M. Jean-François Husson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cette proposition de loi, notre collègue Daniel Dubois aborde la question du financement du service public de l’assainissement, lequel préoccupe un grand nombre de communes, en particulier rurales, et constitue même, pour certaines d’entre elles, un problème lancinant et une source d’inquiétude.
Ce service public est exercé sous forme de service public industriel et commercial, ou SPIC. Or, à ce jour, les communes de plus de 3 000 habitants et les EPCI dont les communes comptent plus de 3 000 habitants ont l’interdiction de prendre en charge les dépenses d’un SPIC dans leur budget propre. Le financement du service public de l’assainissement est dès lors assuré par une redevance versée par les usagers.
Or, au sein des EPCI, certaines communes peuvent avoir déjà investi les fonds nécessaires pour la mise en conformité de leurs ouvrages ou le renouvellement de leur réseau, quand d’autres sont restées dans l’attente. Dans une telle hypothèse, les usagers, qui ont déjà été mis à contribution pour la rénovation du service public d’assainissement de leur commune, peuvent se trouver à nouveau sollicités pour le financement des travaux engagés par les autres communes membres de l’EPCI.
Pour résoudre ce problème, les communes se heurtent aux principes qui régissent le droit des collectivités territoriales. En effet, une fois déléguée, la compétence n’appartient définitivement plus à la commune délégataire, laquelle n’a dès lors plus de recours possible, l’EPCI et ses communes membres disposant de leurs compétences et de leurs budgets propres.
Certes, différentes modifications sont intervenues. Ainsi, la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale a permis aux communes de verser des fonds de concours à un EPCI pour financer la réalisation ou le fonctionnement de certains équipements. Les conditions d’application de cette dérogation ont été assouplies en 2002, puis en 2004.
L’objet de la présente proposition de loi est d’élargir le champ de cette dérogation au financement du service public de l’assainissement.
Je l'ai dit en introduction, la question du financement du service public de l’assainissement me paraît pertinente. Elle est d'une grande, sinon parfois d'une brûlante actualité dans notre espace rural, qui représente 80 % du territoire national où vivent 20 % des Français – je rappelle ainsi l'intérêt de concilier l'espace rural et territorial avec la démographie de notre beau pays…
À cet instant, je veux insister sur le rôle majeur que les agences de l’eau ont à jouer dans le financement et la mise en œuvre du service public de l’assainissement. Ce rôle, me semble-t-il, devrait pouvoir être précisé, pour ne pas dire revisité.
Nous le savons, pour recevoir une aide de l’agence, une commune doit en général avoir intégré le cadre du plan d’actions opérationnel territorialisé. Malheureusement, faute de soutiens et de financements, peu nombreuses sont les communes qui, chaque année, en bénéficient. D'ailleurs, on ne peut que déplorer la nouvelle réduction, prévue par le projet de loi de finances, des moyens financiers accordés aux agences de l’eau – j’y reviendrai en conclusion.
Face au coût par habitant que représente l’installation d’une station d’épuration ou d'assainissement dans une commune rurale de petite taille, les agences de l’eau encouragent parfois l'assainissement autonome, dit « assainissement non collectif ». Je souligne que cette solution n’est pas nécessairement satisfaisante, car elle pèse lourdement sur les particuliers et pose des problèmes importants, notamment en ce qui concerne le contrôle de ces installations, qui incombe aux maires. À force de charger la barque du maire, le mandat devient difficile à exercer…
Les conséquences de toutes ces difficultés sont nombreuses. Aujourd'hui, nombre de communes n’ont toujours pas pu procéder à leur assainissement par manque de moyens. Ainsi, dans mon département, la Meurthe-et-Moselle, plus de 200 communes demeurent aujourd'hui toujours en attente.
Il arrive même que certaines communes hésitent à franchir le pas et à déléguer leur compétence d'assainissement à un EPCI. Notre collègue Philippe Adnot, président du conseil général de l'Aube, m'a rappelé que telle était la situation dans son département.
