M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre. Je ne reviendrai pas sur les raisons de fond qui justifient l’urgence de la ratification de l’avenant à cette convention. Ce dernier vise à mettre fin à la double imposition, notamment d’une partie des agents français du lycée de Porto. Vous comprenez donc notre volonté d’accélérer les choses.
Monsieur le rapporteur général, j’ai bien entendu vos arguments relatifs à l’article 53 de la Constitution, mais la lettre des dispositions de cet article n’exige pas que l’autorisation de ratifier une convention internationale fasse l’objet d’un projet de loi spécifique. À ce titre, je rappelle que, dans le cadre de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, a été ratifié le protocole de Nagoya relatif aux ressources génétiques, et la constitutionnalité de cette disposition n’a pas appelé d’observation de la part du Conseil constitutionnel.
Nous estimons qu’un avenant à une convention fiscale constitue une catégorie particulière des conventions financières, dont l’approbation appartient au domaine des lois de finances en vertu du d) du 7e du II de l’article 34 de la loi organique relative aux lois de finances. Les conventions financières ne sauraient être cantonnées aux seules relations financières entre la République et le Fonds monétaire international ou les banques internationales de développement.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons inscrit ces dispositions dans ce projet de loi de finances rectificative.
M. le président. En conséquence, l'article 51 est supprimé.
Articles additionnels après l’article 51
M. le président. L'amendement n° 562, présenté par Mme Bonnefoy, M. Guillaume, Mme M. André, MM. Botrel, Chiron, Lalande, F. Marc, Vincent, Yung et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 51
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la dernière colonne de la dix-neuvième ligne du tableau du I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, le montant : « 4 200 » est remplacé par le montant : « 6 300 ».
II. – Au VI de l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « défini à l’article L. 253-8-1 du présent code », sont insérés les mots : « et pour améliorer la prise en compte des préjudices en lien direct avec l’utilisation des produits phytopharmaceutiques ».
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.
Mme Nicole Bonnefoy. Le présent amendement vise à relever le plafond de la taxe sur les produits phytopharmaceutiques bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché.
Le taux de la taxe est actuellement fixé à 0,2 %, avec un plafond à 4,2 millions d’euros. Les ressources sont affectées à l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Le relèvement du plafond à 6,3 millions d’euros a pour objet d’éviter que, en cas d’augmentation significative du chiffre d’affaires des contributeurs de la taxe, l’ANSES ne se voie privée d’une partie des ressources destinées au dispositif de phytopharmacovigilance, dispositif qui monte en puissance.
Ce potentiel supplémentaire de recettes permettrait en particulier à l’ANSES de lancer des études, en vue d’approfondir la connaissance sur les liens directs de causalité entre l'utilisation de certains produits et la survenue de plusieurs pathologies graves. Cela permettrait notamment de faire évoluer les tableaux de maladies professionnelles, une mesure très attendue.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Sur cet amendement, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
Le relèvement du taux de la taxe permettra de porter les ressources de l’ANSES de 4,2 millions d’euros à 6,3 millions d’euros. Celle-ci pourra ainsi mener à bien un certain nombre de missions absolument nécessaires, notamment pour éviter de nouveaux scandales, que nous avons connus par le passé, sur l’autorisation de certains médicaments qui n’ont pas eu des impacts très bénéfiques pour les patients.
M. le président. Madame la ministre, acceptez-vous de lever le gage ?
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 562 rectifié.
La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour explication de vote.
Mme Jacky Deromedi. Selon les auteurs de l’amendement, le relèvement de plafond a pour objet d’éviter que l’ANSES ne se voie privée d’une partie des ressources destinées au dispositif de phytopharmacovigilance.
Or la situation financière de l’ANSES montre qu’elle n’a pas besoin de ressources financières supplémentaires, notamment pour financer ce dispositif.
En effet, la délibération du conseil d’administration de l’ANSES du 8 mars 2016 approuvant le compte financier de l’exercice 2015 montre un résultat de fonctionnement excédentaire à hauteur de 12 706 287 euros, affecté au compte de réserve, ainsi qu’un abondement du fonds de roulement au titre de l’exercice 2015, qui s’élève à 9 182 342 euros. Le compte financier de 2015 révèle que le niveau du fonds de roulement, compte tenu de l’abondement effectué au titre de l’année 2015, s’élevait au début de l’année 2016 à 28 573 639 euros.
