M. Gérard César. Tout à fait !
M. Jean-Louis Carrère. On ne peut pas voter un texte comme celui-là sans se préoccuper de ses conséquences.
Pour toutes ces raisons, en particulier parce que nous sommes très attachés à la République, à la sécurité dans les zones urbaines mais aussi dans les zones rurales, nous voterons contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour explication de vote.
Mme Michelle Demessine. Au terme de la discussion de ce texte, l’opposition qu’il m’inspirait pour des raisons de fond et de principe, notamment au regard du rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur, demeure malheureusement.
Certes, quelques modifications nuançant ou améliorant ce projet de loi ont été apportées par certains amendements de nos commissions. Ainsi la mission de police judiciaire de la gendarmerie a-t-elle été confortée. Par ailleurs, le principe du libre choix du service enquêteur par l’autorité judiciaire est consacré au plan législatif. De même, les conditions de placement des commandants d’unités sous l’autorité des préfets ont été assouplies. Enfin, pour pallier la suppression totale de la réquisition, une nouvelle procédure d’autorisation pour l’usage des armes a été instaurée, et j’y suis sensible.
J’ai la faiblesse de croire que nous avons contribué à ces modifications non négligeables en soulevant ces problèmes dans la discussion qui s’est déroulée dans un climat de travail remarquable. Je tiens à saluer particulièrement M. le rapporteur, avec qui nous travaillons sur ce dossier depuis très longtemps.
Cela étant, l’essentiel de votre projet demeure, madame la ministre.
Il porte toujours atteinte aux principes républicains relatifs à l’emploi de la force publique et aux bases du statut général des militaires. Il porte toujours aussi les germes d’une disparition des spécificités respectives des deux forces.
Je doute que cette réforme soit efficace pour renforcer la coopération entre la police et la gendarmerie. Elle mécontente et inquiète déjà les policiers et les gendarmes sur les questions de parité de traitement comme sur l’équilibre des compétences des deux forces. Elle banalisera l’emploi de la force armée. Enfin et surtout, elle consacrera la concentration des pouvoirs des deux forces de sécurité intérieure sous une seule autorité, ce qui est contraire à l’esprit de nos institutions républicaines.
Madame la ministre, en refusant de voter votre texte, le groupe CRC-SPG prend date pour une réforme qui reste à faire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Joseph Kergueris, pour explication de vote.
M. Joseph Kergueris. Hier, lors de la discussion générale, j’ai commencé mon propos en rendant hommage au groupe de travail conduit par Jean Faure et auquel participait notre collègue Pozzo di Borgo, ainsi qu’aux deux commissions pour l’examen approfondi auquel elles avaient procédé sur ce dossier. Au terme de nos débats, je réitère cet hommage.
Ce même propos, je l’ai conclu en annonçant un vote favorable de notre groupe à la condition expresse qu’une partie substantielle des amendements présentés par nos commissions soient retenus. Or, grâce à votre extrême compréhension, à votre sens aigu du débat démocratique, madame le ministre, c’est ce qui s’est produit ; je m’en réjouis d’autant plus que ces amendements étaient d’une remarquable qualité. Nous avons ensemble, Sénat et Gouvernement, travaillé sur ce texte d’une façon tout à fait exemplaire.
Bien sûr la condition suspensive que je viens d’évoquer étant levée, ce dont je n’ai jamais douté, notre groupe votera pour ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 63 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 337 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 169 |
Pour l’adoption | 185 |
Contre | 152 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, tout en me réjouissant de l’adoption de ce texte, je souhaite remercier la Haute Assemblée dans son ensemble, car elle a permis d’améliorer ce texte afin de mieux répondre au besoin de sécurité des Français, ainsi qu’à l’attente légitime de reconnaissance des hommes et des femmes de la gendarmerie, qui se dévouent au quotidien et sur tous les territoires de la République pour assurer la protection de nos concitoyens.
