M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je terminerai par une simple observation : comme vous, je suis frappé, mais aussi ému et réconforté par la montée de l’élan patriotique que l’on constate depuis les attentats du 13 novembre. (Mme Joëlle Garriaud-Maylam opine.)

L’image de nos armées était déjà très positive ; elle ne l’avait même jamais été autant depuis de nombreuses années. Elle est maintenant vraiment très attractive.

Ainsi, ce sont en moyenne 1 500 jeunes, contre 500 avant les attentats, qui, chaque jour, sur l’ensemble du territoire national, entrent en contact avec l’armée de terre pour se renseigner sur les carrières qu’elle propose. Le chiffre a triplé ! Ce regain d’intérêt se vérifie aussi, dans des proportions à peu près identiques, pour les autres armées.

Cet élan patriotique est formidable. C’est celui d’une nouvelle génération, d’une génération qui croit en notre pays, qui considère qu’il faut se battre pour sa sécurité, qui est attaché à notre manière de vivre ensemble. Cet élan, je veux, en conclusion de mon propos, le saluer ! (Vifs applaudissements.)

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Défense
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Engagements financiers de l'Etat - Compte de concours financiers : accords monétaires internationaux - Compte de concours financiers : avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics - Compte d'affectation spéciale : participation de la France au désendettement de la Grèce - Compte d'affectation spéciale : participations financières de l'Etat

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Défense

45 387 166 899

39 589 278 602

Environnement et prospective de la politique de défense

1 282 686 142

1 284 766 016

Préparation et emploi des forces

9 031 105 010

7 191 674 335

Soutien de la politique de la défense

21 459 934 680

21 159 919 557

Dont titre 2

19 132 708 271

19 132 708 271

Équipement des forces

13 613 441 067

9 952 918 694

Mme la présidente. L'amendement n° II-311, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

13 000 000

6 500 000

Préparation et emploi des forces

152 000 000

85 500 000

Soutien de la politique de la défensedont titre 2

8 000 000

8 000 000

8 000 000

8 000 000

Équipement des forces

TOTAL

173 000 000

 

100 000 000

 

SOLDE

+173 000 000

+100 000 000

La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. J’ai déjà évoqué, dans mon intervention, les engagements nouveaux dont je voulais proposer l’adoption au Parlement, à la suite des déclarations du Président de la République et des mesures que celui-ci a annoncées lors de son discours devant le Congrès.

Par cet amendement, il vous est proposé d’augmenter les crédits de paiement de 100 millions d’euros et les autorisations d’engagement, de 173 millions d’euros.

Ces ressources supplémentaires visent à couvrir les quatre besoins suivants : les munitions – c’est le besoin le plus important – ; le dispositif renforcé d’intervention lié à l’opération Sentinelle ; le renseignement, pour se doter des moyens techniques nécessaires à la mise en œuvre immédiate de la loi relative au renseignement ; le renforcement de la réserve opérationnelle.

Il s’agit de permettre la mise en œuvre immédiate, dès 2016, de l’ensemble de ces mesures.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Cet amendement, que la commission n’a pu examiner que peu de temps avant le début de la séance, vise à modifier le projet de loi de finances initiale pour 2016, conformément aux annonces du Président de la République.

Par cet amendement, le Gouvernement nous demande d’allouer des crédits complémentaires à la mission « Défense », à l’instar de ceux que nous avons accordés, hier, à la mission « Justice ».

Le ministre a expliqué à l’instant les besoins que ces crédits sont destinés à couvrir.

Il s’agit tout d’abord de financer la reconstitution des stocks de munitions à la suite de l’intensification des frappes. J’avoue qu’il existe une subtilité que je n’ai pas encore bien saisie – mais que je vous promets d’examiner de plus près – sur le point de savoir ce qui, des stocks ou des flux, est éligible aux OPEX. Mais les opérations extérieures, ce sont aussi des dépenses de carburant ou de personnels, par exemple. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous faire un point sur les opérations actuellement en cours et le solde des OPEX pour 2015, eu égard à l’intensification des frappes ?

La question de la réserve, quant à elle, ne nous pose aucune difficulté.

M. Lorgeoux évoquait, voilà quelques instants, une baisse des crédits alloués au renseignement entre 2015 et 2016. Vous nous proposez, par cet amendement, de les réévaluer. Pourriez-vous nous apporter également quelques précisions sur ce sujet ?

