M. le président. Mes chers collègues, la présence d’au moins trente signataires ayant été constatée, il peut être procédé à la vérification du quorum.
Vérification du quorum
M. le président. Mes chers collègues, la vérification du quorum relève normalement de la compétence du bureau. Cependant, l’Instruction générale du bureau, telle qu’elle a été modifiée par le bureau le 7 octobre 2009, me donne la possibilité de procéder moi-même à cette vérification, pour peu que je sois assisté de deux secrétaires du Sénat.
Je vais procéder à la vérification du quorum et j’invite donc Mme Catherine Procaccia et M. Gérard Le Cam, secrétaires de séance, à venir m’assister.
(La vérification du quorum a lieu.)
M. le président. Mes chers collègues, je constate, avec les deux secrétaires de séance, que la majorité absolue des sénateurs n’est pas présente.
En application du XIII bis de l’Instruction générale du bureau, cette constatation étant faite, le Sénat n’est pas en nombre pour procéder au vote. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Aussi, conformément au règlement, je vais suspendre la séance ; elle sera reprise à quinze heures, pour les questions d’actualité au Gouvernement. Nous reprendrons ensuite la discussion du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, avec le vote sur les deux amendements identiques de suppression de l’article 4 bis.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Bel
M. le président. La séance est reprise.
3
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse.
Je demande à chacune et à chacun de se plier à cette règle, qui est absolument nécessaire au bon déroulement des questions d’actualité.
tibet
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Ma question s'adresse à Mme la ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. (Exclamations sur certaines travées de l'UMP.)
Madame la ministre, le Président de la République effectuera son premier voyage officiel en Chine les 25 et 26 avril prochain. Nous ne disposons pas encore d’un ordre du jour précis, mais il semble que ce déplacement vise notamment à stimuler les relations commerciales entre nos deux pays.
De fait, ce sont là des enjeux importants. Ils ne doivent cependant pas en occulter d’autres, en particulier ceux qui se rapportent au respect des libertés civiles et des droits humains, auxquels notre pays a toujours été très attaché.
À ce sujet, et sans réduire la question des libertés en Chine à ce seul point, la situation actuelle du Tibet est particulièrement préoccupante.
Depuis le mois de février 2009, 112 Tibétains se sont immolés par le feu pour protester contre les atteintes graves aux droits humains au Tibet. Ce décompte macabre évolue malheureusement de jour en jour. Il traduit le désespoir absolu d’un peuple qui refuse de voir sa culture et son avenir annihilés.
Depuis de nombreux mois, l’accès à cette région est totalement fermé aux étrangers, qu’il s’agisse de diplomates, d’organisations humanitaires, de journalistes ou de simples voyageurs.
Inquiet de cette situation, le Sénat, à l’initiative de son groupe d’information internationale sur le Tibet, a adopté le 27 novembre dernier une résolution européenne relative à l’action européenne en faveur de la protection des droits des Tibétains.
Cette résolution met notamment l’accent sur un recours disproportionné à la force face aux manifestations au Tibet et sur l’impasse actuelle des pourparlers entre le gouvernement chinois et les émissaires du dalaï-lama. Elle demande au Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité de confier au Représentant spécial de l’Union européenne pour les droits de l’homme, M. Lambrinidis, un mandat pour faire de la question tibétaine une priorité de son action.
La France n’est pas la seule à se préoccuper ainsi de la situation au Tibet. Plusieurs autres pays ont également voté des résolutions allant dans le même sens.
Cette semaine, lors d’un voyage officiel en Chine, la Première ministre australienne n’a pas manqué d’exprimer auprès du président Xi Jinping sa vive préoccupation quant au respect des droits de l’homme en Chine, au Tibet en particulier.
Madame la ministre, ma question porte sur trois points précis.
Premièrement, le Président de la République entend-il lui aussi évoquer avec son homologue chinois la question des droits de l’homme en Chine et à l’intérieur du Tibet ?
