendement n° I-165, la commission s'en remet à l'avis du Gouvernement.
Il n'est pas certain que la modification proposée par l'amendement n° I-133 soit compatible avec le droit communautaire. C'est la raison pour laquelle la commission pense qu'il est nécessaire de retirer cet amendement.
La commission souhaite également le retrait de l'amendement n° I-68 rectifié bis, qui ne semble pas compatible avec le droit communautaire.
La commission est favorable à l'amendement n° I-326, qui est plus généreux que le dispositif initial. Il n'y a pas de raison de refuser l'amplification de la mesure, qui sera dès lors plus efficace !
L'amendement n° I-69 rectifié me semble satisfait par l'amendement n° I-326.
L'amendement n° I-327 du Gouvernement fait également preuve d'une générosité qui, pour être tardive, n'en mérite pas moins d'être saluée.
Enfin, l'amendement n° I-70 rectifié, qui est moins généreux que le précédent, est évidemment satisfait par celui-ci.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement, étant entendu qu'il a déjà donné son avis sur les amendements nos I-90 et I-157 ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Sur les amendements identiques nos I-171 et I-191, je dirai très franchement que les grands cabinets d'avocats français n'ont pas besoin du crédit d'impôt prévu, car ils sont tous implantés à l'étranger depuis très longtemps ; l'un d'entre eux a d'ailleurs été le premier cabinet au monde à s'implanter à Pékin. Pour ce faire, ils disposent donc de moyens de toute nature, notamment humains, et sont loin de connaître les difficultés que rencontrent les PME de nos provinces.
L'extension de la mesure en faveur de ces grands cabinets me paraît superfétatoire, même si, naturellement, cette proposition part d'un sentiment que nous comprenons.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le secrétaire d'Etat ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission, avec l'autorisation de M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis surpris de la position que vous venez d'exprimer s'agissant des cabinets d'avocats et d'experts-comptables.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Les amendements font référence aux professions libérales réglementées, donc également aux experts-comptables. (M. le rapporteur général approuve.)
Monsieur le secrétaire d'Etat, les sociétés qui souhaitent développer leurs activités hors du territoire national peuvent naturellement passer par les postes d'expansion économique. Chacun sait qu'il s'agit sans doute de l'un des supports les plus puissants en la matière.
Pour autant, le responsable d'une PME qui souhaite s'établir dans un pays étranger a besoin d'être accompagné par des professionnels susceptibles de le conseiller sur le plan juridique et de l'informer sur l'évolution des marchés. S'il décide de s'en remettre pour cela à un grand cabinet, bien souvent, il ne pourra avoir affaire qu'à un cabinet anglo-saxon.
Il est donc très urgent de promouvoir, hors du territoire national, le développement de ces professions libérales, qui éclairent les décisions des PME aussi bien que peuvent le faire les centres de gestion et les postes d'expansion économique.
Il serait donc fâcheux de ne pas encourager tous ces cabinets à se projeter hors de nos frontières. Je souhaite vivement que le Gouvernement revoie sa position sur ce point particulier. En effet, celui qui décide d'aller faire des affaires à l'international, en Orient ou ailleurs, doit pouvoir être aidé pour tenir ses comptes. Or, s'il part de l'idée que seuls les grands cabinets anglo-saxons sont compétents en la matière, il fait preuve d'un fatalisme bien dommageable pour les professionnels français.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Monsieur le président de la commission, je partage complètement votre point de vue, et le Gouvernement est, bien sûr, plein de sollicitude à l'égard des professions libérales.
Cependant, puisque le crédit d'impôt envisagé concerne les dépenses de prospection commerciale, l'adoption des amendements nos I-171 et I-191 poserait un problème au regard du droit communautaire.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il me paraît très important de développer hors du territoire national les activités des sociétés des professions libérales réglementées, car, pendant trop longtemps, celles-ci ont adopté une attitude trop frileuse, en restant cantonnées à l'intérieur de notre territoire.
Lorsque les grandes sociétés et les PME américaines sont venues en Europe, dans le prolongement du plan Marshall, elles n'ont pas imaginé un seul instant s'y implanter sans être accompagnées par leurs auditeurs et leurs lawyers.
Par conséquent, les entreprises françaises devraient accomplir des démarches similaires lorsqu'elles souhaitent se projeter sur un marché extérieur, notamment aux Etats-Unis. Or il est tout de même fâcheux de constater qu'elles ne pensent pouvoir s'adresser qu'à des cabinets de conseil anglo-saxons.
