M. le président. Je mets aux voix l'article 53.
(L'article 53 est adopté.)
Article 53 bis (nouveau)
I. – Le chapitre III du titre III du Livre Ier du code de justice administrative est complété par une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Dispositions relatives aux maîtres des requêtes en service extraordinaire
« Art. L. 133-9. – Des fonctionnaires appartenant à un corps recruté par la voie de l’École nationale d’administration, des magistrats de l’ordre judiciaire, des professeurs et maîtres de conférences titulaires des universités, des administrateurs des assemblées parlementaires, des administrateurs des postes et télécommunications, des fonctionnaires civils ou militaires de l’État, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière appartenant à des corps ou à des cadres d’emplois de niveau équivalent ainsi que des fonctionnaires de l’Union européenne de niveau équivalent peuvent être nommés par le vice-président du Conseil d’État pour exercer, en qualité de maître des requêtes en service extraordinaire, les fonctions dévolues aux maîtres des requêtes pour une durée qui ne peut excéder quatre ans.
« Art. L. 133-10. – Les maîtres des requêtes en service extraordinaire sont soumis aux mêmes obligations que les membres du Conseil d’État.
« Art. L. 133-11. – Il ne peut être mis fin au détachement ou à la mise à disposition de maîtres des requêtes en service extraordinaire, avant l’expiration du terme fixé, que pour motif disciplinaire, à la demande du vice-président du Conseil d’État, et sur proposition de la commission consultative mentionnée au chapitre II du titre III du présent code.
« Art. L. 133-12. – Chaque année, un fonctionnaire ou un magistrat ayant exercé, pendant une durée de quatre ans, les fonctions de maître des requêtes en service extraordinaire, peut être nommé au grade de maître des requêtes. La nomination prévue au présent article est prononcée sur proposition du vice-président du Conseil d’État délibérant avec les présidents de section.
« Il n’est pas tenu compte de ces nominations pour l’application des dispositions de l’article L. 133-4 du présent code. »
II. – L’article L. 121-2 du code de justice administrative est ainsi modifié :
1° Le 6° et le 7° deviennent respectivement le 7° et le 8°;
2° Après le 5°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 6° des maîtres des requêtes en service extraordinaire ; ».
III. – Les dispositions de l’article L. 133-12 du code de justice administrative sont applicables, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, aux fonctionnaires et aux magistrats ayant exercé, avant l’entrée en vigueur de la présente loi, les fonctions normalement dévolues aux maîtres des requêtes et aux auditeurs.
M. le président. L'amendement n° 101, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre.
M. François Sauvadet, ministre. Le Gouvernement est défavorable à la mesure introduite en commission des lois du Sénat, qui confère la qualité de maître des requêtes en service extraordinaire aux fonctionnaires et magistrats de l’ordre judiciaire détachés auprès du Conseil d’État ou mis à disposition du Conseil d’État, ouvrant ainsi la voie à leur intégration.
Ces fonctionnaires apportent incontestablement une contribution précieuse à l’institution au travers des compétences qu’ils ont acquises dans leur parcours antérieur au sein de la fonction publique. Mais, j’y insiste, ils ont aussi vocation à faire bénéficier leur administration d’origine ou une autre administration publique de l’expertise acquise au Conseil d’État. Ils constituent, de ce point de vue, un important vivier de recrutement pour l’ensemble de la fonction publique, qu’il convient de ne pas appauvrir.
Je rappelle que les voies d’accès à la plus haute juridiction administrative sont déjà nombreuses : l’ENA, le tour extérieur, la nomination des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel, cette dernière voie étant élargie par le présent projet de loi et clairement dissociée du tour extérieur.
L’ajout d’une nouvelle procédure, elle aussi déconnectée du tour extérieur, nuirait à la lisibilité des voies de recrutement. L’ouverture d’une voie d’intégration directe créerait par ailleurs des attentes fortes, il ne faut pas se le cacher, pour les fonctionnaires en mobilité,…
M. Jean-Jacques Hyest. Eh oui !
M. François Sauvadet, ministre. … que le quota d’un recrutement par an, convenons-en, ne permettrait pas de satisfaire. À cet égard, le dispositif actuel présente le mérite de la clarté.
La création d’un statut de maître des requêtes en service extraordinaire n’apparaît donc pas nécessaire. D’ores et déjà, les fonctionnaires en mobilité exercent leurs fonctions dans les mêmes conditions que les membres du Conseil d’État.
Par ailleurs, l’impossibilité de mettre fin à la mobilité avant le terme des quatre ans, sauf motif disciplinaire, créerait une rigidité d’organisation et limiterait les possibilités de renouvellement de ce vivier, de nature à en garantir l’excellence.
