Article 66
Au 3 du I de l’article 24 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, l’année : « 2008 » est remplacée par l’année : « 2011 ». – (Adopté.)
Article 66 bis
Un rapport sera établi afin de déterminer l’impact financier de la mise en œuvre de mesures permettant la délivrance de conventions de stage par les établissements d’enseignement supérieur ou les établissements scolaires dans les cas suivants :
– lorsqu’un élève titulaire du baccalauréat réalise un stage en entreprise, association, entreprise publique ou établissement public à caractère industriel et commercial, entre la date d’obtention de son diplôme et celle de son inscription définitive dans un établissement d’enseignement supérieur, à condition que cette inscription ait lieu la même année ;
– lorsqu’un étudiant qui vient de terminer ses études en classe préparatoire réalise un stage en entreprise, association, entreprise publique ou établissement public à caractère industriel et commercial, entre la fin de sa scolarité et celle de son inscription définitive dans un établissement d’enseignement supérieur, à condition que cette inscription ait lieu la même année ;
– lorsqu’un ancien étudiant réalise un stage en entreprise, association, entreprise publique ou établissement public à caractère industriel et commercial, dans les quatre mois suivant la fin de sa scolarité dans un établissement d’enseignement supérieur.
Ce rapport devra être présenté au ministre de la recherche et de l’enseignement supérieur au plus tard le 15 mars 2009.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-44 est présenté par MM. Adnot et C. Gaudin, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-57 est présenté par MM. J.L. Dupont et Plancade, au nom de la commission des affaires culturelles.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :
ministre de la recherche et de l'enseignement supérieur
par le mot :
Parlement
La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-44.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. L’Assemblée nationale a demandé à ce qu’un rapport vous soit présenté madame la ministre. Le Sénat souhaite que ce rapport soit également diffusé au Parlement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-57.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis. L’amendement est strictement identique, je n’ai donc rien à ajouter.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-44 et II-57.
(Les amendements sont adoptés.)
Je mets aux voix l'article 66 bis, modifié.
(L'article 66 bis est adopté.)
Article 66 ter
Un rapport sur l’évolution du financement par le budget de l’enseignement supérieur et sur la place des docteurs dans l’économie française sera remis au Parlement avant le 30 juin 2009. – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 66 ter
Mme la présidente. L'amendement n° II-113 rectifié, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 66 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans l'article L. 132-2 du code de l'éducation, les mots : « ainsi que pour les élèves des classes préparatoires aux grandes écoles et à l'enseignement supérieur des établissements d'enseignement public du second degré » sont supprimés.
II. - Un décret précise les conditions dans lesquelles les élèves des sections de techniciens supérieurs et de classes préparatoires s'acquittent de droits d'inscription au profit des établissements d'enseignement supérieur.
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Je vais retirer cet amendement, madame la présidente. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.) Il avait pour but d’harmoniser les conditions dans lesquelles des étudiants peuvent suivre des études en classe préparatoire, en BTS, en DUT, ou encore en licence.
L’idée est que les crédits d’enseignement qui sont acquis soient équivalents dans tous ces cas, et que donc les droits rattachés soient également équivalents. Cela étant, mon dispositif demande encore beaucoup de précisions. Je retire donc cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° II-113 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-95, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 66 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l'article L. 831-3 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Le montant du droit annuel représentant la participation des étudiants aux dépenses de la médecine préventive de l'enseignement supérieur est fixé par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur, du ministre chargé de la santé et du ministre chargé du budget. »
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Cet amendement tend à rétablir le fondement législatif de la participation des étudiants aux dépenses de médecine préventive, qui avait été supprimé par une loi du 5 mars 2007.
Il permet également de renvoyer la fixation du montant de ce droit à un arrêté, et non à un décret, comme c’était le cas auparavant.
