M. le président. L'amendement n° 191, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 121-84-4 du code de la consommation, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les fournisseurs de services ne peuvent subordonner la conclusion ou la modification des termes du contrat qui régit la fourniture d'un service de communications électroniques à l'acceptation par le consommateur d'une clause imposant le respect d'une durée minimum d'exécution du contrat de plus de vingt-quatre mois à compter de la date de conclusion du contrat ou de sa modification. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur le président, je souhaiterais présenter en même temps les amendements nos 191 et 192, car nous sommes là, véritablement, au coeur du sujet.

M. le président. J'appelle donc également en discussion l'amendement n° 192, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, et ainsi libellé :

Dans l'avant-dernier alinéa (2°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 121-84-4 du code de la consommation, remplacer les mots :

le tiers

par les mots :

le quart

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce sujet est effectivement d'une grande complexité. J'y ai déjà consacré beaucoup de temps lors de l'élaboration de mon rapport écrit, mais je souhaite prendre encore quelques minutes pour en faire une présentation exhaustive, car je tiens à répondre à M. Teston.

Je le dis en toute honnêteté, si j'ai beaucoup réfléchi, j'ai aussi beaucoup hésité ! J'ai en effet cherché à trouver, pour le consommateur, un juste équilibre entre son intérêt à court terme et son intérêt à moyen terme. Croyez-moi, cela n'a pas été si simple !

D'un côté, le fait de s'engager sur une durée d'abonnement de vingt-quatre mois présente un intérêt à court terme évident pour le consommateur, car cela lui permet de bénéficier d'un téléphone mobile moins cher, conformément à la logique économique pratiquée dans ce domaine. De l'autre, cela ne satisfait pas forcément son intérêt à moyen terme.

Il fallait donc peser le pour et le contre.

En ce sens, c'est vrai, j'ai beaucoup hésité à propos d'une éventuelle limitation à douze mois du contrat d'abonnement. Mais cela aurait eu pour effet d'amoindrir l'intérêt à court terme du consommateur, lequel, je le répète, est parfois très content de pouvoir souscrire un abonnement de vingt-quatre mois lui permettant d'obtenir un téléphone beaucoup moins cher. Par ailleurs, j'ai veillé, dans la perspective de la commission mixte paritaire, à ne pas m'écarter outre mesure du texte voté par les députés, afin que les positions de l'Assemblée nationale et du Sénat ne soient pas trop éloignées.

En revanche, monsieur le secrétaire d'État, je soutiens totalement la décision de l'Assemblée nationale de supprimer la référence au décret d'application. Vous le savez, puisque je l'ai déjà répété à plusieurs reprises, je me méfie toujours des renvois aux décrets. Vous m'avez d'ailleurs donné grande satisfaction hier, en confirmant que le décret sur les droits de préemption des baux commerciaux par les communes allait être examiné le 18 décembre prochain ; soit deux ans, tout de même, après l'adoption du texte !

Quoi qu'il en soit, l'Assemblée nationale a eu parfaitement raison de supprimer une telle référence. Il importait alors d'élaborer un dispositif, qui, indépendamment de tout décret, permette au consommateur d'y trouver son intérêt, y compris à court terme. J'ai donc exclu l'éventualité de bloquer le plafond des contrats à douze mois, ce qui aurait constitué une mesure trop pénalisante.

Après y avoir longuement réfléchi, j'ai finalement trouvé une solution. Bien entendu, monsieur Teston, peut-être ne vous satisfera-t-elle pas, mais, pour ma part, j'estime qu'elle est équilibrée, à mi-chemin entre le contrat de douze mois que vous proposez et le texte qui ressort des travaux de l'Assemblée nationale.

Il fallait en effet, à mon sens, rester sur la base de ce qui avait été décidé par nos collègues députés, d'autant qu'il est toujours dangereux de vouloir casser un système commercial qui, finalement, fonctionne bien. En France, les prix étant très compétitifs par rapport à ce qui se pratique dans les autres pays européens, le contrat de vingt-quatre mois procure un avantage certain pour le consommateur sur le plan financier. Il était donc logique et sage de le conserver.

