M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le Gouvernement est bien évidemment défavorable à ces amendements.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la situation actuelle est-elle satisfaisante ? La réponse est non, comme plusieurs d’entre vous l’ont indiqué, notamment Michel Bouvard. Les saisonniers ne sont pas logés dans des conditions acceptables.
M. Michel Bouvard. Oui !
MM. Michel Bouvard, Jean-Claude Carle et Loïc Hervé. Oui !
M. Jean-Claude Carle. Ce n’est pas vrai !
M. Michel Bouvard. Il ne faut pas dire cela !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Messieurs les sénateurs, vous pouvez vitupérer ; cela ne changera rien au problème ! Si la réponse était oui, nous ne serions pas en train de débattre de ce sujet.
Je ne nie pas que certaines communes et certaines intercommunalités soient vertueuses en la matière, mais il en est également qui ne font aucun effort pour améliorer la situation. C’est dans celles-là que se sont produits des drames, que l’on a retrouvé des travailleurs morts de froid dans leur caravane ou leur voiture.
Au fond, comme pour les textes relatifs au logement social qui sont appliqués dans certains territoires, mais pas dans d’autres, cela ne marchera pas tant que l’on ne se donnera pas les moyens de contraindre les mauvais élèves.
Or vous serez tous d’accord pour dire qu’il faut résoudre le problème là où il se pose, parce qu’il est proprement scandaleux et inadmissible de laisser les saisonniers dans une telle situation. Il faut donc des sanctions.
Comme l’a dit M. le rapporteur pour avis, celles-ci ne sont pas considérables. Elles prennent fin dès que les efforts sont réalisés et que les travailleurs saisonniers sont logés dans de bonnes conditions. Elles ne sont pas automatiques : elles sont laissées à l’appréciation des préfets. Au reste, les conventions visent non seulement le logement social, mais également la location intermédiaire.
J’avais cru comprendre, depuis le début de cette discussion, que vous étiez tous d’accord pour régler le problème délicat et vraiment préoccupant du logement des saisonniers. Puisque nous sommes arrivés à ce point du débat, donnons-nous les moyens de le faire.
Les dispositions de l’article 14 ne poseront aucun problème aux collectivités qui consentent déjà les efforts nécessaires. En revanche, les mauvais élèves pourront être sanctionnés.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Giraud, pour explication de vote.
Mme Éliane Giraud. Le débat sur le logement des travailleurs saisonniers me fait penser à celui que nous avons eu hier soir, quand nous avons discuté d’un amendement, que nous n’avons finalement pas adopté, visant à instaurer une priorité en matière de schéma de desserte numérique pour les communes accueillant une population très aisée.
Tout en reconnaissant que la question du logement est un vrai problème, certains de mes collègues demandent du temps. Comme vient de le dire M. le ministre, il faut régler ce problème. C’est notre devoir de le faire.
Sans nier les efforts des communes, j’estime que cette question du logement, qui est absolument essentielle, doit être traitée prioritairement.
On ne peut pas chercher à lutter contre le chômage et inciter les gens à se mettre au travail sans s’atteler aux problèmes qui existent autour.
En tout état de cause, pour ce qui me concerne, je ne peux pas accepter une réflexion à deux vitesses sur les questions de l’emploi et du logement.
La question de la qualité de vie de nos concitoyens et des jeunes saisonniers qui travaillent dans nos stations pour rendre service à d’autres, un peu plus aisés, mérite notre attention. La montagne doit pouvoir les accueillir tous dans de très bonnes conditions. Nous devons nous fixer cet objectif. C’est notre devoir, et l’on ne saurait s’abriter derrière la création de la convention pour dire que toutes les précautions ont été prises.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. Monsieur le ministre, personne ne conteste qu’il y ait des besoins. Au demeurant, les communes, les stations ont consenti de très gros efforts. L’un de vos prédécesseurs, Louis Besson, que j’ai salué tout à l'heure, nous y a beaucoup aidés, en descendant des crédits de catégorie 1.