Enfin, il consacre la suppression des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 831-3 du code de l'éducation relatives au contrôle médical obligatoire des étudiants, qui fixaient le principe de sanctions et qui sont devenues obsolètes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Cet amendement vise en effet à rétablir une disposition qui a été supprimée par erreur par le législateur.
Il s’agit de sécuriser juridiquement les dépenses de santé de médecine préventive dans l’enseignement supérieur. La commission y est donc bien évidemment favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. L’avis est favorable, car, avec cet amendement, le Sénat s’inscrit dans la logique de la lutte contre les frais illégaux.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.
M. Serge Lagauche. Il semble que l’adoption de cet amendement reviendrait à supprimer le caractère obligatoire des examens médicaux et du suivi sanitaire des étudiants. (Mme la ministre fait un signe de dénégation.)
Or c’est un point essentiel à l’heure où d’ores et déjà un certain nombre d’étudiants, faute de moyens, ne se soignent pas.
Dans les entreprises, un suivi et un contrôle obligatoires de la santé des employés sont organisés. Je pense qu’il est indispensable qu’il en aille de même au sein de l’université.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 66 ter.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures quinze.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.
Conseil et contrôle de l’État
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Conseil et contrôle de l’État » s’appuie sur 548,5 millions d’euros de crédits de paiement, dont 81,2 % sont consacrés aux dépenses de personnel.
Les crédits affectés au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives » représentent 55,5 % des crédits de la mission, ceux de la Cour des comptes et des autres juridictions financières 37,8 %, tandis que les crédits attribués au Conseil économique, social et environnemental ne pèsent que 6,7 %.
Les crédits du programme 165 « Conseil d’État et autres juridictions administratives » augmentent de 14,8 % par rapport à 2008, avec 305,4 millions d’euros en crédits de paiement. Cette progression très importante trouve son explication dans le rattachement à ce programme, à compter du 1er janvier 2009, de la Cour nationale du droit d’asile. Sinon, à périmètre constant, l’enveloppe budgétaire n’augmenterait que de 6,7 %.
Au regard de l’activité des juridictions administratives, il convient de se féliciter de la stabilisation des frais de justice, qui se confirme en 2009, avec une dotation de 8,8 millions d’euros.
Toutefois, le programme doit faire face au goulet d’étranglement qui pourrait se former dans les juridictions administratives d’Île-de-France. L’activité soutenue de ces dernières, rapportée à leurs moyens financiers et humains, les place en effet dans une situation de plus en plus critique.
La création d’un nouveau tribunal administratif en Seine-Saint-Denis, prévue en 2009, pour un coût de 700 000 euros en crédits de fonctionnement et 1,5 million d'euros en crédits d’investissement devrait permettre d’apporter une solution à l’engorgement en région parisienne.
D’une manière générale, et en dépit d’efforts notables de productivité, les résultats obtenus en termes de délais de traitement demandent à être renforcés.
En 2002, la loi d’orientation et de programmation pour la justice, la LOPJ, fixait aux juridictions l’objectif de ramener leur délai de jugement à un an. Je dois constater, cette année encore, que cet objectif n’est malheureusement pas atteint. Le délai est aujourd’hui de un an et deux mois devant les tribunaux administratifs et de un an, un mois et quinze jours devant les cours d’appel. Seul le Conseil d’État présente un délai moyen inférieur à un an : dix mois en prévision actualisée pour 2008.
Les finalités du programme 126 « Conseil économique, social et environnemental » ne changent pas, même si la récente loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République a enrichi les attributions de l’ancien Conseil économique et social, le CES, devenu le Conseil économique, social et environnemental, le CESE.
Dans ce contexte, le Conseil connaît une très faible progression de ses crédits pour 2009 – 1,38 % –, avec un budget total de 36,9 millions d’euros.
Au regard de cette évolution budgétaire maîtrisée, il faut souligner, avec satisfaction, que la réforme du Conseil et l’enrichissement de ses missions s’effectuent à moyens humains et budgétaires presque constants. Pourtant, le changement de dénomination pose, pour le Conseil, certains problèmes pratiques, qui devront être résolus en 2009.
