M. Robert del Picchia. Je veux simplement poser une question à M. le rapporteur ou à M. le ministre : sait-on comment va réagir l'Assemblée nationale ? A-t-on déjà des indications ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. On verra bien !
M. Alain Gournac. On ne travaille pas en fonction de l'Assemblée nationale !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Vous posez là, mon cher collègue, une vraie question. Certains semblent intéressés, d’autres se posent les mêmes questions que notre collègue Jean-Jacques Hyest.
Nous avons longuement réfléchi. Cela ne signifie pas pour autant que nous avons mesuré toutes les conséquences qu’emportera notre décision. Nous serions bien présomptueux de l’affirmer ; nous affirmons même le contraire.
Cependant, nous avons considéré la manière dont, à un moment donné, la commission de la culture…
M. Alain Gournac. La commission des affaires sociales !
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. Les deux !
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Moi, je parle de la manière dont la commission de la culture a été dotée d’un tel pouvoir pour examiner le fonctionnement du musée d’Orsay.
M. Alain Gournac. C’est vrai !
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Peut-être me dira-t-on que je me trompe, mais je suis de ceux qui pensent que, si d’aventure ce contrôle sur pièces et sur place s’avérait être une ingérence insupportable et inopérante eu égard au respect du secret-défense par exemple, nos deux assemblées pourraient parfaitement revenir en arrière. C’est dans cet état d’esprit que nous légiférons, en veillant bien sûr au respect des prérogatives des commissions des finances. Ce travail doit être réalisé en coordination avec elles et le ministère de la défense.
Monsieur Hyest, nous voulons avancer pour essayer d’obtenir non pas la certitude, mais la quasi-certitude que cette loi de programmation militaire sera appliquée à l’euro près, car nous en avons absolument besoin.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Je le répète, le Gouvernement est conscient qu’il s’agit d’une avancée considérable, mais elle n’est acceptable que dans la nouvelle rédaction qui est proposée. La question de l’inconstitutionnalité se serait posée pour l’article 4 ter dans la version initiale de la commission.
Il s’agit là de donner aux commissions chargées de la défense des pouvoirs d’investigation sur pièces et sur place, aux fins d’information uniquement pour contrôler de façon régulière l’application de loi de programmation militaire. Sont désormais exclus les documents liés au renseignement et au secret-défense.
Je le dis à l’intention de tous les sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, c’est vraiment là une volonté d’agir en commun pour faire en sorte que la loi de programmation militaire soit respectée.
M. Robert del Picchia. Sans aller trop loin !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.
M. Jean-Jacques Hyest. Je m’abstiens !
M. le président. En conséquence, l'article 4 ter est ainsi rédigé.
Article 4 quater (nouveau)
Chaque semestre, le ministre de la Défense présente aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat un bilan détaillé de l’exécution de la loi de finances et de la présente loi de programmation militaire. – (Adopté.)
Article 4 quinquies (nouveau)
À la première phrase de l’article L. 143-5 du code des juridictions financières, après les mots : « affaires sociales », sont insérés les mots : « , de la défense et des affaires étrangères ».
M. le président. L'amendement n° 8 rectifié bis, présenté par M. Sueur, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 143-5 du code des juridictions financières est ainsi modifié :
1° À la première phrase, après les mots : « affaires sociales », sont insérés les mots : « , de la défense et des forces armées et des affaires étrangères » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le respect des dispositions prévues aux III et IV de l’article 6 nonies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, le Gouvernement transmet à la délégation parlementaire au renseignement les communications de la Cour des comptes aux ministres portant sur les services de renseignement, ainsi que les réponses qui leur sont apportées. »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. Nous abordons les amendements ayant trait à la question du renseignement.
Avant de présenter l’amendement n° 8 rectifié bis, permettez-moi, monsieur le ministre, mes chers collègues, d’évoquer très brièvement les informations dont nous avons eu connaissance aujourd'hui même.
Selon le journal Le Monde, la NSA, agence de renseignement américaine, aurait enregistré en moins d’un mois 70 millions de données téléphoniques provenant de la France.
Mme Nathalie Goulet. J’espère qu’ils ont de bons traducteurs ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. Les articles parus – vous les avez certainement lus – montrent des facultés d’intrusion et de collecte de données considérables.