Deuxièmement, le Président de la République est-il favorable à une médiation européenne, ainsi que le propose le Sénat dans la résolution précitée ?
Troisièmement, enfin, le Président de la République envisage-t-il, dans un avenir proche, de recevoir le dalaï-lama en France ou, à tout le moins, M. Lobsang Sangay, Premier ministre du gouvernement tibétain en exil ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser Laurent Fabius, retenu à la réunion des ministres des affaires étrangères du G8, à Londres.
M. Jean-Claude Gaudin. Mais vous êtes enfin là !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Vous avez raison, la vague d’immolations observée depuis le printemps 2011 dans les régions de peuplement tibétain en Chine suscite, partout dans le monde, émotion et tristesse.
À cet égard, la France s’est exprimée publiquement pour faire part, systématiquement, de sa préoccupation profonde face aux récents développements, pour rappeler son attachement au respect des droits de l'homme, à la liberté de religion, à la liberté de conviction, ainsi qu'à la préservation de la culture et des traditions tibétaines.
Monsieur le sénateur, en ce domaine, la position de la France est constante. Nous considérons que le dialogue entre les autorités chinoises et le dalaï-lama est la voie pour parvenir à une solution durable qui respecte pleinement l'identité culturelle et spirituelle tibétaine, et ce au sein de la République populaire de Chine.
Le prochain déplacement du Président de la République en Chine sera l'occasion de renforcer notre dialogue et notre partenariat dans tous les domaines. Ce partenariat est global, il n'oublie aucun sujet, il porte sur tous les thèmes d'intérêt commun, et il va de soi que les droits de l'homme en font partie intégrante. Dans ce cadre, aucun sujet n'est exclu, toutes les questions seront abordées, dans un esprit de franchise et de respect mutuel.
La situation des droits de l'homme en Chine, en particulier dans sa dimension tibétaine, est très régulièrement évoquée dans les institutions de l’Union européenne, ainsi qu'avec l'ensemble des États membres. L’Union européenne s'est d'ailleurs dotée d'un Représentant spécial pour les droits de l'homme.
Par ailleurs, la situation du Tibet est mentionnée lors de chaque session du dialogue euro-chinois sur les droits de l'homme. Nous continuerons notre action, nous sommes décidés à le faire, de conserve avec chacun de nos partenaires européens.
Enfin, sachez que, pour le moment, nous n'avons pas connaissance d'un projet de visite du dalaï-lama en France. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du groupe écologiste.)
réponses à apporter à la crise économique
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.
Une crise politique grave se déroule dans notre pays. (Oui ! sur les travées de l'UMP.)
La démission du ministre délégué chargé du budget ainsi que ses aveux de malversations ont mis en évidence l’imbrication étroite entre la finance et le domaine public, y compris le champ politique. (Exclamations sur les mêmes travées.)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Eh oui !
Mme Éliane Assassi. Les sénatrices et les sénateurs communistes, qui ont déposé il y a près de trois ans, le 1er juillet 2010, une proposition de loi constitutionnelle visant à garantir l’indépendance du Président de la République et des membres du Gouvernement vis-à-vis du pouvoir économique, approuvent sans réserve les mesures qui permettront d’assurer la transparence et d’éliminer – c’est cela l’objet – l’influence néfaste des financiers et lobbyistes sur les choix politiques, économiques et sociaux.
Un élu ne doit pas tirer un profit personnel de sa fonction. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Un menteur sera toujours un menteur !
Mme Éliane Assassi. La question de la publication des déclarations de patrimoine et d’intérêts se pose, certes. Reste à examiner de quelle manière, pour ne pas tomber dans une surenchère voyeuriste. (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.)
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Rémy Pointereau. Excellente réaction !
Mme Éliane Assassi. Dans leur immense majorité, les élus, qui se dévouent pour leur population, qui participent au débat politique et idéologique, n’ont rien et n'auront rien à craindre en la matière.
Mme Isabelle Debré. Oui !
Mme Éliane Assassi. Mais ce n’est pas tout. Les hésitations actuelles montrent bien que l'essentiel est ailleurs.
