M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Je vous remercie, madame Perol-Dumont, de rappeler que la priorité du Gouvernement va à la modernisation du réseau existant. La poursuite des grands projets doit aller de pair avec l’amélioration des performances de nos lignes classiques, qui sont vieillissantes, après l’achèvement de quatre LGV en cours de réalisation.
S’agissant de la modernisation du réseau existant de la ligne « POLT », qui relie Limoges à Paris, le Gouvernement a récemment confié au préfet de la région Limousin l’élaboration d’un schéma directeur permettant de présenter les améliorations envisagées, d’une part, sur le service de train d’équilibre du territoire, ou TET, d’autre part, sur l’infrastructure.
À cet égard, le schéma directeur de la ligne « POLT » couvrira tant les opérations de renouvellement, qui doivent conduire à la mobilisation de 500 millions d’euros d’ici à 2020, que les opérations de modernisation, qui bénéficient de près de 90 millions d’euros dans le cadre des contrats de plan que vient de conclure l’État avec les régions Centre-Val-de-Loire et Limousin.
Pour ce qui concerne le dossier de la ligne nouvelle entre Poitiers et Limoges, le Gouvernement maintient la feuille de route qu’il s’était fixée à la suite des conclusions de la commission « Mobilité 21 » : signer la déclaration d’utilité publique ; mettre à profit les volets « mobilité » des nouveaux contrats de plan État-région, les CPER, pour poursuivre les études de conception détaillées du projet et élaborer un schéma de financement soutenable pour l’ensemble des partenaires.
Le décret déclarant d’utilité publique les travaux de construction de cette ligne a ainsi été signé le 10 janvier 2015.
Plusieurs recours en annulation ont été déposés auprès du Conseil d’État et sont aujourd’hui en cours d’instruction.
Une enveloppe d’un montant de 42 millions d’euros, cofinancée par l’État, SNCF Réseau et la région Limousin, figure au projet de CPER 2015-2020 de la région Limousin, signé le 28 mai par le Président de la République.
La nouvelle étape d’études détaillées qui va débuter devra permettre d’éclairer les partenaires grâce à une meilleure connaissance des coûts.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont.
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Je prends acte de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État.
Les travaux en cours sur l’axe Paris-Orléans-Limoges sont nécessaires. Pour autant, l’amélioration de cet axe ne résoudra pas la question de la connexion au réseau européen à grande vitesse.
C’est la raison pour laquelle ces travaux de modernisation sur l’axe « historique » doivent être menés parallèlement à la réalisation du barreau TGV.
Il est impératif de mener à bien ce chantier. Je me permets, monsieur le secrétaire d’État, de vous rappeler la bonne avancée des consultations sur ce dossier, le résultat favorable des négociations foncières, conduites sous l’égide de l’assemblée départementale, ainsi que le coût extrêmement contenu du projet – le moins cher au kilomètre s’agissant d’une ligne TGV. Pour toutes ces raisons, la réalisation de ce barreau doit s’affirmer comme prioritaire dans les futurs chantiers de lignes à grande vitesse.
situation des conciliateurs de justice
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, auteur de la question n° 1198, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Yannick Botrel. Monsieur le secrétaire d’État, j’évoquerai la question des conciliateurs de justice et de leur situation. Mon intérêt pour cette question découle d’un double constat.
Par la rapidité et la simplicité de leur action, les conciliateurs de justice évitent souvent le déroulement de contentieux longs et coûteux, tant d’ailleurs pour l’État que pour les justiciables eux-mêmes. En ce sens, leur rôle est tout à fait intéressant et utile.
Je soulignerai ensuite la place grandissante prise par ces conciliateurs dans nos territoires. Leurs compétences, notamment en matière de troubles de voisinage, de conflits entre un propriétaire et un locataire, de créances impayées ou de malfaçons, ou encore, pour ne retenir que les cas les plus fréquents, de difficultés à faire exécuter un contrat, en font des interlocuteurs privilégiés pour nos concitoyens et, parfois aussi, pour les maires.
Si les affaires qu’ils traitent ne défraient pas la chronique, elles contribuent néanmoins, si vous me permettez l’expression, à « pourrir la vie » d’un nombre important de particuliers.