M. le Premier ministre s’est déclaré choqué ; M. le ministre des affaires étrangères a convoqué l’ambassadeur des États-Unis en France et a annoncé qu’il aborderait cette question demain avec M. le secrétaire d’État américain ; M. le ministre de l’intérieur a déclaré que cela était totalement inacceptable, et je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous réagissiez dans le même sens, pas plus que je ne doute que M. le Président de la République soit préoccupé par cette situation et qu’il prendra sans doute, avec le Gouvernement, un certain nombre d’initiatives.
Cette question n’est pas du tout hors sujet, mes chers collègues. Alors même que nous examinons un texte visant à sécuriser la situation en France, à concilier les nécessités de lutter contre le terrorisme avec celles de respecter les libertés individuelles, il serait extrêmement dommageable de laisser prospérer, au niveau mondial, des systèmes qui bafouent ce que nous sommes en train de préparer, de construire, de vérifier dans notre pays. C’est pourquoi j’ai tenu à évoquer cette question. Je pense que vous nous confirmerez, monsieur le ministre, que le Gouvernement va agir et qu’il en tiendra informé le Parlement, tout particulièrement le Sénat. Comme l’a indiqué l’un de vos collègues précités, il apparaît nécessaire que des règles soient fixées au niveau international. À cet égard, l’Europe et la France doivent pouvoir jouer un rôle non négligeable.
Permettez-moi maintenant de dire à Mme Goulet que l’adoption de l’amendement précédent visant à introduire un élément important dans la loi n’oblige nullement notre assemblée à modifier son règlement.
J’en viens à l’amendement n° 8 rectifié bis.
Cet amendement vise à prévoir que la délégation parlementaire au renseignement pourra avoir connaissance des observations formulées par la Cour des comptes, ainsi que des réponses qui leur sont apportées par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable.
Permettez-moi de répondre à l’interpellation de M. Sueur.
Le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, devant s’exprimer cet après-midi sur la question grave évoquée, je me contenterai d’un propos court : tout cela n’est ni convenable ni acceptable. Le ministre des affaires étrangères en parlera plus longuement, car cela relève de sa responsabilité, mais, comme je suis indirectement concerné, je tenais à vous donner mon point de vue, qui rejoint tout à fait les propos de M. Sueur.
M. le président. En conséquence, l'article 4 quinquies est ainsi rédigé.
Article 4 sexies (nouveau)
Le Gouvernement présente chaque année au Parlement, préalablement au débat d’orientation budgétaire, un rapport sur l’exécution de la présente loi de programmation. Ce rapport peut faire l’objet d’un débat au Parlement.
Ce rapport décrit la stratégie d’acquisition des équipements de défense du Gouvernement. Cette stratégie définit les grandes orientations en matière de systèmes d’armes et précise les technologies recherchées.
Ce rapport décrit également la mise en œuvre des dispositifs budgétaires, financiers, fiscaux et sociaux, instaurés pour l’accompagnement économique des territoires affectés par les conséquences des mesures de restructuration de la défense. – (Adopté.)
Chapitre II
Dispositions relatives au renseignement
Article 5
(Non modifié)
L’article 6 nonies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est ainsi modifié :
1° Après la première phrase du I, sont insérées trois phrases ainsi rédigées :
« Elle exerce le contrôle parlementaire de l’action du Gouvernement en matière de renseignement et évalue la politique publique en ce domaine. Elle est informée de la stratégie nationale du renseignement et du plan national d’orientation du renseignement. Un rapport annuel de synthèse des crédits du renseignement et le rapport annuel d’activité de la communauté française du renseignement lui sont présentés. » ;
2° Le III est ainsi modifié :
a) Après le mot : « défense », la fin de la première phrase du dernier alinéa est ainsi rédigée : « et de la sécurité nationale ainsi que le coordonnateur national du renseignement et le directeur de l’académie du renseignement. » ;
b) Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La délégation peut entendre, avec l’accord préalable des ministres sous l’autorité desquels ils sont placés, les autres directeurs d’administration centrale ayant à connaître des activités des services spécialisés de renseignement. » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Elle peut inviter les présidents de la commission consultative du secret de la défense nationale et de la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité à lui présenter les rapports d’activité de ces commissions. » ;
3° La première phrase du second alinéa du VI est complétée par les mots : « , ainsi qu’aux ministres chargés de la sécurité intérieure, de la défense, de l’économie et du budget, chacun pour ce qui concerne les services spécialisés de renseignement placés respectivement sous leur autorité » ;
4° Il est ajouté un VIII ainsi rédigé :
« VIII. – La délégation parlementaire au renseignement exerce les attributions de la commission de vérification prévue à l’article 154 de la loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002. »
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Sueur, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 3, deuxième phrase
Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :
La stratégie nationale du renseignement lui est transmise. Elle prend connaissance du plan national d’orientation du renseignement.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet amendement vise à prévoir que la délégation parlementaire au renseignement dispose du document intitulé « stratégie nationale du renseignement », un document ayant, je le rappelle, vocation à être public.