Par nature, comme je l’ai déjà dit les années précédentes, le Conseil économique, social et environnemental, assemblée consultative, se prête mal à la mesure de la performance, qui est pourtant l’une des exigences de la LOLF. Mais les chiffres ne remplacent jamais les idées. Dans ces conditions, les indicateurs mesurent toujours plus une activité qu’une performance.
Le programme 164 « Cour des comptes et autres juridictions financières » enregistre une diminution de 6 % de ses dépenses de fonctionnement, mais une hausse considérable de ses dépenses d’investissement : 20 % en crédits de paiement et 228,5 % en autorisations d’engagement.
Ces dépenses sont fortement liées aux opérations immobilières de la Cour des comptes et des autres juridictions financières : travaux de rénovation de la tour des archives du Palais Cambon, aménagement d’espaces de réunion supplémentaires au sein de la Cour des comptes, poursuite d’opérations immobilières concernant les chambres régionales et territoriales des comptes.
Le plafond d’emploi demeure stable à 1 841 équivalents temps plein travaillé, mais les dépenses de personnel augmentent de 11,7 millions, soit une progression de 7,38 %.
Au sein de ce programme, l’une des principales réflexions concerne le maillage du territoire par les juridictions financières. Cette réflexion est engagée, mais il convient de rappeler qu’elle devra être menée en étroite concertation avec les élus locaux, et dans le respect des territoires.
En conclusion, et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances, à l’unanimité, propose au Sénat l’adoption des crédits de cette mission et de chacun de ses programmes.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nombreux sont les programmes du projet de loi de finances pour 2009 qui souhaiteraient voir leurs crédits de paiement augmenter de 14,45 % !
Alors que les restrictions budgétaires sont la norme, il faut reconnaître le sort enviable du programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives ».
Certes, il s’agit là d’une donnée brute puisque, à périmètre constant par rapport à 2008, donc exception faite du rattachement effectif au programme à compter du 1er janvier 2009 de la Cour nationale du droit d’asile et de l’augmentation des crédits pour la création du tribunal administratif en Seine-Saint-Denis, le budget atteint 278,7 millions d'euros, soit une progression de 4,5 %, nettement supérieure à la hausse du budget général de l’État.
Cependant, il faut parler ici non pas d’un arbitrage favorable mais plutôt d’un arbitrage budgétaire réaliste, tant il répond, bien que de manière imparfaite – je m’en expliquerai –, à la montée en puissance de la justice administrative et donc aux nécessaires besoins en moyens humains et matériels permettant d’y faire face.
Concernant le programme d’investissement et faisant suite aux demandes des professionnels et des élus, notamment de la commission des finances et de la commission des lois du Sénat, de nombreuses avancées positives sont à noter.
Pour ne citer que quelques avancées parmi les plus importantes, je parlerai notamment de l’ouverture du tribunal administratif de Toulon, qui s’est installé dans ses locaux provisoires en septembre 2008 et qui vient juste de commencer à enregistrer et à tenir des audiences, avec trois chambres, treize magistrats, dix-sept agents des greffes et trois assistants de justice.
Ensuite, permettez-moi, en tant que sénateur gardois, de me féliciter de la montée en puissance du nouveau tribunal administratif de Nîmes, créé l’année dernière, et qui, au cours de l’année 2007, a jugé 4 082 affaires, ce qui, comme cela était attendu et souhaité, a eu un effet positif sur les indicateurs de performance des tribunaux administratifs de Marseille et de Montpellier.
Je suis aussi heureux de noter que nos demandes réitérées ont été entendues : 800 000 euros sont inscrits au budget de cette année, ce qui va permettre de réaliser le ravalement des façades du tribunal administratif de Nîmes.
