M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces éléments de réponse. J’ai bien noté que vous étiez prêt à agir de concert avec les présidents des régions concernées sur les points de blocage immédiats, notamment pour résoudre le problème de la régularité. Le remplacement du matériel roulant s’inscrit dans ce cadre.
Malgré tout, je ne saurais trop insister sur l’importance que revêt la réalisation de la LNPN dans sa globalité. Cet axe doit être prolongé jusqu’au Havre, et ainsi desservir la Basse-Normandie. Je le répète devant mon collègue Philippe Bas ici présent : c’est un enjeu considérable. (M. Philippe Bas acquiesce.)
J’ai cité en effet l’actuel Président de la République : alors qu’il était encore candidat, il s’était engagé à poursuivre ce projet lancé sous le précédent quinquennat. Nous sommes extrêmement attentifs et vigilants sur ce dossier, d’autant qu’en régions certains collègues sénateurs – notamment notre président de région, Alain Le Vern – parlent souvent exclusivement du nœud mantois et de la gare de Rouen. Ils n’évoquent jamais le projet dans sa globalité du projet, ou alors ils le font avec de grandes réserves.
Je le répète, ce dossier mobilise toute notre attention, eu égard à son ampleur nationale, Rouen-Le Havre devant constituer le grand avant-port de Paris. Il s’agit là un enjeu de compétitivité économique auquel les entreprises accordent une importance capitale.
Quoi qu’il en soit, je vous remercie des éléments de réponse que vous nous avez communiqués.
implantation de centrales photovoltaïques dans le nord de la france
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, auteur de la question n° 281, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
M. Yves Daudigny. Monsieur le ministre, le Président de la République a érigé la transition énergétique en priorité de son mandat pour « faire de la France la nation de l’excellence environnementale ».
Conformément à la feuille de route pour la transition écologique adoptée lors de la Conférence environnementale qui s’est déroulée les 13 et 14 septembre dernier, Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a présenté, au début du mois de janvier 2013, des mesures d’urgence pour la relance de la filière photovoltaïque.
Nous ne pouvons qu’adhérer à l’objectif ambitieux et indispensable d’un doublement des volumes ciblés, conduisant au développement d’au moins 1 000 mégawatts de projets solaires dans notre pays au cours de l’année 2013.
Toutefois, au regard des résultats de l’appel d’offres portant sur la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à partir de l’énergie solaire d’une puissance supérieure à 250 kilowatts crête, lancé en février 2012, nous dressons l’amer constat qu’aucun dossier n’a été retenu au nord de la Loire.
Pourtant, de la lecture des mesures d’urgence annoncées, je retiens avec attention l’objectif suivant : dans le souci de préserver les terres agricoles, le prochain appel d’offres pour les centrales au sol doit privilégier les programmes de développement sur des sites dégradés. De tels projets de centrales photovoltaïques constituent en effet de belles occasions pour la reconversion de sites.
Telles sont la philosophie et l’ambition des élus locaux du département de l’Aisne travaillant sur la reconversion du site de défense de Laon-Couvron, que l’armée vient de quitter. Alors que le contrat de redynamisation du site prévoit un plan d’action de 38 millions d’euros, l’implantation d’un tel équipement photovoltaïque est envisagée. Toutefois, vous le comprenez, les résultats du dernier appel d’offres inquiètent vivement l’ensemble des acteurs.
Les industriels du secteur, mais également les élus locaux, s’interrogent donc légitimement sur les critères d’attribution et demandent que les territoires où l’ensoleillement est plus limité ne soient pas exclus de cet effort nécessaire de développement du photovoltaïque.
Mme la ministre a appelé à un véritable patriotisme écologique. Monsieur le ministre, les élus des territoires du nord de la France veulent vous accompagner dans cette voie et s’associer à cette démarche.
Face au défi de la désindustrialisation, nous ne baissons pas les bras, nous travaillons à l’élaboration de projets d’avenir. Nous nous demandons cependant si nos territoires peuvent s’inscrire, au même titre que toute autre région française, dans le défi de la transition énergétique. Pouvez-vous, monsieur le ministre, garantir une égalité de traitement dans le prochain appel d’offres pour les grandes installations, quel que soit le niveau d’ensoleillement ?
