Article 7
L’article 39 AA quater du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 39 AA quater. – Les taux d’amortissement dégressif définis au 1 de l’article 39 A sont majorés de 30 % pour les matériels de production, de sciage et de valorisation des produits forestiers, acquis ou fabriqués entre le 26 septembre 2008 et le 31 décembre 2011, par les entreprises de première transformation du bois.
« Pour l’application du premier alinéa, les entreprises de première transformation du bois s’entendent des entreprises dont l’activité principale consiste à fabriquer à partir de grumes des produits intermédiaires.
« Le bénéfice de cette majoration du taux d’amortissement dégressif est subordonné au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l’application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 7
M. le président. L'amendement n° I-103, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Avant le a du I de l'article 219 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... - Les taux fixés au présent article sont diminués d'un dixième lorsqu'une fraction du bénéfice imposable au moins égale à 60 % est mise en réserve ou incorporée au capital au sens de l'article 109, à l'exclusion des sommes visées au 6° de l'article 112. Ils sont majorés d'un dixième lorsqu'une fraction du bénéfice imposable inférieure à 40 % est ainsi affectée. »
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Cet amendement vise à moduler les taux de l’impôt sur les sociétés en fonction de l’affectation du bénéfice réalisé.
Plus précisément, nous proposons de minorer ce taux d’un dixième en cas de réinvestissement des bénéfices à hauteur de 60 % au moins, afin d’encourager la production plutôt que la distribution de dividendes aux actionnaires ou le rachat d’actions à visée spéculative. Parallèlement, nous préconisons de majorer ce taux d’un dixième lorsque moins de 40 % du bénéfice imposable est réinvesti. Enfin, entre ces deux situations, nous souhaitons maintenir inchangé le barème existant.
La référence à des concepts bien ancrés dans le code général des impôts depuis 1979 devrait rendre ces dispositions aisément applicables.
De plus, une telle distinction entre bénéfices réinvestis et bénéfices distribués est pratiquée par certains pays voisins. Il s’agit d’un outil pertinent de politique fiscale pour orienter les choix des entreprises dans un sens plus favorable à l’économie productive.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vouloir raffiner la législation fiscale en matière de taux de l’impôt sur les sociétés pour induire tel ou tel mode d’affectation du bénéfice imposable relève d’une logique qui conduit à interférer dans la gestion des entreprises.
C’est une conception diamétralement opposée à celle de la commission, qui souhaite, au contraire, que la fiscalité soit simple, neutre, fondée sur une assiette large et des taux bas.
La commission ne peut donc être que très défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je partage le sentiment de la commission.
La gauche avait déjà introduit des mesures similaires, qu’elle a été amenée à supprimer parce qu’elles étaient trop difficiles à mettre en œuvre. C’est un élément dont il faut tenir compte.
Le Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° I-103 est-il maintenu, monsieur Massion ?
M. Marc Massion. Oui, je le maintiens, monsieur le président, car je suis quelque peu déçu des réponses qui me sont apportées.
Contrairement aux propos tenus par M. le rapporteur général, il ne s’agit pas d’un débat idéologique. Je me situe sur le plan du pragmatisme prôné par le Président de la République face à une situation difficile : il préconise lui-même d’en revenir au capitalisme des producteurs.
Notre amendement est conforme à ce souhait puisqu’il s’agit d’une mesure pragmatique visant à encourager les producteurs. Je m’étonne donc qu’il ne recueille l’avis favorable ni du Gouvernement ni de la commission.
M. le président. L'amendement n° I-173, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts est complété par les mots : « et 46 % lorsque les dividendes versés aux actionnaires représentent plus de 10 % du bénéfice imposable. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement vise à modifier l’article 219 du code général des impôts dans le sens de la mise en œuvre de taux différenciés de l’impôt sur les sociétés selon que les entreprises privilégient la distribution de dividendes aux actionnaires ou consacrent au contraire une part importante de leurs bénéfices à l’investissement et à l’augmentation de la part des salaires.