Cependant, je suis aussi très attaché à l’équité entre les territoires.
Or, à Paris, l’État est obligé de céder des actifs, avec des décotes qui vont jusqu’à 80 %, pour faire du logement social, quand, dans le même temps, la Ville de Paris vend ses actifs à plein pot pour renflouer ses caisses. Quant à nous, nous devons construire avec des crédits correspondant à notre classement en zone C, en subventionnant les projets à 70 %, la part couverte par les prêts de la Caisse des dépôts et consignations étant de 30 %, avec des prix de construction en montagne supérieurs de 35 % et un foncier hors de prix
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. Michel Bouvard. Les communes ont beaucoup fait. On nous demande aujourd'hui de nouveaux efforts. Nous y sommes prêts.
Cependant, les dotations diminuent et une partie des recettes est prélevée au titre du FPIC, ce qui pose un problème budgétaire.
M. Jean-Claude Carle. Exactement !
M. Michel Bouvard. Il était aussi question, dans la réforme de la DGF, qui, Dieu merci, ne verra pas le jour, de supprimer la dotation touristique.
On nous demande de construire dans des conditions inédites, compte tenu des coûts de construction et, en regard, des prêts qui sont mis en place. Bien sûr qu’il faut des conventions, mais nous devons être capables de financer les opérations, et les ressources ne sont pas extensibles ! Il faut aussi tenir un langage de vérité pour la population permanente.
Le problème serait moins aigu si, demain, les communes de montagne étaient classées en zone A ou B.
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. Michel Bouvard. Tant qu’elles demeureront en zone C, tant que l’on considérera qu’elles construisent au même prix que celles des Landes ou du Finistère, elles ne pourront plus construire de logements, parce qu'on leur a retiré les ressources qui leur permettaient de le faire.
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. D'abord, personne n’est indifférent au sort des travailleurs saisonniers dans les stations de sports d’hiver…
M. René-Paul Savary. Ni au sort des saisonniers en général !
M. Loïc Hervé. … ni, d'ailleurs, dans les autres stations touristiques de notre pays, notamment des jeunes.
Attribuer les drames qui ont pu avoir lieu à la seule inaction des communes me paraît abusif. J’en appelle à un peu de décence, par égard pour les jeunes qui sont morts par intoxication au monoxyde de carbone ou dans des incendies.
Pour être président d’une communauté de communes, je rappelle que l’on retrouve la question de la construction de logements saisonniers dans les programmes locaux de l’habitat, les PLH, qui relèvent de la compétence de l’intercommunalité.
Je veux maintenant répondre à ma collègue iséroise, Mme Giraud. Hier soir, lorsque nous avons débattu de la priorité en matière de numérique pour les stations, on nous a dit qu’il fallait laisser les élus définir eux-mêmes les priorités, au sein des réseaux d’initiative publique. Or, ce soir, pour le logement des travailleurs saisonniers, on décide de recourir à la coercition.
Mme Éliane Giraud. Non ! Il s’agit de conventions !
M. Loïc Hervé. En application du principe de libre administration des collectivités territoriales, j’estime que, si l’on peut fixer dans la loi des objectifs qui nous paraissent importants, il faut s’abstenir de toute coercition.
Mme Cécile Cukierman. Quand il n’y aura plus de saisonniers dans les stations, l’argent ne rentrera plus !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 186 rectifié bis, 415 et 436.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 14
M. le président. L'amendement n° 26 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Delcros, Lasserre et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l'article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Lorsque l’employeur fournit gratuitement un logement permettant l’hébergement d’un travailleur saisonnier, ce logement est fiscalement considéré comme un élément de l’outil de travail de l’entreprise.
II – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Loïc Hervé.
M. Loïc Hervé. L'objet de cet amendement est d'indiquer que, lorsque l’employeur fournit gratuitement un logement permettant l’hébergement d’un travailleur saisonnier, ce logement est fiscalement considéré comme un élément de l’outil de travail de l’entreprise.