En ce sens, l’intérêt de l’existence d’une procédure de conciliation gratuite, plus rapide qu’une action juridictionnelle, ne me semble faire l’objet d’aucun doute.
Dans cette optique, les conciliateurs ont en quelque sorte pris la place des juges de paix d’antan et endossé le rôle qui leur était dévolu.
Cela est d’autant plus remarquable que l’exercice de ces fonctions est bénévole. Et c’est là, parfois, que le bât blesse.
En moyenne, un conciliateur de justice perçoit 232 euros par an de remboursement au titre de ses frais de fonctionnement. Soyons clairs, cela ne couvre même pas l’essence qu’ils utilisent pour aller à la rencontre des personnes qui les sollicitent, singulièrement dans les territoires ruraux.
Depuis de nombreuses années, rapport après rapport, les experts insistent sur l’utilité qu’il y aurait à développer les modes alternatifs de règlement des litiges.
Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, s’est approprié cette analyse, comme en témoigne, notamment, la septième action de son plan « Justice 21 ».
Toutefois, et sans renoncer pour autant au principe du bénévolat des activités de conciliation, ne serait-il pas envisageable de redéfinir les règles de prise en charge des frais de fonctionnement, afin qu’elles soient mieux adaptées à la réalité que je viens de décrire ?
Pour conclure, je suis convaincu qu’il ne s’agirait pas d’une véritable dépense publique supplémentaire, car ces moyens renforcés entraîneraient par ailleurs une diminution des actions juridictionnelles engagées par nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d’abord d’excuser l’absence de Mme Taubira, retenue en raison d’obligations liées à ses fonctions.
Je voudrais également préciser que, dans le cadre de la réforme judiciaire portée par la garde des sceaux, la proximité de la justice est une priorité. La conciliation est un outil essentiel afin de rendre la justice plus proche – vous l’avez souligné, monsieur le sénateur –, plus accessible et plus lisible. C’est pourquoi il est proposé de développer la conciliation en la rendant obligatoire pour les petits litiges du quotidien avant d’accéder au juge.
Il conviendra alors d’augmenter le nombre des conciliateurs, qui exercent une vraie mission de service public aux côtés des professionnels de la justice. À l’heure actuelle, près de 1 800 conciliateurs actifs sont recensés sur le territoire. Le besoin supplémentaire est estimé à un tiers, soit 600 conciliateurs.
Une évolution de leur statut est par ailleurs à l’étude à la Chancellerie.
Afin d’affermir leur place au sein de l’institution, il est prévu de leur donner l’opportunité de participer aux conseils de juridiction, au plan local, et de siéger au Conseil national de l’accès au droit et à la justice, au plan national. Le processus de leur recrutement sera confié à des magistrats coordonnateurs des tribunaux d’instance afin de raccourcir les délais d’instruction des candidatures.
La qualité de la mission des conciliateurs est d’autant plus louable que ce sont des bénévoles qui consacrent du temps à l’œuvre de justice. Comme vous le soulignez avec raison, ce bénévolat ne doit pas pour autant générer de frais pour les conciliateurs. C’est pourquoi, outre leurs dépenses de fonctionnement, sont également pris en charge leurs frais de déplacement. Il est envisagé un doublement des dépenses de fonctionnement – frais de téléphone, d’affranchissement postal, etc. –, actuellement forfaitisées à 232 euros par an.
S’agissant des frais de déplacement, remboursés selon le régime des personnels civils de l’État, une enquête effectuée auprès de plusieurs cours d’appel a révélé que le montant moyen remboursé s’élevait à 449 euros par an.
Enfin, une subvention de 40 000 euros a été attribuée pour l’année 2015 à la Fédération des associations des conciliateurs de justice.
Le Gouvernement entend donc donner toute leur place, y compris financièrement, aux modes alternatifs de règlement des différends, notamment la conciliation, comme en témoigne le projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIe siècle, en cours d’examen par la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse très complète et je partage un certain nombre des arguments que vous avez avancés. Il est évident, en particulier, que les conciliateurs exercent une mission de service public.