Ne pouvons-nous imaginer deux lots géographiques pour ce nouvel appel d’offres, concernant l’un le nord et l’autre le sud de la France ?
Nos territoires du nord de la Loire, monsieur le ministre, seront-ils des acteurs de la relance de la filière photovoltaïque, relance indispensable pour atteindre l’objectif de mix énergétique fixé par le Président de la République à l’horizon 2025 ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, Delphine Batho vous remercie de votre question. Elle m’a demandé de bien vouloir vous apporter quelques éléments de réponse, même si vous auriez sans doute préféré l’avoir en face de vous, ce que je puis très bien comprendre d'ailleurs. (Sourires.)
La transition énergétique est une priorité du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie pour 2013. Dans l’attente des conclusions du débat national sur la transition énergétique et du projet de loi de programmation qui en résultera d’ici à la fin de 2013, Delphine Batho a pris trois mesures d’urgence le 7 janvier dernier, afin de rendre du souffle à la filière du photovoltaïque.
Tout d’abord, le Gouvernement a relancé des appels d’offres automatiques pour les moyennes installations, avec un cahier des charges révisé qui intègre, notamment, le bilan carbone des panneaux photovoltaïques.
Ensuite, pour les petites installations, l’évolution des tarifs de rachat a été prévue. Celles d’entre elles qui respectent un ou deux critères européens liés à la production ou à l’assemblage bénéficient d’un système de bonification.
Enfin, pour les grandes installations photovoltaïques, d’une puissance supérieure à 250 kilowatts, un nouvel appel d’offres sera prochainement lancé afin de favoriser les technologies innovantes et le développement économique local. Le volume est fixé à 400 mégawatts et sera destiné, d'une part, aux technologies innovantes, c’est-à-dire au photovoltaïque à concentration et au photovoltaïque avec suivi du soleil, et, d'autre part, aux technologies matures sur ombrières et sur toitures.
Concernant les centrales au sol, l’appel d’offres privilégiera le développement sur des sites dégradés comme les friches industrielles, les anciennes carrières ou les décharges, afin d’éviter les conflits d’usage, notamment avec les terres agricoles. L’appel d’offres valorisera la compétitivité-coût des projets proposés, mais aussi leur contribution à la protection de l’environnement et du climat, ainsi qu’à la recherche, au développement et à l’innovation.
Ces critères ont vocation à soutenir rapidement la filière solaire française dans un contexte de concurrence déloyale que nous connaissons tous.
Un second appel d’offres sera lancé au cours de l’année 2013, ciblant notamment d’autres technologies innovantes dans le domaine solaire.
En ce qui concerne l’appel d’offres que vous évoquez, monsieur le sénateur, il relève de l’ancienne procédure. Les projets lauréats ont été sélectionnés sur la base de plusieurs critères, dont, notamment, le prix proposé, l’impact sur l’environnement, la contribution du candidat aux actions de recherche et développement, les délais de réalisation et l’acceptabilité locale.
Dans un souci de maîtrise des coûts pour le consommateur d’électricité, il n’a pas été retenu de critère géographique destiné à encourager le développement du photovoltaïque dans les zones peu ensoleillées du territoire par une régionalisation des tarifs d’achat.
Nous souhaitons que les projets qui n’ont pu être retenus au titre de cette ancienne procédure puissent très vite se positionner sur les prochains appels d’offres. Les services du ministère se tiennent à votre disposition et à la disposition des porteurs de projets pour les aider à s’approprier ces nouvelles procédures.
Vous êtes élu dans une région que vous qualifiez de peu ensoleillée. Je suis moi-même élu de Boulogne-sur-Mer et j’ai des panneaux photovoltaïques sur ma toiture. Votre remarque m’apparaît donc précise et judicieuse. Votre région se situe finalement dans le sud !
M. Yves Daudigny. Dans le sud du nord !
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. En tout cas, au même niveau que le sud de l’Allemagne, qui elle-même est très dotée en photovoltaïque. Cela signifie que nos régions peuvent également bénéficier d’un développement raisonné et raisonnable de cette énergie propre.