Cela étant, j'ai tout à fait conscience que les téléphones mobiles sont non seulement de plus en plus performants, mais également de plus en plus compliqués. De nouvelles technologies, notamment la télévision mobile personnelle, la TMP, vont venir se greffer sur ce qui existe déjà. En outre, le consommateur doit être en mesure d'appréhender la réalité du prix qu'il paie.

Pour toutes ces raisons, je ne souhaite donc pas que l'on s'engage sur une durée supérieure à vingt-quatre mois.

M. Michel Teston. Encore heureux !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Certes, monsieur Teston, cette question n'est pas encore d'actualité. Mais il s'avère important, aujourd'hui, de légiférer sur ce point et de bloquer les contrats à vingt-quatre mois, d'autant que, à mon sens, cela ne pose pas de problèmes particuliers.

M. Bernard Dussaut. Cela ne change rien !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Tel est donc l'objet de l'amendement n° 191.

Le second amendement, l'amendement n° 192, porte sur le système de sortie par pénalités proposé par l'Assemblée nationale. L'idée de permettre au consommateur de rompre le contrat à partir du treizième mois m'a semblé judicieuse. À l'origine, le Gouvernement souhaitait pouvoir limiter ces pénalités à un plafond fixé par décret. Pour toutes les raisons que j'ai invoquées, je m'oppose à tout décret en la matière. L'Assemblée nationale a d'ailleurs supprimé cette référence, en proposant que les pénalités dues par le client au titre de la résiliation anticipée de son contrat ne dépassent pas le tiers des mensualités restant dues.

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, même si le texte de l'Assemblée nationale est satisfaisant, j'ai estimé qu'il était possible d'aller encore un petit peu plus loin, en plafonnant les pénalités au quart du montant à verser. Certes, je le sais bien, cette proposition ne fait pas l'unanimité.

D'ailleurs, pour que tout soit clair, plutôt que de continuer à parler de tiers ou de quart, je vais prendre un exemple chiffré, avec, comme base de calcul, une facture de 30 euros, ce qui est à peu près la moyenne constatée sur le marché.

Tout le monde le sait, dans la réalité, les portables n'ont pas forcément une durée de vie de vingt-quatre mois. Un contrat de deux ans peut donc poser problème.

Raisonnons, tout d'abord, sur la base d'une rupture anticipée du contrat à dix-huit mois. C'est souvent, en effet, à ce moment-là que les raisons de rompre l'abonnement se multiplient pour le consommateur : soit la batterie du téléphone devient défaillante, ...

M. Gérard Longuet. Hélas, les appareils sont trop fragiles !

M. Gérard Cornu, rapporteur. ...soit la sortie d'un nouvel appareil suscite en lui un désir d'achat.

En théorie, il reste six mois de contrat à honorer. Avec une facture moyenne de 30 euros, cela représente 180 euros. Les députés ont plafonné les pénalités au tiers de ce montant. Il en coûtera donc 60 euros au consommateur pour sortir du dispositif.

L'adoption de l'amendement n° 192 ferait passer un tel plafond du tiers au quart. Cela ne coûterait donc plus que 45 euros, montant qui n'est finalement pas si éloigné du plafond de 50 euros que le Gouvernement souhaitait instaurer par décret. C'est même encore plus avantageux.

De surcroît, mes chers collègues, le dispositif proposé par la commission est doublement avantageux, puisqu'il n'y a plus de décret d'application. Reconnaissez-le, il s'agit tout de même d'une avancée substantielle !

Raisonnons, maintenant, sur la base d'une rupture anticipée à vingt et un mois. Trois mois restent alors dus, soit 90 euros. En appliquant le plafond d'un tiers, le consommateur serait redevable de 30 euros. Si vous acceptez l'amendement de la commission, avec un quart, cela ne ferait plus que 22,5 euros.

