M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Roland du Luart.)
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion de la proposition de loi relative au patrimoine monumental de l’État.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis bientôt vingt ans, la France est devenue la première destination touristique au monde. En 2007, nous avons même établi un record historique en accueillant 82 millions de touristes étrangers !
L’attrait de notre pays s’explique par le grand nombre et la variété de ses intérêts : la diversité des paysages, la qualité des structures d’accueil et, bien entendu, la richesse de notre patrimoine historique, culturel et artistique. Et pour cause ! Notre territoire n’abrite pas moins de 44 000 monuments historiques et 2 300 parcs et jardins protégés au titre des Monuments historiques.
J’ajouterai que, si notre patrimoine attire les étrangers, les Français aiment aussi le visiter. Le succès des Journées du patrimoine ne se dément pas. Chaque année, depuis vingt-sept ans, ce sont des millions de visiteurs qui souhaitent découvrir ou redécouvrir une partie de leur patrimoine. Cette opération est une façon pour nos concitoyens de s’immerger dans notre grande histoire commune, de se réapproprier une part de notre mémoire collective.
Cette histoire et cette mémoire collectives, on les doit à une politique patrimoniale qui, depuis le célèbre discours de l’abbé Grégoire sur le vandalisme en 1794, s’est progressivement mise en place, au cours des décennies et des siècles qui ont suivi, à travers la législation.
La question de fond, ces dernières années, est pourtant de savoir comment continuer à sauvegarder, et surtout entretenir, d’innombrables monuments nationaux quand l’État n’a plus les moyens d’assumer cette charge.
C’est ainsi que, depuis 2003, alors que plusieurs chantiers de restauration ont été interrompus, que des monuments ont été contraints à la fermeture pour des mesures de sécurité, que de nombreux châteaux ont été vendus à de riches étrangers, une série de réformes ont été engagées.
C’est dans ce contexte que la voie de la dévolution du patrimoine monumental de l’État a été ouverte en 2004, lors de la deuxième phase de décentralisation, à l’issue du travail de la commission présidée par M. René Rémond.
La loi relative aux libertés et responsabilités locales a permis aux collectivités territoriales de demander le transfert de propriété de monuments historiques et de sites archéologiques appartenant à l’État, en vue d’assurer leur conservation et leur valorisation intellectuelle. Mais, au final, ce sont seulement soixante-cinq monuments sur 176 transférables qui l’ont été : quarante-trois au bénéfice des communes, seize des départements et six des régions.
Il faut souligner qu’aucun bilan de cette première vague de transferts n’avait réellement été fait alors que nous découvrions, au détour du fameux article 52 du projet de loi de finances pour 2010, que le Gouvernement avait inscrit qu’un monument national pouvait être transféré par l’État à une collectivité territoriale, sans les gages et garanties nécessaires.
Les parlementaires se sont alors légitimement émus de ces dispositions qui ont été finalement retoquées par le Conseil constitutionnel.
Dès lors, il était de la responsabilité du Parlement de prendre le temps de la réflexion et de l’analyse, de garantir à travers un certain nombre de précautions la cohérence de notre politique patrimoniale nationale. C’est chose faite, grâce au texte que nous soumet Françoise Férat.
Je tiens à saluer à cet égard la réactivité du président de la commission de la culture, Jacques Legendre, et de notre collègue Françoise Férat pour avoir lancé cette réflexion permettant d’aboutir à un texte important et nécessaire.
Ce texte est soutenu par la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture, qui parle de perspectives nouvelles et rigoureuses. Il est très important de le souligner.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Oui, c’est important !
Mme Catherine Morin-Desailly. Un certain nombre de principes fondent le texte dont nous débattons aujourd’hui.
Il offre trois niveaux de garanties à une possible dévolution du patrimoine monumental étatique.
Tout d’abord, il crée un Haut Conseil du patrimoine, dont je ne rappellerai pas la mission, mes collègues l’ayant fait avant moi.
Ensuite, en établissant des transferts encadrés par plusieurs conditions – l’avis favorable du Haut Conseil du patrimoine, le suivi de l’information et le transfert des personnels –, le texte pose les garanties d’un traitement du patrimoine dans son plus grand respect, de telle sorte qu’il ne puisse être bradé ou cédé sans aucun contrôle sur son devenir.
