Compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
Secrétaires :
Mme Christiane Demontès,
M. Jean-Paul Virapoullé.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Candidatures à la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et à la délégation à la prospective
M. le président. L’ordre du jour appelle la désignation :
- des trente-six membres de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation ;
- de vingt et un membres de la délégation à la prospective.
En application des articles 110 et 8, alinéas 2 à 11 du règlement du Sénat, les listes des candidats présentés par les groupes ont été affichées.
Elles seront ratifiées si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure.
M. Guy Fischer. On ne va pas continuer à ouvrir toutes les séances sans le représentant du Gouvernement !
(Marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Claude Jeannerot. Il faut suspendre !
Mme Annie David. Il attend que les membres de l’UMP soient là !
M. Guy Fischer. Collusion !
Mme Annie David. Cela fait deux fois qu’on nous fait le coup !
3
Rappels au règlement
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Pierre Michel. Monsieur le président, mon rappel au règlement a trait à l’organisation de nos travaux.
À nouveau, durant cette session extraordinaire, un certain nombre de textes importants sont inscrits à notre ordre du jour, notamment le projet de loi pénitentiaire, dont le vote solennel aura d’ailleurs lieu cet après-midi à l’Assemblée nationale. Une commission mixte paritaire devra ensuite se réunir, puisque de graves divergences sont apparues entre les deux chambres sur ce texte, l’Assemblée nationale n’ayant pas repris les avancées que le Sénat avait adoptées grâce, il faut le dire, au travail de notre rapporteur M. Jean-René Lecerf.
M. Guy Fischer. C’est scandaleux !
M. Jean-Pierre Michel. Après cette CMP, l’Assemblée nationale et le Sénat devront encore se prononcer par un vote avant que le projet de loi soit définitivement adopté.
Or le directeur de l’administration pénitentiaire a adressé, vendredi dernier, une lettre surprenante à ses directeurs interrégionaux dans laquelle il commence par dire que « le vote favorable est acquis ». Il poursuit en indiquant que les graves divergences entre le Sénat et l’Assemblée nationale ont été heureusement gommées par l’Assemblée nationale. Par ailleurs, il critique ouvertement Jean-Marie Delarue, le contrôleur général des lieux de privation de liberté, et le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe.
M. Guy Fischer. Scandaleux !
M. Jean-Pierre Michel. Il est enfin précisé : « Cette loi […] est la conclusion de nos efforts ». Cela ne manque pas d’humour quand on sait les efforts réalisés par l’administration pénitentiaire sous la précédente garde des sceaux et, je le suppose, sous l’actuelle ministre de la justice pour que le texte de loi réponde à ses désirs.
M. Guy Fischer. Il doit démissionner !
M. Jean-Pierre Michel. Cette lettre représente un grave manquement à l’obligation de réserve. C’est inadmissible ! Cela prouve que les hauts fonctionnaires ignorent totalement le travail du Parlement.
M. Guy Fischer. Ils le méprisent !
M. Jean-Pierre Michel. Le travail que nous avons réalisé a été particulièrement long et rigoureux, …
M. Guy Fischer. Sérieux !
M. Jean-Pierre Michel. … en commission comme en séance, et tout le monde a reconnu que nous avions abouti à un texte d’équilibre. Mais le directeur de l’administration pénitentiaire en fait fi !
Aujourd’hui, le groupe auquel j’appartiens a écrit solennellement à Mme la garde des sceaux afin de lui demander la révocation immédiate du directeur de l’administration pénitentiaire.
Monsieur le président, pourriez-vous vous faire l’écho de cette demande auprès de M. le président du Sénat et du Bureau afin qu’une démarche identique soit engagée, l’attitude de ce haut fonctionnaire étant absolument inadmissible. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Pourriez-vous me communiquer cette lettre, mon cher collègue ?