A l'heure où l'on parle d'« intelligence économique », il faut encourager les cabinets français qui conseillent les PME à se projeter hors de nos frontières. S'ils ne sont pas encouragés dans cette démarche, je crains que tout le dispositif que nous envisageons reste vain.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Monsieur Arthuis, les mesures prévues par le Gouvernement à l'article 11 concernent uniquement les PME. Or vous souhaitez en élargir le champ des bénéficiaires. Le débat est posé, et il sera tranché par la Haute Assemblée.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il existe des cabinets de taille moyenne !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne change pas d'avis sur ces amendements, mais il a, bien sûr, entendu les arguments de M. Arthuis. Simplement, à nos yeux, un cabinet d'avocats ou un cabinet d'expertise comptable est d'une autre nature qu'une PME.
Cela ne nous empêche pas de réfléchir ensemble pour prévoir éventuellement, dans un autre article, une mesure similaire en faveur de ces professions libérales.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je me permets d'insister pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté entre nous. Il n'y a pas que les grands cabinets. Si un cabinet de conseil, de petite taille ou de taille moyenne, parvient à s'établir dans un pays étranger, je prétends que les conditions d'implantation des PME françaises s'améliorent d'autant.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. C'est un peu problème de l'oeuf et de la poule ! Cela étant, je comprends bien la nécessité, sur ce point, d'aider aussi bien les PME que les cabinets de conseil. Quoi qu'il en soit, monsieur Arthuis, ce débat est très intéressant et je vous remercie de l'avoir lancé.
J'en viens aux autres amendements.
En ce qui concerne l'amendement n° I-165, je demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer, car la modification envisagée risquerait d'entraîner des effets d'aubaine.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° I-133, car son adoption poserait un problème juridique. En effet, en droit communautaire, seules les aides ponctuelles sont acceptées. Il est donc impossible de prévoir un crédit d'impôt sur trois exercices.
Les amendements nos I-68 rectifié bis et I-69 rectifié sont satisfaits par l'amendement n° I-326 du Gouvernement.
De même, l'amendement n° I-70 rectifié est satisfait par l'amendement n° I-327 du Gouvernement.
M. le président. Monsieur Badré, l'amendement n° I-157 est-il maintenu ?
M. Denis Badré. M. le secrétaire d'Etat a rappelé à juste titre que les centristes sont des européens convaincus, et je ne suis certainement pas le moins convaincu !
Nous avons donc déposé cet amendement dans lequel nous développons la conception d'une Europe ouverte sur le monde et celle d'une France qui, à travers l'Europe, veut s'ouvrir sur le monde.
M. Philippe Marini, rapporteur général. A condition que l'Europe ait de bonnes frontières !
M. Denis Badré. Pour les PME françaises qui souhaitent accéder à l'exportation, il est tout de même plus facile de faire leurs premières armes en Pologne plutôt que d'essayer de conquérir immédiatement le marché chinois !
Tel est l'esprit de cet amendement. Cela dit, avec le souci de faire avancer le débat dans la convivialité, j'accepte de le retirer.
M. Denis Badré. Quoi qu'il en soit, nous considérons que, pour une PME, la conquête du monde passe par l'Europe. Et c'est un Européen très déterminé qui le dit !
M. le président. L'amendement n° I-157 est retiré.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En tout cas, si une entreprise française s'implante en Pologne, le taux d'impôt sur les sociétés y sera moins élevé !
M. Roger Karoutchi. C'est vrai !
M. le président. La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote sur les amendements identiques nos I-171 et I-191.
M. Denis Badré. Je suis heureux de constater que ces amendements bénéficient du soutien de la commission.
Je précise qu'il s'agit bien, à nos yeux, d'encourager les PME à se lancer dans l'exportation et non de soutenir les cabinets d'avocats, quelle que soit leur taille.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Sans vouloir monopoliser l'attention sur ce sujet, je souhaite apporter deux précisions, monsieur le secrétaire d'Etat.
Tout d'abord, les cabinets d'avocats ou d'expertise comptable sont des entreprises comme les autres.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'insiste sur ce point. Ce ne sont pas des entités « venues d'ailleurs » ; ce sont des entreprises, qui doivent, en tant que telles, être encouragées à développer leurs activités.