En insistant sur le rôle des banques et la lutte contre les paradis fiscaux, le Président de la République a pointé un fait essentiel : c’est le libéralisme, la libre circulation de l’argent, des capitaux qui est source de dérive, source de corruption. (Exclamations sur certaines travées de l'UMP.)
Trop longtemps, nous avons été seuls, au parti communiste et au Front de Gauche, avec quelques personnalités, à dénoncer l’argent roi, l’argent qui corrompt.
Il est temps aujourd’hui d’affronter le monde de la finance, cet ennemi sans visage hier dénoncé.
Mesdames, messieurs les ministres, montrer du doigt les banques est une bonne chose, car celles-ci profitent de la crise, vampirisent les États et les peuples, mais ce n’est pas suffisant. Il faut s’attaquer au système qui organise leur action. Seul un changement de cap, en France comme en Europe, peut redonner confiance aux peuples ; quelques mesures de transparence ne suffiront pas.
L’affaire Cahuzac est un symptôme du triomphe du libéralisme en Europe. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Rémy Pointereau. C’est plutôt la gauche caviar !
M. Gérard Cornu. Oui, plutôt !
Mme Éliane Assassi. C’est la démocratie qui est moralement atteinte par le pouvoir de l’argent.
Nous vous demandons d’en prendre conscience en stoppant l’austérité maquillée en sérieux budgétaire, en mettant enfin le cap sur la croissance, la politique industrielle durable et l’emploi. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances. (Marques de satisfaction sur les travées de l'UMP.)
M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Madame la sénatrice, vous m'avez posé une question à tiroirs (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP et de l’UDI-UC.) ...
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ce n'est pas une bonne image !
M. Alain Gournac. Parlons plutôt de tiroirs-caisses !
M. Jean-Marc Todeschini. Arrêtez !
M. Pierre Moscovici, ministre. ... à laquelle j'apporterai d'emblée une nuance. Je ne crois pas et je ne peux pas laisser dire ici que nous soyons devant autre chose que la faute grave et impardonnable d'un homme.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Permise par un système !
M. Pierre Moscovici, ministre. Ce mensonge n'est le symptôme d'aucune autre chose ! Il n'est pas plus le symptôme d'une faute du Gouvernement que du libéralisme.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Bien sûr que si !
M. Gérard Longuet. Merci pour le libéralisme !
M. Pierre Moscovici, ministre. Il faut savoir établir les responsabilités au niveau où elles sont.
Il n’en demeure pas moins que cette révélation a incontestablement créé un choc. C'est à ce choc que le Président de la République a voulu répondre hier par un autre choc, un choc de moralisation.
Un sénateur du groupe UMP. Un choc chasse l'autre !
M. Éric Doligé. Vivent les autos tamponneuses !
M. Pierre Moscovici, ministre. C'est la raison pour laquelle il a souhaité que la transparence soit faite sur les patrimoines. Mais la transparence ne suffit pas : il faut aussi le contrôle (Exclamations sur les travées de l'UMP.), à travers une autorité indépendante, présidée par une personnalité incontestable. Et, au-delà de la transparence, il faut aussi la répression.
Madame la sénatrice, vous m’avez également interrogé sur la lutte contre certaines dérives de la finance. Cette lutte, nous avons commencé à la mener ici même. Je pense au vote de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires, texte qui, pour la première fois, permet à un pays – et je ne parle pas seulement pour la France – de demander aux banques des informations sur leurs activités, leur chiffre d'affaires, dans tous les pays du monde, y compris dans les paradis fiscaux.
M. Jean-Claude Gaudin. C’est déjà fait !
M. Pierre Moscovici, ministre. Vous savez que le Président de la République a insisté fortement sur ce point.
Il nous faut aller plus loin encore. En proposant, avec mes homologues allemand, italien, britannique et espagnol, l’adaptation d’un instrument qui existe aux États-Unis, le fameux FATCA, ou Foreign Account Tax Compliance Act, c'est-à-dire l'échange automatique d'informations, c’est ce que nous faisons.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous allons loin, et même très loin !