M. Bernard Dussaut. TTC ou hors taxes ? (Sourires.)

M. Gérard Cornu, rapporteur. TTC, bien évidemment, mais ne jouons pas les marchands de tapis !

Ce fut, en tout état de cause, un véritable exercice d'équilibriste ! Au final, mes chers collègues, l'amendement que vous propose la commission est précisément très équilibré. Il nous permet de répondre à la volonté du consommateur et de satisfaire ses intérêts, tout en nous épargnant les contraintes du décret d'application.

Par ailleurs, monsieur Teston, pour répondre à votre préoccupation, je précise que nos collègues députés, parallèlement au dispositif mis en place, ont instauré une obligation supplémentaire pour les opérateurs : ceux-ci devront proposer, simultanément à l'offre d'abonnement de vingt-quatre mois, un contrat d'une durée maximale de douze mois offrant les mêmes services, avec des modalités commerciales non disqualifiantes.

M. le président. L'amendement n° 166, présenté par Mme Terrade, MM. Billout et Danglot, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

I. - Dans le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 121-84-4 du code de la consommation, remplacer le mot :

douzième

par le mot :

sixième

II. - Dans le même alinéa, avant les mots :

d'au plus le tiers

insérer les mots :

d'une somme forfaitaire ne pouvant excéder 40 euros

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'instauration d'une durée minimale d'engagement avait été initialement prévue pour développer l'accès du plus grand nombre de nos concitoyens à la téléphonie mobile, en leur offrant la possibilité de payer le terminal moins cher.

Cet engagement est présenté comme une prime à la fidélité par les opérateurs, avec un système de fidélisation par points qui leur permet d'acquérir un nouvel appareil à prix préférentiel, le renouvellement de celui-ci étant soumis, cela a été dit, à une obligation d'engagement de nouveau pour vingt-quatre mois.

Dans la mesure où les offres de forfaits font l'objet de modifications et d'offres promotionnelles régulières, ce système de fidélisation va à l'encontre du bon fonctionnement de la concurrence au profit du consommateur.

En effet, la durée minimale d'abonnement est, le plus souvent, prolongée de vingt-quatre mois avant l'échéance du contrat, la période de renouvellement moyenne étant, cela a été dit aussi, de vingt et un mois.

Dans ce domaine, il est des raisons commerciales qui font revenir sur la sacro-sainte concurrence libre et non faussée, censée permettre la régulation du marché.

Je veux citer l'exemple récent de l'iPhone. Un opérateur a passé un accord d'exclusivité avec le fabriquant de cet appareil. Résultat : le consommateur désireux de l'acquérir se trouve dans la quasi-obligation de prendre un abonnement chez cet opérateur, puisque le prix de l'appareil sans abonnement est augmenté de la moitié de sa valeur, et que certains services liés à ce même appareil ne sont disponibles que via un abonnement auprès dudit opérateur.

Mais ce n'est pas le plus grave. En effet, l'engagement minimum auprès de l'opérateur, ce qu'ils appellent la « fidélité », à été jeté aux oubliettes : impossible de faire jouer ces points de fidélité pour acquérir ce nouveau « joujou » qu'est l'iPhone, conformément à ce qui était clairement stipulé dans le contrat d'exclusivité.

Dans le même temps, tout est organisé par les opérateurs pour que chaque utilisateur soit fortement dissuadé de changer d'opérateur pour bénéficier de l'offre plus avantageuse d'un autre.

Afin que la concurrence s'exerce réellement à l'avantage du consommateur, il faut donc permettre à ce dernier, sans trop de difficultés et à un coût connu et raisonnable, de bénéficier d'une offre plus intéressante chez un autre opérateur, et ce en ayant une idée claire de ce que cela va lui coûter et des démarches qu'il lui sera nécessaire de faire.