Sous ces réserves, la commission des finances a émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, vous m’interrogez tout d’abord sur la question des munitions. Il s’agit d’un débat technico-financier que nous pourrons poursuivre avec mon collègue Michel Sapin, dont les compétences sont grandes en ce domaine. (Sourires.)

Il se trouve que, juridiquement parlant, les flux de munitions sont éligibles aux OPEX, mais non les stocks.

M. Michel Sapin, ministre. Et quand il n’y a plus de stocks ? (Sourires.)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Quand il n’y a plus de stocks, il n’y a plus de flux ! (Nouveaux sourires.)

Nos discussions inspireront peut-être aux chercheurs des sujets de thèse très pointus…

S’agissant du niveau des OPEX pour 2015, monsieur le rapporteur spécial, il me semble vous avoir répondu lors de mon intervention liminaire. Comme je vous l’ai indiqué, leur coût sera intégralement couvert par le décret d’avance.

Je ne peux faire aucun commentaire sur les outils techniques que les crédits supplémentaires que je vous demande de bien vouloir allouer au renseignement nous permettront de mettre en place. Ces détails relèvent du secret-défense. Je dirai simplement qu’il s’agit d’appliquer les dispositions techniques prévues dans la loi relative au renseignement afin de la rendre complètement opérationnelle.

Je souhaite préciser, notamment à M. Lorgeoux, que les crédits affectés au renseignement n’ont jamais diminué. Leur baisse apparente tient au changement de périmètre de ces services dont je vous propose, à travers cet amendement, de renforcer encore les moyens.

Nous n’avons cessé d’accroître les effectifs de nos services de renseignement, qui sont un outil de notre souveraineté. Il est indispensable de garantir et de poursuivre cet effort.

Un besoin en moyens techniques supplémentaires se fait sentir pour 2016. S’agissant des besoins en personnels, j’ai indiqué à quel rythme ils pourraient être pourvus dans le cadre de la loi de programmation militaire.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.

M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. J’exprimerai d’abord un regret sur notre méthode de travail.

Si je comprends qu’il faille faire vite et que les règles de la discussion budgétaire nous obligent à des interventions courtes, je trouve que disposer de trois minutes seulement pour s’exprimer sur un sujet aussi important que celui des crédits du programme 146, ce n’est pas suffisant. (Applaudissements.)

MM. Christian Cambon et Yves Pozzo di Borgo. Très bien !

M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères. Le Parlement devrait revoir ses méthodes de travail. Nous sommes contraints de résumer nos travaux, alors que les circonstances actuelles devraient nous pousser à aller au fond des choses.

Cela étant dit, monsieur le ministre – et je sais que nous aurons l’occasion de poursuivre notre discussion en commission –, je voudrais vous dire pourquoi je vais voter avec conviction cet amendement.

D’abord, parce qu’il correspond aux engagements que vous avez pris. Nous avons entrepris un effort de redressement et, de rendez-vous en rendez-vous, tout se passe comme nous le souhaitons.

Mais surtout, parce que ce vote, que nous souhaitons le plus large, le plus massif possible, sera la vraie réponse à apporter aux terroristes. Ces derniers spéculent toujours sur la fragilité de la démocratie, sur nos divisions, sur nos incapacités – par moments – à décider.

Le Président de la République a fixé une orientation. La démocratie française, forte autour de ses institutions, forte autour de son État, forte autour de son Parlement, est capable de répondre massivement « oui » à cet effort de défense pour protéger la France et les Français.

Ce vote, qui nous satisfait sur le plan technique, exprime avant tout notre volonté, celle d’un pays qui veut se défendre avec cœur, avec courage dans le respect de ses institutions rassemblées. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Je m’associe à tout ce qui s’est dit sur la qualité de notre défense, l’effort fourni et la façon dont la nation soutient à la fois ce que vous êtes, monsieur le ministre, et ce que vous représentez.

Je ne veux pas apporter de bémol et j’entends bien la problématique de la durée des interventions. Je veux simplement rappeler que nous devons examiner trente missions en vingt jours. Je comprends que le temps de parole alloué puisse ne pas sembler suffisant, mais nous avons dû faire des arbitrages et formuler des propositions. À notre grand regret, mon cher collègue et président de la commission des affaires étrangères, nous ne pouvons guère faire mieux.