Madame le rapporteur, forte de votre attachement à la mobilité et à l’enrichissement des parcours, je ne doute pas que vous suivrez le Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Tout cela est fort clair, mais disproportionné par rapport à l’initiative prise par la commission.
Je ne pense pas que les équilibres seront bouleversés par une nomination. Il convient non seulement de prendre en considération la préoccupation de mobilité, mais aussi d’enrichir le recrutement des membres du Conseil d’État.
Cette nouvelle voie d’accès au Conseil d’État va dans le sens de l’objectif affiché par le Gouvernement et partagé par la commission, à savoir lutter contre une baisse des effectifs de cette juridiction administrative.
Je persiste donc en disant que la commission des lois a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 53 bis.
(L'article 53 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 53 bis
M. le président. L'amendement n° 27 rectifié, présenté par M. Delebarre et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 53 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 2 du chapitre Ier du titre II du livre II du code de justice administrative est complétée par un article L. 221-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 221-2-1. – En cas de nécessité d’un renforcement ponctuel et immédiat des effectifs d’un tribunal administratif, le vice-président du Conseil d’État peut déléguer, avec son accord, un magistrat affecté auprès d’une autre juridiction administrative, quel que soit son grade, afin d’exercer, pour une durée déterminée, toute fonction juridictionnelle auprès de ce tribunal.
« L’ordonnance du vice-président précise le motif et la durée de la délégation ainsi que la nature des fonctions qui seront exercées par le magistrat délégué.
« Un décret en Conseil d’État fixe le nombre et la durée des délégations qui peuvent ainsi être confiées à un magistrat au cours de la même année. »
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. L’article L. 221-2 du code de justice administrative, dans sa version issue de la loi du 13 décembre 2011, permet à un tribunal administratif de « délibérer en se complétant, en cas de vacance ou d’empêchement, par l’adjonction d’un magistrat appartenant à un autre tribunal administratif ».
Conformément à sa lettre, cette disposition ne peut être utilisée que pour « compléter » un délibéré, c’est-à-dire autoriser un assesseur extérieur à siéger auprès de la formation de jugement. Elle ne peut, en revanche, être utilisée pour permettre à un magistrat extérieur d’assurer d’autres fonctions juridictionnelles, notamment celles de juge statuant seul. Ainsi, la législation en vigueur ne permet pas de répondre à la nécessité d’un ajustement immédiat et imprévisible, ce qui peut arriver notamment dans le cadre du contentieux de l’éloignement des étrangers.
Cet amendement, qui s’inspire de l’article L. 121-4 du code de l’organisation judiciaire, a donc pour objet de permettre d’assurer, de façon ponctuelle et immédiate, le renfort d’un tribunal administratif par un ou plusieurs magistrats d’une autre juridiction.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Cet amendement vise à renforcer ponctuellement une juridiction administrative dont la charge d’activité s’accroît par la délégation provisoire d’un magistrat administratif – bien évidemment avec son accord – affecté auprès d’une autre juridiction administrative.
Dans la mesure où ce dispositif est temporaire et permet aux juridictions administratives d’effectuer leurs missions dans de meilleures conditions, la commission a émis un avis favorable.
Je signale que l’effectif de chaque juridiction administrative est ajusté d’une année sur l’autre pour renforcer les juridictions dont la charge d’activité s’accroît durablement. La mise en œuvre de cette mesure ne peut donc en aucun cas excéder la durée d’une année.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Sauvadet, ministre. Il me semble que cet amendement favoriserait une souplesse organisationnelle pouvant s’avérer utile pour les tribunaux administratifs, en permettant le renfort, pour une durée déterminée, d’un ou plusieurs magistrats affectés auprès d’une autre juridiction administrative.
Je peux paraître manquer d’allant, mais, au-delà du principe, qui semble intéressant, il m’est difficile de me prononcer en l’absence d’éléments quantitatifs ou statistiques permettant d’analyser la réalité du besoin.
Mme Jacqueline Gourault. Cela nous arrive souvent !
M. François Sauvadet, ministre. Madame la sénatrice, je prends bonne note de votre remarque. (Sourires.)
En l’occurrence, le déficit d’informations que je pointe du doigt me conduit à m’en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 53 bis.
Article 54
(Non modifié)
Il est ajouté à la section 2 du chapitre III du titre III du livre II du même code un article L. 233-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 233-4-1. – Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel peut proposer, lorsque le nombre de nominations susceptibles d’être prononcées au grade de premier conseiller, en application de l’article L. 233-4, n’est pas atteint, de reporter ces nominations sur le grade de conseiller. » – (Adopté.)