C'est pourquoi nous sommes plus favorables à l'instauration d'un forfait, en contrepartie d'un départ avancé par rapport aux termes du contrat.

Un représentant de l'association UFC-Que choisir, dans un entretien publié dans le journal Les Échos, déclarait ainsi au sujet de la possibilité offerte au consommateur de résilier son abonnement à partir du treizième mois : « C'est attirant sur le papier mais cela n'aura aucun impact. Le consommateur devra encore payer une pénalité de sortie (...) Autant dire que cela réduit à néant l'intérêt d'un client de changer d'opérateur. »

En outre, les offres de téléphonie étant très régulièrement mises à jour par les opérateurs, à des moments stratégiques tels que la période de Noël ou le début de l'été, il nous semble raisonnable et souhaitable d'offrir au consommateur la possibilité de changer facilement d'abonnement au bout de six mois. Cela aurait l'intérêt de combattre l'effet de captivité chez un opérateur et dissuaderait l'abus d'offres promotionnelles devenant payantes au bout d'un mois, ce qui augmente la facture de l'abonné dans des proportions qu'il n'avait pas prévues.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous demandons d'adopter notre amendement, par lequel nous proposons de réduire le délai de résiliation de douze à six mois, en contrepartie du paiement d'une somme forfaitaire ne pouvant excéder 40 euros, mais qui, bien évidemment, peut être bien inférieure !

M. le président. L'amendement n° 134 rectifié, présenté par MM. Hérisson et Texier, Mme Mélot et M. Pointereau, est ainsi libellé :

 

Avant le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 121-84-4 du code de la consommation, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Tout fournisseur de service ayant mis en place un ou des systèmes de fidélisation par cumul de points ne peut conditionner l'utilisation de ces points de fidélité à l'acceptation par le consommateur d'une clause contractuelle imposant le respect d'une durée minimum d'exécution du contrat, ni différencier selon ce critère la valeur de leur contrepartie.

La parole est à M. Yannick Texier.

M. Yannick Texier. Dans le secteur des communications électroniques, notamment dans la téléphonie mobile, les opérateurs ont mis en place un système de points de fidélité.

En pratique, pendant ou à l'issue de la période d'engagement, le consommateur se voit proposer d'utiliser ses points, soit en déduction de l'achat d'un nouveau terminal, soit pour acquérir des services tels que des SMS, des minutes supplémentaires, etc. Mais pour pouvoir les utiliser, ce consommateur est obligé, dans la plupart des cas, de se réengager sur douze mois, et même, le plus souvent, sur vingt-quatre mois. Il peut aussi choisir de changer d'opérateur, mais il perd alors l'ensemble de ses points, dont le « coût psychologique » est évalué entre 50 et 100 euros.

En conséquence, le système actuel des points de fidélité réduit l'incitation à changer d'opérateur et limite, de ce fait, l'exercice de la concurrence au bénéfice des consommateurs.

Ces points jouent, en réalité, le rôle d'un véritable « coût de sortie », comme Philippe Nasse l'avait noté, dès 2005, dans son rapport, sur la base duquel le ministre de l'industrie avait obtenu des opérateurs, lors de la table ronde du 27 septembre 2005, qu'ils élargissent l'usage des points de fidélité. Deux ans plus tard, le bilan présenté lors de la réunion du 25 septembre dernier a montré que cet engagement n'avait pas été respecté.

Le présent amendement, qui vise à empêcher les opérateurs de réengager les consommateurs lorsque ces derniers utilisent leurs points de fidélité, devrait, à la fois, profiter aux consommateurs et améliorer l'intensité concurrentielle sur le marché.

M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du III de cet article, remplacer les mots :

le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi

par les mots :

le 1er juin 2008

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les autres amendements.

M. Gérard Cornu, rapporteur. L'amendement n° 30 est de coordination.

Je serai bref sur les autres amendements, car je me suis suffisamment expliqué en présentant ceux de la commission.

Nous avons émis un avis défavorable sur les amendements nos 107 et 166, pour les raisons que j'ai exposées précédemment.