Enfin, pour terminer sur les satisfecit en matière d’investissement, je voudrais saluer aussi la création d’un nouveau tribunal administratif en Seine-Saint-Denis en 2009. Nous l’avions demandé l’an dernier ; c’est donc une réponse extrêmement rapide qui nous a été fournie.
La situation particulièrement difficile de la région parisienne justifie que les efforts y soient concentrés dans les prochaines années ; mon collègue Jean-Claude Frécon a d’ailleurs insisté sur ce point. En effet, le contentieux y augmente de 12 % par an depuis 2002 et les délais de jugement sont supérieurs à la moyenne nationale dans les tribunaux administratifs de Versailles et de Cergy. Six chambres seront créées en 2009 et quatre chambres supplémentaires le seront en 2010.
Les demandes budgétaires relatives aux juridictions de première instance sont donc globalement satisfaites.
Quant aux cours administratives d’appel, elles connaissent une activité en très forte augmentation puisque, avec 26 554 nouvelles requêtes enregistrées en 2007, le volume dépasse de 25,95 % celui de 2006. Plusieurs milliers de nouvelles requêtes sont imputables, entre autres, aux contentieux de la nationalité et des étrangers.
Je tiens, monsieur le secrétaire d'État, à vous alerter sur la situation particulièrement délicate de la cour administrative d’appel de Marseille. En effet, cette cour, dont le ressort est très étendu, avec les tribunaux administratifs de Montpellier, de Nice, de Bastia, de Nîmes et de Toulon, est au bord de la saturation.
C'est pourquoi, au moins à moyen terme – nous formulons la demande cette année, peut-être sera-t-elle satisfaite l’an prochain –, nous demandons, monsieur le secrétaire d'État, que l’État crée une nouvelle cour administrative d’appel dans le Grand sud pour combler l’absence de cour entre Marseille et Bordeaux. Je serais heureux que vous puissiez m’apporter quelques précisions sur ce point.
Concernant le programme de fonctionnement, il faut saluer l’amélioration des délais de jugement, malgré une hausse substantielle du nombre d’affaires traitées, et ce alors même que les emplois créés depuis 2002 sont inférieurs – il faut malgré tout le signaler – aux prévisions de la loi d’orientation et de programmation pour la justice. En effet, ce texte prévoyait la création de 210 emplois de magistrats administratifs entre 2002 et 2007. Or, au total, sur cette période, seuls 148 emplois ont été créés.
Il ne faut pas relâcher les efforts sur le fonctionnement, sinon les bons indicateurs actuels ne tiendront pas face à l’augmentation constante du contentieux.
L’amélioration des délais de jugement et la diminution du stock des affaires pourraient ne pas durer. En effet, si les résultats obtenus par le Conseil d’État et les juridictions administratives sont remarquables en matière de maîtrise des délais de jugement, il convient d’être attentif à l’effet que pourraient entraîner les réformes récemment adoptées par le Parlement sur le développement du contentieux.
Ainsi, si l’impact de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable reste difficilement mesurable, une forte hausse du contentieux est attendue à partir du 1er décembre prochain, date à laquelle les tribunaux administratifs auront à connaître, outre les recours contre les rejets des commissions de médiation, du contentieux spécifique à la procédure du droit au logement opposable.
De plus, avec l’adoption, cette semaine même, de la loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, le contentieux des commissions départementales d’aide sociale relèvera des tribunaux administratifs : 12 000 nouvelles affaires sont d’ores et déjà attendues, soit une croissance de près de 7 %.du nombre des entrées devant la justice administrative
Face à l’inflation législative, je souhaite, comme l’année dernière, que soient mises en place, comme l’a prévu la réforme constitutionnelle récemment votée, des mesures permettant d’évaluer l’impact et les conséquences, en particulier sur les risques de contentieux, de l’adoption de toute nouvelle loi. En effet, gouverner, c’est aussi prévoir.