Pour ma part, je veux insister sur le cas de certains EPCI qui renoncent à s'associer. Je l'ai vécu cette année dans le cadre de la commission départementale de la coopération intercommunale de Meurthe-et-Moselle. Dans les environs de Lunéville, une intercommunalité de plus de 30 000 habitants dispose de la compétence « assainissement ». Dans le cadre du schéma départemental de coopération intercommunale, il était proposé de lui rattacher, en la fusionnant, une intercommunalité de moins de 5 000 habitants n’ayant pas de compétence d'assainissement, mais dont la commune chef-lieu avait mis en place le traitement des eaux, et donc leur assainissement. Au final, qu’est-il arrivé ? Les services de l’État, sous l'autorité du préfet, ont accepté de surseoir à statuer, car l'intégration de cette intercommunalité de moins de 5 000 habitants allait aboutir à grever l'essentiel de la capacité d'investissement de l'intercommunalité, pourtant urbaine…
C'est pourquoi, nonobstant la problématique du seuil des 3 000 habitants, nous devons prendre en compte, concrètement, la diversité des situations.
Monsieur le rapporteur, j’ai entendu vos arguments et, sur toutes les travées, nous en partageons un certain nombre. Vous soulevez un problème juridique ; je crois que l'amendement de notre collègue Daniel Dubois répond à une bonne partie de votre objection, ce dont notre groupe ne peut que se féliciter.
Mais, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, je dois vous poser quelques questions. Alors que de nombreuses contraintes financières nouvelles s’abattent sur elles, ne serait-il pas opportun d’accorder aux collectivités une certaine souplesse ? Comment ne pas s'interroger sur la cohérence du Gouvernement lorsqu’il contraint les communes à réduire leurs dépenses en diminuant leur dotation dans le projet de loi de finances, alors que les communes et les intercommunalités doivent mettre en œuvre d'importants dispositifs ainsi que des normes parfois bien complexes, comme on le voit avec l'assainissement ?
Ce problème de complexité, j’en conviens, se pose aujourd'hui comme il se posait hier. Mais, pour avoir participé ici même à certains débats, je vous demande, monsieur le ministre, d'intervenir auprès de votre majorité pour faire en sorte que les propositions de certains rapports, notamment celui de notre collègue Éric Doligé sur la simplification des normes applicables aux collectivités locales, puissent être discutées, quitte à ce que les propositions de loi qui les traduisent soient inscrites à l'ordre du jour d'une autre assemblée…
Enfin, notre débat est l’occasion de poser quelques questions fondamentales sur le financement global du service public de l’assainissement. En effet, le projet de loi de finances pour 2014 retire plus de 210 millions d’euros aux agences de l'eau, alors qu’il est aujourd'hui nécessaire d'accompagner sur nos territoires les communes et les intercommunalités dans leur politique de l'assainissement.
Il s'agit d'un défaut de cohérence. Au contraire, il conviendrait de redonner force et puissance à des agences qui ont l’accompagnement pour compétence principale et qui associent autour d'elles l'ensemble des partenaires.
J’en viens à une dernière considération. Si « l'eau paie l'eau » grâce à la redevance, on voit bien que le fonds de concours que des communes pourraient abonder dans le cadre d'une compétence transférée et portée par l'intercommunalité n’est peut-être pas idéal. Mais il constitue un élément à prendre en considération dans notre débat.
C'est la raison pour laquelle le groupe UMP choisit l'abstention, une abstention que je qualifierai de positive et que, pour ma part, je transformerai même en un vote favorable.
En effet, cette proposition de loi nous invite à une vision plus panoramique de la diversité des situations selon les régions et sur l’ensemble du territoire national. Or il me semble justement important de procéder aujourd'hui à un vaste état des lieux pour apporter demain des réponses peut-être différenciées, mais appropriées et satisfaisantes.