M. Jean-Pierre Michel. Je peux vous la communiquer, monsieur le président, mais elle figure dans son intégralité sur le site de l’observatoire international des prisons.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour un rappel au règlement.
M. Guy Fischer. Au nom de mon groupe, je voudrais m’associer aux propos de notre collègue Jean-Pierre Michel. Nous sommes très sensibles à la situation dans les prisons françaises, qui connaissent une surpopulation comme jamais auparavant et des problèmes d’une gravité extrême.
Le projet de loi pénitentiaire tel qu’il est ressorti des travaux du Sénat est un texte d’équilibre. Cette opinion est partagée par le plus grand nombre. Cette lettre est donc une marque de mépris pour les députés et les sénateurs.
Il est inadmissible que des hauts fonctionnaires puissent faire valoir de tels points de vue. Souvent ils agissent même sur ordres venant du plus haut niveau ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. Mes chers collègues, je transmettrai votre demande à M. le président du Sénat.
4
Orientation et formation professionnelle tout au long de la vie
Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accélérée
(Texte de la commission spéciale)
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie (nos 578, 618 et 619).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 12.
TITRE IV
CONTRATS EN ALTERNANCE
Article 12
Le livre III de la sixième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 6325-1 est complété par un 3° et un 4° ainsi rédigés :
« 3° Aux bénéficiaires du revenu de solidarité active, de l'allocation de solidarité spécifique ou de l'allocation aux adultes handicapés ou aux personnes ayant bénéficié d'un contrat conclu en application de l'article L. 5134-19-1 ;
« 4° (nouveau) Dans les départements d'outre-mer et les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, aux bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et de l'allocation de parent isolé. » ;
2° Après l'article L. 6325-1, il est inséré un article L. 6325-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6325-1-1. - Les personnes mentionnées au 1° de l'article L. 6325-1 qui n'ont pas validé un second cycle de l'enseignement secondaire et qui ne sont pas titulaires d'un diplôme de l'enseignement technologique ou professionnel, ainsi que les personnes mentionnées au 3° du même article bénéficient du contrat de professionnalisation selon les modalités prévues aux articles L. 6325-11, L. 6325-14, L. 6332-14 et L. 6332-15. » ;
3° L'article L. 6325-11 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle peut être allongée jusqu'à vingt-quatre mois pour les personnes mentionnées à l'article L. 6325-1-1. » ;
3° bis (nouveau) Au premier alinéa de l'article L. 6325-12, les mots : «, notamment pour la personne sortie du système éducatif sans qualification professionnelle reconnue » sont remplacés par les mots : « pour d'autres personnes que celles mentionnées à l'article L. 6325-11 du présent code » ;
4° Au premier alinéa de l'article L. 6325-14, les mots : « les jeunes n'ayant pas achevé un second cycle de l'enseignement secondaire et qui ne sont pas titulaires d'un diplôme de l'enseignement technologique ou professionnel, » sont remplacés par les mots : « ceux mentionnés à l'article L. 6325-1-1 » ;
5° L'article L. 6332-14 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« La convention ou l'accord collectif mentionné au premier alinéa détermine des forfaits horaires spécifiques pour les contrats de professionnalisation conclus avec les personnes mentionnées à l'article L. 6325-1-1.