Le rôle des conciliateurs est à ce point reconnu que leur nombre va être considérablement réévalué, comme vous venez de l’indiquer.
Je note aussi avec satisfaction que le statut des conciliateurs sera amené à évoluer, et qu’ils seront mieux reconnus dans les missions qu’ils accomplissent.
Enfin, j’ai relevé que les frais seront pris en charge de façon plus réaliste qu’ils ne le sont actuellement, avec notamment un doublement des frais liés à l’exercice de la fonction.
Compte tenu du nombre de conciliateurs en exercice sur le territoire national, la dépense ne devrait pas être trop importante. Quoi qu’il en soit, elle sera sans rapport avec la qualité du service rendu par ces personnes.
indemnisation des ex-otages victimes de terrorisme
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, auteur de la question n° 1212, transmise à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Hervé Marseille. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question s’adresse en effet à Mme la garde des sceaux et porte sur l’indemnisation des ex-otages victimes de terrorisme.
Créé par la loi n°90-589 du 6 juillet 1990, le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions, le FGTI, est destiné à l’indemnisation des victimes. Ce sont les articles L. 422-1 à L. 422-6 et R. 422-1 à R. 422-10 du code des assurances qui traitent de l’organisation et du financement du FGTI.
Le fonds de garantie est alimenté à 75 % par une contribution forfaitaire de 3,30 euros prélevée sur chaque contrat d’assurance de biens, soit près de 285 millions d’euros, et il dispose d’un budget global de 407 millions d’euros environ.
J’observe que le FGTI est géré par un conseil d’administration de huit membres : un représentant du secteur de l’assurance, quatre représentants de divers ministères, trois membres d’associations de victimes et un président issu du Conseil d’État ou de la Cour de cassation.
Chaque année, le FGTI gère 16 000 demandes d’indemnisation, dont moins d’une centaine provenant de victimes du terrorisme.
Or, si le fonds de garantie ne semble ni manquer de ressources ni manquer d’indemniser des victimes, les règles et les critères concernant les conditions d’indemnisation sont assez mystérieux.
En effet, il convient de remarquer la différence de traitement entre le cas des deux ex-otages français qui ont été détenus en l’an 2000 sur l’île de Jolo, et qui ont obtenu 350 000 euros, après une action devant les tribunaux, au terme de 140 jours de captivité – c’est-à-dire quatre mois et vingt jours – et la situation réservée aux ex-otages d’Arlit, comme le rapporte l’un d’entre eux.
Après 1139 jours de captivité, soit plus de trois ans, cet ancien otage s’est vu proposer 50 000 euros d’indemnisation. Cette somme fut par la suite portée à 500 000 euros, puis réduite à 300 000 euros, après que son entreprise eut décidé de l’indemniser également. Aujourd’hui, les ex-otages d’Arlit ont dû prendre des avocats pour se faire entendre, ce qui n’est pas normal.
Monsieur le secrétaire d’État, alors que le FGTI est administré pour moitié par des représentants directs des ministères et présidé par une personnalité issue de l’une de nos plus hautes juridictions, il conviendrait que l’action de l’État soit la plus transparente possible afin de respecter nos concitoyens qui ont vécu l’horreur de la captivité pendant plusieurs années. L’indemnisation doit être rapide et juste.
C’est pourquoi je souhaite savoir ce que le Gouvernement entend mettre en œuvre afin que les conditions d’indemnisation des ex-otages victimes de terrorisme soient clarifiées et que ces affaires soient réglées avec la célérité et l’équité qu’elles méritent.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser Mme la garde des sceaux, qui, ne pouvant être présente au Sénat ce matin, m’a chargé de répondre à sa place à votre question.
Les sommes versées aux victimes d’actes de terrorisme ne constituent pas les seuls préjudices indemnisés par le FGTI, dont vous avez parlé, créé par la loi du 9 septembre 1986. Le FGTI a en effet réglé, en 2014, les sommes de 256,2 millions d’euros aux victimes des infractions de droit commun et de 27,2 millions d’euros au titre du dispositif du service d’aide au recouvrement des indemnisations allouées aux victimes d’infractions pénales.