Au-delà de l’assainissement de nos finances publiques qui nous occupe souvent dans cet hémicycle, il s'agit ici de permettre à tous les territoires – y compris les territoires ruraux, qui se caractérisent par un nombre élevé de communes de petite taille et dont la France peut aussi s'enorgueillir – de se doter de dispositifs d'assainissement des eaux. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. Gérard Longuet. Excellent !
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission par intérim (Sourires.), monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi est censée, selon ses auteurs, améliorer le service public de l'eau et de l'assainissement.
Aujourd’hui, les collectivités assument une part prépondérante de l’effort consenti en matière de construction et de remplacement des réseaux d’assainissement, un effort qui reste colossal puisqu’il représentait 2,5 milliards d’euros en 2008.
Au regard de la faiblesse actuelle de la capacité d’investissement des collectivités, notamment du fait de l’assèchement progressif des dotations de fonctionnement, cet effort peut apparaître particulièrement dissuasif, entravant concrètement la réalisation d’investissements pourtant nécessaires.
Prenant acte de cette situation de fait, et considérant que cette compétence est souvent déléguée à l’intercommunalité, les auteurs de la présente proposition de loi tentent d’apporter une solution de financement nouvelle en autorisant les communes à participer à ces travaux par le versement de fonds de concours.
Il faut savoir que cette possibilité existe déjà, mais qu’elle se trouve particulièrement encadrée.
D'une manière générale, les communes peuvent verser des fonds de concours à un établissement public de coopération intercommunale pour financer la réalisation ou le fonctionnement de tel ou tel équipement.
Le principe de participation existe donc. Cependant, il se heurte au fait que l’assainissement est un service public industriel et commercial et qu’il doit, à ce titre, être principalement financé par les redevances des usagers.
Ce principe d’autonomie du budget des services publics industriels et commerciaux comporte, là encore, des exceptions, notamment pour les communes de moins de 3 000 habitants – donc pour la plupart des communes rurales.
D'autres exceptions sont prévues, dans les cas d'une contrainte particulière de fonctionnement du service ou d’un investissement impliquant une augmentation excessive des tarifs.
Nous considérons pour notre part que ces exceptions sont à ce jour largement suffisantes et qu’il ne convient pas de poser le principe général d’une participation des communes au financement de l’assainissement lorsque cette compétence a été déléguée.
En effet, pour répondre à une problématique spécifique par une mesure qui peut sembler de bon sens, on apporte une solution qui reste ambiguë.
Elle relance, au fond, un débat auquel les précédents orateurs ont déjà apporté leur contribution, celui du financement de l’assainissement et, au-delà, de la conception de la construction de l’intercommunalité.
Concernant le financement, ce régime a fortement évolué puisque l’ancienne participation pour raccordement à l’égout, qui était jusqu’alors exigible à l’occasion de la délivrance des autorisations de construire, a été progressivement remplacée par une participation rattachée à l’acte de raccordement, désignée sous l’appellation de « participation pour le financement de l’assainissement collectif ».
Plus globalement, aujourd’hui, le financement de l’assainissement est essentiellement assuré par la perception d’une redevance qui couvre à la fois les investissements et le fonctionnement du service. C’est le principe même du financement des services publics industriels et commerciaux. La redevance est donc perçue par l’intermédiaire de la facture d’eau.
Au regard de ces principes, la présente proposition de loi ne semble pas justifiée. En effet, il n’y a aucune raison de faire supporter aux contribuables, via la participation des communes à un fonds de concours, le financement de l’infrastructure qu’ils payent d’ores et déjà au travers de leurs factures d’eau. On l'a dit, ce serait la double facturation, comme usager et comme contribuable !
Quand on connaît la situation des ménages et la perte de pouvoir d’achat de nombre de nos concitoyens, une telle mesure ne peut avoir notre assentiment.
De même, nous ne pouvons pas faire supporter le poids du financement de l’assainissement collectif à l’ensemble des contribuables d’une commune, alors même que certains n’ont pas accès aux infrastructures d’assainissement collectif.
Enfin, il n’y a pas de raison, alors même que l’infrastructure est gérée au niveau intercommunal, de faire financer l’investissement par un seul membre de l’intercommunalité, indépendamment des principes de solidarité qui doivent prévaloir dans ce domaine.
