M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Il est effectivement négatif, et je vais essayer d’expliquer pourquoi.
Tout d’abord, votre amendement pose un problème de forme en ce qu’il vise à inscrire une mission de l’Agence au sein de l’article 1er, qui définit l’Agence, et non au sein de l’article 3, qui dresse la liste des différentes missions de l’Agence.
Ensuite, sur le fond, l’Agence peut d’ores et déjà assister l’autorité judiciaire. Vous avez indiqué qu’elle ne pouvait que « détecter » les faits, ce qui est faux. L’article 1er, que je vous invite à relire, dispose que « l’Agence de prévention de la corruption est un service à compétence nationale, placé auprès du ministre de la justice, ayant pour mission d’aider les autorités compétentes et les personnes qui y sont confrontées à prévenir et à détecter […] ». Toutes les composantes de l’autorité judiciaire, et pas seulement le procureur de la République financier, peuvent donc solliciter l’aide de cette agence.
À de nombreuses occasions, le service central de prévention de la corruption a apporté son concours aux autorités judiciaires, aux membres du parquet comme à des juges d’instruction. La nouvelle agence pourra naturellement continuer de répondre aux demandes d’avis des autorités judiciaires.
Un autre argument me semble plus important encore : je pense que cet amendement présente un risque constitutionnel.
Quelles investigations peut réaliser un service administratif ? L’Agence n’a aucun pouvoir judiciaire et n’est pas composée d’enquêteurs. Il existe déjà des organismes judiciaires spécialisés, à l’instar de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales.
En 1993, le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions par lesquelles le législateur confiait des pouvoirs d’investigations au service central de prévention de la corruption, considérant que ces investigations n’étaient pas définies « de manière suffisamment claire et précise » et que « dès lors cette formulation est susceptible d’entraîner des atteintes à la liberté individuelle sans garantie de l’autorité judiciaire ».
Je ne suis pas sûr que le renvoi à la seule autorité du procureur de la République financier suffise à définir un cadre législatif de garanties.
Je tiens à rappeler que cette agence sera à la disposition de toutes les autorités compétentes.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je ne reviendrai pas sur les habituels problèmes de forme que le rapporteur m’oppose pour éviter de poser les vraies questions…
Par contre, de deux choses l’une : soit le terme « détecter » ne signifie strictement rien, et il faut alors n’inscrire que la seule prévention dans les missions de l’Agence ; soit ce terme signifie quelque chose, et il faut alors permettre à l’Agence de mener un certain nombre d’investigations à la demande du parquet financier.
Un tel dispositif me semble aller dans le sens souhaité par la commission, voire même aller un peu plus loin que la seule détection pifométrique. À moins que cette agence n’ait qu’une vocation purement décorative…
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
L’Agence de prévention de la corruption est dirigée par un magistrat hors hiérarchie de l’ordre judiciaire nommé par décret du Président de la République pour une durée de six ans non renouvelable. Il ne peut être mis fin à ses fonctions que sur sa demande ou en cas d’empêchement ou en cas de manquement grave.
Le magistrat qui dirige l’agence ne reçoit ni ne sollicite d’instruction d’aucune autorité administrative ou gouvernementale dans l’exercice des missions mentionnées aux 3° et 3° bis de l’article 3.
Le magistrat qui dirige l’agence est tenu au secret professionnel.
Un décret en Conseil d’État précise les conditions de fonctionnement de l’agence.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l'article.
Mme Éliane Assassi. Nous l’avons déjà affirmé en première lecture, cette agence, tant dans sa composition que dans son fonctionnement, nous laisse pour le moins dubitatifs.
Sans revenir sur nos doutes persistants, je souhaiterais insister sur la composition de cette agence. Quelle que soit sa dénomination – Agence française anticorruption ou Agence de prévention de la corruption –, on nous renvoie, plus ou moins rapidement, à un décret en Conseil d’État afin de préciser ses conditions de fonctionnement.
Dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, la composition de la commission des sanctions est précisée, mais non celle de l’Agence. Dans la version qui nous est soumise aujourd’hui, la commission des sanctions ayant été supprimée, nous sommes renvoyés au décret en Conseil d’État dès le quatrième alinéa de l’article 2.