Enfin, madame la sénatrice, vous avez également évoqué dans votre question la politique économique que nous suivons. Je répète à la représentation nationale, au Sénat, que, contrairement à ce qui est affirmé ici, cette politique n'est pas une politique d'austérité. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Je combats l'austérité en Europe, parce que je pense, en effet, que si l’Europe n’est qu'une discipline punitive, l'Europe ne convaincra pas ses peuples.
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. Pierre Moscovici, ministre. En tant que ministre de l'économie et des finances, la politique que je mène, sous l'autorité du Premier ministre et du Président de la République, n’est pas une politique d’austérité. La politique que je mène va au rythme qui s’impose, donne les marges de manœuvre nécessaires et fait jouer les stabilisateurs automatiques quand la croissance est faible. Mais c’est une politique sérieuse qui passe par le désendettement.
Comme l’a souligné le Président de la République hier, il y a un cap, c'est le sérieux ; il y a un objectif, c’est la croissance ; il y a une exigence, c’est l'emploi. Nous n'en dévierons pas ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste.)
situation à la dgccrf
M. le président. La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Monsieur le président, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, la crise de la viande de cheval résulte de l’accumulation d’évolutions inacceptables au cours de ces dernières années, qui ont aussi conduit les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, à manifester samedi dernier à Paris.
Il faut rappeler ici que ces agents ont joué un rôle crucial dans la révélation de ces fraudes, fraudes qui témoignent de pratiques peu scrupuleuses dans l’industrie agroalimentaire, mais aussi de carences dans les réglementations françaises et européennes.
Ces agents accomplissent un travail remarquable qui mérite d’être salué. Or ils sont aujourd’hui gagnés par la colère et le découragement, et on peut les comprendre ! Depuis 2007, 560 postes ont été supprimés. Résultat, les 3 000 agents qui couvrent aujourd’hui l’ensemble du territoire national ne peuvent plus assurer correctement leurs trois missions essentielles, que sont la sécurité des consommateurs, leur protection économique et la régulation concurrentielle des marchés.
Conséquence directe de la diminution drastique des moyens humains et financiers, le nombre de contrôles effectués par la DGCCRF est en chute libre, baissant de 13 % en 2012. Dans certains départements, le nombre d’agents a été divisé par plus de trois depuis 2009. Ainsi, dans l’Aude, département cher à nos collègues Roland Courteau et Marcel Rainaud, où les fraudes dans l’affaire de la viande de cheval ont été constatées, un seul agent est affecté aux contrôles alimentaires !
La réforme de la DGCCRF enclenchée en 2008 a, de surcroît, conduit à une désorganisation totale des services. Les agents sont désormais répartis entre les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi et des directions départementales de la protection des populations. À un organigramme particulièrement complexe s’ajoute l’absence de mise en réseau rapide et efficace des informations. Cette inertie, directement liée à la nouvelle organisation, affaiblit les conditions d’exercice des agents de la DGCCRF.
C’est pourquoi il est indispensable non seulement d’accorder à ces agents des moyens supplémentaires, mais aussi d’engager un retour à une organisation plus efficace et cohérente. C’est une condition sine qua non pour permettre à la DGCCRF de remplir pleinement ses missions de service public, ô combien primordiales pour nos concitoyens.
Monsieur le ministre, quelles dispositions comptez-vous prendre pour permettre à la DGCCRF de fonctionner correctement et d’assumer pleinement ses missions de contrôle et de protection ? (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation.
M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Monsieur le sénateur, votre question est double.
Vous m'avez interrogé, d'une part, sur la nécessité de renforcer les effectifs de la DGCCRF, de façon à ce que ses agents remplissent correctement leur mission sur le terrain et soient en mesure d'effectuer les contrôles qui leur sont demandés.