Comme vous l’énoncez à juste titre, ce fonds indemnise également les victimes d’actes de terrorisme et dispose, pour ce faire, de réserves suffisantes permettant de garantir la poursuite de ces indemnisations dans des conditions équitables.
En 2014, le FGTI a versé aux victimes du terrorisme la somme de 6,5 millions d’euros et, au 30 juin de cette année, 6,4 millions d’euros ont été alloués.
Il convient de rappeler que l’article L. 422-1 du code des assurances pose le principe de la réparation intégrale du dommage résultant de l’atteinte à la personne.
Les indemnisations offertes et réglées par le fonds sont donc calculées en fonction du préjudice spécifique de chacune des victimes concernées. Elles sont notamment calculées à partir d’une expertise médicale contradictoire.
Cette réparation est augmentée de l’indemnisation du préjudice exceptionnel des victimes d’actes de terrorisme, récemment créée par décision du conseil d’administration du FGTI en date du 29 avril 2014.
Les effets cumulés de ces principes peuvent aboutir à des variations dans les réparations de dommages versées.
En mentionnant un ex-otage du Sahel, vous faites probablement référence à la situation d’un ex-otage d’Arlit, qui a effectivement reçu 50 000 euros à titre de première provision. Par la suite, une deuxième provision de 500 000 euros a été envisagée, qui a été ramenée à 300 000 euros pour tenir compte des indemnités versées par son employeur, conformément à l’article R. 422-8 du code des assurances.
Cette procédure d’offre, mise en place par la loi du 9 septembre 1986, ne dispense cependant pas le demandeur d’établir l’existence et l’étendue des différents chefs de préjudice.
Concernant la situation de cet otage, une ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil en date du 16 juillet 2015 a confirmé ce point, en indiquant que l’absence d’une expertise médicale – qui avait été proposée à plusieurs reprises par le fonds de garantie – faisait obstacle à ce que l’existence et le quantum de certains préjudices soient reconnus et évalués, et a, avant dire droit, ordonné cette mesure d’instruction qui permettra au fonds de faire une offre d’indemnisation.
Cet otage sollicitait par ailleurs une somme de 3 millions d’euros, en se fondant sur la jurisprudence dite « Jolo », qui aurait fixé, selon lui, le montant dû à un otage à titre de réparation par jour passé en captivité.
Tel n’est malheureusement pas le sens des dernières décisions de justice intervenues en matière d’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme, ainsi qu’il ressort des arrêts des 23 janvier 2009 et 13 février 2012 prononcés par la cour d’appel de Paris dans deux affaires distinctes.
Ces décisions démontrent que le préjudice demeure évalué par les juridictions en fonction des circonstances de chaque cas d’espèce.
Enfin, il convient de rappeler qu’en tout état de cause, les victimes peuvent, en cas de non-acceptation des offres d’indemnisation provisionnelle ou définitive faites par le FGTI, saisir le tribunal d’une demande d’indemnisation, dans les conditions fixées par les articles L. 422-2 et L. 422-3 du code des assurances et 2226 du code civil.
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille.
M. Hervé Marseille. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de ces précisions, qui sont importantes, mais qui restent très administratives… Vous conviendrez qu’après des mois voire des années de captivité, les vies de nos concitoyens sont brisées. L’un d’entre eux, qui habitait ma commune, est maintenant chez lui, ne travaille plus et son ménage n’a pas survécu. Ces otages doivent prendre des avocats pour essayer de se faire entendre, alors même qu’on envoie des soldats, qui risquent leurs vies, pour les libérer.
Il est nécessaire d’apprécier et d’évaluer chaque situation, mais on ne peut pas attendre des années avant d’indemniser des personnes dont la vie a ainsi été brisée et dont le sort a suscité une émotion nationale.
J’ai écrit à AREVA, l’entreprise gestionnaire du site d’Arlit ; je n’ai jamais eu de réponse, même pas un accusé de réception ! J’ai aussi saisi Mme Taubira, qui, aimablement, m’a fait recevoir par des membres de son cabinet.