Article 55
(Non modifié)
La section 4 du chapitre III du titre III du livre II du même code est ainsi rédigée :
« Section 4
« Recrutement direct
« Art. L. 233-6. – Il peut être procédé au recrutement direct de membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel par voie de concours.
« Le nombre de postes pourvus au titre de ces concours ne peut excéder trois fois le nombre de postes offerts chaque année dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel aux élèves sortant de l’École nationale d’administration et aux candidats au tour extérieur.
« Le concours externe est ouvert aux titulaires de l’un des diplômes exigés pour se présenter au premier concours d’entrée à l’École nationale d’administration.
« Le concours interne est ouvert aux fonctionnaires ainsi qu’aux magistrats de l’ordre judiciaire et autres agents publics civils ou militaires appartenant à un corps ou cadre d’emplois de la catégorie A ou assimilé et justifiant, au 31 décembre de l’année du concours, de quatre années de services publics effectifs. » – (Adopté.)
Article 56
Le chapitre IV du titre III du livre II du code de justice administrative est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l’article L. 234-3 est ainsi rédigé :
« Les présidents occupent les fonctions, dans une cour administrative d’appel, de vice-président, de président de chambre ou d’assesseur ; dans un tribunal administratif, de président, de vice-président ou de président de chambre ; au tribunal administratif de Paris, ils occupent en outre les fonctions de président ou de vice-président de section. Ils peuvent également occuper au Conseil d’État des fonctions d’inspection des juridictions administratives. » ;
2° La première phrase de l’article L. 234-4 est ainsi rédigée :
« Les fonctions de président de chambre dans une cour administrative d’appel, de président d’un tribunal administratif comportant moins de cinq chambres, de président de section au tribunal administratif de Paris ou de premier vice-président d’un tribunal administratif comportant au moins huit chambres sont accessibles aux magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel titulaires du grade de président depuis au moins deux ans. » ;
3° La première phrase de l’article L. 234-5 est ainsi rédigée :
« Les fonctions de président ou de vice-président du tribunal administratif de Paris, de premier vice-président d’une cour administrative d’appel et de président d’un tribunal administratif comportant au moins cinq chambres sont accessibles aux magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel titulaires du grade de président depuis au moins quatre ans. » – (Adopté.)
Article 56 bis (nouveau)
I. – L’article L. 222-4 du code de justice administrative est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les fonctions de président d’une cour administrative d’appel ne peuvent excéder une durée de sept années sur un même poste. »
II. – Au chapitre IV du titre III du livre II du code de justice administrative, après l’article L. 234-5, il est inséré un article L. 234-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 234-6. – Les fonctions de chef de juridiction exercées par les présidents de tribunal administratif ne peuvent excéder une durée de sept années sur un même poste.
« À l’issue de cette période de sept années, les présidents qui n’auraient pas reçu une autre affectation comme chef de juridiction sont affectés dans une cour administrative d’appel de leur choix.
« Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l’effectif des présidents affectés dans la juridiction. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile. »
III. – Les dispositions des I et II s’appliquent aux chefs de juridiction dont la nomination est postérieure à l’entrée en vigueur de la présente loi. – (Adopté.)
Article 56 ter (nouveau)
L’article L. 231-1 du code de justice administrative est ainsi rédigé :
« Art. L. 231-1. – Les membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel sont des magistrats dont le statut est régi par les dispositions du présent livre et, pour autant qu’elles n’y sont pas contraires, par les dispositions statutaires de la fonction publique de l’État. » – (Adopté.)
Article 57
Les quatre premiers alinéas de l’article L. 212-5 du code des juridictions financières sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Peuvent être détachés dans le corps des magistrats de chambre régionale des comptes, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, les magistrats de l'ordre judiciaire, les fonctionnaires appartenant à un corps recruté par la voie de l'École nationale d'administration, les professeurs titulaires des universités, les administrateurs des postes et télécommunications et les fonctionnaires civils et militaires issus de corps et cadres d'emplois appartenant à la même catégorie et de niveau comparable, apprécié au regard des conditions de recrutement ou du niveau des missions prévues par les statuts particuliers. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 57
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Delebarre et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 57
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code des juridictions financières est ainsi modifié :
1° L’article L. 123-5 est ainsi modifié :
a) Les deux premières phrases du premier alinéa sont remplacées par trois phrases ainsi rédigées :
« Le conseil supérieur de la Cour des comptes est saisi des faits motivant la poursuite disciplinaire par le premier président ou par le président de chambre à laquelle est affecté le magistrat en cause. Lorsqu’il est saisi par le premier président, celui-ci ne siège pas, le conseil étant alors présidé par le président de chambre en activité le plus ancien dans son grade. Lorsqu’il est saisi par le président de la chambre à laquelle est affecté le magistrat en cause, et si ce président de chambre est membre du conseil supérieur, il ne siège pas au conseil supérieur où il est remplacé par le président de chambre suivant en termes d’ancienneté dans ce grade. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le secrétariat du conseil supérieur de la Cour des comptes statuant en formation disciplinaire est assuré dans des conditions définies par un décret en Conseil d’État ».