Par ailleurs, nous proposons que cette délégation puisse prendre connaissance – les mots ont été soigneusement pesés ! – du plan national d’orientation du renseignement, un document très important nécessaire pour suivre les actions menées dans le domaine du renseignement et, surtout, la stratégie, en termes de renseignement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. La commission a émis un avis favorable. En effet, comment contrôler si l’on ne connaît pas la stratégie ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Sueur, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle est destinataire des informations utiles à l’accomplissement de sa mission.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. Le présent amendement est tout à fait clair : il s'agit de ne pas restreindre les possibilités pour la délégation parlementaire au renseignement d’obtenir un certain nombre d’informations qui peuvent lui être utiles pour assumer sa tâche.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Cette disposition de principe ne permettra pas de contourner les dispositions qui encadrent l’accès de la délégation à l’information détenue par les ministres ayant autorité sur les services de renseignement. Cela a été très clair dans les entretiens que nous avons eus avec les membres de la commission à ce sujet. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Chevènement. Tout est dans le terme « utiles ». Mais qui détermine l’utilité de ces informations ?
M. Jean-Jacques Hyest. Voilà !
M. Jean-Pierre Chevènement. Comme le prévoit le projet de loi de programmation, l’extension du rôle de la délégation parlementaire au renseignement est la contrepartie de l’accès aux fichiers de police, aux banques de données des compagnies aériennes et à beaucoup d’autres choses encore.
Aussi faut-il clarifier le mot « utiles ». C’est la délégation parlementaire du renseignement qui doit déterminer ce qui est utile ! (M. le ministre approuve.)
Sous cette réserve, je voterai l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Jacques Gautier, pour explication de vote.
M. Jacques Gautier. Si nous comprenons très bien le souhait de la commission des lois de donner à la délégation parlementaire au renseignement les moyens d’agir, nous sommes nombreux à penser qu’il faut préserver à tout prix les hommes et les femmes du renseignement, qui risquent leur vie tous les jours.
M. Alain Gournac. Absolument !
M. Jacques Gautier. Parce que leur travail doit être protégé, nous sommes plutôt réservés vis-à-vis de la plupart des amendements présentés par M. le rapporteur pour avis de la commission des lois, et même nous y sommes plutôt opposés.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Monsieur Gautier, je comprends votre préoccupation, mais, en ce qui concerne l’amendement n° 2, le risque que vous signalez n’existe pas.
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. En effet, il n’y a pas de risque !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Monsieur Chevènement, j’ai souligné, il y a quelques instants, que la mesure proposée ne remettait pas en cause les dispositions de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relatives à l’autorité des ministres.
Aussi, je crois vraiment que cet amendement ne pose aucun problème.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. Pour que l’intention de notre commission soit tout à fait claire, je tiens à dire sans ambiguïté que, dans notre esprit, l’interprétation qui doit être faite de la disposition proposée est strictement celle que M. le ministre vient d’énoncer.
De manière générale, aucun de nos amendements ne doit être compris comme susceptible de mettre en cause, dans quelque cas que ce soit, l’anonymat des agents des services de renseignement, c’est-à-dire le respect de leur identité.
La délégation parlementaire au renseignement, que je préside actuellement, a déjà pris des initiatives à cet égard lorsqu’elle a constaté que cet anonymat n’était pas respecté dans telle ou telle publication – je parle sous le contrôle de plusieurs de nos collègues.