Dans la perspective de relance de notre économie, nul ne peut contester que la question de l’utilisation des bénéfices occupe une place centrale.
Notre amendement vise donc clairement à réorienter les bénéfices d’exploitation vers l’économie et la satisfaction des besoins sociaux.
Il s’agit d’une mesure de bon sens, qui répond à une attente et à une revendication forte de nos concitoyens.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement relève d’une logique voisine de celle de l’amendement précédent, mais il est encore plus extrême s’agissant des conséquences.
Aussi, la commission y est encore plus défavorable qu’au précédent.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Je rajouterai, car je n’ai peut-être pas été entendu, qu’en 2000, lorsque vous étiez au pouvoir, vous avez supprimé, si mes souvenirs sont exacts, cette possibilité de faire varier le taux d’impôt sur les sociétés selon qu’une partie des bénéficies est réinvestie ou non dans le capital de l’entreprise, et ce en raison notamment de la difficulté d’exercer un contrôle.
Même si l’idée peut être discutée, une mesure inapplicable ne peut être retenue.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, compte tenu de l’évaporation importante de la richesse créée dans la sphère financière, notre amendement est largement justifié.
Je développerai volontiers mon argumentation si vous le souhaitez, mais c’est tout de même à partir de cet élément-là qu’il faut légiférer.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Pour les raisons évoquées par M. le ministre, je ne voterai pas cet amendement.
En réalité, mon cher collègue, le système existe, car lorsque vous transformez des comptes courants en capitaux, vous êtes exonéré de l’impôt de solidarité sur la fortune. Autrement dit, les dividendes non consommés et réintroduits dans le capital de l’entreprise permettent une exonération fiscale.
M. le président. L'amendement n° I-117, présenté par MM. Jégou, Badré, C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 199 ter B du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par exception aux dispositions de la troisième phrase du premier alinéa et à celles de l'alinéa précédent, la créance constatée par les petites et moyennes entreprises répondant à la définition des petites et moyennes entreprises figurant à l'annexe I de la recommandation 2003/361/CE de la commission du 6 mai 2003 est immédiatement remboursable. »
II. - Les dispositions du I s'appliquent jusqu'au 31 décembre 2009 et dans la limite de 100 000 euros.
III. - La perte de recettes pour l'État résultant des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Le dispositif actuel du crédit d’impôt recherche prévoit son imputation sur l’impôt sur les sociétés. En cas d’impossibilité d’une telle imputation, la fraction non utilisée n’est remboursable aux entreprises qu’à l’expiration d’une période de trois ans. Ce délai est trop long pour des entreprises déficitaires, en particulier en période de crise.
Mobiliser la créance auprès d’établissements financiers reste coûteux, et même difficile dans la conjoncture actuelle.
Nous proposons donc, par cet amendement, de retenir un remboursement immédiat de ces créances dans la limite de 100 000 euros. Cette mesure pourrait judicieusement s’inscrire dans le cadre du plan de soutien aux PME innovantes pour les aider à supporter la crise que nous connaissons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
Lors d’une prise en parole récente en Haute-Savoie, le Président de la République a souhaité un remboursement plus rapide du crédit d’impôt recherche aux entreprises. Le présent amendement semble s’inscrire dans une telle logique et relayer opportunément les propos du Président de la République.
Cette mesure est légitime dans son esprit. Elle ne crée pas de nouvelles dépenses pour l’État, hormis pour les entreprises qui disparaîtraient dans le délai de trois ans. Quant au coût de trésorerie, est-il possible de le chiffrer, monsieur le ministre ?
S’agissant de l’utilisation de la créance sur l’État que représente le crédit d’impôt recherche, je suis surpris d’entendre dire que l’activation de ces créances pose des problèmes auprès du secteur bancaire. En effet, il s’agit bien d’une créance sur l’État qui résulte d’un régime légal clair. Depuis la réforme récente, le mode de calcul du crédit d’impôt recherche est simple, aisément vérifiable dans la comptabilité des entreprises.