De même que l’emploi de salariés est un élément concourant aux dépenses utilisées pour les besoins des opérations taxées à la TVA de l’entreprise, la fourniture des outils nécessaires au travail du salarié fait partie des éléments dont la TVA est récupérable par l’employeur.
Or, parmi les outils nécessaires au travail du salarié saisonnier, nous pouvons compter le logement mis à disposition par l’employeur. Dans bien des cas, notamment dans les stations d’altitude, sans logement, il n'y a pas de salarié, et donc pas de production taxée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Cet amendement concerne le traitement fiscal de la mise à disposition gratuite par l’employeur d’un logement permettant l’hébergement d’un travailleur saisonnier. Il tend à ce que cet avantage en nature soit considéré, fiscalement, comme un élément de l’outil de travail de l’entreprise.
Sur cette proposition de nature fiscale, la commission des affaires économiques souhaite connaître l’avis du Gouvernement. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Je comprends très bien l’intervention de M. Hervé, mais le problème est que l’on se heurte à des règles communautaires : nous ne pouvons pas ainsi décider seuls d’une exonération de TVA.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. L'amendement n° 397, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les communes classées en zone de montagne au sens la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 de développement et de protection de la montagne et classées en commune touristique en application des articles L. 133-11 et L. 151-3 du code du tourisme, il est procédé à une évaluation de l’offre foncière et des coûts de construction pour le logement social et l’accession à la propriété dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi afin de revoir le cas échéant le classement de ces communes au titre des zonages définissant les niveaux d’aides de l’État, les plafonds de loyers et de revenus.
La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Cet amendement concerne le problème des zonages, que nous avons déjà évoqué tout à l'heure.
Les stations de Megève, Chamonix, Courchevel, Val d’Isère, Tignes sont classées en zone C, avec des loyers à l’avenant. Les prêts pour la construction de logements sociaux de la Caisse des dépôts et consignations sont plafonnés en conséquence, avec des enveloppes très basses. Il faut donc subventionner largement.
On peut évidemment mobiliser un peu le dispositif du 1 % logement. Par l’intermédiaire de celui-ci, l’organisme collecteur des remontées mécaniques aide à financer de nombreux logements sociaux, notamment pour les saisonniers.
Nous souhaitons, au travers de cet amendement, qu’un état des lieux soit dressé et que les zonages puissent être modifiés pour prendre en compte la réalité du logement dans les stations de sports d’hiver.
On a beaucoup parlé des saisonniers, mais je rappelle que de jeunes ménages aussi souhaitent pouvoir se loger. Ils ne peuvent pas construire, parce qu’ils n’en ont pas forcément les moyens ou parce qu’il n'y a pas de foncier disponible, du fait du peu de terrains constructibles et de l’existence de zones avalancheuses, de zones Natura 2000, des arrêtés de protection de biotope, des ZNIEFF – les zones naturelles d’intérêt écologique faunistique et floristique – de types I et II, des sites classés et des zones inondables, qui ont tendance, d'ailleurs, à s’étendre, les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement, les DREAL définissant désormais des zones inondables à cinq cents mètres des deux rives du moindre petit ruisseau…
Nous souhaitons que tout cela soit mis à plat, pour coller à la réalité des coûts de construction.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Cet amendement aborde la question de la définition des zonages en territoire de montagne dans le domaine du logement.
Il vise à rendre obligatoire une évaluation de l’offre foncière et des coûts de construction pour le logement social et l’accession à la propriété, afin de revoir le classement de ces communes au titre des zonages définissant les niveaux d’aides de l’État, les plafonds de loyers et de revenus.
D’une part, ce type de diagnostic a sa place dans les PLH, que le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté renforce, sur ce point précis, en prévoyant la mise en place, dans ces plans, d’un volet foncier.
D’autre part, l’auteur de l’amendement demande un diagnostic, mais on ignore qui est censé le réaliser. Les collectivités ou l’État ? On ignore aussi quel est le zonage concerné…
Enfin, il nous semble que la définition de ces zonages relève plutôt du domaine réglementaire.