Mes chers collègues, nous sommes très attachés à ce principe, et nous soutiendrons sans réserve un amendement présenté par M. le rapporteur pour le faire figurer noir sur blanc dans le projet de loi de programmation militaire ; je sais que M. Carrère s’est personnellement occupé de cette question, avec nos collègues de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Monsieur Gautier, je comprends vos craintes, mais vous pouvez être rassuré : les membres de la délégation parlementaire au renseignement sont soumis au secret-défense et ne peuvent en aucun cas divulguer quelque information que ce soit, en particulier des noms de personnes. Il n’y a donc pas de risque majeur à cet égard, sauf à ce que les règles soient enfreintes.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
M. Jean-Pierre Chevènement. M. Gautier semble vouloir inspirer à tous les sénateurs un sentiment de culpabilité.
Assurément, s’agissant de fichiers très confidentiels, il faut préserver l’anonymat des agents des services. Reste que ce qui est en jeu, c’est la liberté des citoyens ! Cette liberté vaut bien qu’on donne à la délégation parlementaire au renseignement la possibilité d’obtenir communication d’un certain nombre de documents utiles, qui lui permettent de vérifier, par exemple, qu’il n’y a pas divulgation de données personnelles de tout un chacun.
M. Jean-Jacques Hyest. C’est un autre sujet !
M. Jean-Pierre Chevènement. Évitons toute surenchère déplacée et faisons confiance à la délégation parlementaire pour trouver le meilleur équilibre. En tout cas, celle-ci doit pouvoir obtenir communication de toute information qu’elle juge utile à l’accomplissement de sa mission républicaine !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur Chevènement, votre intervention risque de créer un trouble, car elle ne se rapporte pas au problème dont nous parlons.
Les interceptions de sécurité et les questions de cet ordre, nous en débattrons tout à l’heure. À cet instant, il s’agit de savoir jusqu’où la délégation parlementaire au renseignement, qui est bien sûr soumise au secret de la défense nationale, doit être informée des activités des services de renseignement, notamment à l’extérieur du territoire. À cet égard, il faut faire preuve d’une certaine prudence.
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Certainement !
M. Jean-Jacques Hyest. Mes chers collègues, je vous rappelle que, lorsque la délégation parlementaire au renseignement a été créée, à l’issue d’un long cheminement, on a été extrêmement prudent, avec le souci d’éviter que des agents puissent être mis en cause. Telle est, monsieur Chevènement, la question qui se pose !
M. Jean-Pierre Chevènement. Mon cher collègue, ce n’est pas moi qui ai soulevé le problème de l’anonymat !
M. Jean-Jacques Hyest. Sans doute, mon cher collègue, mais le problème que vous avez abordé, celui des libertés publiques, c’est tout à l’heure qu’il sera examiné. Pour le moment, il s’agit de savoir jusqu’à quel point la délégation parlementaire doit être informée.
Dans certains pays, notamment aux États-Unis, le Parlement exerce sur le renseignement un contrôle extrêmement étroit, encore que, vu le nombre d’agences de renseignement, je ne sais pas comment les parlementaires américains s’en sortent.
Dans ce domaine, j’invite tout le monde à la prudence ; je crois, monsieur le ministre, que c’est aussi votre état d’esprit. (M. le ministre acquiesce.)
L’amendement de M. Sueur aura beau être adopté, on donnera à la délégation parlementaire les informations qu’on estimera devoir lui donner, avec le souci d’éviter toute mise en cause des services de renseignement.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Il me semble que, si la délégation parlementaire au renseignement est de création récente, la politique du secret-défense est bien établie dans notre pays. Du reste, je vous fais observer qu’aucune femme ne siège dans cet organe, et qu’il faudrait remédier à cette situation lors du prochain renouvellement sénatorial !
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Ce n’est pas exact, ma chère collègue !
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. Mme Patricia Adam y siège, et elle l’a même présidée !
Mme Nathalie Goulet. Peut-être, mais elle n’est pas sénatrice ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois. Elle n’est pas encore sénatrice ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. L'amendement n° 43, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° À la seconde phrase du I, le mot : « quatre » est remplacé deux fois par le mot : « cinq » ;
…° À la première phrase du premier alinéa du II, après les mots : « de défense » sont insérés les mots : « et des finances » ;
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. L’article 6 du projet de loi de programmation militaire prévoit de faire de la commission de vérification des fonds spéciaux, qui a accompli ces dernières années un travail excellent, une formation spécialisée de la délégation parlementaire au renseignement. Ainsi, cette délégation serait chargée d’examiner les dépenses faites sur les fonds spéciaux et de s'assurer que les crédits ont été utilisés conformément à la destination prévue par la loi de finances.