À l’avenir, l’augmentation des moyens ne suffira pas à endiguer le flot des nouvelles affaires. C’est pourquoi je voudrais insister sur la nécessité de réformer en profondeur, mais de manière progressive, la justice administrative, pour en améliorer encore l’efficacité. Plusieurs réformes sont d’ailleurs en cours : elles sont relatives à l’amélioration des fonctions consultatives et juridictionnelles du Conseil d’État, à l’inscription dans les textes de la séparation de fait entre activités consultatives et activités contentieuses, à l’amélioration de la procédure contradictoire devant le juge administratif et à la transformation du commissaire du Gouvernement en rapporteur public.
Mais c’est surtout la perspective du développement des recours administratifs préalables obligatoires qui constitue, à mon avis, la mesure la plus importante de ces prochaines années. Ce type de recours désigne l’ensemble des procédures par lesquelles une personne, souhaitant contester une décision administrative qui lui est défavorable, est tenue de former un recours devant l’autorité administrative préalablement à toute saisine du juge. Quatre grands domaines, qui représentent près du tiers du contentieux, pourraient rapidement bénéficier de cette mesure : les invalidations de permis de conduire, la fonction publique, le droit des étrangers et les contestations en matière pénitentiaire, sans exclure pour autant les autres domaines.
Sous réserve de ces différentes observations, la commission des lois vous propose, mes chers collègues, d’adopter ce budget.
Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Enfin, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’interviens à nouveau cette année, car les problèmes que j’avais alors soulevés n’ont pas été résolus.
En 2007, j’avais évoqué l’engorgement de certains tribunaux administratifs en raison de la multiplication des contentieux et l’insuffisance des effectifs. Or la lecture des crédits affectés au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives », auquel je limiterai mon intervention, ne permet pas d’apaiser les craintes soulevées voilà un an.
Certes, ce programme bénéficiera d’un effort budgétaire qui se traduit par l’affectation de soixante équivalents temps plein travaillé supplémentaires pour 2009 et par l’ouverture, qui avait été demandée, d’un nouveau tribunal administratif en Seine-Saint-Denis, prévue pour l’automne 2009.
Comme MM. les rapporteurs l’ont indiqué, les crédits, qui sont en hausse pour 2009, s’élèvent à 311,16 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 305,36 millions d’euros en crédits de paiement.
Néanmoins, comme l’ont également rappelé MM. les rapporteurs, cette hausse s’explique surtout par l’intégration à ce programme de la Cour nationale du droit d’asile, dont les crédits s’élèvent à 20,83 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 18,12 millions d’euros en crédits de paiement.
Sans cette nouvelle action, les crédits n’augmentent que de 6,7 %. Ils continueront d’être insuffisants tant que les juridictions administratives continueront de subir les conséquences des politiques du Gouvernement, qui ne sont pas neutres sur le plan du contentieux administratif.
Le poids du contentieux des étrangers reste très important : sa part a atteint 47 % du total des affaires enregistrées en 2007 devant les cours administratives d’appel. Entre 2003 et 2007, la hausse est de 576 % ! Devant les tribunaux administratifs, les requêtes relatives à ce contentieux représentent 27,3 % des affaires, en augmentation constante. Je ne vois pas comment cette progression pourrait se ralentir après la mise en place de la procédure de refus de titre de séjour assortie d’une obligation de quitter le territoire, à moins de changer de politique !
Nous dénoncions déjà ces évolutions l’année dernière non seulement parce que nous condamnons la politique du Gouvernement en matière d’immigration mais aussi parce que, en termes de fonctionnement, les juridictions administratives se retrouvent totalement engorgées.
Cette tendance ne pourra aller qu’en s’aggravant : les nouvelles lois adoptées sur l’initiative du Gouvernement et de la majorité auront pour conséquence d’augmenter les possibilités de recours devant le juge administratif, ce qui aboutira à accroître le volume du contentieux administratif.