Vous m’avez interrogé, d'autre part, sur la manière de renforcer aujourd'hui les pouvoirs de cette administration pour qu'elle fasse mieux respecter les procès-verbaux qu'elle dresse et les injonctions qu'elle adresse aux différentes entreprises.
La réalité, c’est que l’affaire de la viande de cheval a révélé la diminution de la présence des agents de la DGCCRF sur le terrain, conséquence d’un double mouvement, fruit notamment d’une mise en œuvre assez absurde de la RGPP, qui a entraîné une réduction de 16 % des effectifs au sein de cette direction au cours des cinq dernières années. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Éric Doligé. Et qui supprime les sous-préfectures ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, on peut vouloir mener une politique de réduction de la dépense publique sans pour autant être sots au point de renoncer à des choix aussi prioritaires que la protection des consommateurs contre la tromperie économique !
C’est la raison pour laquelle je me réjouis que M. le ministre de l'économie et des finances ait demandé, pour l’année 2013, la stabilisation des effectifs de la DGCCRF, en dépit du fait que cette direction n’était pas prioritaire et que toutes les administrations devaient contribuer au financement des créations de postes dans la police, la gendarmerie et l’éducation nationale.
Nous avons donc maintenu les effectifs, mais nous devons aussi subir les conséquences de la RéATE, c’est-à-dire la réforme de l’administration territoriale de l’État, que, là encore, le précédent gouvernement a souhaitée, et qui a séparé les missions en deux niveaux territoriaux distincts, et en deux départements interministériels distincts.
En conséquence, nous avons aujourd’hui une désorganisation des services, une chaîne de commandement qui a été remise en cause et une baisse de 13,5 % des contrôles sur le terrain.
Or la Commission européenne exige aujourd’hui des services de la DGCCRF qu’ils remplissent de nouvelles missions de contrôle.
M. Gérard Cornu. Autrement dit, encore l’Europe !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous avons nous-mêmes voulu que les filières viande et poisson soient mises sous surveillance après l’affaire Spanghero.
C’est la raison pour laquelle nous souhaitons aujourd’hui que les effectifs de la DGCCRF soient revus et que l’organisation territoriale mise en œuvre dans le cadre du Comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, ou CIMAP, tienne compte des défauts qui ont été hérités du précédent gouvernement. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
Je me réjouis de constater que vous reconnaissez un tant soit peu vos erreurs, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je suis sûr que vous nous soutiendrez quand il s’agira de renforcer les pouvoirs de la DGCCRF, vous qui êtes toujours champions pour donner des leçons ! (Brouhaha sur les travées de l'UMP.) Vous voterez certainement le projet de loi relatif à la consommation pour faire en sorte que, demain, nous ayons davantage de sanctions administratives et que nous puissions punir les entreprises qui fautent. Ainsi, grâce à vous, le crime arrêtera de payer ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – Protestations continues sur les travées de l’UMP.)
suites de l'affaire cahuzac
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini. Monsieur le président, ma question s’adresse à M. Pierre Moscovici. (La réserve ! La réserve ! La réserve !, scande-t-on sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Serait-il possible que vous me laissiez parler durant deux minutes trente, chers collègues ?
M. Alain Richard. Expliquez-vous sur la réserve !
M. le président. Veuillez poser tranquillement votre question, mon cher collègue.
M. Philippe Marini. Monsieur le ministre, beaucoup d’entre nous pensent que les annonces faites cette semaine ne constituent qu’une simple diversion dans le contexte d’une situation très grave, que le Gouvernement n’arrive pas à gérer.
En matière de lutte contre les excès des paradis fiscaux, ces annonces sont excellentes dans leur principe. Mais il faut aussi savoir utiliser les outils qui existent déjà.
M. David Assouline. La réserve !
M. Philippe Marini. Or, à la suite de la crise financière et des réunions du G20, le réseau de conventions internationales s’est perfectionné, avec notamment la signature d’un avenant à la convention qui nous lie à la Suisse, complété en février 2010 par un échange de lettres entre les directeurs des administrations fiscales suisse et française.