2°) L’article L. 223-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots et deux phrases ainsi rédigées : « ou par le premier président de la Cour des comptes. Lorsqu’il est saisi par le premier président, celui-ci ne siège pas, le conseil étant alors présidé par le président de la mission permanente d’inspection des chambres régionales et territoriales des comptes. Lorsqu’il est saisi par le président de la chambre à laquelle est affecté le magistrat en cause, et si ce président de chambre est membre du conseil supérieur, il ne siège pas au conseil supérieur. »
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le secrétariat du conseil supérieur des chambres régionales des comptes statuant en formation disciplinaire est assuré dans des conditions définies par un décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement a pour objet d’améliorer le fonctionnement des conseils supérieurs de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes en formation disciplinaire.
Les dispositions actuelles ne sont pas conformes à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et des juridictions administratives françaises sur l’impartialité des juridictions. L’amendement vise donc à bien distinguer entre les autorités de saisine et les autorités chargées de présider les instances disciplinaires.
En l’état actuel des textes, cette séparation n’est pas assurée, et il peut arriver que le conseil supérieur, présidé par le Premier président, ait à délibérer d’une affaire disciplinaire dont il aurait été saisi par ce dernier.
Nous proposons que la saisine puisse être le fait soit du Premier président, soit du président de la chambre d’affectation, car en aucun cas l’autorité de saisine ne devrait pouvoir siéger.
Il est également prévu de renvoyer à un décret en Conseil d’État le soin de régler les modalités selon lesquelles est exercée la fonction de secrétariat des conseils supérieurs ; lorsque ces derniers interviennent en formation disciplinaire, les fonctions de secrétariat et de greffe doivent être assurées de façon très précise et complète, ce que ne permet pas le cadre juridique actuel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. L’objet du présent amendement, qui vient d’être clairement explicité par notre collègue Roland Courteau, vise à permettre au Premier président de la Cour des comptes de saisir les conseils supérieurs en matière disciplinaire, sans pour autant lui ouvrir la possibilité de siéger au sein desdits conseils.
En l’état actuel du droit, le Premier président de la Cour ne peut saisir les conseils supérieurs en cette matière que pour les présidents de chambre ou pour les magistrats financiers sans affectation.
La commission a donc émis un avis favorable sur cette extension du pouvoir de saisine du Premier président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Sauvadet, ministre. Monsieur Courteau, les dispositions que vous proposez d’introduire dans le texte sont susceptibles d’améliorer les conditions de saisine et le fonctionnement des conseils supérieurs de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes statuant en formation disciplinaire. Elles permettent de clarifier les pouvoirs de l’autorité de saisine et ceux de l’autorité de sanction.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement s’en remet de nouveau à la sagesse du Sénat.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 57.
Article 57 bis (nouveau)
Après la section 4 du chapitre II du titre Ier du livre Ier du code des juridictions financières, il est inséré une section 4 bis ainsi rédigée :
« Section 4 bis
« Participation de magistrats des chambres régionales et territoriales des comptes aux travaux de la Cour des comptes
« Art. L. 112-7-1. – Sur décision du premier président de la Cour des comptes, des magistrats des chambres régionales et territoriales des comptes peuvent participer aux travaux de la Cour des comptes à temps plein ou à temps partiel, y compris dans le cadre des procédures juridictionnelles, sur leur demande et après avis de leur président de chambre. » – (Adopté.)
Article 57 ter (nouveau)
Au dernier alinéa de l’article L. 122-2 du code des juridictions financières, le mot : « quarante » est remplacé par le mot : « quarante-cinq ».