Le débat national sur la transition énergétique, qui se déroulera bientôt dans chaque région, sera ouvert à tous et abordera tous les sujets, dont le potentiel de développement des énergies renouvelables région par région. Ce sera l’occasion de développer des installations solaires de grande taille dans les régions les moins ensoleillées.
Nos régions sont peut-être moins ensoleillées, mais elles sont tout aussi attractives !
M. Jean-Pierre Sueur. Surtout Boulogne-sur-Mer, qui ouvre le chemin dans de nombreux domaines. Vive Boulogne ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Merci, monsieur le ministre, des précisions que vous avez bien voulu apporter et qui, sans aucun doute, ouvrent des perspectives nouvelles en comparaison de ce qui est arrivé à l’appel d’offres évoqué dans ma question.
L’exemple de l’Allemagne est judicieux. Il prouve que l’installation de centrales photovoltaïques dans des régions qui ne sont pas plus ensoleillées que le nord de la France, où se situe le département de l’Aisne, est économiquement possible.
En effet, il ne faudrait pas en arriver à une situation absurde dans laquelle, demain, toutes les centrales photovoltaïques étant dans le sud de la France, nous serions contraints de construire des lignes à haute tension pour transporter ce courant vers le nord. L’énergie photovoltaïque doit être produite et consommée localement, vous l’avez dit vous-même.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir ouvert ainsi des perspectives intéressantes pour le nord de la France.
prise en compte des derniers répertoires d'immeubles localisés connus pour le calcul de la population servant de base à la dgf
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, auteur de la question n° 227, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
M. Vincent Delahaye. Ma question porte sur le recensement de la population par l’INSEE.
Le problème du logement est une question centrale pour nos concitoyens, particulièrement en Île-de-France. Le Gouvernement s’est engagé à construire 500 000 logements par an. J’espère que cette promesse sera tenue. En tout cas, nous y serons très attentifs.
En Île-de-France, 70 000 logements doivent être construits. À cette fin, il est nécessaire de s’appuyer sur les maires. Siégeant dans une assemblée aussi attentive aux collectivités territoriales, nous sommes sensibles aux efforts de ces dernières en vue de construire ces logements.
Toutefois, vous le savez, construire du logement n’est pas toujours aisé. Tout d'abord, ce n’est pas toujours populaire. Le réflexe des habitants consiste souvent à considérer que les constructions de logements sont bien nécessaires, mais dans les autres municipalités !
De plus, nous sommes confrontés à des textes et des normes de plus en plus complexes.
Enfin, cela pose un défi financier. Bâtir des logements impose de construire aussi des crèches et des écoles, et le coût du processus dans son ensemble dépasse souvent les recettes que procurent les nouveaux habitants.
Depuis 2002, l’INSEE évalue la population en effectuant un recensement sur la base d’enquêtes pluriannuelles menées sur des échantillons de 8 %. Sans remettre en cause cette méthode, car je comprends qu’on factorise un nombre de logements par un taux d’occupation moyen calculé sur cinq ans, je voudrais soulever la question de la date que l’INSEE prend en compte comme référence du nombre de logements.
Au 1er janvier 2013, le chiffre référence considéré est issu de la moyenne du nombre de logements recensé dans la commune entre le 1er juillet 2009 et le 1er juillet 2010, ce qui équivaut peu ou prou au nombre de logements au 1er janvier 2010. L’évaluation a donc trois ans de retard.
Dans les communes qui construisent beaucoup, comme Massy, mais aussi Évry et d’autres villes d’Île-de-France, les nouveaux logements sont pris en compte avec beaucoup de retard.
Cette situation entraîne des conséquences financières non négligeables, non seulement sur la dotation globale de fonctionnement, la DGF, mais aussi sur le calcul de la péréquation, qui prend de plus en plus d’importance et dont le calcul est basé sur le potentiel financier par habitant.
Dans ma commune, les chiffres au 1er juillet 2012 sont déjà très bien connus, par mes services comme par l’INSEE, qui a disposé de six mois pour les vérifier – un délai raisonnable au vu des moyens modernes de communication et de statistique disponibles. Si cette date avait été choisie comme référence, la population légale de Massy serait plus importante d’à peu près 1 000 habitants, dans 2 300 logements, selon mes calculs.
