M. Richard Yung. Elle a raison !
M. Alain Joyandet, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, les accords que nous soumettons aujourd’hui à la Haute Assemblée ne peuvent évidemment pas encore être techniquement mis en application ! Une fois qu’ils auront été ratifiés, nous pourrons engager les procédures et je suis persuadé que les résultats seront alors bien meilleurs.
Mme Alima Boumediene-Thiery. On en parle depuis 2006 !
M. Alain Joyandet, secrétaire d’État. En conclusion, il est peut-être intéressant que ce soit le secrétaire d’État chargé de la coopération qui vous soumette aujourd’hui ces accords, lesquels sont traditionnellement présentés par le ministère des affaires étrangères : je peux ainsi vous apporter un témoignage positif. Car, comme Brice Hortefeux, je parcours l’Afrique pour traiter de sujets relatifs au développement et à la coopération et je peux vous assurer de l’acceptation de cette nouvelle politique de gestion des flux migratoires et de développement.
Il n’existe pas de lien direct entre la gestion des flux migratoires et la mise en œuvre de notre politique de développement. Je tiens à rassurer complètement Mme Tasca : notre zone de solidarité prioritaire demeure prioritaire.
L’affectation des moyens de notre politique de développement n’est pas subordonnée à l’acceptation de contrats d’immigration par tel ou tel pays de départ. Cela dit, nous ne pouvons pas aborder la question du développement sans parler de la gestion des flux migratoires, et vice versa : les deux phénomènes sont totalement liés. Si nous accentuons nos politiques de développement, nous aurons nécessairement moins de problèmes de migrations, puisque ceux qui choisissent d’émigrer le font non pas par plaisir, mais parce que leur pays connaît des difficultés de développement.
Mme Éliane Assassi. Eh oui !
M. Alain Joyandet, secrétaire d’État. Donc, mesdames, messieurs les sénateurs, je travaille d’un commun accord avec le ministre de l’immigration. J’insiste d’ailleurs sur le fait que nous sommes venus ensemble, avec Brice Hortefeux, présenter ces accords devant vos commissions, car nos politiques ne sont pas opposées : elles sont complémentaires et reflètent bien la cohérence de l’approche du Président de la République et du Gouvernement de ces problèmes de l’immigration et du développement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.
accord avec le bénin
M. le président. Nous passons à la discussion de l’article unique du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Bénin relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement.
Article unique
Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Bénin relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement (ensemble cinq annexes), signé à Cotonou le 28 novembre 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l’article unique du projet de loi.
Je suis saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe UMP. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme Éliane Assassi. Ils ne sont pas là !
Mme Alima Boumediene-Thiery. Quelle démocratie !
M. le président. Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 62 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 326 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l’adoption | 187 |
Contre | 139 |
Le Sénat a adopté.
accord avec le congo
M. le président. Nous passons à la discussion de l’article unique du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Congo relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement.
Article unique
Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Congo relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement (ensemble quatre annexes), signé à Brazzaville le 25 octobre 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l’article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
accord avec le sénégal
M. le président. Nous passons à la discussion de l’article unique du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal et de son avenant.
Article unique
Est autorisée l’approbation de l’accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal (ensemble trois annexes et une déclaration), signé à Dakar le 23 septembre 2006, et de l’avenant (ensemble deux annexes), signé à Dakar le 25 février 2008, et dont les textes sont annexés à la présente loi.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l’article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
accord avec la tunisie
M. le président. Nous passons à la discussion de l’article unique du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord-cadre relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire, du protocole relatif à la gestion concertée des migrations et du protocole en matière de développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne.
Article unique
Est autorisée l’approbation de l’accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire, du protocole relatif à la gestion concertée des migrations (ensemble deux annexes) et du protocole en matière de développement solidaire (ensemble trois annexes), signés à Tunis le 28 avril 2008, et dont les textes sont annexés à la présente loi.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l’article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
7
Conventions internationales
Adoption de six projets de loi en procédure simplifiée
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen de six projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.
Pour ces six projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure simplifiée.