Nous l'avons toujours dit : la construction d’intercommunalités doit correspondre à une mutualisation des moyens. Certes, toutes les communes, lorsqu’elles adhérent à une intercommunalité, ne se trouvent pas dans la même situation par rapport à l’assainissement, mais cette question se pose dans un équilibre global de transfert de compétences, quel que soit le domaine.
De plus, comment penser que les communes, déjà durement impactées par des politiques de diminution des dotations, pourraient intervenir par voie de fonds de concours ?
Par ailleurs, un tel mode de financement nous interroge. Alors que les communes ayant délégué la compétence « assainissement » ne sont plus à même de prendre les décisions s'y rapportant, elles seraient néanmoins amenées à financer cette compétence ? Elles paieraient donc sans décider, ce qui, en matière de démocratie locale, ne nous semble pas très judicieux…
Nous considérons, à l’inverse, qu’à partir du moment où une commune finance spécifiquement une compétence appartenant à un EPCI, il faudrait qu’elle soit pour le moins associée aux prises de décision concernant cette compétence…
Mes chers collègues, vous l'aurez compris, toutes ces raisons nous conduisent à ne pas soutenir la présente proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La discussion générale est close.
La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion de l’article unique de la proposition de loi initiale.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous rappelle que nous devons impérativement suspendre la séance à dix-huit heures trente. J’invite donc les orateurs à la concision afin que nous achevions cette discussion dans le temps imparti.
Article unique
Au premier alinéa du V de l'article L. 5214-16, au premier alinéa de l'article L. 5215-26 et au premier alinéa du VI de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « d'un équipement, » sont insérés les mots : « ou, par dérogation au premier alinéa de l'article L. 2224-2, pour prendre en charge des dépenses au titre du service public de l'assainissement, ».
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin, sur l’article unique.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous savons tous, au sein de cet hémicycle, en notre qualité de représentants des collectivités territoriales, que le financement du petit cycle de l’eau est particulièrement difficile pour les communes rurales.
Dans une étude de la Confédération générale du logement, publiée hier – le sujet est d’actualité -, on déplore une « France rurale qui paie son eau plus chère ».
Ainsi, dans le Tarn-et-Garonne, le prix de l’eau, estimé à 5,72 euros par mètre cube, est le plus élevé de France. Et les disparités peuvent être très fortes au sein d’un même département.
Les réseaux et les petites stations d’épuration sont vétustes et requièrent un renouvellement financièrement insoutenable pour les petites collectivités, qui peinent à respecter les nouvelles normes et réglementations sur la qualité de l’eau.
Lorsqu’elles n’exercent pas cette compétence au niveau intercommunal, elles ne disposent pas de moyens d’ingénierie publique, de moyens humains ou techniques, ou encore de la possibilité de réaliser des économies d’échelle.
En outre, c’est au sein des communes rurales que l’on retrouve la plus forte proportion de populations non raccordées à l’assainissement collectif. C’est le cas de mon département, dans lequel 47 % de la population ne peut pas être raccordée au réseau collectif.
Certes, les agences de l’eau, conformément à leurs missions, contribuent au financement du petit cycle en attribuant des subventions pour l’exécution des travaux.
Malheureusement, ces aides sont insuffisantes, et les crédits affectés à l’eau potable et à l’assainissement sont, nous le savons, en baisse au sein des Xes programmes pluriannuels d’intervention des agences de l’eau régissant la période 2013-2018. L’aide à l’assainissement est ainsi en diminution de 15 % par rapport aux IXes programmes.
Le principe selon lequel « l’eau paie l’eau » connaît des limites en milieu rural, où le nombre d’abonnés est moindre et les réseaux sont plus longs, ce qui pourrait avoir pour conséquence une hausse excessive des tarifs, ce qui risque de peser significativement sur le pouvoir d’achat des ménages.