Je tiens également à remercier les rapporteurs ainsi que les membres du groupe de travail et des commissions qui, pendant des mois, se sont beaucoup investis dans ce projet, dont ils ont vu toutes les dimensions et perçu toute l’importance si l’on veut conforter la démocratie dans notre pays et apporter une vraie réponse au besoin de sécurité de ses habitants.
Je salue la qualité des travaux que nous avons menés ensemble et je remercie tous ceux qui ont été présents durant ces débats.
Aux représentants de l’opposition, je veux dire que nous avons des positions et des principes différents, mais que l’expression de ces divergences au cours de nos débats ne m’a, pour autant, jamais semblée médiocre.
Enfin, je remercie très sincèrement de son soutien constant et assidu la majorité, qui a permis, à la fois, de soulever un certain nombre de problèmes et d’y trouver des réponses qui garantissent les fondements et l’éthique de la gendarmerie, ainsi que la sécurité sur l’ensemble du territoire national.
La gendarmerie, je le répète, est l’expression de l’autorité de l’État sur chaque point du territoire, en particulier dans les zones les plus fragiles, et elle le restera. En effet, ce texte garantit la répartition des zones de compétence entre la police et la gendarmerie, et donc, en premier lieu, la présence de la gendarmerie dans les zones rurales, de montagne et périurbaines.
Au total, nous apportons à l’ensemble des hommes et des femmes de la gendarmerie les moyens dont ils ont besoin dans leur engagement quotidien et courageux au service de l’ensemble des Français. Ce texte répond à cette finalité et constitue une garantie importante pour la République et pour la France. Merci de votre action ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Monique Papon.)
PRÉSIDENCE DE Mme Monique Papon
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
4
Conférence des présidents
Mme la présidente. La conférence des présidents a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Jeudi 18 décembre 2008
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire :
1°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2008 (n° 134, 2008-2009) ;
(La conférence des présidents a fixé à une heure et demie la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ;
Les délais limites pour les inscriptions de parole et le dépôt des amendements sont expirés) ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
Vendredi 19 décembre 2008
Ordre du jour prioritaire :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2008.
Éventuellement, samedi 20 décembre 2008
Ordre du jour prioritaire :
À 9 heures 30 et à 15 heures :
- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2008.
Lundi 22 décembre 2008
Ordre du jour prioritaire :
À 17 heures :
- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2008.
Suspension des travaux en séance plénière du mardi 23 décembre 2008 au dimanche 4 janvier 2009.
Mercredi 7 janvier 2009
Ordre du jour prioritaire :
À 16 heures et le soir :
- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision (n° 145, 2008 2009) et projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France (n° 144, 2008 2009) ;
(La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l’objet d’une discussion générale commune ;
La conférence des présidents a fixé :
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale commune, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 6 janvier 2009) ;
- à l’ouverture de la discussion générale, le délai limite pour le dépôt des amendements à ces deux textes.)
Jeudi 8 janvier 2009
À 10 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire :
1°) Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision et du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
Lundi 12 janvier 2009
Ordre du jour prioritaire :
À 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision et du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.