Toujours est-il que la composition d’une agence qui tend à prévenir et à détecter les faits de corruption, dans l’entreprise comme dans les administrations de l’État, devrait respecter un certain pluralisme, voire, a minima, comprendre des citoyens en sus, bien évidemment, des organisations syndicales.
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par MM. Anziani et Yung, Mme Espagnac, MM. Guillaume, Sueur, Marie, Vaugrenard, Vincent et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1, première phrase
Remplacer les mots :
de prévention de la corruption
par les mots :
française anticorruption
II. – Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il ne peut être membre de la commission des sanctions ni assister à ses séances.
II. – Après l’alinéa 2
Insérer huit alinéas ainsi rédigés :
L’agence comprend une commission des sanctions chargée de prononcer les sanctions mentionnées à l’article L. 23-11-4 du code de commerce.
La commission des sanctions est composée de six membres :
1° Deux conseillers d’État désignés par le vice-président du Conseil d’État ;
2° Deux conseillers à la Cour de cassation désignés par le premier président de la Cour de cassation ;
3° Deux conseillers maîtres à la Cour des comptes désignés par le premier président de la Cour des comptes.
Les membres de la commission sont nommés par décret pour un mandat de cinq ans. Le président de la commission est désigné parmi ses membres, selon les mêmes modalités.
Des suppléants sont nommés selon les mêmes modalités.
En cas de partage égal des voix, le président de la commission a voix prépondérante.
III. – Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
Le magistrat qui dirige l’agence et les membres de la commission des sanctions sont tenus au secret professionnel.
IV. – Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que les modalités de désignation des membres de la commission des sanctions, de manière à assurer une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes pour chacune des catégories énumérées aux 1° à 3°
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Cet amendement vise à rétablir la commission des sanctions, et donc la sanction administrative, dont j’ai déjà parlé longuement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de revenir sur ma préférence pour les termes « Agence de prévention de la corruption ».
Concernant la commission des sanctions, notre différence de doctrine est fondamentale. Je rappelle une nouvelle fois que l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, est la mieux placée pour répondre efficacement aux faits de corruption. Si la justice n’a pas les moyens d’y faire face, renforçons ses moyens !
Je comprends parfaitement l’exposé intellectuellement honnête de M. Anziani. Un certain nombre d’organismes ont déjà la possibilité de prononcer des sanctions, et le Conseil constitutionnel a estimé que cela ne posait pas de difficulté. A fortiori, il en irait de même si cette possibilité était laissée à la seule autorité judiciaire.
À titre personnel, je ne crois pas que créer des commissions administratives empiétant sur les prérogatives de l’autorité judiciaire soit une bonne solution. J’ai eu le plaisir de convaincre la commission des lois sur cette question ; j’espère arriver à convaincre le Sénat.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Nous avons déjà longuement débattu de ces questions.
Je crois indispensable, dans le respect de nos principes constitutionnels maintenant fixés très clairement par les dernières décisions du Conseil constitutionnel, que cette agence dispose de pouvoirs de sanction. Il s’agit d’une différence fondamentale avec l’actuel service central de prévention de la corruption.
Si l’on veut que cette agence puisse véritablement agir, si l’on veut que les entreprises mettent réellement en place des plans de prévention de la corruption, il faut bien doter l’Agence de la capacité de prendre des sanctions, indépendamment de la saisine éventuelle du juge. Il s’agit d’assurer son autonomie et son autorité.
Telle est la raison pour laquelle je soutiens très fermement l’amendement de M. Anziani.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
L’Agence de prévention de la corruption :
1° Participe à la coordination administrative, centralise et diffuse les informations permettant d’aider à prévenir et à détecter les faits de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme.
Dans ce cadre, elle apporte son appui aux administrations de l’État, aux collectivités territoriales et à toute personne physique ou morale ;
2° Élabore des recommandations destinées à aider les personnes morales de droit public et de droit privé à prévenir et à détecter les faits de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme.