Lorsque j’avais présenté l’organisation de la discussion budgétaire, en juillet dernier, lors de la conférence des présidents, j’avais indiqué combien ce serait difficile.

Les commissions, notamment la commission des finances, ont réalisé un travail remarquable. Nous vous avions d’ailleurs reçu, monsieur le ministre, avec grand plaisir au moment de l’examen de la loi de règlement.

Je sais que cela peut sembler difficile, mais accorder plus de temps aux orateurs nous emmènerait trop loin.

L’importance de ce vote se trouve non pas dans les temps de parole, monsieur le ministre, mais dans la façon dont vous allez être soutenu. Je pense que la quasi-totalité, sinon la totalité, des membres de cet hémicycle votera les crédits de cette mission. C’est historique.

Mme la présidente. Vous aurez noté, monsieur le président Raffarin, que j’ai laissé à M. le ministre tout le temps nécessaire pour s’exprimer, eu égard à l’importance du sujet.

M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères. Je vous en remercie, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à Mme Leila Aïchi, pour explication de vote.

Mme Leila Aïchi. Monsieur le ministre, en toute responsabilité, nous voterons cet amendement.

Nous regrettons cependant que le Gouvernement n’ait pas dévolu davantage de moyens à l’opération Sentinelle et au renseignement.

Au regard des tristes événements du 13 novembre dernier, il semble clair que l’armée est plus à même de répondre aux défis d’une guerre asymétrique qui ne porte pas son nom.

Sous ces deux réserves, nous voterons cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Le groupe UDI-UC avait majoritairement voté la loi de programmation militaire, ce qui avait permis de faciliter l’adoption de ce texte, sous la houlette du président Carrère, auquel je voudrais aussi rendre hommage. (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)

L’ensemble de mon groupe votera cet amendement pour les raisons déjà invoquées par les précédents orateurs.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.

M. Yves Pozzo di Borgo. Nous sommes quelque peu frustrés de ces temps de parole écourtés et je m’associe à la remarque du président de la commission des affaires étrangères, ainsi qu’à celle de la présidente de la commission des finances.

Je voudrais juste évoquer deux chiffres : les exportations d’armement ont rapporté 15 milliards d’euros à la France en 2015. Savez-vous quelle est la part de l’armée dans cette somme ? Elle n’est que de 7,5 millions d’euros, au titre des prestations vendues, ainsi que l’a rappelé tout à l’heure Joël Guerriau ! La comparaison se passe de mots.

Il nous semble plus que jamais nécessaire de réfléchir à la façon dont l’armée pourrait bénéficier davantage de ces ventes d’armes. Si nous arrivions à gratter tout cela, peut-être pourrions-nous éviter, à l’avenir, d’avoir à adopter de tels amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-311.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été voté à l’unanimité des présents.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-84 est présenté par MM. Trillard, Lorgeoux, J. Gautier, Reiner et Pintat, au nom de la commission des affaires étrangères.

L'amendement n° II-181 est présenté par M. Bouvard.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

15 000 000

 

15 000 000

 

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défensedont titre 2 

Équipement des forces

 

15 000 000

 

15 000 000

TOTAL 

15 000 000 

15 000 000 

15 000 000 

15 000 000 

SOLDE

0

0

La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-84.

M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. La Cour des comptes s’est fait l’écho des difficultés bien connues que traverse actuellement l’Office national d’études et de recherches aérospatiales, l’ONERA, comme elle s’est fait l’écho de difficultés dans toutes les administrations.

La situation appelle non seulement des solutions à moyen terme, mais surtout la conclusion rapide d’un contrat d’objectifs et de performance.

Nous avons que la soufflerie de Modane est en danger et que le site de Châtillon n’est pas tout à fait aux normes de sécurité.

C'est la raison pour laquelle nous proposons de transférer 15 millions d’euros du programme 146 vers le programme 144.

Cet amendement nous permettra au moins d’entendre le ministre sur ce sujet. Peut-être a-t-il des solutions à nous proposer…

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Bouvard, pour présenter l’amendement n° II-181.

M. Michel Bouvard. Eu égard au contexte actuel, je n’aurais pas déposé cet amendement si nous n’étions pas en situation de grande urgence.

Il faut, à l’évidence, que le contrat d’objectifs et de moyens soit négocié, que l’ONERA relève le challenge et que la direction générale de l’aviation civile apporte sa part au financement de l’ONERA, car il s’agit ici de recherche duale.