M. Alain Richard. On le sait déjà !
M. Jean-Marc Todeschini. Moralisez donc la réserve !
M. Philippe Marini. Cet échange de lettres vous aurait permis, monsieur le ministre, d’interroger beaucoup plus largement que vous ne l’avez fait l’administration fiscale suisse pour savoir si, oui ou non, un certain docteur Cahuzac détenait bien, directement ou indirectement, des comptes en Suisse.
Monsieur le ministre, pourquoi avez-vous limité votre question à la seule banque UBS ? (La réserve ! La réserve ! La réserve !, scande-t-on encore sur certaines travées du groupe socialiste.)
En second lieu, et alors qu’il était de notoriété publique, monsieur le ministre, que d’éventuels comptes en Suisse avaient pu être déplacés vers Singapour, pourquoi n’a-t-on pas utilisé la convention franco-singapourienne, qui date de la même époque et qui permettait de s’assurer de l’existence ou non d’un compte auprès de cet État ?
M. Jean-Louis Carrère. Quand on donne des leçons, il vaut mieux être irréprochable !
M. Philippe Marini. Monsieur le ministre, les réponses que vous avez bien voulu m’adresser par écrit ne me semblent pas de nature à épuiser le sujet, d’autant qu’elles sont aujourd’hui éclairées par de nouveaux bruits, de nouvelles rumeurs, de nouvelles indications parues dans la presse (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste, où l’on scande de nouveau : La réserve ! La réserve ! La réserve !) Ces nouveaux développements prouvent que cette affaire n’en est probablement qu’à ses débuts ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur Marini, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai évidemment lu et entendu toutes les questions, tous les raccourcis, toutes les simplifications sur ce que l’on appelle « l’affaire Cahuzac ».
Je répète ici qu’il s’agit de la faute et du mensonge d’un homme, et non d’une responsabilité collective. Prenez garde de ne pas tomber dans ce type de dérives.
J’ai en effet constaté que de nouvelles allégations étaient publiées ce matin dans un hebdomadaire classé à droite, et même très à droite, Valeurs actuelles. Ce sont ces allégations qui vous conduiront, cet après-midi, monsieur le président de la commission des finances, à vous rendre au ministère des finances - vous y êtes évidemment le bienvenu -, pour vérifier de quoi il s’agit.
Mais je veux dire ici, avec la plus grande force et la plus grande fermeté, que ces allégations sont mensongères, et je les démens formellement. Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, je combattrai les mensonges, en me réservant la possibilité de leur donner des suites judiciaires.
Pour le reste, je veux m’en tenir aux faits. Vous êtes certes légitime à m’interroger en votre qualité de président de la commission des finances, monsieur Marini, mais il est facile de réécrire l’histoire a posteriori.
Il y avait bien, ici ou là, des analyses, mais une seule mise en cause existait, celle de Mediapart, qui affirmait que Jérôme Cahuzac aurait possédé, au début de 2010, un compte à la banque UBS, en Suisse, compte transféré par la suite à Singapour.
C’est cette information-là, et elle seule, que l’administration fiscale a cherché à vérifier, à travers une convention d’entraide avec la Suisse.
J’ai déjà répondu sur le champ de notre demande d’entraide.
Nous avons interrogé la Suisse sur l’hypothèse de la détention d’un compte à la banque UBS, car nous n’avions pas à cette date d’éléments nous permettant de viser d’autres établissements financiers.
Vous évoquez un avenant, monsieur Marini. Mais, contrairement à ce que vous affirmez, il est plus restrictif que la convention en la matière, et ne permettait pas d’évoquer des circonstances ou des conditions exceptionnelles.
Nous avons demandé aux autorités suisses de remonter loin dans le temps - aucun gouvernement ne l’avait fait avant nous -, jusqu’en 2006, date de la prescription fiscale.
M. Albéric de Montgolfier. Il n’y avait pas eu de Cahuzac avant !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Nous avions eu la bonne idée de ne pas le nommer ministre ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)