La commission des affaires économiques est donc défavorable à ce qu’elle considère être un amendement d’appel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le Gouvernement partage les arguments de la commission des affaires économiques.
Par ailleurs, monsieur Bouvard, le zonage dépend non seulement de l’offre foncière, mais aussi du jeu de l’offre et de la demande en matière de logement. C’est une réalité incontestable.
Ce que vous proposez est d’une très grande complexité.
Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas un argument !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Si, madame la sénatrice, c’est un argument, a fortiori dans ce genre de commune, pour ne pas dire dans ce genre de station.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je ne suis pas un élu de montagne, mais certaines des dispositions du présent texte pourraient trouver à s’appliquer sur l’ensemble du territoire national.
La ruralité est également confrontée au problème du zonage. Dans mon département de l’Oise, par exemple, le zonage est ainsi fait que le sud du département, compte tenu de la pression de la demande de logements, draine à lui seul 80 à 90 % des financements du logement social.
On ne pourra améliorer la répartition du logement social sur l’ensemble du territoire et éviter que des ghettos ne se constituent dans des lieux où le logement social est déjà très concentré que si le zonage est modifié. Il faut pouvoir mobiliser les financements du logement social dans des zones rurales retirées au lieu de les concentrer dans des zones déjà très fortement urbanisées.
J’entends bien que l’amendement de M. Bouvard est un amendement d’appel. Comme l’a souligné Gérard Bailly, ses dispositions relèvent essentiellement du domaine réglementaire. Il appartient donc au Gouvernement de prendre conscience de cette difficulté et d’arrêter de tenir un double discours en reprochant aux élus locaux de ne pas suffisamment favoriser la construction de logements sociaux en milieu rural sans mettre à leur disposition les éléments réglementaires et les financements idoines.
Nous attendions donc du ministre une réponse un peu plus explicite…
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Nous n’avons pas voté en faveur des amendements précédents, dont les dispositions ne permettaient pas d’assurer la responsabilité collective nécessaire pour garantir l’accès des saisonniers au logement.
En revanche, nous voterons cet amendement. Comme l’a rappelé M. Bouvard, il s’agit non seulement de permettre aux saisonniers de se loger, mais aussi aux jeunes couples et à toute une nouvelle population de dynamiser, pérenniser et sécuriser le devenir de ces territoires.
La même problématique se pose en termes d’accession à la propriété et de capacité locative. Nous devrons aussi nous pencher sur le développement d’une offre de location résidentielle et non pas uniquement touristique.
L’adoption de cet amendement apporterait une première réponse au problème du logement en station et permettrait de limiter les déplacements pendulaires de jeunes, ou de moins jeunes, qui travaillent en station et résident dans la vallée, parfois à des heures de grande dangerosité sur la route.
Limiter les déplacements permettait en outre d’apporter une contribution, certes minime, au défi climatique.
S’il y a un problème de rédaction, la commission et le Gouvernement peuvent présenter un sous-amendement pour donner toute sa force au dispositif proposé. Si vous ne le faites pas, monsieur le rapporteur pour avis, monsieur le ministre, dites-nous clairement et simplement que vous n’êtes pas d’accord avec l’esprit de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. Je tiens à remercier Mme Cukierman, qui a parfaitement compris le problème.
Il faut prendre conscience de la dangerosité des mouvements pendulaires et de leurs incidences en matière environnementale. Il n’est pas normal que des jeunes, nés dans un village, ne puissent plus y résider en raison du coût du foncier et de notre incapacité à construire du logement social.
La tension locative est réelle. Aujourd’hui, le point de blocage majeur, c’est le zonage. M. Bailly a tout compris : si la rédaction de cet amendement avait été plus précise, on m’aurait objecté que ces dispositions étaient totalement réglementaires et nous n’aurions pu en discuter au titre de l’article 41 de la Constitution. Mais comme je ne suis pas un perdreau de l’année (Sourires.), j’ai rédigé cet amendement de manière à lui permettre d’être examiné…
Monsieur le ministre, nous devons mettre fin à cette injustice, qui ne peut plus durer. Louis Besson a essayé de faire bouger les choses voilà quelques années, lorsqu’il était ministre du logement, mais il s’est heurté à l’opposition de Bercy qui craignait que l’augmentation du nombre de communes en catégorie 1 – à l’époque, on parlait de catégories 1, 2 et 3 – ne grève les finances publiques.