En revanche, nous sommes favorables à l'amendement n° 134 rectifié, qui nous semble aller dans le bon sens.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Je ferai un rapide retour en arrière.

Le marché de la téléphonie mobile a véritablement explosé en dix ans, le nombre d'abonnés passant de 5 millions à 53 millions. Ce marché a pu évoluer aussi rapidement grâce au développement d'un modèle économique, celui du subventionnement des terminaux : les opérateurs mettent à la disposition de leurs abonnés des téléphones portables neufs et renouvelés régulièrement. En contrepartie, ils demandent à ces mêmes abonnés de s'engager sur des durées minimales.

Ce modèle a bien fonctionné, car il a permis la mise à disposition d'appareils à un coût raisonnable. Vous évoquiez tout à l'heure, monsieur le rapporteur, l'ordre de grandeur des montants des forfaits. J'observe que le coût moyen de la facture de téléphonie mobile par Français est resté stable, alors que le nombre de minutes utilisées a augmenté.

Jusqu'à présent, ce modèle a donc été plutôt favorable au consommateur. Mais il a un effet pervers, qui a été dénoncé par l'Autorité de régulation : aujourd'hui, alors même que le marché est mature, la concurrence ne joue pas suffisamment.

L'Autorité de régulation a identifié deux freins à la concurrence dans le secteur de la téléphonie mobile.

Le premier est le délai de portabilité, c'est-à-dire le délai nécessaire pour changer d'opérateur de téléphonie tout en conservant le même numéro.

Lorsque j'étais député et co-rapporteur du projet de loi de 2005 avec M. Cornu, nous avons remédié à ce problème en présentant un amendement qui ramenait le délai de portabilité à dix jours. Ce délai, qui est effectif depuis le 21 mai dernier, a entraîné un triplement des demandes de portabilité, ce qui prouve que le délai constituait bien un frein à la concurrence ; il avait, d'ailleurs, été reconnu comme tel dans le rapport de Philipe Nasse que vous avez cité, monsieur Texier.

Le second frein à la concurrence identifié par l'Autorité de régulation concerne les durées minimales d'engagement.

Il existe aujourd'hui trois opérateurs de téléphonie mobile et quatorze opérateurs de réseau mobile virtuels, les fameux MVNO.

La part de marché des MVNO sur le flux, c'est-à-dire sur les nouveaux contrats, est de 28 % ; sur le stock, c'est-à-dire sur l'ensemble du marché, elle n'est, en revanche, que de 4 %. La raison est simple : en matière de téléphonie mobile, les consommateurs sont liés pour des durées de vingt-quatre mois ; la concurrence ne joue donc, en fait, qu'une fois tous les deux ans.

Si nous ne faisons rien, une vingtaine d'années seront nécessaires pour que la part de marché des MVNO sur le stock atteigne le même niveau que celle portant sur le flux. La question pourrait, d'ailleurs, se poser au moment de l'apparition sur le marché d'un quatrième opérateur, ce que souhaite le Gouvernement.

Nous avons étudié cette question avec les différents acteurs afin de remédier à cette situation. Ainsi, le sujet a été évoqué lors de la réunion du mois de septembre dernier, au cours de laquelle Hervé Novelli et moi-même avons rencontré les associations de consommateurs et les opérateurs.

À l'heure actuelle, 75 % des consommateurs liés par des contrats de forfait téléphonique mobile sont soumis à des durées minimales d'engagement qui atteignent souvent vingt-quatre mois.

Comme l'a dit M. le rapporteur, plusieurs solutions s'offraient à nous.

La plus radicale, qui fait l'objet de l'amendement n° 107, déposé par le groupe socialiste, consiste à interdire les durées d'engagement supérieures à douze mois. Nous l'avons examinée avec attention et, à un moment donné, elle avait même ma préférence.