Par ailleurs, monsieur le ministre, vous avez vous-même souligné, ce matin, que cette délégation verrait ses pouvoirs renforcés en matière de contrôle de la dépense publique dans le domaine du renseignement.
Dans ces conditions, il me semble opportun de prévoir que la commission des finances participera aux travaux de la délégation parlementaire au renseignement, au lieu d’être seulement destinataire du rapport de celle-ci ; telle est la demande de la commission des finances. Cette participation me semble d’autant plus justifiée que l’assistance de la Cour des comptes, théoriquement assurée jusqu’ici par la participation de celle-ci aux travaux de la commission de vérification des fonds spéciaux, n’est plus prévue dans le nouveau dispositif.
J’ai relevé que les présidents des autres commissions permanentes concernées sont membres de droit de la délégation parlementaire au renseignement. Mes chers collègues, j’espère que vous ne m’en voudrez pas de proposer que la présence des présidents des commissions des finances soit également prévue, par souci de symétrie.
Pour lire chaque année très attentivement le rapport de la commission de vérification des fonds spéciaux – c’est même l’un des rares rapports administratifs que je lise de manière à peu près exhaustive, après quoi, bien entendu, il va au coffre – et pour avoir observé un réel progrès de la connaissance au fur et à mesure des années, sans que les règles du secret et de l’efficacité aient été enfreintes, je puis vous indiquer que le bon déroulement des opérations nécessite, dans certains cas, des immeubles et des biens, ainsi que des modes de rémunération échappant, comme il est tout à fait normal, aux contraintes administratives et aux règles habituelles du secteur public.
Or il peut arriver que ces biens doivent être évalués et vendus et que l’on s’efforce de bénéficier de ces éléments de nature à permettre le financement des opérations de renseignement et des opérations de terrain. De même, il peut se produire qu’il y ait des arbitrages patrimoniaux à opérer et que l’on s’interroge sur l’utilité de tel ou tel logement, parce que toute situation évolue.
Aussi, il me semble qu’une appréciation financière de ce type de questions, notamment en matière patrimoniale, ne serait pas de trop. De là cet amendement, que je défends au nom de la commission des finances.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Monsieur Marini, j’avais cru comprendre que vous présentiez cet amendement à titre personnel et pas au nom de la commission des finances ; si vous m’assurez que vous le défendez au nom de la commission des finances, je révise ma position…
M. le président. Monsieur Marini, souhaitez-vous éclairer M. le rapporteur ?
M. Philippe Marini. Il est exact que M. le rapporteur pour avis de la commission des finances n’a pas souhaité présenter cet amendement, non plus que l’amendement n° 44. Toutefois, j’ai exposé ce problème devant la commission des finances, et j’ai le sentiment de ne pas trahir la position de ses membres ; au reste, je crois défendre son point de vue institutionnel. Pour le reste, deux rapporteurs pour avis siègent au banc de la commission, et ils peuvent également s’exprimer.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Il s’agissait seulement de clarifier la situation : que cet amendement émane de M. Marini ou de la commission des finances n’en change pas la nature, mais, pour nous, ce n’est pas tout à fait pareil.
L’amendement vise à prévoir que les présidents des commissions des finances des deux assemblées seront membres de droit de la délégation parlementaire au renseignement, que j’ai eu le plaisir, à la suite de Josselin de Rohan, de présider en tant que président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, et qui est aujourd’hui présidée par M. le président de la commission des lois.
Mes chers collègues, vous devez savoir que cette délégation est composée de huit membres, dont une répartition politique harmonieuse doit être garantie. À ce propos, monsieur Marini, il faudrait que vous assuriez une présence un peu plus assidue de votre représentant !
M. Philippe Marini. Parlez-vous du représentant de la commission des finances ou du représentant de l’UMP ?
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur. Je parle du représentant de la formation politique à laquelle vous appartenez.