Les nouveaux habitants sont donc pris en compte dans le potentiel financier à partir duquel est calculée la contribution à la péréquation de ma commune, en revanche, ils ne sont pas pris en considération dans la population légale sur la base de laquelle est calculée la DGF. Ma commune contribue donc à financer d’autres municipalités qui, elles, construisent beaucoup moins de logements.
Monsieur le ministre, pouvez-vous demander à l’INSEE, qui dépend de votre ministère, de prendre comme référence un chiffre datant non de trois ans, mais de six mois, qui est vérifiable et sur lequel il est possible de s’accorder très rapidement ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous m’avez interrogé sur la prise en compte des derniers répertoires d’immeubles localisés connus pour l’évaluation de la population servant de base au calcul de la DGF.
Vous avez raison de souligner qu’il existe un décalage de trois ans entre la date de référence des populations légales et l’année en vigueur.
Même s’il peut encore paraître important, notamment pour les communes où la population est en forte croissance, comme Massy, ce décalage de trois ans constitue une nette amélioration par rapport au dispositif précédent, dans lequel près de dix ans séparaient deux recensements de la population.
La durée de ce décalage s’explique par les contraintes fortes relatives au calcul. Les méthodes de calcul de la population doivent assurer l’égalité de traitement entre les communes en fournissant des données de population avec une robustesse équivalente, quelle que soit la collectivité.
Dans les communes de moins de 10 000 habitants, l’estimation s’appuie sur la disponibilité des données sur la taxe d’habitation. Dans le cas des communes de 10 000 habitants et plus, l’estimation de la population repose sur la mise à jour du RIL, et l’estimation d’un nombre moyen de personnes par logement.
Le nombre de logements de la commune est certes connu, mais cela ne suffit pas à fournir une estimation fiable de la population, même si on en a une idée. Le calcul du nombre moyen de personnes par logement, élément très important dans le calcul de la population, est ardu et nécessite une expertise. En outre, ce nombre diminue régulièrement sous l’effet d’un double mouvement sociologique que nous connaissons partout, et notamment en Île-de-France : de plus en plus de personnes vivent seules et il y a de moins en moins de familles nombreuses.
La commission nationale d’évaluation du recensement de la population, ou CNERP, présidée par le sénateur Jean-Claude Frécon et dont sont membres les représentants des associations d’élus, a examiné, au cours de sa réunion du 10 mai 2012, la possibilité d’avancer la date de référence des populations légales.
Elle a conclu que, au prix de quelques investissements méthodologiques relativement lourd, il était possible d’avancer la date de référence des populations légales d’un an au maximum. Je suis bien conscient de ne pas répondre ainsi tout à fait à votre attente.
La CNERP a prévu de lancer une concertation pour recueillir l’avis des associations d’élus et demander à l’INSEE de poursuivre ses travaux et de réaliser des simulations afin de tester la force, la robustesse et la précision des estimations.
Je pense que votre attente est ainsi prise en considération, et j’espère que ces travaux en cours permettront de rapprocher votre point de vue de la réalité statistique.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions. Je m’attendais à ce que vous annonciez un gain d’un an et je trouve que c’est déjà un pas dans la bonne direction. L’ancien système était archaïque, un recensement tous les neuf ans ne permettant pas du tout de prendre en compte les évolutions de la population. Le système actuel permet d’être plus proche de la réalité et, avec un an de moins, on en sera plus proche encore.
Je ne remets pas en cause le taux moyen d’occupation par logement, qui résulte d’enquêtes réalisées dans chaque commune sur les cinq dernières années.
Je suis sûr que les problèmes techniques seront résolus peu à peu et j’espère que nous parviendrons progressivement à prendre en compte le chiffre le plus proche de la réalité, c’est-à-dire celui des six derniers mois – celui du 1er juillet de l’année précédente lorsque le calcul est fait le 1er janvier. En tout cas, monsieur le ministre, je prends note du progrès que vous avez annoncé, en espérant que votre propos sera suivi d’effets.
Enfin, je souhaite que l’INSEE fasse preuve d’une transparence encore plus grande dans les informations fournies aux collectivités territoriales, s’agissant notamment des corrections apportées au répertoire d’immeubles localisés.