Ce type de crédit est assorti du meilleur gage possible, c’est-à-dire d’une créance sur l’État. Je m’étonne donc que l’on évoque des difficultés pour obtenir un financement sur une telle base.
Peut-être pourrez-vous nous donner des éléments d’information sur ce point, monsieur le ministre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Cette créance est mobilisable auprès d’OSEO comme auprès des banques commerciales.
J’ignore si nous avons déjà des retours sur le rythme et la réalité de cette mobilisation, puisque le dispositif, tout comme la crise, est récent. Ces informations figureront dans les tableaux de bord qui sont actuellement établis département par département et entreprise par entreprise.
Le Gouvernement partage l’esprit qui sous-tend cet amendement et, comme l’a rappelé le rapporteur général, le Président de la République lui-même s’est exprimé à ce sujet.
Les modalités techniques d’application de la mesure doivent être étudiées et le coût évalué.
Je demande donc le retrait de cet amendement en attendant que nous soyons prêts à mettre en œuvre cette idée que nous partageons : accélérer les remboursements de l'État a un coût moindre que la mobilisation de la créance auprès des banques.
M. le président. L’amendement n°I-117 est-il maintenu, monsieur Badré ?
M. Denis Badré. J’ai bien écouté les arguments de la commission et du Gouvernement.
Je faisais référence, de façon subliminale, au discours du Président de la République en Haute-Savoie, laissant à notre rapporteur général le soin d’expliciter cette référence.
À cet égard, il est symboliquement important que le Parlement apporte sa contribution directe à l’élaboration de ce genre de plan, afin que celui-ci ne reste pas simplement une construction exécutive.
La crise n’existait pas au moment où le dispositif a été élaboré, avez-vous dit. Si la crise avait été présente à ce moment-là, des mesures analogues auraient sans doute été retenues.
Vous renvoyez l’adoption de ce dispositif à plus tard, monsieur le ministre, car les modalités techniques d’application d’un tel dispositif doivent être étudiées.
Je me permettrai de vous faire une autre proposition : pour marquer sa volonté de soutenir le plan que le Gouvernement est en train de bâtir, pourquoi la Haute Assemblée ne voterait-elle pas cette mesure aujourd’hui, quitte à apporter des précisions d’ici à la commission mixte paritaire ?
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Je ne suis évidemment pas insensible au souci de nos collègues d’améliorer la trésorerie des entreprises, parce que, au fond, c’est l’objet principal de l’amendement n° I-117 de M. Jégou et de ses amis. Le problème, c’est qu’une telle disposition représente pour l'État non seulement une charge de trésorerie, mais aussi une charge qui se traduit budgétairement immédiatement dans les comptes de l'État, avec une dégradation du solde.
On a toujours de bonnes raisons, mes chers collègues, de rembourser sur le champ un crédit d’impôt. De proche en proche, on pourrait rentrer dans cette mécanique. Peut-être le faudra-t-il d’ailleurs un jour, et pourquoi pas en ce qui concerne le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, le FCTFA, puisque l’on attend deux ans pour se le faire rembourser.
Donc, que l’on nous autorise aussi à inscrire la recette dans les budgets des collectivités et que l’on nous verse les fonds immédiatement.
La situation des finances de l’État, en particulier de son budget, est telle que l’on ne peut pas se payer ce luxe.
Si un délai de trois ans a été prévu, c’est aussi pour que l’entreprise se rende compte de l’effet du crédit d’impôt recherche, plus exactement de la recherche engagée et financée avec le crédit d’impôt.
Par ailleurs, les entreprises ont la possibilité – il me semble que c’est M. le ministre qui l’a dit – d’obtenir un crédit par l’intermédiaire d’OSEO, en attendant la rentrée du crédit d’impôt recherche. Bien entendu, cela représente des charges d’intérêts. Mais pourquoi voulez-vous que celles-ci soient payées par l’État dans une période où l’État n’a pas d’argent à distribuer ?