Mardi 13 janvier 2009
À 10 heures :
1°) Dix-huit questions orales :
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 303 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche ;
(Conditions de gestion des aides directes à l’agriculture) ;
- n° 309 de M. Claude Biwer à M. le secrétaire d’État chargé de l’emploi ;
(Réforme de la formation professionnelle) ;
- n° 328 de M. Michel Teston à M. le secrétaire d’État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative ;
(Réorganisation du réseau des CREPS) ;
- n° 334 de M. Jean-Pierre Godefroy à Mme la garde des Sceaux, ministre de la justice ;
(Avenir de la profession d’avoué) ;
- n° 340 de Mme Anne-Marie Payet à Mme la garde des Sceaux, ministre de la justice ;
(Suicides dans les prisons) ;
- n° 346 de Mme Odette Herviaux à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales ;
(Avenir de l’école de police de Vannes) ;
- n° 347 de M. Ivan Renar à Mme la ministre de la culture et de la communication ;
(Avenir de l’Agence France-Presse et de son statut) ;
- n° 348 de M. Claude Domeizel à M. le ministre de la défense ;
(Nuisances sonores causées par le survol d’avions militaires) ;
- n° 349 de M. Francis Grignon à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi ;
(Hausse des prix du bois) ;
- n° 352 de M. Michel Billout à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;
(Plan d’urgence pour améliorer la desserte de la plate-forme de Roissy-en-France) ;
- n° 353 de M. Richard Yung à M. le secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation ;
(Amélioration du système des brevets en Europe) ;
- n° 355 de M. Hubert Haenel à M. le secrétaire d’État chargé des transports ;
(Conséquences du règlement OSP) ;
- n° 356 de M. Roger Madec à Mme la ministre du logement et de la ville ;
(Financement par l’agence nationale pour la rénovation urbaine de la cité Edmond Michelet, à Paris (19e)) ;
- n° 360 de M. Jean-Pierre Demerliat à M. le secrétaire d’État à la défense et aux anciens combattants ;
(Devenir des écoles de reconversion professionnelle de l’ONAC) ;
- n° 362 de M. Roland Ries à Mme la garde des Sceaux, ministre de la justice ;
(Avenir du palais de justice de Strasbourg) ;
- n° 363 de M. Rémy Pointereau à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;
(Imposition des emprises militaires dans le département du Cher) ;
- n° 364 de Mme Marie-France Beaufils transmise à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi ;
(Indemnisation des sinistrés de la sécheresse) ;
- n° 371 de Mme Anne-Marie Escoffier à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre mer et des collectivités territoriales ;
(Sanction des dépassements de vitesse) ;
Ordre du jour prioritaire :
À 16 heures et le soir :
2°) Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision et du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.
Mercredi 14 janvier 2009
Ordre du jour prioritaire :
À 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision et du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.
Jeudi 15 janvier 2009
Ordre du jour prioritaire :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision et du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.
Mardi 20 janvier 2009
Ordre du jour réservé :
À 16 heures et, éventuellement, le soir :
1°) Proposition de loi abrogeant le service minimum à l’école, présentée par Mme Brigitte Gonthier-Maurin et les membres du groupe CRC-SPG ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 19 janvier 2009) ;
- au lundi 19 janvier 2009, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements.)
2°) Proposition de loi relative à l’exécution des décisions de justice et aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées, présentée par M. Laurent Béteille (n° 31, 2008-2009) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 19 janvier 2009) ;
- au lundi 19 janvier 2009, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements.)
Mercredi 21 janvier 2009
Ordre du jour prioritaire :
À 15 heures et le soir :
1°) Sous réserve de son dépôt à l’Assemblée nationale et de sa transmission au Sénat, projet de loi de finances rectificative pour 2009 ;
2°) Sous réserve de son dépôt à l’Assemblée nationale et de sa transmission au Sénat, projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés ;
(Les modalités de discussion de ces deux textes seront réglées ultérieurement).
Jeudi 22 janvier 2009
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire :
1°) Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2009 et du projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
Éventuellement, vendredi 23 janvier 2009
Ordre du jour prioritaire :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2009 et du projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Ces propositions sont adoptées.
5
Loi de finances pour 2009
Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2009 (n° 138).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Yann Gaillard, en remplacement de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, dussé-je vous causer quelque déception, je suis appelé ce soir à suppléer notre rapporteur général, Philippe Marini. Ce dernier est, en effet, retenu dans son département pour des raisons impératives. J’ajouterai, au passage, qu’il en a largement gagné le droit ! (Sourires.)
N’ayant pas son talent, je me contenterai de me livrer à un compte rendu quasi-notarial des décisions de la commission mixte paritaire qui s’est tenue le lundi 15 décembre dernier à l’Assemblée nationale, sous la présidence de notre collègue député Didier Migaud.
À l’issue de plus de six heures de débat, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord sur les 121 articles restant en discussion. Rappelons-le, en première lecture, l’Assemblée nationale avait introduit 66 articles nouveaux et le Sénat 60, soit un nombre à peu près équivalent, ce qui traduit la très équitable répartition de la créativité fiscale et budgétaire entre les deux assemblées !