En effet, si certaines corrections sont parfaitement compréhensibles, d’autres interviennent au dernier moment et ne sont ni expliquées ni justifiées. Dans ma commune, ces corrections inexpliquées peuvent concerner jusqu’à cent ou deux cents logements. Je serais donc ravi, monsieur le ministre, si vous pouviez donner à l’INSEE l’instruction de fournir davantage d’explications aux communes.
sécurité et délinquance en nouvelle-calédonie
M. le président. La parole est à M. Hilarion Vendegou, auteur de la question n° 94, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Hilarion Vendegou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la Nouvelle-Calédonie est en proie à un mal que tous les élus connaissent bien : une délinquance parfois très violente qui ne cesse de croître, notamment parmi les jeunes.
De nombreux facteurs entrent en jeu. Il y a, bien sûr, le chômage, qui laisse nos jeunes désœuvrés et livrés à eux-mêmes. Il y a surtout les ravages causés par la consommation d’alcool, dont la vente illicite ne semble pas pouvoir être enrayée, et aussi, malheureusement, le trafic de drogue.
Le cannabis et l’alcool provoquent bien des drames en Nouvelle-Calédonie, notamment dans les îles. À cet égard, un reportage diffusé mercredi dernier dans le journal de vingt heures de France 2 et intitulé « Les Ravages de l’alcool et de la drogue sur les routes de Nouvelle-Calédonie » fut particulièrement édifiant.
Bien sûr, la police et la gendarmerie font de leur mieux, mais ce n’est pas suffisant. Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour nous aider sur ces sujets sensibles ? Je vous remercie par avance de votre réponse, très attendue en Nouvelle-Calédonie.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, je prendrai un peu de temps pour vous répondre, car vous m’avez interrogé sur un problème important : la délinquance, parfois très violente, qui ne cesse de croître en Nouvelle-Calédonie, notamment parmi les jeunes.
Pour répondre aux exigences de sécurité légitimes de vos concitoyens et de leurs élus, mon collègue Victorin Lurel et moi-même sommes déterminés à garantir l’ordre républicain et à renforcer la tranquillité et la sécurité des populations dans tous les territoires des outre-mer.
La délinquance appelle des réponses au fond, qui prennent du temps, impliquent tous les leviers de l’action publique et mobilisent l’ensemble des acteurs concernés ; je pense notamment aux politiques de prévention et d’éducation. Reste que si la réponse policière n’est pas suffisante à elle seule, elle est indispensable. Accompagnée de la réponse judiciaire, elle doit être ferme et efficace.
Comme vous l’avez signalé, monsieur le sénateur, plusieurs formes de délinquance sont préoccupantes en Nouvelle-Calédonie. C’est le cas, par exemple, des vols avec violence, essentiellement commis par de jeunes majeurs ou des mineurs multiréitérants, souvent en état d’ivresse. Le fait est que la consommation excessive d’alcool par une partie de la jeunesse est l’une des causes importantes de la délinquance. Pour les seuls huit premiers mois de l’année, les services de police et de gendarmerie ont constaté 3 060 ivresses publiques et manifestes.
Pour lutter contre ce phénomène et contre la délinquance qui l’accompagne, les forces de l’ordre doivent agir dans plusieurs directions.
Policiers et gendarmes ont d’ores et déjà renforcé leur présence sur la voie publique ; s’il faut faire plus, nous le ferons. Divers dispositifs spécifiques ont été mis en œuvre pour renforcer l’action des forces de sécurité : des opérations anti-délinquance menées conjointement par la police, la gendarmerie et les douanes sont organisées chaque mois sur réquisition du parquet de Nouméa et des opérations mixtes de sécurité sont menées régulièrement par la police et la gendarmerie avec les polices municipales qui existent.
À Nouméa, des patrouilles renforcées sont organisées les nuits de fin de semaine en raison des rassemblements importants de jeunes gens alcoolisés sur le littoral. En outre, des mesures préventives de restriction de vente d’alcool sont prises le week-end entre midi et vingt et une heures ; vous me direz, monsieur le sénateur, si ces mesures sont bien appliquées.