Au demeurant, si vous soutenez les efforts de ces cabinets pour prospecter à l'étranger, vous faites en quelque sorte coup double puisque vous créez, de surcroît, un environnement plus favorable au développement de l'activité de toutes les autres PME sur le territoire considéré.
Cette extension du crédit d'impôt m'apparaît donc vraiment comme une bonne mesure. En tous cas, il n'est pas souhaitable d'exclure les professions libérales du nouveau régime.
L'enjeu est très important : nous avons vraiment besoin, en France et à l'étranger, de disposer de cabinets indépendants, de taille moyenne et même, si possible, de taille importante. De nombreux éléments en dépendent, qu'il s'agisse des modes de raisonnement ou des concepts juridiques et comptables utilisés, bref, de tout ce qui structure l'approche de l'entreprise.
Ces professions sont exercées par des entreprises à part entière. Je suis pour le moins surpris de constater que ces foyers d'activité ne sont pas assimilés à des entreprises.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'exprime un point de vue économique et non pas juridique, monsieur le secrétaire d'Etat.
Par ailleurs, comme le disait fort bien Jean Arthuis, lorsqu'une PME s'implante sur un territoire, elle ne peut le faire qu'à deux conditions : d'une part, être correctement conseillée par des personnes proches de sa culture ; d'autre part, trouver un bon partenaire local. Or comment trouver un bon partenaire local sans disposer d'accords juridiques correctement formalisés et d'instruments de traduction de la loi locale en « pensée française » ? Il est donc nécessaire de pouvoir compter sur un conseiller très proche.
De ce point de vue-là aussi, il faut encourager le développement des activités en question par cette excellente mesure qu'est le crédit d'impôt.
M. Jean-Jacques Jégou. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, de coeur et de raison, je serais prêt à tenir le même langage que vous.
Cependant, je le répète, l'Union européenne n'acceptera pas l'extension du bénéfice du crédit d'impôt prévue dans ces amendements. Cela risquerait de retarder de plusieurs semaines ou de plusieurs mois notre négociation pour obtenir un accord complet sur l'ensemble du dispositif de l'article 11.
Je me dois donc d'apporter cette précision au Sénat afin qu'il prenne ses responsabilités, même si je partage, naturellement, les arguments de fond qui ont été exprimés tout au long de ce débat.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Tout malentendu est donc dissipé.
Un grand nombre de sociétés de professions libérales sont bien des PME. De plus, s'il est domaine ou la globalisation est effective, c'est bien celui des principes comptables. C'est ainsi que les Etats souverains vont devoir se soumettre, demain, à des règles qui auront été conçues dans des cénacles dont la légitimité n'est pas évidente, mais dont les travaux seront, à mon avis, incontournables. Or on est souvent tenté de se replier sur son territoire national.
Je me réjouis, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous soyons complètement d'accord sur le fond.
J'affirme de nouveau qu'il est important, pour une PME, d'avoir des conseillers qui parlent le même langage et dont elle sait que, lorsqu'ils rendront compte, elle ne se fera pas voler au coin du bois. Un patron de PME ira plus facilement consulter un avocat correspondant à Tokyo ou à Pékin. Quelquefois, les postes d'expansion économique, les services de la direction des relations économiques extérieures ont tendance à penser qu'eux seuls sont capables d'accompagner les PME. C'est faux ! S'ils rendent de bons services, nous avons besoin de ce réseau de sociétés qui conseillent les PME.
Quoi qu'il en soit, j'ai bien entendu votre observation, monsieur le secrétaire d'Etat. Pour l'heure, je suggère au Sénat d'adopter ces amendements identiques, puisque, d'ici à la réunion de la commission mixte paritaire ce point aura pu être tiré au clair. Nous pourrons alors en tirer les conséquences.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Jégou. Monsieur le secrétaire d'Etat, si le Sénat votait ces amendements, comme vient de le demander M. le président de la commission des finances, en quoi l'application de l'article 11 serait-elle retardée ? S'agit-il d'autorisations européennes ou d'autres difficultés administratives ?
Par ailleurs, sans vouloir être cruel ni interférer dans une affaire qui n'est pas encore close aux Etats-Unis, je rappelle que les contribuables français vont payer très cher les frasques d'une entreprise française, pourtant très grande, qui a peut-être été mal conseillée ! Ce sujet est donc très important.