Toujours sur un plan statistique, je tiens à rappeler que 64 articles ont été adoptés dans le texte du Sénat, 38 ont été élaborés par la commission mixte paritaire, tandis que 6 articles ont été rétablis dans le texte voté par l’Assemblée nationale. Par ailleurs, 10 articles ont été supprimés, dont 6 par la CMP et 4 sont des confirmations de la suppression votée par le Sénat.
Sans chercher à être exhaustif et en commençant par la fin de l’énumération à laquelle je viens de procéder, je voudrais insister sur quelques points saillants de l’accord auquel nous sommes parvenus avec les députés.
En ce qui concerne les confirmations de suppression, je relève celle de l’article 2 bis, relatif au régime fiscal des indemnités pour préjudice moral sur décision de justice, ainsi que celle de l’article 2 ter, qui portait sur une réduction d’impôt pour le financement de projets économiques dans les pays en voie de développement. Ce texte a eu une certaine importance politique compte tenu de la personnalité de son auteur ! (Sourires.)
S’agissant des suppressions décidées par la CMP, je mentionnerai simplement celle de l’article 2 bis A, qui tendait à assujettir à l’impôt sur le revenu les indemnités journalières d’accident du travail, ainsi que celle de l’article 49 bis, qui permettait aux collectivités de décider sur leur initiative des exonérations de taxes sur le foncier non-bâti en faveur des terres arboricoles et viticoles.
Permettez-moi d’insister, pour la regretter vivement, sur la suppression de l’article 59 octies A, qui prévoyait un relèvement du taux de la redevance d’archéologie préventive, non pas pour faire plaisir à l’Institut national de recherches archéologiques préventives, mais pour favoriser la bonne marche des chantiers, qui devraient être de plus en plus nombreux à la faveur du plan de relance.
Pour en revenir aux articles figurant dans le texte définitif, je voudrais souligner le nombre de dispositifs votés par le Sénat et acceptés par la commission mixte paritaire, ce qui, au demeurant, n’est pas inhabituel.
Parmi ceux-ci, on peut citer les articles suivants : l’article 6 bis, qui reconduit le remboursement partiel de la taxe intérieure sur les produits pétroliers pour les agriculteurs ; une série d’articles, 7 quinquies, 7 sexies, 7 septies, rénovant le régime des sociétés d’investissement immobilier cotées ; l’article 9 septies, qui crée une imputation du droit à restitution sur les impositions directes locales et l’impôt de solidarité sur la fortune, ce qui constitue, du moins osé-je l’espérer, un pas appréciable quant à l’auto-liquidation de l’ISF ; l’article 51, qui comporte une série de mesures d’incitation à la réalisation d’investissements favorables à la restructuration foncière forestière, sujet qui, vous l’imaginez bien, me tient à cœur, même s’il concerne plus la forêt privée que la forêt publique.
Je passerai rapidement sur la validation par la CMP des équilibres trouvés par le Sénat pour la répartition des dotations aux collectivités territoriales.
Bien entendu, la CMP a également retenu, sur certains points, la position de l’Assemblée nationale.
L’article 44 ter est celui qui a été le plus largement commenté par la presse et par l’opinion. Il a trait à la demi-part des personnes vivant seules et ayant élevé un enfant. Je ne reviendrai pas sur les conditions d’adoption de cet article tant elles ont été abondamment relatées dans les médias. Ce qui est en cause, c’est un avantage de quotient familial qui ne correspond à aucune charge effective pour ses bénéficiaires ; je le concède, ce point souffre discussion.
Sur ce sujet délicat, la majorité a préféré en revenir au texte introduit par l’Assemblée nationale, même si celui-ci n’est, à l’évidence, pas satisfaisant dans la mesure où il ne pérennise l’avantage de la demi-part que pour les personnes ayant élevé seules un enfant à un moment de leur vie, éventuellement il y a des dizaines d’années. Autant dire que la preuve sera très difficile à apporter. En outre, il pourrait s’ensuivre des inégalités entre les ayants droit potentiels de l’avantage fiscal.