Ainsi, les entreprises restent à l’écart et je conviens qu’il peut exister des volets sur lesquels il ne faut pas s’étendre. Néanmoins, il serait souhaitable de mettre en place des médiations pour faire avancer ces dossiers, afin d’éviter qu’ils n’aboutissent devant les juridictions et que cela ne dure finalement des années et des années.
Ces personnes gardent des séquelles et font face à de graves difficultés. L’État doit donc s’engager davantage pour y mettre un terme.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, auteur de la question n° 1199, adressée à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Valérie Létard. Ma question s’adresse à monsieur le secrétaire d’État chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Initialement, je souhaitais vous interroger, monsieur le secrétaire d’État, sur la décision de ponctionner de 100 millions d’euros les fonds de roulement d’une dizaine d’universités et d’une vingtaine d’écoles de l’enseignement supérieur. Ces fonds de roulement permettent souvent aux établissements de compenser les désengagements financiers de l’État. Ils financent leurs investissements, notamment en matière d’entretien, de sécurité et de mise en accessibilité de leurs bâtiments.
Les établissements de la région Nord-Pas-de-Calais ont subi une ponction particulièrement lourde, puisqu’elle s’est élevée à 35 millions d’euros, ce qui représente plus d’un tiers du total prélevé et alors même que la part des étudiants dans cette région atteint seulement 7 %.
Or, comme vous le savez, cette région n’est certainement pas la mieux dotée et certaines des universités concernées sont notoirement sous-dotées en personnel. Il y a donc eu, dans le choix de cette répartition de l’effort, une double pénalisation : la pénalisation d’établissements vertueux ayant fait l’effort de se constituer des réserves et celle d’une région qui connaît avec la crise un regain de difficultés économiques et sociales.
Depuis votre arrivée au ministère, monsieur le secrétaire d’État, vous avez fait savoir que vous ne reviendriez pas sur les arbitrages de l’année 2015 – on peut comprendre que ce soit complexe dans le contexte budgétaire –, confirmant ainsi la pérennité de cette ponction. Le Premier ministre, devant les remontées extrêmement fermes du terrain, a indiqué que la reconduction de ce prélèvement pour l’année 2016 était définitivement abandonnée, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.
Néanmoins, et en particulier pour les universités du nord de la France, les prélèvements de 2015 vont annihiler les efforts drastiques de gestion ainsi que ceux qui ont été mis en œuvre pour développer les ressources propres, dans la logique même que vous souhaitez encourager en matière de formation continue, et pour constituer des provisions destinées à réaliser les investissements nécessaires à la qualité de service due aux étudiants.
La situation de l’université de Lille 2 est, à cet égard, emblématique. Alors que vos services reconnaissent que cet établissement souffre d’un déficit d’au moins quatre cents postes, que cette université a fait l’objet d’un écrêtement récurrent de 8 millions d’euros par an depuis trois ans et que certains de ses locaux, à la limite de l’insalubrité, nécessitent une rénovation urgente, la ponction supplémentaire opérée en 2015 va freiner des investissements indispensables.
Au moment où vous annoncez un léger desserrement de la contrainte budgétaire grâce à une augmentation de votre budget de 165 millions d’euros et où vous affichez une volonté de corriger les plus fortes disparités en matière d’encadrement des étudiants, pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, prendre aujourd’hui l’engagement que les moyens supplémentaires disponibles seront aussi répartis en tenant compte des efforts déjà demandés en 2015 et en essayant de réduire l’injustice qui a été ressentie ? Beaucoup d’universités ont été sollicitées alors qu’elles n’auraient pas dû l’être !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice, votre question comporte deux éléments : le prélèvement sur les fonds de roulement en 2015 et son devenir en 2016 dans le cadre des évolutions budgétaires.
Sur le prélèvement effectué en 2015, vous avez raison de rappeler que la loi de finances, qui est en cours d’application, prévoyait une participation de certains établissements d’enseignement supérieur aux économies à hauteur de 100 millions d’euros.
Dans la région Nord-Pas-de-Calais, certains établissements d’enseignement supérieur, à savoir deux universités, l’Institut d’études politiques de Lille et trois écoles d’ingénieurs, ont fait partie des quarante-sept établissements qui ont été concernés par cette mesure. Après mobilisation, leur fonds de roulement reste supérieur à soixante-douze jours de dépenses de fonctionnement au minimum, alors que le seuil prudentiel que nous avions retenu était de soixante-cinq jours.