J’entends certes les inquiétudes légitimes exprimées par nos collègues de l’UDI-UC lorsqu’ils évoquent les blocages auxquels peuvent faire face certaines communes membres d’EPCI et ayant transféré les compétences en la matière.
Cependant, il me semble que les outils juridiques existants sont suffisants pour lever ces inquiétudes. Et, pour ma part, je pense que la solution réside dans la mobilisation des financements, au niveau national, afin de permettre aux collectivités locales de jouer leur rôle d’autorités organisatrices et d’assumer cette mission de service public fondamentale pour nos concitoyens.
Pour toutes ces raisons, et malgré l’intérêt qu’elle peut avoir, notre groupe ne votera pas cette proposition de loi
M. le président. L'amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Dubois, Arthuis, Amoudry et Merceron, Mme Férat et M. J.L. Dupont, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au neuvième alinéa de l’article L. 2224-2, après les mots : « services publics d’assainissement non collectif », sont insérés les mots : « ainsi qu’aux services publics d’assainissement collectif pour leurs dépenses d’investissement, » ;
2° Au premier alinéa du V de l’article L. 5214-16, au premier alinéa de l’article L. 5215-26 et au premier alinéa du VI de l’article L. 5216-5, après les mots : « d’un équipement » sont insérés les mots : « ou, en application du neuvième alinéa de l’article L. 2224-2, pour prendre en charge des dépenses d’investissement au titre du service public d’assainissement, ».
La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Pour répondre à votre appel, monsieur le président, je serai bref et me contenterai de dire que cet amendement a pour objet de préciser que seules les dépenses d’investissement des services d’assainissement collectif sont visées par la présente proposition de loi, à l’exclusion donc des dépenses de fonctionnement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur. Notre collègue, loin de nous proposer un amendement, nous soumet en fait une nouvelle proposition de loi, tant le texte initial est ici réécrit !
Cette initiative modifie complètement la portée de la présente proposition de loi. Il est donc difficile de voir en elle un simple amendement !
Vous avez donc décidé d’abandonner le fonctionnement pour vous consacrer uniquement à l’investissement, cher collègue. Je vous remercie d’avoir tiré la bonne conclusion de la discussion que nous avons eue ensemble. C’est un effort louable, mais, ce faisant, vous changez complètement de projet ! Je ne peux donc plus considérer votre initiative comme un amendement.
Vous souhaitez étendre à l’assainissement collectif les règles aujourd’hui applicables à l’assainissement non collectif. Cher collègue, sur ce point-là aussi, vous vous trompez profondément. Car la raison de cette dérogation pour l’assainissement non collectif tient à la mise en place, en 2005, des services publics d’assainissement non collectif. Or, les SPANC n’ont rien à voir avec l’objet de votre proposition de loi, puisqu’il s’agissait d’une compétence obligatoire et immédiate pour toutes les communes. Tel n’est pas le cas du service d’assainissement dont vous parlez.
Si la dérogation, en 2005, a été instituée, c’est parce qu’il fallait soutenir les communes confrontées au problème de devoir immédiatement et obligatoirement exercer une nouvelle compétence. Voilà pourquoi ce délai de cinq ans a été prévu !
Cela ne correspond pas du tout au cas de figure que vous évoquez ici. La compétence d’assainissement appartient aux communes depuis longtemps. Et elle n’est pas obligatoire ! Les communes la prennent, ou non ; elles y sont incitées, mais elles n’y sont pas obligées.
De plus, les dépenses d’un SPANC ne relèvent pas de l’investissement, mais, principalement, du fonctionnement, notamment pour les dépenses de contrôle.
Vous voyez donc que votre comparaison entre l’assainissement communal ou intercommunal et le SPANC n’est pas du tout valable.
La commission, qui a aussi arrêté sa position sur ce sujet, a émis également un avis défavorable sur ce second texte.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, ministre délégué. Monsieur le président, je suis partagé entre le désir de vous livrer une réponse quelque peu détaillée et la nécessité de tenir compte des contraintes de temps que vous avez rappelées. Il n’est pas du tout dans l’intention du Gouvernement de « jouer la montre », comme on dit en sport. Vous me pardonnerez donc le caractère succinct de ma réponse : elle rejoint en réalité très largement les éléments évoqués spontanément par M. le rapporteur de la commission des finances.