Par ailleurs, l’alcool étant une des causes principales des accidents de la circulation, les opérations de contrôle d’alcoolémie ont été intensifiées. C’est ainsi que, depuis le mois de janvier dernier, près de 1 000 opérations ont été réalisées par les policiers et les gendarmes, conduisant à 30 000 dépistages préventifs. De plus, la gendarmerie a créé en août dernier un poste d’officier adjoint chargé de la sécurité routière afin d’aider les instances locales à développer des dispositifs adaptés. Mon administration, mon cabinet et moi-même sommes disposés à accueillir votre avis sur ce type de dispositifs.
La prévention est un élément essentiel de cette action. À Nouméa, le contrat local de sécurité signé au début de l’année dernière a fixé deux axes majeurs : la prévention de la délinquance des mineurs, qui passe par des diagnostics de sécurité dans les établissements scolaires ainsi que par le signalement et le suivi des jeunes en rupture de scolarité, et la lutte contre l’alcoolisme et la toxicomanie.
Dans ce cadre, une permanence de médecin a été mise en place à l’hôtel de police, du lundi au samedi. Des entretiens en addictologie, à la suite de suspensions de permis de conduire tendent également à se développer. Enfin, en Nouvelle-Calédonie comme en métropole, les brigades motorisées de la gendarmerie interviennent auprès des entreprises ou des établissements scolaires en matière de prévention contre l’alcoolisme.
Comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, ce phénomène d’alcoolisation, fréquemment conjugué à une consommation de cannabis cultivé localement, provoque des faits de délinquance souvent gratuits, commis par une frange de la jeunesse – dans de nombreux cas, des mineurs multiréitérants. Pour nombre de ces jeunes, venus de zones rurales, l’échec scolaire et le déracinement provoquent une désocialisation.
Certes, la Nouvelle-Calédonie ne connaît guère de trafic de drogue au sens métropolitain du terme, mais plutôt des deals relevant davantage du troc, le cannabis local étant devenu, me semble-t-il, un moyen de paiement pour acheter de l’alcool. Reste que la drogue constitue un problème. L’action des forces de l’ordre permet d’importantes saisies dans les zones urbaines, mais aussi dans le reste de l’archipel, avec l’appui de la section aérienne et du peloton de surveillance et d’intervention à cheval de la gendarmerie. Les douanes de l’aérodrome de Nouméa-Magenta sont également en première ligne dans ce combat et le parquet de Nouméa apporte une réponse pénale à chaque infraction à la législation sur les stupéfiants.
Une importante action est aussi menée sur le plan de la prévention, dans le cadre du partenariat établi entre les forces de police et de gendarmerie et l’éducation nationale. C’est ainsi qu’une vingtaine de formateurs anti-drogue de la police et de la gendarmerie ont mené, au cours de l’année 2011, quelque 56 opérations de sensibilisation au profit de près de 2 000 mineurs.
Tels sont, monsieur Vendegou, les moyens mis en œuvre pour s’attaquer aux maux que vous avez décrits. Soyez sûr que le Gouvernement est attentif aux problèmes que vous avez soulevés et que je reste à votre disposition, ainsi qu’à celle de tous les élus de Nouvelle-Calédonie, pour améliorer les dispositifs en vigueur, mesurer leur efficacité et mieux répondre aux attentes des habitants de l’archipel.
M. le président. La parole est à M. Hilarion Vendegou.
M. Hilarion Vendegou. Monsieur le ministre, j’ai bien entendu votre réponse et je veux croire à votre volonté de faire évoluer la situation, afin d’assurer aux Calédoniens la tranquillité à laquelle ils aspirent de la plus légitime des façons. Aussi, je serai très attentif aux mesures que vous prendrez pour lutter plus efficacement encore contre l’insécurité et la délinquance qui rongent notre société. D’avance, monsieur le ministre, je vous remercie pour la Nouvelle-Calédonie de tous les efforts que vous voudrez bien entreprendre.
application de la législation sur les « devis modèles » relatifs aux obsèques
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question n° 290, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la vie, vous le savez, est pleine d’imprévus… (Sourires.) Il y a plus de vingt ans, ayant eu l’honneur d’être nommé secrétaire d’État aux collectivités locales dans un ministère que, cher Manuel Valls, vous connaissez bien, j’ai trouvé sur mon bureau un dossier auquel je ne m’attendais pas : la réforme du monopole des pompes funèbres.