Je vais donc les mettre successivement aux voix.
accord de partenariat et de coopération entre les communautés européennes et le tadjikistan
Article unique
Est autorisée la ratification de l’accord de partenariat et de coopération établissant un partenariat entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Tadjikistan, d’autre part (ensemble quatre annexes, un protocole et un acte final), et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix l’article unique du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Tadjikistan, d’autre part (nos 37 et 126).
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
accord avec le brésil relatif à la coopération dans le domaine de la défense
Article unique
Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil relatif à la coopération dans le domaine de la défense et au statut de leurs forces, signé à Paris le 29 janvier 2008, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix l’article unique du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation d’un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil relatif à la coopération dans le domaine de la défense et au statut de leurs forces (nos 122 et 128).
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
déclaration de certains gouvernements européens relative au centre spatial guyanais
Article unique
Est autorisée l'approbation de la déclaration de certains Gouvernements européens relative à la phase d'exploitation des lanceurs Ariane, Vega et Soyouz au Centre spatial guyanais (CSG), adoptée à Paris le 30 mars 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix l’article unique du projet de loi autorisant l’approbation de la déclaration de certains gouvernements européens relative à la phase d’exploitation des lanceurs Ariane, Vega et Soyouz au Centre spatial guyanais (nos 89 et 127).
(Le projet de loi est adopté.)
protocole relatif au centre spatial guyanais
Article unique
Est autorisée l'approbation du protocole portant amendement de l'accord entre le Gouvernement français et l'Agence spatiale européenne relatif au Centre spatial guyanais (CSG), signé à Paris le 12 décembre 2006, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix l’article unique du projet de loi autorisant l’approbation du protocole portant amendement de l’accord entre le Gouvernement français et l’Agence spatiale européenne relatif au Centre spatial guyanais (CSG) (nos 90 et 127).
(Le projet de loi est adopté.)
accord avec l'espagne relatif au bureau à contrôles nationaux juxtaposés de biriatou
Article unique
Est autorisée la ratification de l’accord entre la République française et le Royaume d’Espagne relatif au bureau à contrôles nationaux juxtaposés de Biriatou, signé à Madrid le 13 novembre 2006, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord entre la République française et le Royaume d’Espagne relatif au bureau à contrôles nationaux juxtaposés de Biriatou (nos 35 et 124).
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
accord avec la suisse relatif à la création de bureaux à contrôles nationaux juxtaposés en gares de pontarlier et de vallorbe
Article unique
Est autorisée l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la création de bureaux à contrôles nationaux juxtaposés en gares de Pontarlier et de Vallorbe, signées à Paris le 12 septembre 2002 et le 30 avril 2003, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix l’article unique du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la création de bureaux à contrôles nationaux juxtaposés en gares de Pontarlier et de Vallorbe (nos 36 et 125).
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
(M. Jean-Claude Gaudin remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
8
Report de la désignation des membres de l'Observatoire de la décentralisation
M. le président. Je vous rappelle que la conférence des présidents avait inscrit à notre ordre du jour la désignation des vingt-cinq membres de l’Observatoire de la décentralisation.
Le délai limite pour le dépôt des candidatures avait été fixé aujourd’hui à seize heures trente.
Je constate que trois groupes n’ont pas déposé leurs candidatures.
Je vous propose donc de reporter la désignation des membres de l’Observatoire de la décentralisation à une date ultérieure qui sera fixée par la conférence des présidents.
9
Nomination de membres d'un organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle que la commission des finances a proposé deux candidatures pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame Mme Marie-France Beaufils et M. Bernard Vera respectivement membre titulaire et membre suppléant du Comité central d’enquête sur le coût et le rendement des services publics.
10
Gendarmerie nationale
Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale (nos 499, 2007–2008, 66 et 67).
Rappel au règlement
M. Didier Boulaud. Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l’article 37, alinéa 1, du règlement du Sénat : « La parole est accordée aux ministres – ce terme est au pluriel –, aux présidents et aux rapporteurs des commissions intéressées quand ils la demandent ».
Or le ministre de la défense ne participera pas au débat qui s’annonce. Nous aurions pourtant souhaité l’entendre car, à l’heure où je vous parle, mes chers collègues, il est encore et toujours le ministre de tutelle de la gendarmerie nationale. Nous nous étonnons de son absence pour une discussion aussi importante et nous la regrettons.