Je le répète, l’urgence est extrême. La soufflerie de Modane, dont l’intérêt stratégique est souligné par tous les constructeurs européens, est menacée par un affaissement des sols, qui s’est amplifié ces derniers temps. À terme, c’est la structure même du bâtiment qui pourrait être affectée.

Le coût de la reconstruction de cette soufflerie s’élèverait à 700 millions d’euros. Si nous n’intervenons pas rapidement, sa remise en état, quant à elle, peut coûter jusqu’à 300 millions d’euros.

La soufflerie de Modane est unique au monde. C’est la seule qui permette d’analyser des maquettes de missile en grandeur réelle ou des maquettes de gros avions à une taille raisonnable.

Il y a une vingtaine d’années, on considérait que le numérique pouvait tout faire. Puis on s’est aperçu que ces grandes souffleries gardaient toute leur utilité, puisqu’elles permettaient d’obtenir des résultats qu’on ne peut avoir qu’en situation réelle.

Monsieur le ministre, nous avons besoin d’une décision rapide. L’ONERA autofinance déjà 1,6 million d’euros, pour mener les études et trouver la solution technique, qui est complexe. Les travaux doivent être engagés en 2016, ce qui suppose que l’ONERA en ait les moyens budgétaires.

Il s’agit de sauvegarder un patrimoine de recherche scientifique incomparable au niveau mondial. Pour avoir été longtemps l’élu territorial de ce secteur, j’ai vu défiler à cet endroit tous les grands constructeurs mondiaux, toutes les équipes de recherche.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Je rappelle que nous avons été alertés sur la situation de la soufflerie de Modane, qui est désormais bien connue. Je note que la subvention du ministère de la défense à l’ONERA augmente de 7 % cette année, ce qui constitue déjà un effort.

La position de la commission des finances, c’est la sanctuarisation des crédits de la défense.

Si l’ONERA a incontestablement une vocation militaire, il a également une vocation civile. Je ne verrais aucun inconvénient à ce que la direction générale de l’aviation civile participe au financement en question. J’observe simplement qu’elle ne subventionne plus l’ONERA.

J’ajoute que l’office est un EPIC, un établissement public à caractère industriel et commercial, qui a vocation à travailler avec le secteur public, mais aussi avec le secteur privé. En tant qu’EPIC, il est tout à fait à même d’avoir un plan de développement. La Cour des comptes l’a souligné elle-même, il faut éviter de lancer des investissements sans plan stratégique ni contrat d’objectifs. Je n’ai pas noté que l’ONERA disposait de ces deux outils.

Enfin, d’un strict point de vue budgétaire, l’ONERA dispose de biens immobiliers inutilisés dans les secteurs de Meudon et Châtillon, certains de mes collègues, notamment des Hauts-de-Seine, me l’ont rappelé. Il y a peut-être là une recette possible…

Pour toutes ces raisons, la commission des finances demande le retrait de ces amendements identiques, qui sont des amendements d’appel. À ce titre, ils seront, j’en suis sûr, entendus par M. le ministre.

S’ils n’étaient pas retirés, la commission se verrait contrainte d’émettre un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. J’ai bien entendu les appels des sénateurs faisant état des difficultés de l’ONERA. Je les entends d’autant mieux qu’elles ont déjà été portées à ma connaissance au moment du débat qui s’est tenu à l’Assemblée nationale. Il y a vraiment un groupe qui soutient fortement l’ONERA ! Et je voudrais en faire partie !

Premier point, le ministère de la défense, contrairement à ce que j’ai pu lire ou entendre ici ou là – je ne parle pas de ce que vous venez de dire – ne laissera pas tomber l’ONERA. D’ailleurs, en 2015, nous avons ajouté 9 millions d’euros pour boucler le budget de l’office. Nous sommes donc tout à fait conscients de la situation.

Deuxième point, cette situation traduit un problème de fond, évoqué par le rapporteur spécial. Il convient en effet d’envisager avec l’ONERA une refondation de sa stratégie, qui permette aux industriels de s’investir davantage dans cet outil, qui n’est pas propre au ministère de la défense. Un contrat d’objectifs et de performance, que j’espère pouvoir valider, me sera ainsi présenté avant la fin de cette année.