En réalité, cet amendement vise à financer la prise en charge de préjudices hypothétiques, ce qui va à l’encontre de l’objectif poursuivi avec le dispositif de phytopharmacovigilance défini à l’article L. 253-8-1 du code rural et de la pêche maritime.
Ce dispositif, destiné à la surveillance des effets indésirables des produits phytopharmaceutiques autorisés à la mise sur le marché, a justement été créé pour détecter les produits susceptibles de présenter de tels effets et permettre à l’ANSES de les interdire à l’utilisation, le cas échéant, et d’éviter ainsi tout préjudice pour l’homme ou l’environnement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour explication de vote.
Mme Nicole Bonnefoy. Je connais bien cet argumentaire : c’est celui de l’industrie phytopharmaceutique !
Le dispositif de pharmacovigilance a été adopté à l’unanimité par le Sénat en 2014 dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, à la suite de la mission commune d’information sur les pesticides présidée par Mme Sophie Primas, et du rapport intitulé Pesticides : vers le risque zéro, que j’ai remis en 2012.
Les représentants de l’ANSES que j’ai rencontrés récemment m’ont indiqué que ce dispositif montait en puissance.
J’ajoute que, avec un chiffre d’affaires de plus de 2 milliards d’euros, l’industrie chimique ne devrait pas rencontrer trop de difficultés à s’acquitter d’une taxe plafonnée à 6,3 millions d’euros.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 51.
L’amendement n° 376 rectifié bis, présenté par Mme Létard et MM. Capo-Canellas, Bonnecarrère, Vanlerenberghe, Kern, Guerriau, Marseille, L. Hervé et Delahaye, est ainsi libellé :
Après l’article 51
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 82 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 est ainsi modifié :
1° Au I, après les mots : « code de la construction et de l’habitation », sont insérés les mots : « dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 relative à la réorganisation de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction, et par la société mentionnée à l’article L. 313-19 du même code dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 susmentionnée, » ;
2° Le III est ainsi rédigé :
« III. ― Une convention conclue en concertation avec l’association mentionnée à l’article L. 313-18 du code de la construction et de l’habitation avant toute souscription postérieure au 31 décembre 2016 d’un emprunt mentionné au I et, au plus tard, le 31 mars 2017 entre le ministre chargé de l’économie et cette société définit notamment les modalités selon lesquelles :
« 1° L’emprunteur transmet chaque année aux ministres chargés de l’économie, du budget et du logement, avant la tenue de son conseil d’administration examinant les documents prévisionnels mentionnés à l’article L. 232-2 du code de commerce, un plan financier pluriannuel permettant de s’assurer de la capacité de remboursement des emprunts ;
« 2° Lorsque, au vu notamment de ce plan financier, le remboursement des emprunts est compromis, les ministres chargés de l’économie, du budget et du logement peuvent fixer, après concertation avec l’emprunteur et l’association mentionnée à l’article L. 313-18 du code de la construction et de l’habitation, la part des ressources de la participation des employeurs à l’effort de la construction mentionnées à l’article L. 313-3 du code de la construction et de l’habitation affectée à ce remboursement et déterminer les conditions de son versement. » ;
3° Au IV, les mots : « l’Union des entreprises et des salariés pour le logement » sont remplacés par les mots : « la société mentionnée à l’article L. 313-19 du code de la construction et de l’habitation » ;
4° Au V, après les mots : « code de la construction et de l’habitation », sont insérés les mots : « dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 relative à la réorganisation de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction, et par la société mentionnée à l’article L. 313-19 du même code dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 susmentionnée » ;
5° Le VII est ainsi rédigé :
« VII. – Une convention, conclue, en concertation avec l’association mentionnée à l’article L. 313-18 du code de la construction et de l’habitation, avant toute souscription postérieure au 31 décembre 2016 d’un emprunt mentionné au V et, au plus tard, le 31 mars 2017, entre le ministre chargé de l’économie et la société mentionnée à l’article L. 313-19 du code de la construction et de l’habitation, définit notamment les modalités selon lesquelles est assuré le remboursement effectif de ces emprunts, en complément des mesures prévues par la convention mentionnée au III.
« Lorsque le remboursement des emprunts est compromis, les ministres chargés de l’économie, du budget et du logement peuvent fixer, après concertation avec l’association mentionnée à l’article L. 313-18 du code de la construction et de l’habitation et la société mentionnée à l’article L. 313-19 du même code, le montant de la contribution de l’association foncière logement à ce remboursement et déterminer les conditions de son versement. »
II. – Au second alinéa du II de l’article 79 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013, les mots : « du même code » sont remplacés par les mots : « du code de la construction et de l’habitation dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 relative à la réorganisation de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction, et de la société mentionnée à l’article L. 313-19 du même code dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 susmentionnée ».