« Les organismes collecteurs paritaires agréés mentionnés au premier alinéa peuvent poursuivre la prise en charge des actions d'évaluation, d'accompagnement et de formation des bénéficiaires du contrat prévu à l'article L. 6325-5 dans les cas de rupture du contrat définis aux articles L. 1233-3 et L. 1243-4 et dans les cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l'entreprise. » ;
6° L'article L. 6332-15 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « d'un plafond mensuel et d'une durée maximale » sont remplacés par les mots : « de plafonds mensuels et de durées maximales » ;
b) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette prise en charge fait l'objet d'un plafond spécifique lorsque les contrats de professionnalisation sont conclus avec les personnes mentionnées à l'article L. 6325-1-1. » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Ces organismes peuvent également prendre en charge, dans les mêmes conditions, une partie des dépenses de tutorat externe à l'entreprise engagées pour les personnes mentionnées à l'article L. 6325-1-1, les personnes qui ont été suivies par un référent avant la signature du contrat de professionnalisation et les personnes qui n'ont exercé aucune activité professionnelle à plein temps et en contrat à durée indéterminée au cours des trois années précédant la signature du contrat de professionnalisation. » ;
7° (nouveau) Après l'article L. 6325-6 du code du travail, il est inséré un article L. 6325-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6325-6-1. - Les mineurs titulaires d'un contrat de professionnalisation peuvent être autorisés à utiliser au cours de leur formation professionnelle les équipements de travail dont l'usage est interdit aux jeunes travailleurs, dans des conditions définies par décret ».
M. le président. L'amendement n° 146 rectifié, présenté par MM. Gillot, Antoinette, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le quatrième alinéa (4°) du 1° de cet article par les mots :
et du revenu supplémentaire temporaire d'activité
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Les auteurs de cet amendement tiennent à saluer le travail de la commission, qui a adopté, sur l’initiative de son rapporteur, un amendement tendant à étendre le bénéfice du contrat de professionnalisation aux titulaires du revenu minimum d’insertion, le RMI, et de l’allocation de parent isolé, l’API, dans les départements d’outre-mer et les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le RSA, le revenu de solidarité active, qui se substitue au RMI et à l’API et qui est entré en vigueur le 1er juin 2009 en métropole, ne s’appliquera qu’à partir du 1er janvier 2011 en outre-mer. Dès lors, M. Gillot aimerait avoir des précisions sur les intentions du Gouvernement concernant l’extension des contrats de professionnalisation aux bénéficiaires du revenu de solidarité active. Cette extension s’appliquera-t-elle exclusivement aux personnes sans activité, c’est-à-dire à celles qui bénéficiaient du RMI et de l’API avant l’entrée en vigueur du RSA, ou bien s’appliquera-t-elle également aux bénéficiaires du RSA exerçant ou reprenant une activité professionnelle et pouvant ainsi cumuler revenus du travail et revenus issus de la solidarité ?
Si l’extension du contrat de professionnalisation vise les salariés précaires percevant le RSA, il serait légitime de l’appliquer aux bénéficiaires du RSTA, le revenu supplémentaire temporaire d’activité, en outre-mer.
Si tel est le cas, vous ne pouvez refuser cet amendement, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur de la commission spéciale. Le revenu supplémentaire temporaire d’activité créé par le décret du 27 mai 2009 n’est pas comparable au RSA et ne se substitue ni au RMI ni à l’API.
Le RSTA est une prestation financière de l’État pour soutenir le pouvoir d’achat en outre-mer. Pour en bénéficier, il faut, d’une part, être titulaire d’un CDD, d’un CDI, d’un contrat d’intérim ou être agent titulaire de droit public, et, d’autre part, avoir une rémunération inférieure à 1,4 fois le SMIC.
Je ferai donc plusieurs remarques.
Premièrement, si l’amendement a pour objet de préciser que le contrat de professionnalisation ouvre droit au RSTA, il est satisfait par le droit existant, puisque les contrats de professionnalisation, à la différence des contrats d’apprentissage, sont des CDD ou des CDI.
Deuxièmement, si l’amendement a pour objet de prévoir la transition avant l’entrée en vigueur du RSA outre-mer, il est satisfait par le texte de la commission, qui a prévu spécifiquement l’ouverture des contrats de professionnalisation aux titulaires du RMI et de l’API.
Troisièmement, si l’amendement a pour objet d’affirmer que les titulaires du RSTA peuvent en plus conclure un contrat de professionnalisation, comment pourraient être superposés le contrat de travail ouvrant droit au RSTA et le nouveau contrat de professionnalisation ?
Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur le président, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, pour les raisons juridiques très clairement exprimées par le rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 180, présenté par M. Carle, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le 1° de cet article, insérer un 1° bis ainsi rédigé :
1° bis Au premier alinéa de l'article L. 6325-1, après la référence : « L. 6314-1 », sont insérés les mots : « enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. J’ai consulté les différents partenaires et, devant la difficulté de mise en œuvre de ces mesures, je préfère retirer cet amendement pour ne pas compliquer le système.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je remercie M. le rapporteur de sa compréhension.
Nous avions déjà débattu avec lui de cette question, car le fait de limiter les contrats de professionnalisation à la seule préparation de diplômes enregistrés au RNCP nous semblait trop restrictif. Nous avons cherché conjointement à procéder à une évaluation. À titre d’exemple, il existe des contrats de professionnalisation destinés aux caristes ou aux hôtesses de caisse délivrant une vraie formation qualifiante qui débouche sur un métier, mais qui ne sont pas enregistrés au RNCP.
M. le président. L’amendement n° 180 est retiré.
L'amendement n° 174, présenté par M. Carle, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 6325-1-1 du code du travail, remplacer la référence :
au 3°
par les références :
aux 3° et 4°
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13 A
La première phrase du premier alinéa et les trois derniers alinéas du I de l'article 20 de la loi n° 92-675 du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail sont supprimées.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 78 est présenté par Mmes David, Gonthier-Maurin, Pasquet et Hoarau, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 115 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l'amendement n° 78.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’article 13 A résulte de l’adoption d’un amendement en commission, que nous n’avons pas voté, et qui ne faisait pas partie de l’accord national interprofessionnel, l’ANI.
Outre cette question de forme, nous sommes fermement opposés à la généralisation de l’apprentissage dans la fonction publique. Cela constitue une nouvelle manière de porter atteinte au secteur public puisque, de l’avis d’une majorité de partenaires sociaux, il s’agit d’un outil supplémentaire d’accompagnement de la révision générale des politiques publiques, la RGPP. Vous comprendrez que nous y soyons opposés.
De surcroît, la volonté initialement affichée de permettre aux jeunes de mieux appréhender la fonction publique en vue de préparer les concours n’est en fait qu’illusoire, car rares sont ceux qui, ayant profité de l’apprentissage dans la fonction publique, l’intègrent par la suite.
En réalité, l’apprentissage dans la fonction publique ne peut remplacer l’égalité des droits, le renforcement de l’éducation nationale et la création d’un véritable service public de la préparation aux concours de la fonction publique. Les grandes écoles qui préparent à ces concours restent trop souvent fermées aux jeunes n’habitant pas les quartiers les plus huppés et la part d’enfants d’ouvriers à l’université régresse d’année en année.
Quant à l’agrément que vous entendez supprimer, il est aujourd’hui le seul outil statistique permettant de connaître précisément le nombre de jeunes concernés. C’est pourquoi nous sommes fortement hostiles à cette disposition.
Par ailleurs, permettez-moi de profiter de la discussion de cet article, monsieur le secrétaire d’État, pour vous interroger. Nous aurions bien proposé un amendement s’il n’avait pas encouru le risque d’être déclaré irrecevable sur le fondement de l’article 40 de la Constitution.
Savez-vous donc, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, que les apprentis de la fonction publique, contrairement à ceux du privé, ne cotisent pas, durant leur période d’apprentissage, pour la retraite ? Sans doute l’État a-t-il voulu économiser quelques euros sur leur dos !
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cet article et vous invitons à adopter cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 115.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, je présente à mon tour un amendement de suppression de l’article 13 A. En réalité, nous ne souhaitons pas le supprimer, nous voulons revenir à la formulation initiale, bien plus complète et intéressante pour la défense des conditions de l’apprenti.