Nous ne l'avons pas retenue, car nous avons pensé que si une telle mesure était adoptée, elle pourrait entraîner un effet pervers majeur, à savoir l'augmentation du prix moyen du forfait. Je rappelle, en effet, que les offres de vingt-quatre mois sont, aujourd'hui, nettement moins chères que celles de douze mois. Un autre effet pervers possible était la fin du modèle du subventionnement des terminaux.

Nous avons donc cherché d'autres formules.

La commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale avait adopté un amendement tendant à obliger les opérateurs à proposer, parallèlement à toute offre d'abonnement d'une durée de vingt-quatre mois, une offre équivalente d'une durée de douze mois, afin que le consommateur ait le choix. Cet amendement prévoyait également que le consommateur puisse résilier son contrat à partir du treizième mois, même en cas d'engagement pris sur vingt-quatre mois, à condition de verser un dédit.

Le Gouvernement avait envisagé, dans un premier temps, de proposer un plafonnement par décret du montant de ce dédit à un tiers des mensualités restant dues. J'avais même évoqué publiquement un plafonnement de l'ordre de quelques dizaines d'euros, afin de renforcer l'efficacité de la disposition.

L'Assemblée nationale n'a pas retenu cette dernière disposition et a souhaité maintenir uniquement le plafonnement à hauteur du tiers des mensualités restant dues.

Sur ce point, le Gouvernement partage l'avis de la commission. Nous souhaitons, avec cette mesure, fluidifier le marché.

Il est, certes, nécessaire de prévoir une clause de dédit en cas de rupture de l'engagement sur l'initiative du consommateur, qui doit se traduire par une indemnité versée à l'opérateur avec lequel ce consommateur a signé le contrat, mais il faut faire en sorte que son coût soit le plus bas possible.

L'abaissement de ce montant du tiers au quart des mensualités restant dues, comme l'a proposé M. le rapporteur dans son amendement n° 192, me paraît satisfaisant. Cette solution volontariste, qui permettra de diminuer le coût de sortie et d'améliorer la concurrence, présente l'avantage de ne pas être jusqu'au-boutiste et de ne pas aller à l'encontre des attentes des consommateurs.

Le Gouvernement demande donc au Sénat d'adopter les amendements nos 191 et 192, auxquels il est favorable.

L'avis est également favorable sur l'amendement n° 134 rectifié, qui concerne la question très importante des points de fidélité. Vous allez contribuer, monsieur Texier, à transformer des points de captivité en points de fidélité ! (Sourires.) Aujourd'hui, plus on est fidèle, plus on est captif !

M. Yannick Texier. C'est vrai !

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Il faut, au contraire, que la fidélité soit récompensée, la meilleure des récompenses étant la liberté.

Sur l'amendement n° 30, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

En revanche, sur les amendements nos 107 et 166, son avis est défavorable.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Je comprends que mes collègues des groupes socialiste et CRC soient déçus de voir leurs amendements repoussés, mais ils doivent penser à la commission mixte paritaire !

Des divergences existent entre l'Assemblée nationale et le Sénat, et il est important que les amendements de votre commission soient portés par un élan fort du Sénat, de façon à passer l'obstacle de la CMP. Je n'ai pas besoin de vous faire un dessin, mes chers collègues !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote sur l'amendement n° 107.

M. Jean-Pierre Fourcade. J'ai été convaincu par la démonstration de M. le secrétaire d'État. Il a eu raison de donner son accord sur les propositions de la commission, qui forment un tout cohérent.

Je souhaite néanmoins poser une question technique. Le système que vous avez exposé, monsieur le secrétaire d'État, fonctionne correctement à condition que les trois opérateurs disposent d'un choix de matériel disponible, et que la tarification et l'offre faites par ces opérateurs puissent s'appliquer à n'importe quel type de terminal.

Mais dans la situation où un seul opérateur a l'exclusivité sur un terminal particulier, comme c'est le cas pour l'iPhone, ce système pose un problème : le mécanisme concurrentiel, que nous avons longuement évoqué et que j'approuve pleinement, ne fonctionne plus.