En effet, qu’il s’agisse de la loi instituant le droit au logement opposable – on nous dit ne pas pouvoir en mesurer l’impact, mais, de source syndicale, cela pourrait représenter quelques dizaines de milliers de recours par an –, de la loi instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire, ou encore de la loi généralisant le revenu de solidarité active, en cours de promulgation, dont l’impact sur les juridictions administratives n’a pas du tout été pris en compte dans le projet de budget, le Gouvernement fait peser sur les juridictions administratives des responsabilités qui ne sont pas les leurs.
Dans ces conditions, comment continuer à demander aux juridictions de réduire leurs délais de jugement sans augmenter considérablement leurs effectifs ? Les moyens restent insuffisants, alors que les exigences gouvernementales sont toujours plus importantes, et ce au détriment de la qualité de la justice rendue.
Cette exigence de rendement, qui se traduit par une prime à la statistique, a d’autres conséquences. Dans le but de réduire les délais de jugement, elle légitime l’élargissement des hypothèses dans lesquelles les requêtes présentées devant les tribunaux administratifs peuvent être traitées par ordonnance, ainsi que le recours de plus en plus fréquent au juge unique, que nous déplorons mais qui est, hélas ! de plus en plus souvent la règle.
Enfin, le décrochage entre le régime indemnitaire des magistrats administratifs et celui des magistrats des juridictions financières est aujourd’hui entériné. Pourquoi une telle mesure, si ce n’est en raison de la révision générale des politiques publiques ?
La revalorisation sur trois ans du régime indemnitaire des magistrats administratifs ne résoudra pas le problème de l’origine de l’alignement du régime indemnitaire des magistrats administratifs sur celui des grands corps de l’État.
Malgré les avis favorables des rapporteurs, nous voterons donc contre les crédits affectés à la mission « Conseil et contrôle de l’État », plus particulièrement contre ceux qui sont affectés au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives ». Les tribunaux administratifs restent engorgés, et l’augmentation des effectifs ne suit pas celle du contentieux.
L’ouverture d’un tribunal en Seine-Saint-Denis ne va certainement pas régler le problème : en effet, il est créé pour désengorger le tribunal de Cergy-Pontoise, qui, lui-même, devait permettre de soulager celui de Versailles ! D’année en année, se pose la question des nouveaux tribunaux qui pourraient être créés. On ne rattrape pas le temps. Va-t-on continuer à faire peser indéfiniment sur les juges administratifs les conséquences des politiques qui multiplient de façon exponentielle les possibilités de recours ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier M. le rapporteur spécial, Jean-Claude Frécon, d’avoir parfaitement décrit ce programme. Il a relevé, à juste titre, les problèmes que rencontrent les juridictions administratives – Mme Borvo Cohen-Seat est également revenue sur ce point –, que ce soit en Île-de-France ou dans d’autres régions. Comme il l’a souligné, la création d’un tribunal administratif en Seine-Saint-Denis au 1er septembre prochain devrait nous permettre de faire face aux difficultés en Île-de-France.
Il est vrai que d’autres tribunaux avaient précédemment été créés pour désengorger certaines juridictions administratives ; mais, madame Borvo Cohen-Seat, c’est précisément l’objectif que l’on cherche à atteindre !
MM. les rapporteurs et Mme Borvo Cohen-Seat ont tous les trois rappelé que la principale difficulté concerne l’évolution des délais de jugement par rapport aux objectifs fixés par la loi d’orientation et de programmation de la justice.
La réduction des délais s’est poursuivie en 2008 au Conseil d’État et dans les tribunaux administratifs. Au Conseil d’État, le délai prévisible moyen de jugement devrait se situer autour de dix mois, ce qui est inférieur à l’objectif d’un an. Dans les tribunaux administratifs, le délai prévisible moyen de jugement devrait se situer autour de un an et un mois.