Ces recommandations sont adaptées à la taille des entités concernées et à la nature des risques identifiés. Elles sont régulièrement mises à jour pour prendre en compte l’évolution des pratiques et font l’objet d’un avis publié au Journal officiel ;
3° Contrôle, de sa propre initiative, la qualité et l’efficacité des procédures mises en œuvre au sein des administrations de l’État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et sociétés d’économie mixte, et des associations et fondations reconnues d’utilité publique pour prévenir et détecter les faits de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme. Elle contrôle également le respect des mesures mentionnées au II de l’article 8.
Ces contrôles peuvent également être effectués à la demande du président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, du Premier ministre, des ministres ou, pour les collectivités territoriales et leurs établissements publics et sociétés d’économie mixte, du représentant de l’État. Ils peuvent faire suite à un signalement transmis à l’agence par une association agréée dans les conditions prévues à l’article 2-23 du code de procédure pénale.
Ces contrôles donnent lieu à l’établissement de rapports transmis aux autorités qui en sont à l’initiative ainsi qu’aux représentants de l’entité contrôlée. Ils contiennent les observations de l’agence concernant la qualité du dispositif de prévention et de détection de la corruption mis en place au sein des entités contrôlées ainsi que des recommandations en vue de l’amélioration des procédures existantes ;
3° bis Exerce les attributions prévues à l’article 8 de la présente loi, à l’article 131-39-2 du code pénal et aux articles 41-1-2 et 764-44 du code de procédure pénale ;
4° Veille, à la demande du Premier ministre, au respect de la loi n° 68-678 du 26 juillet 1968 relative à la communication de documents et renseignements d’ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales étrangères, dans le cadre de l’exécution des décisions d’autorités étrangères imposant à une société dont le siège est situé sur le territoire français une obligation de se soumettre à une procédure de mise en conformité de ses procédures internes de prévention et de détection de la corruption ;
4° bis et 5° (Supprimés)
Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article.
M. le président. L'amendement n° 152 rectifié, présenté par MM. Collombat, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
Dans ce cadre, elle répond aux demandes d’avis émanant des administrations de l’État, des collectivités territoriales et de toute personne physique ou morale concernant la conformité des dispositions de prévention et de détection des faits précités ;
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement tend à permettre aux personnes publiques et privées de solliciter des avis auprès de l’Agence pour s’assurer de la bonne mise en conformité de leurs normes et procédures au cadre juridique relatif à la prévention et à la détection de faits de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Cet amendement me semble satisfait. En effet, l’alinéa 3 de l’article 3 dispose que l’Agence « apporte son appui aux administrations de l’État, aux collectivités territoriales et à toute personne physique ou morale ».
La rédaction issue du texte de la commission permet donc à l’Agence de répondre à toutes les demandes d’avis, et pas seulement à celles concernant la conformité des dispositions de prévention et de détection de faits de corruption.
L’adoption de cet amendement reviendrait à limiter le champ d’action de l’Agence.
Pour ces raisons, monsieur Collombat, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Collombat, l'amendement n° 152 rectifié est-il maintenu ?
M. Pierre-Yves Collombat. Malgré l’alliance objective entre la commission et le Gouvernement, qui me semble pleine d’avenir, je le maintiens.
Je veux bien concéder que la formulation que j’ai retenue est plus restreinte que celle de la commission, mais elle est aussi plus précise et donc plus opérationnelle. Ce qu’on demande, c’est que l’Agence fasse des réponses suffisamment claires et précises pour savoir si les dispositifs mis en place ont une utilité. Je veux bien qu’on papote, qu’on donne des avis, mais s’ils n’engagent personne, en particulier l’Agence, je ne vois vraiment pas à quoi ils serviront. Mais c’est peut-être ça, l’objectif…
M. le président. L'amendement n° 155, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 6, seconde phrase
Remplacer les mots :
au II de l'article 8
par les mots :
à l'article L. 23-11-2 du code de commerce
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 135 rectifié, présenté par MM. Collombat, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Rétablir le 4° bis dans la rédaction suivante :
4° bis Avise le procureur de la République compétent en application de l'article 43 du code de procédure pénale des faits dont elle a eu connaissance dans l'exercice de ses missions et qui sont susceptibles de constituer un crime ou un délit. Lorsque ces faits sont susceptibles de relever de la compétence du procureur de la République financier en application des 1° à 8° de l'article 705 ou de l'article 705-1 du même code, l'Agence de prévention de la corruption en avise simultanément ce dernier. Lorsque ces faits entrent dans son domaine de compétence, elle prête son concours, sur leur demande, aux autorités judiciaires qui en sont saisies ;
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement recueillera probablement un avis défavorable… En fait, c’est toujours le même problème : je veux une agence qui serve à quelque chose. C’est fâcheux, car vous voulez une agence simplement décorative, pour faire croire qu’on fait quelque chose, alors qu’on ne fait rien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Notre collègue Collombat nous invite toujours à ne pas faire de lois bavardes. Or, aujourd’hui, il nous inviterait presque à faire le contraire.