L’Assemblée nationale avait ensuite adopté une disposition permettant aux préfets d’ajuster les zonages, mais le Sénat a ensuite tordu le cou à celle-ci. J’en ai un souvenir précis, car c’est un combat que nous menons depuis des années.
Les communes avaient les ressources nécessaires, quelques années en arrière, pour financer de telles opérations à hauteur de 1 ou de 1,5 million d’euros. Elles ne le peuvent plus, car la péréquation est en train d’amputer les ressources dont elles disposaient pour de tels investissements.
Le zonage doit évoluer. Comment un jeune peut-il se loger en station quand le coût du foncier est le même que celui du XVIe arrondissement de Paris ? Le jeune parisien a droit à un logement social, pourquoi n’en irait-il pas de même en zone de montagne ? Si ce texte ne prend pas en compte ce type de problème, c’est que ce projet de loi Montagne ne sert à rien ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC, ainsi que sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.
Article 14 bis A (nouveau)
Après l’article 8-3 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, il est inséré un nouvel article 8-4 ainsi rédigé :
« Art. 8-4. – Les personnes titulaires de la carte professionnelle peuvent, dans le cadre de la politique d’accès au logement en faveur des travailleurs saisonniers, donner mandat, au sens de l’article 1984 du code civil, à une personne désignée par la collectivité territoriale afin que celle-ci participe à la gestion locative des locaux destinés à la sous-location en faveur des saisonniers. Les missions du mandataire sont définies par décret. »
M. le président. L'amendement n° 402 rectifié, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après l’article 4-1 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, il est inséré un article 4-2 ainsi rédigé :
« Art. 4-2. – En vue du logement des travailleurs saisonniers et par dérogation aux deuxième et troisième alinéas de l’article 4 et à l’article 6, les organismes agréés, conformément à l’article L. 365-4 du code de la construction et de l’habitat, peuvent habiliter, pour certaines missions relevant de la présente loi, des personnels d’une collectivité territoriale. Un décret en Conseil d’État précise ces missions. »
La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. La loi Travail et le projet de loi dont nous discutons améliorent considérablement la situation des travailleurs saisonniers et des pluriactifs.
Le volet logement prévoit notamment qu'une commune reconnue touristique doit, dans les deux ans qui suivent la promulgation de la loi, conclure une convention pour le logement des saisonniers sous peine de perdre sa dénomination de commune touristique.
Le présent amendement vise à régulariser une situation innovante et vertueuse que pratiquent plusieurs stations, comme Les Deux Alpes, en Isère, ou la communauté de communes de Chamonix, en Haute-Savoie, à savoir un dispositif d’intermédiation locative en faveur du logement des travailleurs saisonniers.
Le propriétaire de l’appartement loue, pendant la saison hivernale, son bien meublé à un tarif raisonnable à l’employeur, qui sous-loue ce bien à son employé travailleur saisonnier.
En pratique, les communes ou EPCI de montagne font appel à une agence immobilière à vocation sociale, ou AIVS, titulaire d’une carte professionnelle d’agent immobilier qui signe un mandat de gestion avec le propriétaire. Ce contrat prévoit l'établissement des états des lieux entrant et sortant, la rédaction des baux, la perception et la réservation des loyers, le suivi locatif.
Toutefois, l'AIVS ne dispose pas de suffisamment de personnels pour réaliser tous les états des lieux dès lors que le nombre de logements devient important – de 100 à 250 logements –, autrement dit, dès lors que la politique de logement des saisonniers est réussie.