Ainsi, au regard de la tendance constante depuis 2002, qui est une diminution du délai d’environ un mois par an, l’objectif d’un délai inférieur à un an apparaît à portée de main.
Comme l’ont souligné les orateurs, la progression du volume du contentieux est alimentée par les législations existantes, mais aussi par l’extension des droits dans plusieurs domaines, comme le droit des étrangers, le revenu de solidarité active, le droit au logement opposable, que Mme Borvo Cohen-Seat a énumérés.
En effet, que ce soit en France ou dans les autres pays européens – je suis assez bien placé pour le savoir ! –, les droits sont davantage garantis : l’augmentation du contentieux qui en résultera, y compris en ce qui concerne les étrangers, nous incite donc à rester prudents.
Les résultats en termes de réduction des délais de jugement témoignent d’une amélioration très substantielle de l’ensemble des niveaux de juridiction. De 2002 à 2008, ces délais auront été réduits de onze mois à dix mois devant le Conseil d’État ; de deux ans et dix mois à un an, un mois et quinze jours devant les cours administratives d’appel ; et de un an et huit mois à un an et un mois devant les tribunaux administratifs.
Dans son rapport, M. Frécon est également revenu sur les juridictions financières, qui pourraient faire l’objet d’une réforme. Lors des cérémonies du bicentenaire de la Cour des comptes, le Président de la République en a présenté les grandes orientations.
Les exigences nouvelles de la gestion publique impliquent en effet de revoir les attributions de ces juridictions en matière de certification des comptes des collectivités locales et d’évaluation des politiques publiques. Vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, il faut adapter leur organisation à ces nouveaux impératifs.
Actuellement, le travail interministériel se poursuit pour que la réforme puisse être finalisée au cours du premier semestre de l’année 2009, après consultation des élus, qui sont impliqués au premier chef dans ces réformes pour ce qui concerne les collectivités locales.
M. Sutour a rappelé la forte progression des crédits pour les juridictions administratives. Mme Borvo a souligné que la hausse nette était de 6,7 %, ce qui, dans les circonstances actuelles, reste significatif pour faire face aux besoins croissants de ces juridictions. À cet égard, l’effort consenti pour le tribunal administratif de Nîmes, notamment pour la réfection de ses façades, est particulièrement éloquent.
Monsieur le rapporteur pour avis, j’ai bien pris note de votre souhait de voir créer, entre Bordeaux et Marseille, une Cour administrative d’appel pour le Grand sud. Nous étudierons cette demande avec attention.
MM. les rapporteurs ont parfaitement décrit les moyens d’améliorer l’efficacité de la justice administrative ; je n’y reviendrai donc pas.
Le problème des recours administratifs préalables obligatoires a également été évoqué.
Le recours à ce type de procédure permet de limiter le contentieux et donc d’améliorer le délai de traitement des affaires devant les tribunaux. Pour nos concitoyens, c’est un moyen simple, peu coûteux et rapide d’obtenir la réformation d’une décision avec des chances raisonnables de succès ou à tout le moins d’une meilleure explication de celle-ci.
L’étude a identifié plusieurs domaines dans lesquels ce type de recours pouvait être développé : les invalidations de permis de conduire à la suite de la perte de points, le contentieux de la fonction publique, certaines situations en matière de droit des étrangers, madame Borvo Cohen-Seat, et, en matière pénitentiaire, l’ouverture du prétoire issue de l’arrêt Boussouar et d’autres décisions de l’assemblée du contentieux du Conseil d’État, en date du 14 décembre 2007, qui renforcent les garanties des droits des personnes incarcérées.
La mise en place de recours administratifs préalables obligatoires, si elle ne saurait être universelle, apparaît ainsi souhaitable dans ces différents domaines, car elle répond, comme cela a été souligné, à une double exigence d’efficacité et de respect des droits de recours.
Au bénéfice de ces explications, le Gouvernement demande à la Haute Assemblée de bien vouloir adopter les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)