Parce que cette nouvelle rédaction conduit en quelque sorte à un véritable changement de nature de votre proposition de loi, et parce que, comme notre débat l’a montré avec pertinence, il existe suffisamment d’exceptions, il n’est pas nécessaire, même à la faveur de cette nouvelle rédaction, d’en ajouter d’autres.
J’en reste à ces considérations de principe – j’aurais pu développer, mais je pense que l’important est que nous puissions aller jusqu’au bout de l’examen du présent texte dans les délais impartis, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais m’adresser à Jean-Claude Frécon, qui connaît bien ce dossier, et dont l’expertise est reconnue bien au-delà du Sénat, puisque notre collègue a présidé la commission des communes rurales, au sein de l’Association des maires de France, pendant de nombreuses années.
Je crois que nous tenons là un sujet d’importance qui devra être repris lorsque nous discuterons de l’évolution de l’intercommunalité, c'est-à-dire des compétences obligatoires, de celles qui ne le sont pas, des nouvelles compétences obligatoires...
Je me permets d’intervenir à cet instant du débat parce que je suis l’un des responsables de la commission des aides de l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse. Et on constate en effet, monsieur le rapporteur, que notre pays compte plus de 33 000 communes de moins de 3000 habitants, ce qui représente plus de 80 % du territoire !
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur. Plutôt 90 %
M. Pierre Hérisson. Or ces collectivités, à l’exception de quelques réalisations exemplaires, peinent souvent à constituer une intercommunalité de dimension suffisante. Et qu’est-ce que la « dimension suffisante » pour une intercommunalité ? Ce n’est pas forcément le périmètre, parce que le périmètre tel qu’il est vu par nos agences de l’eau correspond avant tout au bassin versant et pas du tout à des critères de population ou d’importance des communes.
Il n’empêche que c’est le volume de l’eau distribué qui constitue l’assiette du prélèvement. Je prendrai un exemple que M. le président connaît bien : le bassin du lac d’Annecy. Il y a 117 communes dans une même intercommunalité. Or il est clair que les habitants des zones urbaines ont payé deux fois l’assainissement. Ils ont payé le leur jusque dans les années soixante. Et, depuis, l’élargissement du périmètre et le tarif unique de l’eau ont permis de réaliser globalement, sur un territoire pertinent, qui est celui du bassin versant, l’assainissement collectif sur la totalité de ce territoire.
Sans vouloir citer le bassin du lac d’Annecy en exemple – encore que l’on pourrait – j’estime qu’il sera nécessaire de clarifier cette situation, quitte à imposer la solution que je viens de dire, sur le territoire, pour que l’urbain, qui consomme beaucoup plus d’eau que le rural, contribue à l’assainissement. En effet, la ressource en eau, qu’il s’agit de protéger, est constituée à 90 % par les nappes phréatiques qui se trouvent dans le sous-sol des zones rurales, mais qui servent à alimenter les zones urbaines, dans un pays où 80 % de la population vit sur 20 % du territoire.
Nos collègues Daniel Dubois et Jean-François Husson ont eu raison de défendre leur idée, mais il est nécessaire de retravailler la question et, monsieur le ministre, de la soumettre de nouveau à notre examen, peut-être à l’occasion de la discussion au Sénat de l’un des textes prévus pour l’aménagement du territoire à l’échelle de l’intercommunalité.
M. le président. Le lac d’Annecy est en effet un exemple, et vous n’êtes pas étranger à ce résultat, mon cher collègue !
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RDSE.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 92 :
Nombre de votants | 348 |
Nombre de suffrages exprimés | 212 |
Pour l’adoption | 35 |
Contre | 177 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi n'est pas adoptée.)
M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
7
Conférence des présidents