Enfin, en définissant une procédure à titre gratuit pour des transferts accompagnés d’un projet culturel, cette proposition de loi encourage l’ouverture et le renouveau des monuments. Certains bâtiments, parfois abandonnés, mal entretenus, trop peu visités, pourraient, grâce à ces projets, connaître un nouveau souffle.
Comme le soulignait à très juste titre M. Jean-Jacques Aillagon, « il y a, dans une politique du patrimoine, l’expression d’une politique de démocratisation de la culture et, tout simplement, une politique du partage civique. »
On le voit, l’ambition assumée de ce texte est d’encadrer la passation par trois grands principes : la précaution en intervenant tout au long de la procédure, le respect de l’esprit culturel et historique du lieu et la garantie que le patrimoine reste un lieu de vie accessible au public.
Je me réjouis que ce soit notre assemblée, de surcroît par l’intermédiaire d’une collègue centriste, qui porte cette avancée législative. Les propositions qui sont faites posent les principes d’une éthique dans la gestion de notre patrimoine national.
Je regrette, par exemple – mais, à l’avenir, cela ne se reproduira plus si nous votons cette proposition de loi –, qu’à Rouen, dans ma ville, le couvent des Gravelines, qui date du début du 17e siècle et dont l’État, via la direction régionale des affaires culturelles, ou DRAC, de Haute-Normandie, s’est dessaisi, ait, immédiatement après sa vente, été démantelé pour qu’une partie du verger alentour soit revendue à un promoteur.
Le cas de l’hôtel de la Marine a été un révélateur, comme l’a dit Françoise Férat. Il est aujourd’hui une référence mais, on le voit à travers l’exemple que j’ai cité, il existe malheureusement bien d’autres cas.
L’objectif de ce texte est d’éviter le dépeçage des monuments historiques.
Je formule le souhait, à cette tribune, qu’il puisse d’ailleurs inspirer les collectivités locales qui pourraient être elles-mêmes tentées, à leur niveau, de vendre de manière hâtive et non inspirée leur patrimoine, en allongeant, comme elles le font parfois, la longue liste de lieux remarquables cédés au privé et définitivement non accessibles au public.
Avant de conclure, je voudrais insister sur deux points.
Premièrement, monsieur le ministre, j’insisterai sur le rôle essentiel que doit continuer à jouer le ministère de la culture en matière de protection du patrimoine et de veille, par le biais du classement.
Je m’appuie encore une fois sur mon expérience personnelle d’élue locale – certains de nos collègues, dont notre ami Yves Dauge, verront à quoi je fais référence –, pour souligner l’efficacité avec laquelle les services de l’architecture et du patrimoine étaient intervenus, il y a deux ans, lorsque je les ai saisis pour éviter la destruction d’un ensemble remarquable et identifié de l’architecte urbaniste Marcel Lods, que l’actuel maire de Rouen avait malheureusement fait voter. L’État peut et doit garantir une politique patrimoniale exemplaire.
Deuxièmement, il nous faut réaliser aujourd’hui que la mondialisation bouscule le monde du patrimoine. L’approche et la coopération internationales sont, de ce fait, rendues nécessaires en matière de protection des biens culturels, y compris en cas de catastrophes naturelles ou encore de conflits armés mais aussi de trafics illicites.
Cela m’amène à remercier notre collègue Amboise Dupont d’avoir proposé que soit insérée la notion de « patrimoine mondial » dans le code du patrimoine. Les documents d’urbanisme devront désormais tenir compte des exigences qui découlent de ce classement par l’UNESCO.
La massification du tourisme, l’envol du marché de l’art mondial, y compris le développement rapide des nouvelles technologies, ne sont pas non plus sans poser de question. Sur ces sujets, c’est aussi au niveau européen qu’il nous faut agir.
Seul un projet comme Europeana pourra prétendre rivaliser avec la gigantesque bibliothèque mondiale ambitionnée par Google en préemptant notre patrimoine littéraire.
Les centristes que nous sommes pensent que l’Europe, ce doit d’être aussi l’Europe de la culture et qu’il y a un patrimoine spécifique porteur de notre héritage à identifier et à protéger.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. C’est vrai !