M. le président. L’amendement n° 102, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre.
M. François Sauvadet, ministre. Le Gouvernement est défavorable à la mesure introduite par la commission des lois du Sénat, qui a pour objet de relever de quarante à quarante-cinq ans l’âge minimal requis pour être nommé conseiller maître au tour extérieur à la Cour des comptes. Les conditions actuelles d’accès à ce grade sont satisfaisantes pour garantir à la Cour les recrutements diversifiés dont elle a besoin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. La commission des lois a inséré cet article pour répondre à deux préoccupations : l’harmonisation des règles applicables aux juridictions administratives et financières et, plus fondamentalement, la prise en compte de l’expérience nécessaire à l’exercice des missions d’un conseiller maître nommé au tour extérieur à la Cour des comptes, laquelle requiert un tel relèvement de l’âge minimal.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Sauvadet, ministre. Madame le rapporteur, si je veux bien entendre votre premier argument, je me refuse à considérer que l’âge est un indicateur d’expérience et de compétence.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. Naguère, on était censé atteindre la sagesse à trente-cinq ans, âge suffisant pour devenir sénateur et en assumer les responsabilités ! Je partage donc l’avis de M. le ministre.
Madame le rapporteur, si vous voulez vraiment passer de quarante à quarante-cinq ans, tenez-vous-en à la première partie de votre explication et épargnez-nous la seconde.
Personne, à quarante ans, n’aurait, selon vous, l’expérience requise : qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Moi qui croyais que le Sénat venait d’évoluer…
La valeur n’attend pas le nombre des années, dit-on. Supprimons donc cet article, c’est une question de principe. Si tout fonctionne bien aujourd’hui, pourquoi opérer un tel relèvement d’âge ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Par souci d’harmonisation !
M. Jean-Jacques Hyest. Dans ce cas, harmonisons dans l’autre sens !
M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour explication de vote.
M. Jean-Vincent Placé. Je découvre un peu le sujet en direct, mais, ayant moi-même quarante-trois ans, vous comprendrez que ce débat me préoccupe. (Sourires.) Cela dit, je ne cherche pas à être nommé au tour extérieur, car ma fonction d’élu me satisfait amplement.
Plus sérieusement, je suis surpris par les arguments qui ont été échangés. Je ne ferai pas plus de commentaires, sinon pour indiquer que je serais même plutôt favorable à un abaissement de l’âge requis à trente-cinq ans. Je voterai donc l’amendement du Gouvernement.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Ils ne doivent pas arriver trop tôt à la Cour des comptes, monsieur le ministre !
M. le président. Je mets aux voix l’article 57 ter.
(L’article 57 ter est adopté.)
Article 57 quater (nouveau)
L’article L. 122-5 du code des juridictions financières est ainsi modifié :
1° La première phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée :
« Chaque année, sont nommés conseiller référendaire à la Cour des comptes au plus deux magistrats de chambre régionale des comptes ayant au moins le grade de premier conseiller, âgés de trente-cinq ans au moins et justifiant, à la date de nomination, de dix ans de service public effectifs. » ;
2° Au cinquième alinéa, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « deux » ;
3° Au sixième alinéa, les mots : « a émis un avis » sont remplacés par les mots : « a émis, dans une proportion double au nombre de postes à pourvoir, un avis favorable ».
M. le président. L’amendement n° 103, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre.
M. François Sauvadet, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cette mesure introduite en commission des lois du Sénat, qui modifie substantiellement les conditions de nomination au grade de conseiller référendaire de la Cour des comptes.
Les conditions actuelles d’accès à ce grade sont satisfaisantes pour garantir à la Cour les recrutements diversifiés dont elle a besoin. Il n’y a donc pas lieu de les modifier.
Puisque l’on peut être élu sénateur à quarante ans, pourquoi ne pourrait-on pas accéder à d’autres responsabilités au même âge ? Franchement, je m’étonne de l’argumentation qui a été développée.
Il convient de tenir compte, pour les carrières professionnelles dans la haute fonction publique, des compétences de chacun et des conditions d’accès à certains grades. Or vous décidez, madame le rapporteur, de mettre un coup d’arrêt aux perspectives d’évolution, sous prétexte qu’à quarante-cinq ans on accéderait tout juste aux rivages de la compétence permettant d’assumer des hautes responsabilités. Voilà une curieuse vision de la réalité ! Dois-je en conclure que vous n’êtes pas hostile au « plafond de verre » ?
Pour ma part, je souhaite offrir de réelles opportunités de carrière à ceux qui ont fait le choix d’un métier particulier, celui d’être au service du public et de l’intérêt général, fût-ce dans les hautes fonctions. À persister dans cette voie, vous risquez de décourager un certain nombre de grands talents, qui, ne voyant pas leur carrière progresser, seront amenés à faire d’autres choix pour trouver un épanouissement professionnel plus marqué.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement s’en est remis à votre sagesse sur plusieurs amendements. Puissiez-vous à nouveau faire preuve de sagesse pour celui-ci ! Après tout, Laurent Fabius ne fut-il pas nommé Premier ministre à trente-huit ans ?