Troisième point, concernant la soufflerie, qui est un sujet dans le sujet, je comprends vos préoccupations. Des mesures urgentes ont été prises par l’ONERA et un plan de rénovation pour les années 2016-2017, que je vais étudier avec beaucoup d’attention, est en cours d’élaboration. Il entrera dans le cadre du contrat d’objectifs que je viens d’évoquer.

Je suis défavorable à ces amendements identiques. J’espère toutefois avoir apporté les réponses nécessaires.

Mme la présidente. L’amendement n° II-84 est-il maintenu, monsieur Trillard ?

M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. M. le ministre a toutes les cartes en main pour mener une telle opération. Je ne voudrais pas être amené à déposer un nouvel amendement sur le même sujet l’an prochain. Je lui fais donc confiance pour analyser rapidement la direction à prendre. Certaines solutions ont été avancées. Il est possible que les industriels préfèrent payer les brevets à la valeur qu’ils ont plutôt que la recherche. (M. Jacques Gautier applaudit.)

Quoi qu’il en soit, je retire l’amendement n° II-84.

Mme la présidente. L’amendement n° II-84 est retiré.

L’amendement n° II-181 est-il maintenu, monsieur Bouvard ?

M. Michel Bouvard. Je partage l’analyse de M. le rapporteur spécial. Les travaux de la Cour vont dans le bon sens. J’ai entendu le ministre affirmer qu’il y avait « un sujet dans le sujet » et que des décisions pourront être prises s’agissant de la soufflerie S1, dans le cadre d’un contrat d’objectifs et de performance, qui est nécessaire et à propos duquel le Gouvernement est légitimement exigeant.

Je retire l’amendement n° II-181.

Mme la présidente. L’amendement n° II-181 est retiré.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits, modifiés.

(Ces crédits sont adoptés.)  (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste, de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

Etat B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Etat D

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Défense ».

Engagements financiers de l’État

Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux

Compte de concours financiers : Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

Compte d’affectation spéciale : Participation de la France au désendettement de la Grèce

Compte d’affectation spéciale : Participations financières de l’État

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que des comptes d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et « Participations financières de l’État ».

La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur spécial.

M. Serge Dassault, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant que rapporteur spécial de la mission « Engagements financiers de l’État », je vais vous faire part de mes observations sur la situation de nos finances publiques, avant de formuler un certain nombre de propositions qui permettraient de contribuer à une véritable amélioration de notre situation économique et budgétaire. En réalité, cette dernière n’est pas aussi brillante qu’on le souhaiterait ou qu’on le dit.

Le Gouvernement prévoit en effet une croissance de 1,1 % pour 2015 et de 1,6 % pour 2016. Si le Haut Conseil des finances publiques estime, dans son avis rendu le 30 septembre dernier, que l’objectif du Gouvernement est crédible pour 2015, il considère en revanche que, « compte tenu de l’accroissement des incertitudes depuis l’été, […] l’hypothèse d’une croissance de 1,5 % en 2016 ne peut plus être qualifiée de “prudente” ».

Si le Gouvernement doit à juste titre augmenter le financement de notre sécurité, rien ne l’empêche de faire aussi des économies, en arrêtant de financer des dépenses de fonctionnement par des emprunts. Je pense notamment aux aides supposées inciter les chômeurs à travailler et qui ne servent malheureusement à rien.

Le 18 septembre 2015, l’agence de notation Moody’s a procédé à une nouvelle dégradation de la note de la dette française. Elle s’est ainsi alignée sur les autres agences, qui avaient dégradé la note de la France au dernier trimestre 2014. La prochaine baisse risque de décourager nos investisseurs et de déclencher une augmentation des taux d’intérêt exigés par eux, ce qui serait dramatique, car cela pourrait nous mettre en cessation de paiement. Ce n’est pas sûr, mais il faudrait se préparer à une telle hypothèse, ce que l’on ne fait pas. Or nous sommes sous haute surveillance !

Les principales raisons de notre manque de croissance résident dans notre système fiscal. L’ISF, des prélèvements sociaux sur les dividendes de 15,5 % et un impôt sur le revenu dont le taux maximum atteint 45 % conduisent à une imposition totale de plus de 65 %, ce qui provoque le départ de nos investisseurs, nous privant ainsi de toute croissance.