Pour des raisons qui tiennent au caractère très serré des finances de l’État, et quelles que soient les explications séduisantes qui ont été données par notre collègue Jean-Jacques Jégou en commission et par notre ami Denis Badré maintenant, je ne peux pas voter en faveur de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. L’intention des auteurs de l’amendement est louable ! En ce moment, tout signe donné aux petites entreprises va dans le bon sens s’il permet d’éviter l’arrêt d’un certain nombre d’investissements, notamment dans les secteurs qui nous intéressent, en matière de recherche et de développement.
Cependant, comme vient de le souligner mon excellent collègue M. Charasse, le coût de cette disposition viendrait s’imputer directement sur le déficit ; je crains que l’augmentation du déficit ne s’élève à plusieurs centaines de millions d’euros, ce qui n’est pas peu important à l’heure actuelle.
M. Badré a dit : adoptons cet amendement, quitte à apporter des précisons d’ici à la commission mixte. Non, mon cher collègue, car il ne faut pas que le projet de loi de finances adopté par le Sénat comporte une aggravation du déficit !
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. Michel Charasse. Bien sûr !
M. Jean-Pierre Fourcade. Nous serions alors considérés comme moins sérieux que nous prétendons l’être !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Voilà un argument décisif !
M. Jean-Pierre Fourcade. C’est la raison pour laquelle je ne voterai pas en faveur de cet amendement.
Cependant, monsieur le ministre, nous pourrions prendre deux initiatives pour aller dans le sens des préoccupations de MM. Jégou et Badré, ainsi que des membres du groupe de l’Union centriste.
Premièrement, nous pourrions demander à OSEO d’isoler dans sa comptabilité la mobilisation de ces créances en conférant à cette mobilisation le taux le plus faible possible. Il me semble que c’est réalisable. J’ai participé, voilà quelque temps, à un débat sur la chaîne Public Sénat avec le directeur général d’OSEO : ce dernier est tout à fait disposé à le faire ! La mobilisation des créances à un taux préférentiel permettrait, me semble-t-il, d’atteindre l’objectif que nous poursuivons.
Deuxièmement, sur le fond, il conviendrait peut-être de revenir sur le délai de trois ans, qui est certainement très long pour une petite entreprise.
Il faudrait adopter pour ces créances d’impôt recherche sur l’État le même système que celui que nous avons retenu tout à l’heure pour les petites sociétés pétrolières, à savoir que cette créance peut être imputée soit sur l’exercice 2009, soit sur l’exercice 2010. Cela permettrait d’assouplir un peu les conditions d’application de la mesure et de donner un avantage particulier aux petites entreprises en ce qui concerne le crédit d’impôt recherche.
Telle est la position que le groupe UMP adoptera.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je voudrais tenter de rapprocher les points de vue exprimés par Michel Charasse et Jean-Pierre Fourcade, dont je salue la vigilance et la volonté de ne pas dégrader le solde budgétaire.
L’amendement présenté par Denis Badré va dans le sens de la vie économique et du renforcement de la compétitivité. Car équilibrer les comptes publics, ce n’est pas seulement tenir la dépense publique : c’est aussi veiller à enrichir le potentiel économique, sans lequel il n’y a pas, à terme, d’espérance d’équilibre des finances publiques.
Au fond, dans ce cas particulier, seules les entreprises bénéficiaires, soumises à l’impôt sur les sociétés dans des conditions significatives, peuvent bénéficier immédiatement du financement public pour la recherche. Il n’a pas échappé à Michel Charasse que celles-ci sont remboursées immédiatement.
M. Michel Charasse. Tout à fait !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Les sociétés qui sont en phase de démarrage et d’investissement, et qui n’ont pas encore de résultats positifs susceptibles de les assujettir à l’impôt sur les sociétés, n’ont pas la possibilité de bénéficier de ce financement.