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chargées d’un message spirituel du passé, les œuvres monumentales des peuples demeurent, dans la vie présente, le témoignage vivant de leurs traditions.
Aussi, j’espère que notre vote, aujourd’hui, saura garantir le respect nécessaire à cet héritage. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme cela a été souligné par plusieurs intervenants, la proposition de loi qui nous est soumise s’inscrit à un moment particulier de notre actualité.
C’est ainsi que le projet de l’État d’un bail emphytéotique de quatre-vingt-dix-neuf ans sur l’actuel hôtel de la Marine illustre malheureusement les objectifs de profits à court terme qui ont guidé cette démarche et que nous ne pouvons approuver.
Je rappelle que, à la suite de l’adoption de la loi de finances pour 2010, le Conseil constitutionnel avait censuré sur la forme les mesures d’assouplissement concernant le transfert des biens patrimoniaux de l’État aux collectivités territoriales, reconnaissant qu’il s’agissait d’un cavalier budgétaire.
Nous constatons que la monture reste identique. Sur le fond, elle représente toujours à nos yeux le cheval de Troie d’une politique fondée sur le profit !
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Françoise Cartron. Ainsi, avec mes collègues du groupe socialiste, je reste attaché à deux grands principes : d’une part, que la préservation de notre passé collectif reste l’intérêt supérieur défendu par la loi ; d’autre part, que l’implication des collectivités territoriales dans le domaine du patrimoine, que nous défendons également, s’inscrive dans le cadre de la défense de cet héritage commun et non dans une simple démarche de spéculation financière.
En vertu de l’article 97 de la loi du 13 août 2004, les transferts de monuments aux collectivités « sont effectués à titre gratuit et ne donnent lieu au paiement d’aucune indemnité, droit, taxe, salaire ou honoraires. »
Au sens de l’article 5 de la présente proposition de loi, le principe de gratuité est remis en question. Il s’applique désormais aux seuls transferts justifiant d’un projet culturel. Si l’objet est déclaré non culturel alors sa cession à titre onéreux devient possible.
La boîte de Pandore est ainsi ouverte et le risque est grand de voir notre patrimoine monumental bradé. La recherche d’un profit immédiat, par la revente à une personne privée, serait susceptible, à l’avenir, de motiver à titre principal la demande d’acquisition.
Par ailleurs, qu’il s’agisse des consultations du nouveau Haut conseil du patrimoine pour déclassement des monuments inscrits en vue d’une revente ou de l’organisation de cette revente par les collectivités, elles ne sont prévues que pour les cessions à titre gratuit.
A contrario, nous constatons que les cessions à titre onéreux ne feront l’objet d’aucun contrôle. Une partie du patrimoine national classé ou inscrit pourrait alors se voir attribuer un usage sans aucun rapport avec sa vocation initiale et être mutilée pour les besoins de sa nouvelle destination.
Dans cette proposition de loi, il est précisé que le ministre chargé des monuments historiques accorde ou non le transfert du monument et, le cas échéant, désigne la collectivité bénéficiaire, après accord du ministre chargé du domaine de l’État. Je m’interroge : de quelles voies de recours les collectivités qui s’estimeraient lésées par le transfert d’un bien réalisé au profit d’une autre collectivité disposeront-elles ?
M. Roland Courteau. Bonne question !
Mme Françoise Cartron. De la même manière, en cette période de resserrement budgétaire, quelles sont les garanties apportées par l’État pour que les collectivités puissent poursuivre l’entretien des monuments et des sites acquis ? Notons que, à défaut d’un tel entretien, la seule possibilité serait le déclassement pour revente afin d’éviter un coût devenu insupportable pour les finances de la collectivité.
Les modalités de suivi de l’utilisation du monument, une fois celui-ci transféré, nous apparaissent également insuffisantes. Les délais impartis pour la communication des bilans de transferts par les collectivités à l’État sont fixés à trois ans. Cette période est trop longue et ne permettra pas une réaction rapide en cas d’éventuelles difficultés financières ou lorsque des carences manifestes apparaîtront dans la mise en valeur d’un monument, d’autant que l’assistance juridique de la part du ministre chargé du domaine de l’État est, elle, prévue pour une durée très courte, à savoir un an seulement.