M. Pierre-Yves Collombat. Ce texte est déjà extrêmement bavard !
M. François Pillet, rapporteur. Je vous laisse la responsabilité de cette affirmation, mon cher collègue.
Cet amendement vise à rétablir une disposition ajoutée en nouvelle lecture, à l’Assemblée nationale, relative à l’information des parquets compétents lorsque l’Agence a connaissance d’un délit ou d’un crime. C’est tout à fait redondant avec l’article 40 du code de procédure pénale. La rédaction de cet amendement, quasiment reprise de cet article, précise que l’Agence pourra prêter son concours aux autorités judiciaires. Or, comme je l’ai déjà souligné, l’Agence peut d’ores et déjà le faire dans le cadre de sa mission.
Si les travaux parlementaires ont une utilité dans l’analyse d’une loi, il suffira de s’y référer pour que soit acté le fait que je vous ai donné satisfaction.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je voudrais simplement faire observer à notre éminent rapporteur que l’alinéa 3 de l’article 6 A prévoit que « toute personne à l’origine d’un signalement abusif ou déloyal engage sa responsabilité sur le fondement de l’article 226-10 du code pénal et de l’article 1240 du code civil ».
Si cette formulation n’est pas redondante, je me demande ce qu’elle est ! Il faut croire que la redondance est plus acceptable pour les uns que pour les autres…
M. le président. L'amendement n° 66, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Rétablir le 5° dans la rédaction suivante :
5° Élabore chaque année un rapport d’activité rendu public.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Comme l’a rappelé Éliane Assassi lors de la discussion générale, le déficit démocratique actuel est entretenu par un sentiment de corruption généralisée à tous les étages.
Si nous avons des doutes quant à la pertinence de cette agence, la publication de son rapport d’activité ne peut que s’avérer bénéfique pour le débat public. Il ne s’agit pas seulement d’un énième rapport. Permettre au grand public de connaître l’état des dispositifs mis en œuvre afin de prévenir la corruption dans les entreprises ou dans les administrations publiques nous semble un minimum pour faire reculer la défiance à l’égard des institutions. En outre, cette publication permettrait de mettre en valeur le rôle concret de cette agence et de laisser à nos concitoyens le soin de juger de la pertinence de son existence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Les auteurs de cet amendement considèrent qu’il est nécessaire d’informer le public des travaux de l’Agence ; je le crois aussi. Néanmoins, je ne crois pas nécessaire d’inscrire la publication de ce rapport dans la loi. En effet, le service central de prévention de la corruption, que cette agence va remplacer, publie déjà des rapports chaque année sans que la loi l’ait précisé.
Est-ce vraiment du ressort de la loi de prévoir que toute instance rende public un rapport annuel ? Vous connaissez depuis longtemps les réserves de la commission des lois et du Sénat sur la question de l’inflation du nombre de rapports.
En l’espèce, nous avons tout lieu de penser que l’agence qui va se substituer au service central de prévention de la corruption continuera de publier un rapport annuel.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement de rétablissement du texte de l’Assemblée nationale. Il me paraît utile qu’un rapport sur les activités de l’Agence soit rendu public.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le rapporteur, nous ne nous inscrivons pas tout à fait dans la « jurisprudence » de la commission des lois sur les rapports : il ne s’agit pas d’un énième rapport remis au Parlement, mais bien d’un rapport d’activité rendu public.