III. – Au 2° de l’article 12 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, les mots : « l’Union des entreprises et des salariés pour le logement » sont remplacés par les mots : « la société mentionnée à l’article L. 313-19 du code de la construction et de l’habitation ».
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Je présente cet amendement au nom de ma collègue Valérie Létard.
L’ordonnance du 20 octobre 2016 relative à la réorganisation de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction prévoit notamment le remplacement des structures actuelles, à savoir l’Union des entreprises et des salariés pour le logement, l’UESL, et les comités interprofessionnels du logement, les CIL, par de nouvelles entités.
Action Logement sera ainsi constitué sous la forme d’un groupe, dont le pilotage sera assuré par l’association Action Logement Groupe, avec l’appui de deux sociétés filiales, Action Logement Services, qui reprendra les emprunts souscrits par l’UESL auprès du fonds d’épargne, et Action Logement Immobilier. L’Association pour l'accès aux garanties locatives et l’association Foncière Logement continueront d’exercer leurs missions.
Dans ce nouveau contexte, les dispositions relatives aux garanties accordées par le ministre de l’économie aux emprunts contractés par l’UESL et l’association Foncière Logement doivent être révisées pour mettre à jour les règles afférentes aux conventions de garantie et maintenir le bénéfice de la garantie de l’État aux prêts que pourra souscrire la nouvelle entité Action Logement Services.
Tel est l’objet du présent amendement, dont l’adoption permettra de proroger les garanties d’État déjà accordées et d’assurer la garantie des prêts qui seront octroyés dans le cadre de la nouvelle gouvernance.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre. Le Gouvernement est évidemment favorable à cet amendement, qui vise à mettre à jour certaines dispositions à la suite de la réforme d’Action Logement.
Aux termes de la loi l’habilitant à adopter des mesures relevant du domaine de la loi pour simplifier et rationaliser l’organisation de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction et la distribution des emplois de cette participation, dont Valérie Létard a été la rapporteur au Sénat et qui avait été adoptée en mai dernier, le Gouvernement a publié une ordonnance le 20 octobre dernier. Les trois décrets organisant la nouvelle structure d’Action Logement ont été signés, et deux d’entre eux ont été publiés ce matin, me semble-t-il, ou le seront dans les jours qui viennent.
Cet amendement a pour objet de mettre à jour les dispositions afférentes aux conventions de garantie et à maintenir le bénéfice de la garantie de l’État aux prêts que pourra souscrire la nouvelle entité. Ainsi, nous aurons bouclé la réforme d’Action Logement, qui sera effective le 1er janvier prochain.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 51.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2016, je donne la parole à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. L’un des sentiments que j’éprouve au terme de nos débats est que nous avons, d’une certaine façon, détourné la discussion du projet de loi de finances rectificative. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
De fait, nous avons eu d’interminables débats sur la fiscalité agricole, la fiscalité de l’énergie ou encore la réforme de la politique aéroportuaire, toutes questions qui relèvent de l’examen de la loi de finances. Au vrai, nous savons très bien pourquoi nous nous sommes retrouvés avec plus de 500 amendements sur ce texte… Et tout cela pour, probablement – quelqu’un fera le calcul ! –, dégrader le solde budgétaire annuel !
Sur la méthode, les choses ne sont pas satisfaisantes.
Sur le fond, les décrets d’avance ont été supprimés sans que l’on sache très bien comment il faudra faire à présent. Devra-t-on rapatrier les soldats de l’opération Barkhane, faute de pouvoir les payer ? Nos collègues de la majorité sénatoriale ont également supprimé les mesures de trésorerie relatives à la C3S pour les organismes sociaux.
Néanmoins, je constate quelques avancées, d’ailleurs contenues dans le texte initial, s’agissant notamment du compte PME innovation, des secteurs de l’économie solidaire et de la taxe YouTube, que nous avons votée tous ensemble ; je pense aussi aux diverses mesures d’amélioration de la perception fiscale.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste et républicain ne peut pas voter le projet de loi de finances rectificative dans sa rédaction issue de nos travaux. C’est pourquoi nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. D’un strict point de vue quantitatif, nous sommes en présence d’un beau projet de loi de finances rectificative : nous sommes venus à bout de pas moins de 118 articles, 594 amendements et six membres du Gouvernement ! Ces derniers survivront, du moins nous l’espérons tous… (Sourires.) Il y a eu du volume, du coffre et même quelques moments d’amusement.