Je ne voterai pas l'amendement de M. Teston, rassurez-vous ! Mais je pose au Gouvernement et à la commission la question suivante : lorsqu'il existe une exclusivité de terminal pour un opérateur donné, le système que vous proposez fonctionne-t-il aussi bien ? N'allons-nous pas trop loin dans la réglementation et dans la recherche de la précision ?

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.

M. Michel Teston. Dans le cas, peu vraisemblable, où notre amendement ne serait pas adopté (sourires), nous étudierons avec attention l'amendement n° 166 de nos collègues du groupe CRC.

S'agissant des amendements de la commission, nous ne souhaitons pas répondre, pour l'instant, à la sollicitation de M. le rapporteur. Mais nous nous réservons la possibilité de revoir la question en commission mixte paritaire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 107.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 191.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 166.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 192.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 7 bis, modifié.

(L'article 7 bis est adopté.)

Article 7 bis
Dossier législatif : projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs
Article 7 quater

Article 7 ter

I. - Après l'article L. 121-84 du code de la consommation, il est inséré un article L. 121-84-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 121-84-6. - Dans le respect de l'article L. 121-1, aucune somme ne peut être facturée au consommateur pour un appel depuis le territoire national à un service téléphonique lorsqu'il lui a été indiqué, sous quelque forme que ce soit, que l'appel à ce service est gratuit. Le présent alinéa est applicable à toute entreprise proposant directement, ou par l'intermédiaire d'un tiers, un service accessible par un service téléphonique au public. »

II. - Après l'article L. 34-8-1 du code des postes et des communications électroniques, il est inséré un article L. 34-8-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 34-8-2. - Les opérateurs qui commercialisent un service téléphonique ouvert au public formulent une offre d'interconnexion visant à permettre à leurs clients d'appeler gratuitement certains numéros identifiés à cet effet au sein du plan national de numérotation. La prestation correspondante d'acheminement de ces appels à destination de l'opérateur exploitant du numéro est commercialisée à un tarif raisonnable dans les conditions prévues au I de l'article L. 34-8. »

M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 121-84-6 du code de la consommation, remplacer les mots :

depuis le territoire national

par les mots :

depuis le territoire métropolitain, les départements d'outre-mer et les collectivités territoriales de Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision, qui fera plaisir à Mme Payet et à Miss France, toutes deux Réunionnaises ! (Sourires.)

Il vise à rappeler ce qu'est le territoire national.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.

M. Philippe Nogrix. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d'avoir présenté cet amendement. Il est nécessaire, en effet, de rappeler que notre territoire n'est pas seulement métropolitain et que, dans les départements et les collectivités territoriales d'outre-mer, vivent aussi des Français, qui doivent avoir les mêmes droits que nous.

On l'oublie souvent, par inattention. Heureusement, leurs représentants sont là pour nous le rappeler, de temps à autre !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 75 rectifié est présenté par MM. Hérisson et Texier, Mme Mélot et M. Pointereau.

L'amendement n° 128 est présenté par M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

 Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 121-84-6 du code de la consommation, supprimer les mots :

l'appel à

La parole est à M. Yannick Texier, pour présenter l'amendement n° 75 rectifié.

M. Yannick Texier. L'article 7 ter introduit le principe selon lequel la gratuité des numéros verts doit être effective pour l'utilisateur depuis tous les opérateurs fixes et mobiles.

Afin que cet objectif de gratuité soit pleinement respecté et que l'article ne soit pas détourné de sa finalité initiale, il est important de préciser que l'ensemble du service, et non pas seulement la prestation d'appel à ce service, doit être gratuit.

À défaut de cette précision, les numéros verts risqueraient d'être utilisés par des entreprises qui pourraient se faire rémunérer par un autre biais. Une telle dérive retirerait la lisibilité tarifaire des numéros verts, qui sont connus du public pour être des services gratuits.