Le Président de la République a rappelé, d’une manière non ambiguë – vous en êtes vous-même convenu, monsieur le ministre – qu’il s’agissait d’une dette de l’État. Vous imaginez de passer par OSEO. C’est tout de même un chemin un peu plus compliqué. Si nous voulons être pleinement efficaces dans cette économie productive, mieux vaut aller droit au but.
On va finir par reconnaître que les créances des entreprises sont réelles, qu’elles peuvent être négociées auprès d’une banque ou d’OSEO, et que toute banque pourra se servir de ce titre comme gage collatéral pour bénéficier des liquidités offertes par la Caisse nationale de refinancement créée dans le récent collectif budgétaire.
Il serait dommage, Denis Badré, que cet amendement soit rejeté…
M. Michel Charasse. Je propose de le sous-amender !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous devons tous reconnaître que l’objectif est réalisable et que, dans ces conditions, il faut trouver une mesure simple, applicable sans difficulté.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. C’est sûr !
M. Jean-Pierre Fourcade. Absolument !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Plutôt que de passer par ces refinancements, ne serait-il pas préférable de demander à ceux qui certifient la sincérité des comptes de certifier également le bien-fondé de cette créance afin qu’elle puisse être validée le plus rapidement possible ? Cela me paraît un point très important.
M. Michel Charasse. Monsieur le président, je souhaite déposer un sous-amendement !
M. le président. Monsieur Charasse, il n’est pas possible de déposer de sous-amendement pendant les explications de vote sur l’amendement. Je vous accorderai néanmoins cette possibilité si M. Badré maintient son amendement.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il serait très désagréable de ne pas pouvoir voter un amendement qui va dans le bon sens économiquement et, sans doute, fiscalement. Mais ce serait une erreur de conduire le Sénat à se prononcer dès aujourd'hui sur cette proposition, ce pour deux raisons.
Premièrement, Jean-Pierre Fourcade l’a fort bien expliqué, l’affichage d’un solde dégradé dans la loi de finances n’est pas souhaitable.
M. Michel Charasse. Bien sûr !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Deuxièmement, un plan de relance est certainement en cours d’élaboration aujourd'hui. Il n’y a pas une multitude de « cartouches » à y inscrire. Mieux vaut que les différentes phases du plan de relance se potentialisent mutuellement dans un cadre global ; le message politique sera beaucoup plus fort. Ce serait sans doute gaspiller cette cartouche que de l’utiliser dès maintenant. Il serait préférable de procéder par rafales, si j’ose m’exprimer ainsi.
Cet élément de l’accélération du remboursement aux entreprises, en particulier aux PME, du crédit d’impôt recherche peut certainement prendre place opportunément dans un plan de relance. En le concrétisant dès ce projet de loi de finances, nous émousserons sans doute un peu son effet.
Je suggère d’essayer de trouver un juste équilibre. Par exemple, monsieur le ministre, pourriez-vous nous préciser d’ici à la discussion du collectif budgétaire le coût éventuel de la mesure et les intentions du Gouvernement ? Cela nous permettrait de revenir sur cette idée lors de l’examen du collectif budgétaire, qui interviendra dans quelques jours.
Si l’amendement était retiré, cela ne vaudrait évidemment renonciation ni à l’idée ni à la mesure. Au contraire, ce serait le signe que cette mesure est plutôt destinée à s’incorporer dans un ensemble plus vaste et cela traduirait un souci d’efficacité.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. C’est un débat intéressant et je vous remercie d’avoir posé le problème, monsieur Badré. Je partage le sentiment de M. le rapporteur général.
Le Gouvernement réfléchit et nul ne peut préjuger des initiatives qui seront prises. Le Président de la République a défini un certain nombre d’orientations. J’ai lancé une mission de l’Inspection générale des finances il y a une quinzaine de jours. Celle-ci doit rendre ses conclusions dans une semaine, notamment sur le rescrit, pour faire écho aux propos du président de la commission des finances, afin de bien définir la réalité de la créance : elle doit être précise …
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui !
M. Éric Woerth, ministre. … pour ne poser aucun problème, par exemple en termes de mobilisation.
Par ailleurs, on peut aller plus loin et envisager la mobilisation non pas par le secteur bancaire, mais par l’État lui-même d’une mesure de trésorerie. D’une manière générale, quand l’État est débiteur à l’égard d’une entreprise, dans un temps compliqué comme celui que nous connaissons sur le plan économique, nous devons essayer de réduire les délais.
J’ai donné des instructions au trésorier-payeur général sur d’autres sujets. Celui-là est tout à fait particulier. Nous ne sommes pas totalement mûrs aujourd'hui pour adopter une telle mesure. Il faut éviter toute initiative s’agissant de l’État débiteur du système économique. À l’évidence, cette mesure de crédit d’impôt recherche aurait des conséquences importantes.
Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Badré. Bien entendu, nous vous tiendrons informé de l’état d’évolution de la réflexion du Gouvernement.
M. le président. Monsieur Badré, l'amendement n° I-117 est-il maintenu ?
M. Denis Badré. Monsieur le ministre, j’ai également trouvé ce débat intéressant. Il a une valeur symbolique forte, notamment sur le plan du principe. Alors que l’on attend des initiatives du Parlement, il est aujourd'hui en situation de pouvoir en prendre une pour apporter sa contribution à l’élaboration des plans de soutien et de relance face à la crise, afin de retrouver la croissance plus rapidement. Il est important que nous nous montrions prêts à participer à la construction de ce genre de plan.
Ce débat doit nous permettre d’aller un peu plus loin que l’objet précis de la mesure, même si celui-ci est très important.
Comme membre de la commission des finances, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, je suis le premier, à vos côtés, à avoir le souci constant de ne pas dégrader le solde. Cela dit, dégrader un solde momentanément peut être porteur pour l’avenir.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Absolument !
M. Denis Badré. Nous pouvons adopter des mesures qui ont une valeur d’investissement forte. Éviter des catastrophes est une forme d’investissement, mais construire et participer à la relance en est une autre !
À cet égard, le plan qui est en préparation, si j’ai bien compris, comportera un certain nombre de mesures qui dégraderont le solde. Il ne faut donc pas écarter a priori une mesure au motif qu’elle dégraderait le solde : il convient de considérer ses effets positifs pour l’avenir. Je remercie le président de la commission, M. Arthuis, d’être intervenu un peu dans le même esprit.
J’ai entendu mes collègues Michel Charasse et Jean-Pierre Fourcade qui, l’un comme l’autre, ont annoncé, Michel Charasse pour lui-même et Jean-Pierre Fourcade pour le groupe UMP, qu’ils ne voteraient pas en faveur de cet amendement si je le maintenais.
Mon souci est de trouver une solution. C’est pourquoi je souhaitais, dans un esprit très constructif, nous donner le temps de réfléchir jusqu’à la commission mixte paritaire. Vous me dites que ma logique n’est pas bonne, et mes deux collègues n’y adhèrent pas. Il faut donc en trouver une autre ! Vous vous y attachez, monsieur le ministre, et vous prenez des engagements que je ne demande qu’à entendre.
Un conflit au sein de notre assemblée sur une mesure aussi symbolique ou, pire, un rejet de celle-ci par notre assemblée seraient de très mauvais signaux pour les entreprises concernées. Si nous voulons montrer que nous sommes attentifs aux efforts qu’elles développent, ne leur envoyons pas de tels signaux ! Je regrette de ne pas pouvoir leur adresser un bon signal, mais si nous ne pouvons en envoyer qu’un mauvais, j’y renonce, monsieur le président, sauf si Michel Charasse, avec son habileté coutumière, nous propose une solution, tel un deus ex machina, s’il me permet cette expression… (Sourires.)