Les gendarmes apprécieront la façon dont le ministre les aura laissés en rase campagne pour un texte qui les concerne d’aussi près. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je vous donne acte de votre rappel au règlement, monsieur Boulaud.
Nous avons cependant la chance de bénéficier de la présence de Mme la ministre de l’intérieur, qui a une connaissance parfaite du ministère de la défense, et qui honore habituellement de sa présence, je suis heureux de le souligner, la séance de questions orales du mardi de la Haute Assemblée, ce qui n’est pas le cas de tous les ministres. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Discussion générale
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, les évènements de ce jour soulignent les exigences de sécurité au service de la protection de nos concitoyens.
Ce matin, à la suite d’une revendication adressée à l’Agence France-presse, des bâtons de dynamite ont été découverts dans un grand magasin. Heureusement, ils ne contenaient pas d’éléments susceptibles de produire une détonation. Mais ce fait est évidemment préoccupant.
La revendication provient d’un groupe inconnu de tous nos services de sécurité. Les forces de l’ordre sont immédiatement intervenues. Ainsi, avec une très grande réactivité, elles ont mis en place un cordon de sécurité bloquant les rues adjacentes et procédé à l’évacuation des personnes qui se trouvaient à l’intérieur de ce grand magasin et qui, bien sûr, étaient particulièrement nombreuses quelques jours avant Noël. Elles ont ensuite effectué les perquisitions nécessaires, qui ont permis la découverte de la charge.
L’enquête est évidemment en cours pour tenter de déterminer l’origine de ces bâtons de dynamite et identifier les auteurs du dépôt et de la revendication, en vue de leur interpellation et de leur traduction devant la justice.
Par ailleurs, compte tenu de la période sensible que nous traversons, j’ai décidé de renforcer les effectifs employés à la sécurisation de Paris et des grandes villes de province. Dès demain, je tiendrai une réunion consacrée à la sécurité durant cette période, avec les services de police et de gendarmerie, les services de renseignements, les services de sécurité de la RATP, de la SNCF, des grands magasins et d’Aéroports de Paris.
Nous devons faire preuve de prudence et de sérénité, mais il nous faut aussi être vigilants et déterminés. C’est ce que nous faisons chaque fois que la sécurité de nos concitoyens est en jeu.
Cela a un rapport très direct avec le projet de loi que j’ai l’honneur de présenter à la Haute Assemblée aujourd’hui et qui organise le rattachement organique et budgétaire de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur.
Je n’ai pas besoin de le préciser, surtout ici, la gendarmerie est une force armée, chargée de la sûreté et de la sécurité publiques. Elle l’est aujourd’hui ; elle le restera demain.
Depuis la loi du 28 germinal an VI, aucune loi n’a été adoptée sur le statut et les missions de la gendarmerie nationale.
Pour la première fois dans l’histoire de notre République, les deux forces de sécurité, civile et militaire, seront placées sous la responsabilité pleine et entière du ministre de l’intérieur, même si, depuis 2002, la gendarmerie est déjà placée pour emploi, pour ses missions sur le territoire, sous la responsabilité du ministre de l’intérieur.
Ce rattachement est important au moment où je souhaite constituer un grand ministère moderne de la sécurité, au service de la protection des Français. La gendarmerie nationale doit y tenir toute sa place. Le projet de loi vise à lui donner les moyens de participer pleinement à la mise en place de ce grand ministère. Il répond ainsi à une exigence de modernisation et d’efficacité. Dans le même temps, il conforte l’identité militaire de la gendarmerie, car c’est aussi une condition de cette modernisation et de cette efficacité.
Le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur est logique.
Premièrement, l’environnement de la sécurité intérieure se modifiant, l’organisation de celle-ci doit évoluer.
Le poids des missions de sécurité intérieure de la gendarmerie a justifié son rattachement pour emploi au ministère de l’intérieur en 2002. Aujourd’hui, il faut aller au bout de la démarche.
Vous l’avez souvent souligné au sein de la Haute Assemblée, la séparation entre les missions et les moyens nécessaires à leur exécution se révèle artificielle. Confier le budget au responsable de l’emploi constitue une exigence de rationalité et d’efficacité.