Je tiens à le rappeler, cette mobilisation n’a par ailleurs porté que sur des crédits libres d’emploi, c’est-à-dire qu’il a été tenu compte de tous les projets d’investissement d’ores et déjà engagés. Ceux-ci ont été placés en dehors de l’opération de mobilisation. Afin d’identifier ces crédits, une méthodologie particulière, développée par l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche et par l’inspection générale des finances, a été appliquée à tous les établissements.
L’analyse des fonds de roulement, dont le montant est souvent dû aux marges dégagées par les universités du fait de leur bonne gestion, a bien entendu été faite en relation avec les services des universités, même si leur enthousiasme était naturellement limité…
L’ensemble de leurs projets d’investissements pluriannuels, notamment en matière de politique immobilière, a été pris en considération afin de garantir leur mise en œuvre.
Par ailleurs, pour observer la réalité des flux financiers entre l’État et les universités, il faut mentionner que la dotation de fonctionnement a augmenté en 2015 pour ces établissements, et ce de manière durable, en particulier pour l’université de Lille 2, qui bénéficie d’un total de moyens nouveaux par rapport à 2014 de 2,279 millions d’euros.
En outre, en ce qui concerne cette université, qui a besoin d’être soutenue, comme vous l’avez à juste titre mentionné, un rattrapage en emplois a été opéré en sa faveur au regard de son sous-encadrement relatif : vingt-cinq emplois supplémentaires ont été accordés en 2015, après trente-cinq en 2013 et quarante et un en 2014.
Cela m’amène à la seconde partie de votre question.
Je vous confirme que le Premier ministre a annoncé qu’il n’y aurait pas de reconduction du prélèvement sur les fonds de roulement en 2016, ce qui est bien inscrit dans le projet de loi de finances, que vous examinerez dans quelques semaines.
Par ailleurs, le montant de dotation supplémentaire du programme 150 destiné aux universités, que vous avez chiffré à juste titre, à cette étape de la discussion budgétaire, à 165 millions d’euros, sera attribué en fonction de trois éléments.
Au-delà des règles actuelles d’attribution des dotations aux universités dans le cadre du logiciel dénommé SYMPA, deux critères supplémentaires seront introduits.
Je souhaite tout d’abord pouvoir amorcer un rééquilibrage entre les disciplines en ce qui concerne les taux d’encadrement, certaines étant vraiment à des niveaux très faibles comparés à d’autres. Nous devons ensuite tenir compte des efforts réalisés par les universités pour accueillir les étudiants, dans le contexte actuel d’augmentation des effectifs. Ces deux critères supplémentaires pourraient être profitables, me semble-t-il, à des universités de votre territoire.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.
Mme Valérie Létard. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions, mais je souhaite insister sur plusieurs points.
Notre région est candidate à un appel à projets dans le cadre des initiatives d’excellence – IDEX – des investissements d’avenir. Lorsqu’on s’engage dans une telle aventure, pour avoir la chance de la mener à bien, on a besoin de pouvoir investir et d’apporter des fonds propres pour aller chercher des fonds européens. Il est donc quelque peu contradictoire de nous demander d’être vertueux, d’économiser pour nous permettre d’apporter les fonds propres nécessaires et, dans le même temps, de nous les prendre pour réduire les dépenses publiques.
J’attire votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur la nécessité d’atteindre un double objectif : faire des investissements, notamment pour que les IUT et universités de notre région aient des locaux en bon état, et être au rendez-vous de ce programme IDEX.
Sans une université en ordre de marche, on ne pourra pas relever le défi de la reconversion économique. Dans le contexte actuel, nous avons besoin d’universités et de centres de recherche et il faut leur laisser des marges de manœuvre.
Vous êtes proche des territoires et nous comptons sur votre écoute pour que cet exercice complexe soit possible. Pour redécoller économiquement et relever le défi qui est devant elle, notre région doit pouvoir s’appuyer sur ses universités.
impact de la réforme des collèges sur l’enseignement des langues régionales vivantes