Il est nécessaire, me semble-t-il, d'accompagner les entreprises, notamment les PME, puisque nous constatons qu'une très grande entreprise a pu fauter par méconnaissance de la législation d'un pays étranger.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Monsieur Jégou, nous avons déjà consulté, en amont, l'Union européenne sur la mesure que nous proposons. Nous avons reçu son « feu vert ».
Nous allons donc devoir la consulter de nouveau sur la mesure que vous défendez.
Quoi qu'il en soit, si la Haute Assemblée vote ces amendements identiques, comme le préconise M. le président de la commission, le Gouvernement s'efforcera d'obtenir une réponse de la part de l'Union européenne avant la réunion de la commission mixte paritaire, mais je ne peux cependant pas garantir que tel sera le cas.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-171 et I-191.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote sur l'amendement n° I-165.
M. Denis Badré. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous m'avez dit tout à l'heure que l'adoption de cet amendement entraînerait des effets d'aubaine. Je ne suis pas du tout d'accord !
En effet, l'objet de cet amendement, j'y insiste, est de soutenir l'exportation et non pas - du moins directement - de créer de l'emploi.
Nous considérons qu'un salarié déjà en place dans l'entreprise est mieux placé qu'un nouvel arrivant pour développer l'exportation. A la suite de son affectation aux services de l'exportation, ce salarié libérera un poste, qui sera occupé par quelqu'un d'autre, ce qui, indirectement, créera de l'emploi.
Par ailleurs, en réussissant à l'exportation, l'entreprise se développera, ce qui lui permettra de réaliser des embauches.
Cet amendement vise donc à aider les entreprises à exporter grâce à une bonne prospection commerciale.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je souhaite rappeler que ce dispositif n'intervient pas sur un sol vierge, car il existe déjà ce que l'on appelle l'« assurance prospection ». Il s'agit d'un mécanisme financièrement aidé par l'Etat et qui permet à des entreprises de tous les secteurs de financer des dépenses de prospection commerciale sur un sol étranger.
Certes, le dispositif que le Gouvernement tend à mettre en place vise autre chose. D'ailleurs, si j'ai bien compris, les deux avantages ne seront pas cumulables. Le Gouvernement veut proportionner ce crédit d'impôt à l'effort « physique » de l'entreprise, qui sera attesté par l'embauche d'un salarié.
Si l'on devait, monsieur Badré, adopter votre amendement, dont l'objectif est évidemment tout à fait louable, on ferait en réalité bénéficier de ce crédit d'impôt toutes les entreprises, quelles qu'elles soient, partout. En effet, chacun affirmerait faire un effort de prospection sur tel ou tel territoire. Et ce crédit d'impôt deviendrait un droit ! Il faut donc bien prévoir une contrepartie en termes d'embauche.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Selon le texte proposé pour le III de l'article 244 quater H, « l'obtention du crédit d'impôt est subordonnée à la conclusion d'un contrat de travail avec un salarié affecté au développement des exportations ou au recours à un volontaire international. »
Il faut donc qu'il y ait quelqu'un de plus dans l'entreprise, mais celui qu'on va affecter au commerce international n'est pas forcément celui que l'on recrute. Sinon, le dispositif risque de ne pas avoir toute l'efficacité voulue.
Il conviendrait qu'il soit clairement établi que, si la condition est le recrutement d'une personne, celui qui sera chargé de la prospection extérieure pourra déjà être employé dans l'entreprise ? En effet, c'est lui qui la connaîtra le mieux.
Les considérations qui motivaient l'amendement de M. Badré sont tout de même très importantes, car il s'agit du monde des PME.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Puisque la volonté du Sénat est claire, cela sera précisé dans l'instruction.
M. le président. L'amendement n° I-165 est-il maintenu, monsieur Badré ?
M. Denis Badré. Je le retire, monsieur le président. Je voulais, avant de rendre les armes, être certain que l'objectif de cet amendement avait été bien compris et qu'il était considéré comme juste.
M. le président. L'amendement n° I-165 est retiré.
L'amendement n° I-133 n'a plus d'objet.
Monsieur Karoutchi, l'amendement n° I-68 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Roger Karoutchi. Je le retire, monsieur le président, ainsi que les amendements n°s I-69 rectifié et I-70 rectifié.
M. le président. Les amendements n°s I-68 rectifié bis, I--69 rectifié et I-70 rectifié sont retirés.
Je mets aux voix l'amendement n° I-326.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.