Comme l’avait très bien montré un rapport de trois inspections générales, il existait dans ce domaine un système tout à fait fallacieux, conjuguant un pseudo-monopole biaisé avec une concurrence faussée. Nous nous sommes donc mis au travail, avec le soutien de Pierre Bérégovoy tout particulièrement. Finalement, le Parlement a adopté la loi du 8 janvier 1993 modifiant le titre VI du livre III du code des communes et relative à la législation dans le domaine funéraire. Cette loi a instauré la concurrence entre les différents opérateurs agréés et redéfini le service public dans ce domaine extrêmement sensible.
Au cours de la dernière lecture de ce texte, j’ai acquis la conviction que certaines dispositions auxquelles je tenais beaucoup, relatives aux prix et, notamment, aux devis types, relevaient du domaine réglementaire. Autrement dit, un règlement national ou municipal pourrait prévoir l’établissement de devis modèles.
Pourquoi ces devis types sont-ils indispensables ? Malheureusement, chaque famille française peut être frappée par un deuil. Or, en pareille occasion, il faut prendre beaucoup de décisions en moins de vingt-quatre heures. Bien entendu, toutes les entreprises du secteur doivent fournir des devis – la loi le prévoit. Mais qui, touché par le décès d’un être cher, va se plonger dans la lecture de devis longs de quarante pages, écrits en petits caractères et largement incompréhensibles, en tout cas difficilement comparables ?
J’ai toujours représenté aux professionnels du domaine funéraire, que je connais bien, que la transparence était dans l’intérêt de tous. Or pour que celle-ci soit assurée, il faut que l’on puisse très simplement connaître les prix proposés par les divers opérateurs agréés pour des prestations clairement définies.
N’étant pas parvenu à mes fins il y a quelque temps, je suis revenu à la charge au Sénat – vous me connaissez, monsieur le ministre… Avec le concours de nombreux parlementaires, en particulier de M. Lecerf et, à l’Assemblée nationale, de M. Gosselin, nous avons réussi à faire voter à l’unanimité par le Sénat et par l’Assemblée nationale la loi du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire.
Entre autres mesures très importantes, touchant notamment à la crémation, cette loi fait obligation à tous les opérateurs funéraires agréés de déposer chaque année dans les mairies des devis modèles par lesquels ils s’engagent à fournir, à un prix fixé pour l’année, des prestations de référence. Du temps de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, nous sommes parvenus, après un long dialogue, en particulier avec les services de la direction générale des collectivités locales, à la parution de l’arrêté du 23 août 2010, qui définit ces prestations de manière extrêmement claire.
La loi ayant été votée et l’arrêté ayant été publié, toutes les entreprises agréées ont aujourd'hui l’obligation d’indiquer dans les mairies, dans l’ordre prévu par l’arrêté, les prix qu’elles pratiquent pour chacune des prestations. Quant aux mairies, en vertu de la loi, elles sont tenues de mettre ces devis modèles à la disposition des citoyens, soit à la mairie, soit, plus simplement, sur leur site Internet.
Or j’ai malheureusement constaté que ces dispositions étaient assez peu appliquées. L’agrément des entreprises qui ne respectent pas la loi ne leur est pas retiré, et un certain nombre de communes omettent, peut-être par méconnaissance des dispositions de la loi, de mettre les devis modèles à la disposition de leurs habitants.
Si je vous interpelle sur ce sujet, monsieur le ministre, c’est parce que je suis convaincu que la transparence des prix est nécessaire. Les prix de certaines cérémonies d’obsèques, qu’il s’agisse d’inhumation ou de crémation, peuvent être très élevés. Il existe aujourd'hui une tendance au low cost, mais ces prix très bas correspondent à des prestations qui ne respectent pas toujours – je pèse mes mots – la dignité qui s’impose lors de ces cérémonies. Il faut de la clarté et de la rigueur, afin de garantir le respect du service public et des familles ; cela passe par les mesures de transparence que j’ai évoquées.
Monsieur le ministre, je pense que vous avez beaucoup réfléchi à ces questions, et je vous remercie par avance de la réponse que vous pourrez m’apporter.