Je rappelle les termes qui ont été supprimés par la commission et que nous voudrions conserver : « Au vu d’un dossier précisant les conditions de travail, d’hygiène et de sécurité, l’équipement du service et la nature des techniques utilisées ainsi que les compétences professionnelles des maîtres d’apprentissage, le représentant de l’État dans le département du lieu d’exécution des contrats délivre un agrément à ces personnes. » Il existait un processus de vérification.
Le paragraphe suivant a également été supprimé : « Pour les personnes morales autres que l’État, l’agrément peut être retiré en cas de manquement aux obligations mises à la charge de l’employeur par le présent chapitre. » Nous voudrions le rétablir.
Cet article prévoit la suppression des garde-fous qui permettaient à un jeune d’effectuer son apprentissage dans des conditions de travail contrôlées par l’État, notamment au niveau de l’hygiène, de la sécurité ou des compétences professionnelles des maîtres d’apprentissage.
Ces mesures allaient dans le sens d’un environnement de travail plus sain pour l’apprenti, qui savait qu’en cas de manquement à ses obligations l’employeur pouvait être sanctionné par l’État.
Si l’État se désengage, qui garantira le bon déroulement de l’apprentissage ? Quel recours sera mis à la disposition de l’apprenti, parfois mineur, face à d’éventuels abus de sa hiérarchie ?
Nous examinons actuellement un projet de loi sur la formation professionnelle. Si nous ne sommes pas en mesure de nous assurer qu’une formation doit avoir lieu dans les meilleures conditions possibles dès seize ans, quelle crédibilité avons-nous à présenter la formation tout au long de la vie comme un tremplin vers un parcours professionnel épanouissant et comme pilier d’un marché du travail tourné vers l’avenir ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Selon les derniers chiffres de la DARES, le secteur public – essentiellement les communes – compte 6 000 apprentis sur un total de cinq millions de salariés, alors que les seules entrées en 2007 dans le secteur privé se montaient à 280 000 jeunes. Il existe donc de très importants gisements d’apprentissage dans la fonction publique qu’il convient de valoriser.
Laurent Hénart, chargé d’une mission auprès du Premier ministre, est venu devant notre commission spéciale expliquer les raisons du faible développement de l’apprentissage dans le secteur public. Il y a bien sûr des difficultés structurelles, liées au principe de l’entrée par concours dans la fonction publique, et des difficultés financières, liées à l’absence d’incitations financières consenties aux entreprises dans le domaine privé.
Mais il existe aussi un frein purement procédural et administratif : l’agrément préfectoral préalable des personnes publiques. Or ces procédures sont longues et très hétérogènes selon les différentes préfectures. C’est pourquoi l’article 13 A levait cet obstacle inutile au développement de l’apprentissage dans le secteur public.
De plus, l’apprentissage dans le secteur public reste soumis aux dispositions de l’ancien article L. 117-5-1 du code du travail qui prévoit, en cas de risque pour la santé ou l’intégrité de l’apprenti, la suspension du contrat et, le cas échéant, l’interdiction de recruter de nouveaux apprentis.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Le maire que je suis, comme beaucoup d’entre vous, sait d’expérience que la mise en place de contrats d’apprentissage au sein des collectivités locales relève du parcours du combattant. On ne peut continuer à tenir un double discours, en défendant l’apprentissage auprès des entreprises comme une bonne filière pour accéder à un emploi tout en ne l’appliquant pas à la fonction publique.
Il convient donc de mener un travail de fond pour faire en sorte de développer l’apprentissage dans la fonction publique. Le travail réalisé par la commission spéciale pose un premier jalon, monsieur le rapporteur. Nous prenons acte, nous prenons rendez-vous : faites-moi confiance, nous ne lâcherons pas ! Je ne me contenterai pas du rapport de Laurent Hénart ; je suis décidé à faire bouger les choses sur l’apprentissage dans la fonction publique.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Merci, monsieur le secrétaire d’État.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 78 et 115.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)