D’ailleurs, l’esprit de la LOLF et, temporairement, les contraintes budgétaires imposent plus que jamais la cohérence des actions de l’État. Que la mission « Sécurité » dépende du ministre de l’intérieur au travers des deux programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » est donc logique et nous fera progresser. En effet, les mutualisations et regroupements de marchés, facilités par le rapprochement en matière de gestion des moyens, nous permettront d’améliorer à la fois les coûts et l’interopérabilité entre les forces de la police nationale et de la gendarmerie nationale.
Deuxièmement, le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur permettra de moderniser un certain nombre de procédures qui, parfois, datent du XIXe siècle.
Il en va ainsi de l’abandon de la procédure de réquisition pour l’engagement des unités de gendarmerie au maintien de l’ordre. Permettez-moi d’insister un peu sur ce point, qui, je le sais, a fait débat, notamment au sein de vos commissions.
Je rappelle que la réquisition permet à l’autorité civile d’obtenir la mise en œuvre de moyens dont elle ne dispose pas normalement, notamment les forces armées pour le maintien de l’ordre. C’est un héritage de la Révolution qui a été ensuite transcrit dans le code de la défense.
Mais dès lors que la gendarmerie est placée sous l’autorité du ministre de l’intérieur, cette procédure formelle n’a plus lieu d’être, quand bien même la gendarmerie reste une force militaire. Il serait quand même assez peu cohérent que le ministre soit contraint de requérir une force dont il dispose.
M. Jean-Louis Carrère. Donc, elle perd son statut !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Non, la gendarmerie ne perd pas son statut !
Cela ne veut pas dire que tout formalisme disparaît. Personne n’imagine, par exemple, que, pour l’emploi des véhicules blindés, l’autorisation du Premier ministre, ou par délégation celle du préfet de zone, puisse être supprimée ; il n’en est pas question ! Dès lors que des moyens importants existent, cela se fait tout naturellement.
Mais il faut aussi faire preuve d’un minimum de logique. D'ailleurs, vos commissions ont accepté le principe de l’abandon de la réquisition. Un dispositif réglementaire, à leur demande, permettra toutefois d’encadrer le recours à des moyens militaires spécifiques, qui sont des moyens lourds, ou à l’usage des armes les plus significatives en cas de besoin.
Le maintien de l’ordre public, nous le savons tous, exige de la maîtrise, du sang-froid, de la mesure, de la retenue. C’est d'ailleurs l’une des caractéristiques des forces de l’ordre françaises et l’une des raisons pour lesquelles nous servons souvent de référence et d’exemple à l’étranger. Cela est vrai des forces déployées sur le terrain, de leurs chefs et des autorités civiles.
Gendarmes et policiers sont formés, préparés, entraînés dans cet état d’esprit. À comparer la façon dont sont gérés des événements similaires chez un certain nombre de nos voisins, qu’il s’agisse des États-Unis ou d’autres grands pays, on voit bien la différence et le rôle que joue la formation.
M. Didier Boulaud. Nous sommes les meilleurs !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Mais oui, et j’en suis fière ! De temps en temps, il faut savoir dire que nous sommes les meilleurs parce que c’est reconnaître à leur juste valeur les qualités des policiers et des gendarmes français. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.) .
Soyons lucides : malgré cette maîtrise, nous ne sommes pas à l’abri d’un incident grave. C’est la raison pour laquelle je prépare aussi, parce que je veux que les choses soient claires, une instruction permanente sur le maintien de l’ordre garantissant la traçabilité des ordres donnés en toutes circonstances : je veux savoir qui fait quoi !
Je souhaite aussi, et les responsables le savent, chaque fois que des opérations lourdes sont menées, que des films soient tournés en permanence parce que j’en ai assez que soient diffusées des images enregistrées à partir de téléphones portables et qui ne montrent que ce que l’on veut bien montrer.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien ! (MM. Robert del Picchia et M. Alain Gournac approuvent également.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Cela évitera un certain nombre de polémiques stériles qui mettent injustement en cause les forces de l’ordre, en oubliant trop souvent les provocations dont elles sont préalablement l’objet.
M. Alain Gournac. Tout à fait !
Mme Michelle Demessine. On s’engage sur une drôle de voie !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis de la commission des lois. C’est la bonne voie !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Un autre élément de modernisation concerne l’articulation claire de l’autorité du préfet et du commandement militaire. Là aussi, je le sais, cette question a suscité un certain nombre de débats au sein de vos commissions et j’ai d'ailleurs eu l’occasion d’apporter des réponses.