Plus sérieusement, et d’un point de vue qualitatif, cette fois, le groupe écologiste était d’emblée réservé sur l’équilibre général de ce projet de loi de finances rectificative, auquel les crédits de l’écologie ont contribué plus souvent qu’à leur tour, même si ces mouvements étaient répartis de manière un peu opaque, entre trois décrets d’avance. Nous avons soutenu le rejet de ces décrets, parce qu’un moment vient où il faut signifier que ces méthodes ne sont pas acceptables du point de vue du travail parlementaire. (M. Philippe Dallier opine.)
M. Vincent Delahaye. Très bien !
M. André Gattolin. Ne vous réjouissez pas trop vite, chers collègues de la majorité sénatoriale, car j’en viens aux points qui vont moins vous plaire ! Il en faut pour tout le monde !
De fait, nous avons adopté de nombreux amendements ayant pour effet d’élargir les niches de l’impôt de solidarité sur la fortune. Nous avons même allégé, cette fois à l’unanimité moins les écologistes, la contribution des exploitations nucléaires, ce qui est, pour le moins, paradoxal compte tenu des coûts de démantèlement faramineux qui sont devant nous et qui ne sont absolument pas provisionnés. Peut-être aurons-nous l’occasion d’en reparler dans dix, quinze ou vingt ans, quand il faudra larguer dix milliards d’euros d’un coup pour solder ce qui n’aura pas été prévu !
Nous avons, certes, quelques motifs de satisfaction, et pas des moindres. Ainsi, le Sénat a préservé la déclaration automatique de revenus sur les plateformes en ligne, ainsi que la taxe sur la publicité accompagnant les vidéos en ligne. Je formule les choses ainsi pour ne pas promouvoir une certaine entreprise étrangère, surtout qu’il y a de très bons services nationaux… Je ne vois donc pas pourquoi cette taxe serait dénommée « taxe YouTube » ! Ça y est : j’ai lâché le nom ! (Sourires.)
Le Sénat a également reconnu, au détour d’un amendement déposé et adopté par la majorité sénatoriale, les difficultés posées par les importations d’huile de palme. Il y a là une vraie évolution sur le fond : il s’agit non pas seulement de considérations économiques, mais aussi de considérations écologiques, et cela concerne la manière de construire notre agriculture nationale et locale.
Enfin, nous sommes extrêmement satisfaits que le Sénat ait adopté l’amendement de notre collègue Ronan Dantec, cosigné, ce qui est plutôt rare, par des collègues d’autres groupes, visant à attribuer un financement à partir de 2018 aux intercommunalités et aux régions qui se doteront de plans Climat, conformément à leurs nouvelles compétences dans ce domaine. Ce sera un relais au niveau des collectivités locales au moment où l’on doute sur la réalité des engagements nationaux en matière d’application des décisions de la COP21.
Le bilan de l’ensemble de ces éléments conduira le groupe écologiste à s’abstenir.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Le Sénat s’étant privé de débattre du projet de loi de finances pour 2017, la majorité de notre assemblée a utilisé le projet de loi de finances rectificative pour 2016 comme palliatif, ainsi que le prouve le nombre d’amendements déposés.
À l’issue de ce débat, peu de nouveautés sont à signaler. Comme par habitude, on a traité de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’impôt sur le capital et le patrimoine des plus riches, de la fiscalité immobilière, de la crise agricole, envisagée sous le prisme de la fiscalité et des prélèvements sociaux, et de la taxation des plus-values.
La contribution du groupe CRC à nos débats a emprunté plusieurs voies. Nous avons proposé d’alléger l’impôt des plus modestes sous toutes ses formes, de tenir compte de la situation familiale des contribuables comme de leur situation de ressources, de rétablir dans leurs droits les plus modestes et de rendre du pouvoir d’achat à nos concitoyens, mais aussi de reconnaître les difficultés des collectivités territoriales. Surtout, nous avons demandé que le Parlement, lorsqu’il prend des décisions, en fasse assumer les conséquences financières par l’État, au lieu de les faire payer aux collectivités territoriales.
Telles sont les convictions qui nous ont animés et que nous nous sommes efforcés de faire entendre au fil de nos diverses prises de parole et au travers des amendements que nous avons défendus.