Pour y remédier, les collectivités souhaitent faire appel à des agents communaux, notamment ceux des centres communaux d’action sociale, ou CCAS, qui ont l'avantage d'être sur place.
Or, au regard de la loi du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, dite loi Hoguet, la personne réalisant l'état des lieux doit être soit un salarié de l'AIVS, soit un agent commercial.
La dérogation à cette loi que nous proposons permettrait de mobiliser des logements du parc privé qui ne sont souvent occupés qu’une partie de l’année au profit des saisonniers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à mettre en place un mécanisme de mandat permettant à une agence immobilière de déléguer partiellement les tâches d’intermédiation locatives pour permettre au personnel de la collectivité territoriale de procéder, sous le contrôle de l’agence, aux opérations les plus courantes et les plus simples.
La commission est favorable à cet amendement, qui vise le même objectif que l’article 14 bis A, mais dont la rédaction est plus opératoire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Les dispositions de cet amendement permettent de conforter le modèle économique des AIVS concernées par le logement des saisonniers, lesquels rencontrent des difficultés d’accès au logement et sont exclus du marché immobilier classique.
Par ailleurs, la captation par les AIVS des logements du parc existant au profit des travailleurs saisonniers dans le cadre de dispositifs d’intermédiation est souvent mise en avant dans les plans départementaux d’action pour le logement et l’hébergement des communes de montagne.
Voilà deux bonnes raisons d’émettre un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. En une heure dix, nous avons examiné seulement 15 amendements. Il en reste 186… Il faudrait être plus synthétique, si nous voulons terminer l’examen du présent projet de loi au cours de la nuit de demain.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Nous voterons en faveur de votre amendement, monsieur Bouvard, preuve que nous sommes capables de nous rejoindre lorsqu’il s’agit du logement des saisonniers. Peut-être aurez-vous également l’opportunité de voter l’un de nos amendements ? On peut toujours rêver… (Sourires.)
M. Michel Bouvard. C’est déjà arrivé !
M. le président. En conséquence, l'article 14 bis A est ainsi rédigé.
Article 14 bis
(Non modifié)
À la seconde phrase de l’article L. 1253-20 du code du travail, les mots : « la moitié » sont remplacés par les mots : « les trois quarts ».
M. le président. L'amendement n° 27 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Delcros, Lasserre et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants - UC, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 6321-13 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le troisième alinéa s’applique également aux saisonniers pour lesquels l’employeur s’engage à donner une priorité de réembauchage pour la saison suivante, en application d’un accord de branche ou d’entreprise ou du contrat de travail. »
La parole est à M. Loïc Hervé.
M. Loïc Hervé. L’accès aux périodes de professionnalisation, réservé aux employés en CDI et à certains en CDD, n’est pas ouvert aux saisonniers, alors même que les besoins en formation de ceux-ci, pour garantir leur employabilité, sont en augmentation.
Cet amendement vise, d’une part, à rendre accessible aux saisonniers, bénéficiant par accord de branche ou d’entreprise, ou par application d’une clause de leur contrat, de la reconduction de leur contrat, le dispositif de la période de professionnalisation.
Il tend, d’autre part, à ce que la période de professionnalisation puisse s’adresser aux saisonniers bénéficiant non seulement de la reconduction automatique, mais également de la priorité de réembauchage.
En effet, à titre d’exemple, environ 20 % des saisonniers relevant de la convention collective nationale des remontées mécaniques et domaines skiables qui sont dans les petites stations ne peuvent se voir accorder une reconduction automatique en raison de l’aléa climatique auquel sont exposées les petites stations.
Ces saisonniers bénéficient a minima d’une priorité de réembauchage : celui qui vient dans la station depuis cinq saisons est embauché avant celui qui est présent depuis trois saisons seulement. Cette priorité de réembauchage offre une garantie importante aux saisonniers qui, le cas échéant, peuvent ne pas être repris l’année suivante à discrétion de l’employeur, et constitue une pratique devant être valorisée. Aussi, il convient que la loi leur garantisse une égalité d’accès à la formation.