En maintenant dans le même temps toute leur confiance à l’Allemagne, qui bénéficie auprès de chacune des agences de notation de la note triple A, les agences de notation ont clairement marqué tout l’écart qui sépare aux yeux des investisseurs un pays capable de dégager un excédent budgétaire, parce qu’il a fait les économies nécessaires, d’un pays comme le nôtre ou plutôt d’un gouvernement comme le nôtre, qui continue de créer de nouvelles dépenses, sans faire de réelles économies de fonctionnement.

Certes, il faut que les riches paient plus, comme vous le dites, monsieur le ministre, mais il y a une limite au-delà de laquelle ils ne paieront plus rien, car ils partiront, excédés, investir ailleurs.

L’impôt sur le revenu, dont 80 % est payé par seulement 20 % des contribuables, est un suicide collectif. Trop d’impôt tue l’impôt ! Ce sont les pays où la pression fiscale est la plus faible qui sont les plus riches. Tous les contribuables devraient payer un impôt, même minime.

Notre besoin de financement en 2016 atteindra 200,2 milliards d’euros : le déficit budgétaire sera de 73 milliards d’euros et les emprunts arrivant à échéance en 2016 devront être remboursés, à hauteur de 127 milliards d’euros.

Je le rappelle, financer les échéances d’un emprunt par un autre emprunt est rigoureusement interdit pour les entreprises et les collectivités locales. Cela relève de la faillite.

Selon le projet annuel de performances pour 2016, l’encours de la dette de l’État passera, au sens du traité de Maastricht, de 1 584,6 milliards d’euros à la fin de l’année 2015 à 1 647,1 milliards d’euros à la fin de 2016, soit une augmentation de 3,9 %.

La charge de la dette, qui représente 44,5 milliards d’euros – elle est en hausse de 2,1 milliards d’euros par rapport à 2015 –, pèsera très lourd dans le budget.

Cette situation exceptionnelle, qui nous permet de ne pas voir augmenter, pour le moment, la charge de notre dette, est due aux taux d’intérêt dont nous profitons actuellement. Le directeur général de l’Agence France Trésor, que j’ai auditionné, prévoit cependant que les taux à dix ans peuvent augmenter progressivement dans les mois qui viennent. Ils pourraient atteindre 1,4 % fin 2015, puis 2,4 % fin 2016, en lien avec l’amélioration de la conjoncture économique aux États-Unis et en Europe, mais malheureusement pas en France.

Toutefois, je dois vous signaler que j’ai auditionné avec l’Agence France Trésor dix-huit banques souhaitant participer au financement de notre dette pour les prochaines années. Elles ne craignent pas, pour le moment, une augmentation de nos taux d’intérêt, il faut le signaler. Toutefois, cela pourrait ne pas durer.

Enfin, pour nous permettre de réduire le chômage et améliorer notre croissance, je vous propose – j’espère que vous m’écouterez ! – de mettre en place la flexibilité de l’emploi, avec des contrats de mission ou de chantier. En effet, vous n’arriverez jamais à inverser la courbe du chômage avec les emplois d’avenir, qui ne sont pas d’avenir, ou les emplois aidés, qui ne sont pas aidés.

Cela ne sert à rien ! Les entreprises doivent pouvoir licencier le personnel qu’elles ont embauché si elles n’ont plus de travail à leur fournir. Ce n’est pas en conservant le CDI que vous résoudrez un jour le problème du chômage, au contraire ! D’ailleurs, il ne cesse d’augmenter.

Deuxièmement, je propose de mettre en place un nouveau système fiscal, articulé autour d’une flat tax à trois ou quatre taux, 5, 10, 20, 30 %, tous les contribuables étant imposables. C’est indispensable ! Le taux maximum tout compris ne doit pas excéder 30 % : c’est le seul moyen susceptible de relancer la croissance et d’augmenter nos recettes fiscales, les investissements et l’emploi.

La croissance n’augmentera pas tant que vous ne baisserez pas les impôts des plus riches ! C’est ainsi : ce sont non pas les plus pauvres, mais les plus riches, qui font la croissance, parce que ce sont eux qui investissent ! Et si vous persistez à imposer excessivement les plus riches, ils partiront, et la croissance avec eux. Il ne faut pas rêver !

Je propose enfin de supprimer les lois fixant la durée légale du temps de travail à 35 heures hebdomadaires, afin d’améliorer la compétitivité de toutes nos entreprises. Ces mesures grèvent chaque année notre budget de 21 milliards d’euros !

Chers collègues, permettez-moi de préciser que ces réformes ne sont ni de droite ni de gauche,…