Le texte qui nous est présenté ne modifie en rien les grandes lignes du projet de loi de finances pour 2016, que nous n’avions pas voté tant il était traversé par le dogme de la réduction de la dépense publique. Nos débats le montrent, le rapporteur général a souvent indiqué qu’il était aussi fortement préoccupé par la réduction de la dépense publique. Peut-être que, dans des perspectives futures, il a souhaité être très vigilant à cet égard. Vous le comprendrez, nous ne voterons pas ce projet de loi de finances rectificative.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Le nombre d’amendements déposés sur ce projet de loi de finances rectificative était certes élevé, avec quelque 500 amendements, mais pas démesuré. Souvenons-nous que 400 amendements environ avaient été déposés sur celui de l’année dernière. Au reste, la discussion nous aura pris trois jours, ce qui n’est pas énorme.
Si nous n’avons pas examiné le projet de loi de finances pour 2017, c’est parce que nous l’avons jugé insincère. Je pense qu’il l’est en effet : le déficit annoncé, de 70 milliards d’euros, est loin du déficit réel, comme nous ne tarderons pas à le constater au cours de l’exécution du budget en 2017.
Nous n’approuvons pas bien entendu la politique budgétaire et financière du Gouvernement ; nous l’avons dénoncée à maintes reprises dans cet hémicycle. Je regrette que cette discussion soit le dernier débat budgétaire avant l’élection présidentielle, et que les comptes de 2016 ne puissent pas être soldés avant la fin du quinquennat. Cela aurait confirmé que le quinquennat qui s’achève n’a pas été vertueux en matière budgétaire et financière, malheureusement, et qu’aucun des engagements pris par le Président de la République et ses Premiers ministres successifs n’a été tenu.
La commission des finances a beaucoup travaillé sur ce projet de loi de finances rectificative, auquel nous avons apporté un assez grand nombre de modifications. En particulier, nous avons supprimé la ratification des décrets d’avance, qui représentaient cette année un montant considérable, avec près de 5 milliards d’euros. C’est inédit ! Je rappelle que, par ces décrets, le Gouvernement décide de l’inscription de dépenses sans en passer par l’autorisation du Parlement, ce qui n’est pas une démarche satisfaisante. Nous avons entendu le dénoncer.
Bien sûr, de nombreux amendements ont été approuvés par le Sénat. J’espère que le Gouvernement et la majorité de l’Assemblée nationale conserveront une partie du travail du Sénat, mais je crains qu’il ne s’agisse d’un vœu pieux, car il n’en a pas toujours été ainsi dans le passé, loin s’en faut.
En conséquence, les membres du groupe UDI-UC voteront le projet de loi de finances rectificative modifié par le Sénat.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. À cette heure avancée de l’après-midi, je ne me lancerai pas dans l’énumération des mesures que nous aurions pu adopter, me bornant à remercier Mme la présidente de la commission des finances et notre rapporteur général, ainsi que les services de la commission qui, à chaque fin d’année, travaillent sur le projet de loi de finances rectificative dans des conditions extrêmement difficiles. Cette année encore, nous avons manqué de temps pour approfondir l’examen de certains sujets. Mais c’est ainsi, et nous n’y pouvons rien.
Je remercie également les membres du Gouvernement qui se sont succédé au Sénat, en un nombre impressionnant. Nous n’avions jamais vu autant de ministres différents au banc du Gouvernement lors de l’examen d’un projet de loi de finances rectificative, et certains moments ont été, disons-le, surprenants… Nous nous en souviendrons les uns et les autres ! (Mme la ministre s’étonne.) Madame la ministre, je ne dis pas cela pour vous ! Nous vous raconterons… (Sourires.)
M. Philippe Dallier. Cela étant dit, le texte qui nous a été transmis comportait des dispositions de toute nature, de sorte qu’il est difficile de tracer un fil conducteur. Ce que je retiens, c’est que la dégradation du contexte économique se poursuit : la croissance faiblit et, d’après l’INSEE, elle ne dépassera pas 1,2 % en 2016. C’est là le plus important.
En d’autres termes, il n’y a quasiment aucune chance que la croissance s’établisse l’année prochaine au niveau attendu par le Gouvernement. L’insincérité que nous avons dénoncée lors du débat relatif au projet de loi de finances pour 2017, puis lors de l’examen de ce projet de loi de finances rectificative, se confirme donc malheureusement, et je le regrette. Les faits vont nous donner raison, ce qui placera le pays dans une situation encore plus difficile.
Le groupe Les Républicains votera le projet de loi de finances rectificative modifié. Nous verrons lundi matin en commission mixte paritaire ce que nous parviendrons à sauver de tout notre travail…