Cette inquiétude est renforcée par le fait que le Haut conseil du patrimoine ne jouera pas un rôle assez fort. En effet, il ne devrait pas seulement s’exprimer sur les projets qu’il a décidé d’analyser ou qui lui seront soumis, comme cela est prévu dans le dispositif, mais il devrait également se prononcer sur tous les projets de transfert de monuments.
Prenons l’exemple de la citadelle de Blaye, achetée par la ville en 1954, classée monument historique et inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2008. Le maire souhaite aujourd’hui en vendre une partie à la découpe. Or la présente proposition de loi n’institue aucune protection de nature à éviter le démembrement de ce monument classé, puisque les destinataires de cette vente à la découpe ne seront pas des collectivités et que seuls les transferts au profit de celles-ci entrent dans le champ d’application du texte dont nous débattons.
Pour conclure, nous souhaitons rappeler fortement que la culture tout comme le patrimoine ne sont pas des produits de luxe. Ils représentent bien plus : un élément de notre conscience collective et la garantie de notre rayonnement international.
Comme l’a dit Catherine Morin-Desailly, l’engouement formidable des Français et des étrangers pour les Journées du patrimoine nous oblige, dans l’intérêt du pays, à proposer un dispositif responsable dont l’objectif unique est la préservation du patrimoine monumental de la France.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Françoise Cartron. À cet égard, celui-ci mérite la mise en place de garde-fous importants. C’est la raison pour laquelle seule l’adoption par le Sénat de certains de nos amendements nous permettra de voter ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. « Un ensemble de ressources héritées du passé que des personnes considèrent, par-delà le régime de propriété des biens, comme un reflet et une expression de leurs valeurs, croyances, savoirs et traditions en continuelle évolution » ! C’est ainsi, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, que la convention de Faro définit le patrimoine culturel.
À cet égard, les dernières tentatives du Gouvernement en matière de sauvegarde de notre patrimoine nous laissent songeurs et nous inquiètent.
En effet, tout porte à croire, ou plus justement, si vous me permettez l’expression, « à craindre », que la machine ne soit lancée. Depuis la loi du 13 août 2004, l’État peut déjà transférer aux collectivités territoriales la propriété de monuments classés ou inscrits. L’assouplissement des conditions de transfert, voulu par la loi de finances pour 2010, a fort heureusement été censuré par le Conseil constitutionnel, comme l’a déjà mentionné notre collègue Françoise Cartron.
Certes, la proposition de loi de nos collègues Férat et Legendre que nous examinons aujourd’hui, en contenant des dispositions qui tendent à définir un principe de précaution, prévoit des sauvegardes supplémentaires. Mais est-ce suffisant ?
En réalité, au-delà de ces considérations, que traduit vraiment le texte ? Tout simplement la possibilité pour l’État, assurément impécunieux et possiblement inconséquent, de brader le patrimoine national pour remplir ses caisses. La boîte de Pandore est bien ouverte !
M. Roland Courteau. Exactement !
Mme Claudine Lepage. Il importe de « sécuriser » davantage notre patrimoine monumental, en France comme à l’étranger.
En effet, beaucoup l’ignorent, le ministère des affaires étrangères et européennes gère quelque 1 500 biens situés hors de nos frontières dans 160 pays et évalués à 4,47 milliards d’euros.
Il n’existe pas de répertoire de ces biens de la France à l’étranger. D’ailleurs, la transparence très relative qui entoure leur gestion mériterait, me semble-t-il, un rapport circonstancié. Nous pouvons cependant remarquer que ces bâtiments sont de type très divers : ambassades et consulats, bien sûr, mais aussi centres culturels ou logements de fonction.
Leur valeur financière et leur charge symbolique sont également très variées. Sachez cependant que près d’une centaine de biens ont sans conteste une haute valeur patrimoniale. On estime ainsi que plus d’une trentaine d’entre eux seraient classés monuments historiques s’ils étaient situés sur le territoire français et qu’une soixantaine seraient inscrits à l’inventaire des monuments historiques. Je parle ici aussi bien d’ambassades historiques, comme le palais Buquoy à Prague, la Case de Gaulle à Brazzaville, que d’immeubles abritant des centres culturels français, comme le palais Lenzi à Florence, ou encore des lieux de culte, telle l’église Saint-Louis-des-Français à Lisbonne.