L'ARCEP n'ayant aucun pouvoir de contrôle sur les services, elle ne pourra agir pour faire respecter la gratuité totale du service.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour présenter l'amendement n° 128.

M. Philippe Nogrix. Les sénateurs d'Ille-et-Vilaine s'associent, monsieur le président ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il ne paraît pas raisonnable d'exiger qu'un service rendu soit gratuit. Libre à un service qui décide d'être accessible par un numéro gratuit, y compris depuis un mobile, de se faire rémunérer par d'autres moyens.

De plus, ces amendements pourraient aller à l'encontre de la volonté de leurs auteurs, car ils auraient pour effet d'interdire l'accès à tout service payant par l'intermédiaire d'un numéro vert.

J'invite donc MM. Texier et Nogrix à retirer leurs amendements, à l'encontre desquels j'émettrai, sinon, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Comme l'a indiqué M. le rapporteur, si ces amendements étaient adoptés, serait interdit, par exemple, le recours à un numéro gratuit pour certains services payants comme le dépannage.

Ces amendements vont, par ailleurs, à l'encontre de la démarche de transparence que nous souhaitons, et qui vise à éviter la double facturation dans le cas où le consommateur est en relation régulière avec un service : le recours à un numéro d'appel gratuit permet, alors, de ne pas facturer le temps d'attente.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement sollicite le retrait de ces amendements ; à défaut, il y sera défavorable.

M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 75 rectifié est-il maintenu ?

M. Yannick Texier. Je le retire, monsieur le président !

M. le président. L'amendement no 75 rectifié est retiré.

Monsieur Nogrix, l'amendement n° 128 est-il maintenu ?

M. Philippe Nogrix. Je le retire également, monsieur le président !

M. le président. L'amendement n° 128 est retiré.

L'amendement n° 63, présenté par M. Texier et Mme Mélot, est ainsi libellé :

Après la première phrase du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 121-84-6 du code de la consommation, insérer une phrase ainsi rédigée :

Toutefois, il est fait exception lorsque figurent à proximité du mot gratuit, en caractères de taille lisible, et proportionnés, les exceptions à la gratuité.

La parole est à M. Yannick Texier.

M. Yannick Texier. L'article 7 ter comporte une ambiguïté. On comprend qu'il met les opérateurs dans l'obligation de conclure des accords entre eux pour permettre la gratuité de numéros identifiés comme tels, mais il va plus loin. En effet, alors qu'il figure dans le chapitre sur les contrats de communications électroniques, il oblige les entreprises qui veulent être accessibles par un numéro vert et qui en font la publicité à prendre un numéro accessible gratuitement depuis tous les réseaux.

Or, du fait de l'ambiguïté qui règne, il n'est pas exclu que des annonceurs persistent à parler de gratuité, même s'ils ne remplissent pas cette obligation. On peut penser, par exemple, aux associations et aux personnes publiques qui ne sont pas concernées par ce texte ou aux entreprises qui ne veulent ou ne peuvent pas, pour des raisons économiques, offrir l'accès de leur numéro aux appels depuis les mobiles.

Compte tenu de la diversité des situations que pourront rencontrer les consommateurs, il ne faudrait pas que cela entraîne un accroissement des contentieux de facturation « clients » des opérateurs, qui, eux, ne peuvent être responsables des annonces des entreprises. Il n'est pas sûr, de surcroît, que la situation gagne en lisibilité pour le consommateur.

Par ailleurs, pourquoi ne pas donner le choix à l'entreprise si on ne veut pas risquer de voir disparaître l'usage des numéros verts, notamment par des PME, compte tenu de la hausse des prix inévitable qui va s'ensuivre ?

L'amendement a donc pour objet d'accroître la lisibilité pour le consommateur en contrepartie de la possibilité qui serait donnée aux entreprises, ou à toute autre personne, de choisir un numéro vert accessible depuis tous les réseaux ou depuis certains d'entre eux.