Je rappellerai simplement que, depuis six ans, sans que m’ait été transmis, ni comme ministre de la défense ni comme ministre de l’intérieur, aucun signe de difficulté, cette articulation entre l’action du préfet et celle du commandement militaire des gendarmes s’est déroulée sur le terrain en de nombreuses occasions.
Aujourd'hui, l’autorité du représentant de l’État s’exerce déjà sur les services de police, bien sûr, et sur les unités de gendarmerie. Le préfet fixe les missions, c’est la moindre des choses. La hiérarchie militaire de la gendarmerie détermine, elle, les moyens opérationnels d’organisation et d’exécution de la mission, puis le commandement rend compte de l’exécution de ces missions et des résultats obtenus au préfet.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. C’est ce qui se passe et c’est ce que nous inscrivons dans la loi.
Ni le préfet ni ses collaborateurs n’ont à s’immiscer dans le détail de l’organisation ou de l’exécution du service. D'ailleurs, ils n’ont pas la formation requise, la plupart du temps, sauf lorsqu’il s’agit de préfets issus de la gendarmerie ; il y en a un certain nombre.
M. Didier Boulaud. Si tout fonctionne, pourquoi changer ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, s’il y a modernisation, il doit aussi y avoir, et d’une façon déterminée, maintien d’un certain nombre de principes.
L’un de ces principes, auquel je suis attachée – vous le savez tous pour m’avoir souvent entendu l’affirmer au cours de ces dernières années –, c’est que la gendarmerie est l’un des piliers de la République. En confortant son identité militaire, le projet de loi réaffirme sa place au cœur de notre pacte républicain. En effet, je le répète une nouvelle fois, car c’est ma conviction profonde, la France a besoin d’une force de sécurité à statut militaire. (Applaudissements sur le banc des commissions.)
M. Jean-Pierre Raffarin. Bravo ! (Mme Michelle Demessine s’exclame.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Et là, nous avons les bases de la démocratie et de la République.
Héritière d’une longue histoire, la gendarmerie a toujours su démontrer sa capacité d’adaptation grâce, notamment, à l’éventail de ses savoir-faire, qui est l’une de ses caractéristiques, et à ses compétences.
La gendarmerie assure et doit continuer d’assurer la couverture du territoire national, aussi bien en métropole qu’outre-mer. Elle sait allier les modes d’action militaire et l’exercice de la police administrative et judiciaire, dans des conditions parfois difficiles. Elle le démontre et je pense que nous pouvons tous saluer ce qui se fait en Guyane dans la lutte contre l’orpaillage.
M. Jean-Louis Carrère. C’est ce que vous faites que l’on ne salue pas !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je parle de ce que font les gendarmes ! Je considère qu’ils doivent en être remerciés, parce qu’ils travaillent dans des conditions particulièrement ardues et qu’ils essuient régulièrement des coups de feu.
M. Jean-Louis Carrère. Hors sujet !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. La gendarmerie sait aussi se mobiliser à tout moment, en temps de paix, en temps de crise, voire en temps de guerre. Sa présence au sein de la mission de l’Union européenne en Géorgie, au Kosovo, en Côte d’Ivoire, notamment, en est l’illustration.
C’est autour d’elle que j’ai pu créer la force européenne de gendarmerie, qui est un outil de gestion de crise ou de sortie de crise sans équivalent, et cela a entraîné l’adhésion de nos vingt-sept partenaires.
La gendarmerie est, ne l’oublions jamais, une condition d’effectivité de la démocratie dans sa traduction quotidienne. Son encadrement, ses valeurs, son esprit de discipline lui dictent le strict respect des droits de la personne humaine en toutes circonstances ; je l’ai souvent constaté.
Elle garantit aux magistrats le libre choix dans l’exercice de la police judiciaire, et cela aussi est une base de notre démocratie.
Elle assure la continuité de l’État sur tous les territoires de la République.
L’équilibre entre police et gendarmerie est le corollaire de cette double participation à la protection de nos concitoyens.
Il n’est pas question d’aller vers une fusion de la police et de la gendarmerie,…