J’ajoute que l’on n’a peut-être pas perçu tous les effets négatifs du dispositif voté puisque les conjoints survivants, pour l’essentiel des femmes, bénéficiant actuellement de la demi-part perdront celle-ci dès lors qu’elles auront élevé leurs enfants en couple.
Toujours à la rubrique des articles rétablis dans le texte voté par l’Assemblée nationale, je mentionnerai l’article 7 ter, qui a créé un régime de bénéfice mondial pour les PME, ainsi que l’article 55 quinquies, relatif à la présentation de scénarios alternatifs en annexe au projet de loi de finances.
J’en viens maintenant aux quelque 38 articles dont la rédaction résulte des délibérations de la CMP. Je ne ferai état ici que d’un petit nombre d’entre eux : l’article 3 quater, relatif au régime fiscal des entrepreneurs indépendants non-adhérents à un organisme de gestion agréé ; l’article 4 bis, qui, conformément au souhait du président Arthuis, aménage le régime des fonds communs de placement à risque ; les articles 42 et 42 bis, qui concernent le patrimoine.
En ce qui concerne le régime dit « Malraux », si le plafond de dépense est bien ramené à 100 000 euros, le taux de l’avantage fiscal reste celui qu’a voté le Sénat. S’agissant des monuments historiques, l’Assemblée nationale s’est ralliée à la position du Sénat et a supprimé tout plafond pour les monuments non ouverts au public, ce qui est une grande satisfaction pour nous et, j’en suis convaincu, pour les propriétaires desdits monuments.
Enfin, outre le régime du droit à l’image collective de l’article 78, qui reprend pour une bonne part les thèses du Sénat et borne l’application du dispositif au 30 juin 2012, je voudrais insister sur ce qui a été réalisé en matière d’environnement, qu’il s’agisse de l’article 55 ter A, relatif à la responsabilité élargie du producteur dans le domaine des déchets dangereux des ménages, ou de l’article 9 bis A, relatif à la responsabilité du producteur dans le domaine des DASRI, les déchets d’activité de soins à risques infectieux, particulièrement les seringues.
Nous avons également obtenu une grande satisfaction en matière d’agriculture, et les décisions que nous avons prises à cet égard seront certainement très appréciées par les intéressés.
Au sortir de cette énumération hétérogène, je voudrais évoquer les questions de crédit.
Sur deux points, les votes du Sénat ont été pris en compte par le Gouvernement dans ses amendements post-CMP, ceux-ci, outre l’article d’équilibre, correspondant essentiellement à des rectifications d’erreurs matérielles et à des levées de gages. Rappelons deux sujets sensibles : l’enseignement technique agricole et le régime des zones franches urbaines.
En conclusion, je me dois d’évoquer les conséquences de nos votes en termes de déficit budgétaire.
Dans le contexte de crise aiguë que nous connaissons, nous constatons que, à l’évidence, les termes de référence changent. Le solde général s’établit à près de 67 milliards d’euros, soit près de 15 milliards de plus que dans le texte initial du projet de loi de finances. Si l’on tient compte des mesures envisagées dans le collectif qui nous sera proposé au mois de janvier, on peut estimer que ce déficit atteindra plus de 76 milliards d’euros, et même 79 milliards si l’on inclut les ressources dont sera doté le Fonds d’intervention stratégique.
La commission des finances aura l’occasion de faire le point au mois de janvier. Dans l’immédiat, si les nécessités de l’heure nous amènent à mettre entre parenthèses les disciplines budgétaires telles que nous les avons conçues jusqu’à présent et telles qu’elles s’expriment dans les règles du traité de Maastricht, nous ne pouvons manquer d’exprimer certaines inquiétudes sur la façon dont ces déficits seront financés à court terme et sur la baisse de la valeur de la signature de notre pays par rapport à d’autres. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)