Certains parmi ces biens du domaine public de la France, tel le palais Thott à Copenhague, sont même classés monuments historiques au regard de la législation locale.
Or, depuis le 1er janvier 2010, aucun crédit d’investissement n’est plus inscrit dans le budget général. Le financement de la programmation immobilière du ministère des affaires étrangères et européennes ne doit donc plus être assuré que par les produits de cession de ses biens immobiliers.
Suivant cette logique, le Quai d’Orsay évoque la cession d’immeubles ordinaires ou de logements devenus inutiles. Mais il y a aussi des biens beaucoup plus prestigieux et de grande valeur et, de surcroit, particulièrement emblématiques du rayonnement de la France à l’étranger. Je ne citerai que le palais Lenzi à Florence, l’Hospice wallon à Amsterdam ou la Villa andalouse à Madrid, parmi la bonne dizaine de bâtiments nommés.
La situation serait certainement plus tenable si, comme le prévoit la réglementation, la totalité du produit des cessions réalisées à l’étranger revenait effectivement au ministère des affaires étrangères et européennes. Pour différentes raisons techniques et dilatoires, nous en sommes bien loin. Et je n’entrerai pas dans les détails de la mise en place des loyers budgétaires, qui ne sont pas sans poser problème, notamment en raison de l’impact de la mise en réserve qui réduit la dotation budgétaire.
Pour terminer, j’évoquerai la création d’une foncière des propriétés de l’État à l’étranger, validée par le Conseil de modernisation des politiques publiques, et qui fait de plus en plus figure d’Arlésienne. Pourtant, un tel établissement, par la professionnalisation qu’il induirait, permettrait une politique immobilière à l’étranger beaucoup plus efficace. Encore faudrait-il, c’est une évidence pour beaucoup sauf, semble-t-il, pour Bercy, qu’il dispose de la capacité d’emprunt.
En attendant, nécessité faisant loi, il y a fort à craindre que, à l’étranger comme sur le territoire français, l’aliénation potentiellement inconsidérée de notre patrimoine se poursuive. Comme nous ne pouvons l’accepter, nous avons déposé des amendements visant à encadrer la cession des biens immobiliers du domaine public à l’étranger, amendements que nous demanderons au Sénat d’adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission.
Chapitre Ier
Utilisation du patrimoine monumental de l’État
Article 1er A (nouveau)
Au livre VI du code du patrimoine, avant le chapitre Ier du titre Ier, il est inséré un nouvel article ainsi rédigé :
« Art. L. 610. - La conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel, dans ses qualifications historiques, archéologique, architecturale, urbaine et paysagère sont d'intérêt public.
« Les collectivités publiques intègrent le patrimoine culturel dans leurs politiques et leurs actions d'urbanisme et d'aménagement notamment au sein des projets d'aménagement et de développement durable établis en application des articles L. 122-1-1 et L. 123-1 du code de l'urbanisme, afin d'en assurer la protection et la transmission aux générations futures.
« Lorsqu'un élément de patrimoine ou une partie de territoire est reconnu en tant que patrimoine mondial de l'humanité en application de la convention du patrimoine mondial, culturel et naturel de l'UNESCO en date du 16 novembre 1972, l'impératif de protection de sa valeur universelle exceptionnelle ainsi que le plan de gestion du bien et de sa zone tampon qui assurent cet objectif sont pris en compte dans les documents d'urbanisme de la ou les collectivités concernées. L'État peut également, à tout moment, recourir en tant que de besoin aux procédures exceptionnelles prévues par les articles L. 522-3 et L. 621-7 du présent code et par les articles L. 113-1, L. 121-9 et L. 122-5-1 du code de l'urbanisme.
« Lorsque la collectivité territoriale compétente engage l'élaboration ou la révision d'un Schéma de cohérence territoriale (SCOT) ou d'un Plan local d’urbanisme (PLU), le représentant de l'État porte à sa connaissance les mesures et les modalités à respecter pour assurer l'atteinte des objectifs visés aux premier et deuxième alinéas du présent article. »