Je ne sais pas si la loi doit être bavarde ou répétitive, mais si le service central de prévention de la corruption publie déjà un rapport d’activité annuel, pourquoi ne pas inscrire cette obligation dans la loi ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
Dans le cadre de ses missions définies aux 3° et 3° bis de l’article 3, les agents de l’Agence de prévention de la corruption peuvent être habilités, par décret en Conseil d’État, à se faire communiquer par les représentants de l’entité contrôlée tout document professionnel, quel qu’en soit le support, ou toute information utile. Le cas échéant, ils peuvent en faire une copie.
Ils peuvent procéder sur place à toute vérification de l’exactitude des informations fournies. Ils peuvent s’entretenir, dans des conditions assurant la confidentialité de leurs échanges, avec toute personne dont le concours leur paraît nécessaire.
Les agents habilités, les experts et les personnes ou autorités qualifiées auxquels ils ont recours et, de manière générale, toute personne qui concourt à l’accomplissement des missions mentionnées à l’article 3 sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont connaissance en raison de leurs fonctions, sous réserve des éléments nécessaires à l’établissement de leurs rapports.
Nul ne peut procéder aux contrôles relatifs à une entité économique ou publique à l’égard de laquelle il détient ou a détenu un intérêt direct ou indirect.
Est puni de 30 000 € d’amende le fait de prendre toute mesure destinée à faire échec à l’exercice des fonctions dont les agents habilités mentionnés au présent article sont chargés.
Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles sont recrutés les experts et les personnes ou autorités qualifiées auxquels il est recouru ainsi que les règles déontologiques qui leur sont applicables.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 142 rectifié, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Fortassin, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Lorsque la visite domiciliaire est effectuée dans le cabinet d’un avocat, au siège d’un organe de presse ou encore dans le cabinet d’un médecin, d’un notaire ou d’un huissier, les dispositions des articles 56-1, 56-2 ou 56-3 du code de procédure pénale, selon les cas, sont impératives.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement vise à renforcer les garanties pour préserver le secret professionnel lors du contrôle sur place dans le cabinet ou au domicile d'un avocat, d’un médecin, au siège d’un organe de presse…
Cette rédaction s'inspire de celle relative aux contrôles opérés par d’autres autorités.
M. le président. L'amendement n° 108 rectifié ter, présenté par Mme Deromedi, MM. Frassa, Bizet, Bouchet, Charon, Danesi, de Raincourt et Houpert, Mme Hummel, M. Husson, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, Lefèvre, P. Leroy, Longuet, A. Marc et Milon, Mme Morhet-Richaud et MM. Soilihi et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Lorsque la vérification sur place des informations fournies concerne le cabinet ou le domicile d’un avocat ou les locaux du conseil de l’ordre des avocats, la visite doit être effectuée par les agents de l’Agence de prévention de la corruption en présence du bâtonnier ou de son délégué, à la suite d’une demande écrite et motivée qui indique les documents professionnels sur lesquels portent la demande de vérification et les motifs qui la justifient. La demande est communiquée dès le début de la procédure de vérification au bâtonnier ou à son délégué par ces agents. Le bâtonnier ou son délégué ont seuls le droit de consulter ou de prendre connaissance des documents se trouvant sur les lieux préalablement à leur éventuelle communication. Aucune communication ne peut concerner un document non mentionné dans la demande. Le bâtonnier ou son délégué peut s’opposer à la communication s’il estime qu’elle serait attentatoire au secret professionnel. Le document est placé sous scellé fermé et transmis sans délai au président du tribunal de grande instance qui statue sur la contestation par ordonnance motivée non susceptible de recours dans les cinq jours de la réception des pièces. Le présent article est également applicable aux vérifications demandées au cabinet ou au domicile d’un avocat au Conseil d’État ou à la Cour de cassation ou dans les locaux de l’ordre des avocats auxdits conseils selon les cas. Le présent alinéa est applicable à peine de nullité.
La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.